Les talibans fêtent leur victoire après le départ des Américains et la fin de vingt ans de guerre

Des guerriers talibans gardent l'entrée de l'aéroport de Kaboul, le 31 août (Photo, AFP).
Des guerriers talibans gardent l'entrée de l'aéroport de Kaboul, le 31 août (Photo, AFP).
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Publié le Mardi 31 août 2021

Les talibans fêtent leur victoire après le départ des Américains et la fin de vingt ans de guerre

  • Les Etats-Unis «travailleront» avec les talibans s'ils tiennent leurs engagements, déclare Blinken, alors que les talibans saluent un «moment historique»
  • Le Pentagone reconnaît n'avoir pas pu évacuer autant de monde qu'il voulait, et annonce avoir détruit des avions et des blindés avant de quitter Kaboul

KABOUL: Les talibans fêtent mardi leur victoire en Afghanistan après le départ dans la nuit des derniers soldats américains, qui met fin à 20 ans d'une guerre dévastatrice et ouvre un nouveau chapitre rempli d'incertitudes pour le pays.

Des coups de feu victorieux ont éclaté à Kaboul à l'annonce du retrait final de l'armée américaine, salué comme un succès "historique" par les talibans, revenus au pouvoir le 15 août.

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Depuis le 14 août, sur une période de 18 jours, les avions des Etats-Unis et de leurs alliés ont évacué par un gigantesque pont aérien plus de 123 000 civils de l'aéroport international Hamid Karzai, selon le Pentagone. (Photo, AFP)

Les Américains étaient entrés en Afghanistan en 2001, à la tête d'une coalition internationale, pour chasser du pouvoir les talibans en raison de leur refus de livrer le chef d'Al-Qaïda, Oussama Ben Laden, après les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis.

"Félicitations à l'Afghanistan (...) Cette victoire est la nôtre à tous", a déclaré mardi matin le principal porte-parole taliban, Zabihullah Mujahid, à l'aéroport de Kaboul, dont les islamistes avaient pris le contrôle total quelques heures plus tôt.

"C'est une grande leçon pour d'autres envahisseurs et pour notre future génération", et "c'est aussi une leçon pour le monde", a-t-il estimé. "C'est un jour historique, c'est un moment historique et nous en sommes fiers". 

Après deux semaines d'opérations d'évacuations précipitées, voire chaotiques, le dernier avion de transport militaire C-17 a décollé de l'aéroport de Kaboul lundi à 19H29 GMT, juste avant minuit à Kaboul, a déclaré à Washington le général Kenneth McKenzie, qui dirige le commandement central américain dont dépend l'Afghanistan.

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Après vingt ans de guerre, les Américains ont fini par quitter l'Afghanistan, où l'ennemi est désormais maître du pays. (Photo, AFP)

Le retrait militaire des Etats-Unis s'est donc achevé 24 heures avant la date butoir fixée par le président américain Joe Biden, pour lequel cette journée gardera un goût amer. Il doit s'adresser mardi à ses concitoyens, nombreux à se demander à quoi auront finalement servi ces deux décennies d'engagement en Afghanistan.

Même si l'objectif de supprimer Oussama Ben Laden avait été tenu dès le 2 mai 2011, lorsqu'il a été tué par les forces spéciales américaines au Pakistan, les États-Unis sont restés en Afghanistan, notamment pour former une armée afghane qui s'effondrera finalement face aux talibans.

Le président Biden a maintes fois justifié sa décision de retirer les troupes américaines par son refus de faire perdurer plus longtemps cette guerre.

Au total, les États-Unis déplorent quelque 2.500 morts et une facture de 2.313 milliards de dollars en 20 ans, selon une étude de la Brown University. Ils ressortent de cette guerre avec une image encore plus écornée par leur incapacité à prévoir la rapidité de la victoire talibane et par leur gestion des évacuations.

123.000 personnes évacuées

Depuis le 14 août, sur une période de 18 jours, les avions des États-Unis et de leurs alliés ont évacué par un gigantesque pont aérien plus de 123.000 civils de l'aéroport international Hamid Karzaï de Kaboul, selon le Pentagone.

Le retour des islamistes au pouvoir avait obligé les Occidentaux à évacuer leur ressortissants, mais aussi les Afghans susceptibles de subir des représailles, notamment pour avoir travaillé pour les forces étrangères.

Le Pentagone a reconnu lundi n'avoir pas pu faire sortir d'Afghanistan autant de personnes que voulu. De vives critiques de l'opposition républicaine ont suivi l'annonce de cet échec.

Le président Biden a abandonné "des Américains à la merci de terroristes", a ainsi déclaré le chef des républicains à la Chambre des représentants, Kevin McCarthy.

Ces opérations risquées ont été endeuillées le 26 août par un attentat-suicide, revendiqué par le groupe jihadiste État islamique au Khorasan (EI-K), qui a fait plus d'une centaine de morts, dont 13 soldats américains.

Ennemi juré des talibans, l'EI-K pourrait continuer à constituer une menace et mener des attentats dans le pays.

 

Merkel: L'aéroport de Kaboul est d'une «importance existentielle» pour l'Afghanistan

Angela Merkel a jugé mardi que l'aéroport de Kaboul était d'une "importance existentielle" pour l'Afghanistan et pour le soutien médical et humanitaire à ce pays.

"Sans lui, aucune aide médicale ou humanitaire ne peut parvenir, ce qui signifie qu'il est aussi de la plus haute importance pour l'action des Nations Unies", a déclaré la chancelière allemande lors d'une conférence de presse commune avec son homologue autrichien, Sebastian Kurz.

Malgré le départ dans la nuit des derniers soldats américains, l'Allemagne n'a pas renoncé, selon Mme Merkel, à exfiltrer des Afghans, ceux qui ont collaboré avec l'armée allemande lors de l'intervention occidentale dans le pays, mais aussi ceux employés par les organisations humanitaires.

Elle a estimé entre "10.000 et 40.000 personnes" le nombre de ceux destinés à être sortis du pays.

"Cette fin douloureuse avec l'évacuation de nombreuses personnes n'est bien sûr pas encore terminée", a déclaré Mme Merkel.

"L'Allemagne compte encore un grand nombre de forces locales que nous voulons faire sortir d'Afghanistan et nous nous préoccuperons bien sûr aussi de la situation humanitaire dans le pays", a plaidé la dirigeante, à quelques semaines de quitter le pouvoir.

L'urgence dans laquelle s'est opéré le retrait américain s'explique par le fait que les talibans ont pris de court l'Occident par une offensive éclair pour reprendre possession de l'Afghanistan.

Le gouvernement central et l'armée régulière du pays, instable depuis des décennies, se sont effondrés en une dizaine de jours. Kaboul est tombée le 15 août. Washington a admis ne pas avoir anticipé cette débâcle. 

Les Etats-Unis continueront à "aider" tous les Américains qui veulent quitter l'Afghanistan, a assuré lundi soir le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, et "travailleront" avec les talibans s'ils tiennent leurs engagements. "Les talibans veulent la légitimité et le soutien internationaux. Notre message est que la légitimité et le soutien doivent se mériter".

Crainte d'un retour en arrière

De 100 à 200 Américains seraient encore en Afghanistan, selon M. Blinken, qui a annoncé un transfert à Doha, au Qatar, des activités diplomatiques et consulaires de l'ambassade des États-Unis à Kaboul. Comme le reste du monde, Washington regardera attentivement dans les prochains jours quelle attitude les talibans vont adopter concernant l'aéroport.

Mardi matin, les islamistes avaient enlevé tous les barrages menant à l'aéroport sauf un. Sur la route, leurs combattants ne cachaient pas leur joie, souriant et serrant les mains des chauffeurs et passagers, a constaté un journaliste de l'AFP.

Lors de leur précédent passage au pouvoir entre 1996 et 2001, les talibans avaient imposé une version ultra-rigoriste de la loi islamique. Les femmes ne pouvaient ni travailler ni étudier, voleurs et meurtriers encouraient de terribles châtiments.

Ils se sont efforcés depuis leur retour au pouvoir d'afficher une image d'ouverture et de modération, qui laisse néanmoins sceptiques de nombreux pays et observateurs.

"Nous voulons avoir de bonnes relations avec les États-Unis et le monde", a promis mardi leur porte-parole, Zabihullah Mujahid.

Beaucoup d'Afghans et d'Occidentaux craignent un retour en arrière sur la libéralisation de la société observée ces 20 dernières années, notamment pour ce qui concerne le rôle des femmes, lesquelles ont accédé à l'éducation, sont entrées en politique ou dans les médias.

Un meilleur accès à l'eau potable ou la baisse de la mortalité infantile figurent aussi parmi les acquis des deux décennies écoulées que les talibans devront préserver.

Les islamistes ont promis de ne pas se venger des personnes ayant travaillé pour l'administration précédente. Ils ont aussi assuré qu'ils œuvreraient à la formation d'un gouvernement ouvert à d'autres factions et attendaient le départ définitif des forces étrangères pour en annoncer la formation.

"L’Émirat islamique a mené le jihad ces 20 dernières années. Maintenant, il a tous les droits de diriger le prochain gouvernement. Mais il reste engagé à former un gouvernement inclusif", a répété M. Mujahid.

Les talibans ont reproché aux Occidentaux d'avoir emmené avec eux certains des Afghans les plus éduqués et qualifiés. Ils doivent maintenant s'atteler sans eux à une tâche gigantesque: remettre sur pied un pays et une économie dévastés par la guerre.

Le retrait américain ouvre « une nouvelle page », selon la Chine

PEKIN: La Chine a estimé mardi que le retrait de l'armée américaine d'Afghanistan permet à ce pays meurtri d'ouvrir "une nouvelle page" après 20 ans d'occupation étrangère, durement critiquée ces derniers jours par Pékin.

Les autorités chinoises fustigent le départ précipité des Etats-Unis et le bilan humain et économique qu'ils laissent derrière eux après la reconquête éclair du pouvoir par les talibans.

Washington a achevé lundi soir le retrait de ses troupes d'Afghanistan, mettant fin sans gloire à la plus longue guerre de l'Amérique, tandis que les talibans célébraient leur victoire dans la capitale Kaboul.

"L'Afghanistan a réussi à s'affranchir de toute occupation militaire étrangère", a déclaré lors d'une conférence de presse régulière Wang Wenbin, un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères.

"La population afghane salue ce nouveau point de départ vers la paix et la reconstruction nationales. L'Afghanistan ouvre une nouvelle page de son histoire", a-t-il souligné.

Pays frontalier de l'Afghanistan, la Chine maintient ouverte son ambassade à Kaboul. Elle avait déjà évacué ses ressortissants qui le souhaitaient il y a plusieurs semaines en raison de la détérioration de la situation sécuritaire.

Pékin continue par ailleurs de discuter avec les talibans, mais attend de voir la composition du futur gouvernement afghan avant de se prononcer sur une éventuelle reconnaissance du nouveau régime.

La Chine reste méfiante quant à l'attitude des talibans vis-à-vis des militants séparatistes islamistes ouïghours présents en Afghanistan et qui cherchent à s'infiltrer dans la région chinoise frontalière du Xinjiang, théâtre jadis de nombreux attentats.

"Nous espérons que l'Afghanistan formera un gouvernement ouvert, inclusif et largement représentatif" et "combattra avec fermeté toutes les forces terroristes", a indiqué mardi le porte-parole chinois Wang Wenbin.

Une délégation talibane avait rencontré fin juillet en Chine le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi, lui promettant que le sol afghan ne serait jamais utilisé pour mener des attaques anti-chinoises.

La Chine pourrait s'avérer être une précieuse source de soutien économique pour le nouvel Afghanistan dirigé par les talibans, mais les investissements chinois ne viendront que si la sécurité est rétablie, soulignent des experts.


Trump impose des restrictions d'entrée à sept autres pays et aux Palestiniens

Des personnes arrivent à l'aéroport international John F. Kennedy de New York, le 9 juin 2025. (AFP)
Des personnes arrivent à l'aéroport international John F. Kennedy de New York, le 9 juin 2025. (AFP)
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  • Donald Trump élargit les interdictions d’entrée aux États-Unis à sept pays supplémentaires, dont la Syrie, et inclut les Palestiniens munis de documents de l’Autorité palestinienne
  • La Maison Blanche invoque la sécurité nationale, tout en prévoyant des exceptions limitées, dans le cadre d’un durcissement général de la politique migratoire

WASHINGTON: Donald Trump a étendu mardi les interdictions d'entrée aux Etats-Unis aux ressortissants de sept pays, dont la Syrie, ainsi qu'aux Palestiniens.

Le président américain a signé une proclamation "restreignant et limitant davantage l'entrée des ressortissants étrangers afin de protéger la sécurité des Etats-Unis", a indiqué la Maison Blanche.

Les nouveaux pays concernés par cette mesure sont le Burkina Faso, le Niger, le Mali, le Soudan du Sud et la Syrie, tandis que le Laos et la Sierra Leone passent de restrictions partielles à totales.

Les Palestiniens disposant de documents de voyage émis par l'Autorité palestinienne sont également visés.

L'administration Trump avait déjà imposé des restrictions totales visant les ressortissants de douze pays et des dizaines d'autres pays se sont vus imposer des restrictions partielles.

S'agissant de la Syrie, la mesure intervient quelques jours après une attaque meurtrière contre des soldats américains dans le centre de ce pays.

L'administration Trump dit avoir identifié des pays où les vérifications sont "tellement insuffisantes qu'elles justifiaient une suspension totale ou partielle de l'admission des ressortissants de ces pays".

La proclamation prévoit cependant des exceptions pour les résidents permanents légaux, les titulaires de visas existants, certaines catégories de visas comme les athlètes et les diplomates, et les personnes dont "l'entrée sert les intérêts nationaux des Etats-Unis".

Depuis son retour au pouvoir en janvier, Donald Trump mène une vaste campagne contre l'immigration illégale et a considérablement durci les conditions d'entrée aux Etats-Unis et l'octroi de visas, arguant de la protection de la sécurité nationale.

Ces mesures visent ainsi à interdire l'entrée sur le territoire américain aux étrangers qui "ont l'intention de menacer" les Américains, selon la Maison Blanche.

De même, pour les étrangers qui "pourraient nuire à la culture, au gouvernement, aux institutions ou aux principes fondateurs" des Etats-Unis.

Le président américain s'en est récemment pris avec virulence aux Somaliens, disant qu'il "ne voulait pas d'eux chez nous".

En juin, il avait annoncé des interdictions d'entrée sur le territoire américain aux ressortissants de douze pays, principalement en Afrique et au Moyen-Orient (Afghanistan, Birmanie, Tchad, Congo-Brazzaville, Guinée équatoriale, Erythrée, Haïti, Iran, Libye, Somalie, Soudan, Yémen).

En revanche, le Turkménistan, pays qui figure parmi les plus reclus au monde, se voit accorder un satisfécit, la Maison Blanche évoquant mardi des "progrès significatifs" dans cet Etat d'Asie centrale.

Du coup, les ressortissants de ce pays pourront à nouveau obtenir des visas américains, mais uniquement en tant que non-immigrants.

Lors de son premier mandat (2017-2021), Donald Trump s'en était pris de façon similaire à certains pays, ciblant principalement des pays musulmans.


Australie: la communauté juive, bouleversée et en colère, enterre «le Rabbin de Bondi»

Dans un pays considéré depuis longtemps comme un refuge, et qui abrite environ 2.500 survivants de la Shoah, le massacre de dimanche a instillé le doute quant à la politique de Canberra contre l'antisémitisme. (AFP)
Dans un pays considéré depuis longtemps comme un refuge, et qui abrite environ 2.500 survivants de la Shoah, le massacre de dimanche a instillé le doute quant à la politique de Canberra contre l'antisémitisme. (AFP)
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  • Celui qui était connu sous le nom de "Rabbin de Bondi" a été abattu dimanche sur la plage du même nom, lors de l'attentat le plus meurtrier en Australie depuis des décennies
  • Les proches et les membres de la communauté ont laissé échapper des sanglots quand le corbillard transportant le corps de M. Schlanger, 41 ans, est arrivé et que son cercueil, recouvert d'un velours noir orné de l'étoile de David, a été déposé

SYDNEY: Dans une synagogue bondée, emplie de cris et de larmes, la communauté juive de Sydney traumatisée a rendu hommage mercredi au rabbin Eli Schlanger, première victime de l'attentat antisémite de la plage de Bondi a être mise en terre.

Celui qui était connu sous le nom de "Rabbin de Bondi" a été abattu dimanche sur la plage du même nom, lors de l'attentat le plus meurtrier en Australie depuis des décennies.

Les proches et les membres de la communauté ont laissé échapper des sanglots quand le corbillard transportant le corps de M. Schlanger, 41 ans, est arrivé et que son cercueil, recouvert d'un velours noir orné de l'étoile de David, a été déposé.

David Deitz, homme d'affaires de 69 ans, qui connaissait M. Schlanger "depuis très, très longtemps", explique à l'AFP que le rabbin a eu "une influence positive sur beaucoup de gens".

"C'est un choc pour l'Australie de voir un tel événement se produire ici. Ce n'est pas dans la nature des Australiens", poursuit-il.

Une forte présence sécuritaire a été mobilisée lors des obsèques, avec des policiers alignés dans la rue fermée au public.

Dans un pays considéré depuis longtemps comme un refuge, et qui abrite environ 2.500 survivants de la Shoah, le massacre de dimanche a instillé le doute quant à la politique de Canberra contre l'antisémitisme.

En 2021, le nombre de juifs australiens était estimé à 117.000.

"Ils auraient pu nous écouter" 

Jillian Segal, la responsable de la lutte contre l'antisémitisme en Australie, a fustigé cette semaine des préjugés antijuifs "qui s’insinuent dans la société depuis de nombreuses années et contre lesquels nous ne nous sommes pas suffisamment élevés".

Mme Segal a été la première nommée à ce poste après une série d'attaques antisémites à Melbourne et à Sydney, au début de la guerre d'Israël dans la bande de Gaza.

Au cours des 12 mois suivant l’attaque du Hamas en Israel du 7 octobre 2023 qui a déclenché cette guerre, les incidents de nature antisémite en Australie ont augmenté de 316%, dépassant les 2.000, dit-elle.

"Nous devrions pouvoir être qui nous sommes sans avoir peur", a déclaré Brett Ackerman, un analyste de données âgé de 37 ans.

La colère gagne certains membres de la communauté qui estiment que leur cri d'alarme face à la montée de l'antisémitisme depuis le 7-Octobre n'a pas été pris en compte.

"Ils auraient pu nous écouter" se désole M. Ackerman. Pour lui, l'attaque n'était "pas une surprise".

A côté de lui, le rabbin Yossi Friedman acquiesce. "Le message était clair depuis un peu plus de deux ans", soutient-il. "Est-ce que nous nous sentons en sécurité? Pour être honnête, pas vraiment."

"Nous pensions être en sécurité. Nos grands-parents et arrière-grands-parents étaient des survivants de la Shoah, et beaucoup d’entre eux sont venus ici pour échapper à la haine et au sang versé, aux pogroms, à la persécution (...) et c'est ce qu'on retrouve ici", observe-t-il.

"Problème de société"

Le Premier ministre Anthony Albanese a dénoncé l'attaque de Bondi comme un acte terroriste antisémite de "pure méchanceté" perpétré par des hommes inspirés par l’idéologie jihadiste du groupe État islamique.

Mais il a rejeté les critiques selon lesquelles son gouvernement n'avait pas réagi suffisamment à l'appel de Mme Segal.

Le Premier ministre a souligné que son gouvernement avait pénalisé les discours de haine et interdit le salut nazi et les symboles haineux, entre autres.

Depuis la fusillade, M. Albanese mène une initiative conjointe entre le gouvernement central et les Etats d'Australie en faveur d’un contrôle plus strict des armes à feu. L'assaillant le plus âgé possédait six armes dûment enregistrées.

Mais pour l'écrivain Danny Gingef, 66 ans, "la réforme des armes à feu est une diversion totale par rapport au vrai problème, qui est la haine, il faut identifier la haine là où elle commence".

Au départ du cercueil, les spectateurs ont entonné des chants en hébreu. Submergés par l’émotion, certains se sont effondrés dans les bras de leurs proches, à peine capables de tenir debout.

"Je sens que ces dernières années, les Juifs ont été en état d’alerte maximale", dit M. Gingef. Il se sent triste et en colère, et fait référence aux "marches de la haine" où il a vu des manifestants porter des drapeaux du Hezbollah.

Pour lui, il n’y a pas "beaucoup plus que nous puissions faire" sans le soutien des autorités et d’autres groupes.

"L’antisémitisme n’est pas un problème que les Juifs doivent résoudre, c’est un problème de société".

lec-oho/mjw/lgo/alh/pt

 


La BBC va "se défendre" face à la plainte en diffamation à 10 milliards de dollars de Trump

Des personnes empruntent l'entrée des bureaux de la chaîne britannique BBC à Londres en fin d'après-midi, le 11 novembre 2025. (AFP)
Des personnes empruntent l'entrée des bureaux de la chaîne britannique BBC à Londres en fin d'après-midi, le 11 novembre 2025. (AFP)
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  • Donald Trump poursuit la BBC pour diffamation et pratiques trompeuses, réclamant jusqu’à 10 milliards $ après un montage contesté de son discours du 6 janvier 2021
  • L’affaire secoue l’audiovisuel public britannique : démissions à la tête de la BBC, lettre d’excuses envoyée à Trump, et réexamen annoncé de la charte royale

LONDRES: La BBC a assuré mardi qu'elle allait "se défendre" contre la plainte en diffamation du président américain Donald Trump, qui réclame 10 milliards de dollars au groupe audiovisuel public britannique pour un montage vidéo contesté de l'un de ses discours.

La plainte, déposée lundi devant un tribunal fédéral à Miami par le président américain et consultée par l'AFP, demande "des dommages et intérêts d'un montant minimum de 5 milliards de dollars" pour chacun des deux chefs d'accusation: diffamation et violation d'une loi de Floride sur les pratiques commerciales trompeuses et déloyales.

"Ils ont littéralement mis des mots dans ma bouche", s'est plaint le milliardaire de 79 ans, lundi devant la presse.

"Nous allons nous défendre dans cette affaire", a répondu un porte-parole de la BBC mardi matin, sans faire davantage de commentaire sur la procédure.

Le groupe audiovisuel britannique, dont l'audience et la réputation dépassent les frontières du Royaume-Uni, est dans la tourmente depuis des révélations sur son magazine phare d'information "Panorama".

Ce dernier a diffusé, juste avant la présidentielle américaine de 2024, des extraits distincts d'un discours de Donald Trump du 6 janvier 2021, montés de telle façon que le républicain semble appeler explicitement ses partisans à attaquer le Capitole à Washington.

Des centaines de ses partisans, chauffés à blanc par ses accusations sans fondement de fraude électorale, avaient pris d'assaut ce jour-là le sanctuaire de la démocratie américaine, pour tenter d'y empêcher la certification de la victoire de son adversaire démocrate Joe Biden.

"La BBC, autrefois respectée et aujourd'hui discréditée, a diffamé le président Trump en modifiant intentionnellement, malicieusement et de manière trompeuse son discours dans le but flagrant d'interférer dans l'élection présidentielle de 2024", a dénoncé lundi un porte-parole des avocats du républicain contacté par l'AFP.

"La BBC a depuis longtemps l'habitude de tromper son public dans sa couverture du président Trump, au service de son programme politique de gauche", a-t-il ajouté.

- Lettre d'excuses -

Au Royaume-Uni, la controverse a relancé le brûlant débat sur le fonctionnement de l'audiovisuel public et son impartialité, alors que le groupe a déjà été bousculé ces dernières années par plusieurs polémiques et scandales.

L'affaire a poussé à la démission son directeur général Tim Davie et la patronne de BBC News Deborah Turness.

Le président de la BBC Samir Shah a pour sa part envoyé une lettre d'excuses à Donald Trump et la BBC a indiqué "regretter sincèrement la façon dont les images ont été montées" mais contesté "fermement qu'il y ait une base légale pour une plainte en diffamation".

Le groupe audiovisuel a "été très clair sur le fait qu'il n'y a pas matière à répondre à l'accusation de M. Trump en ce qui concerne la diffamation. Je pense qu'il est juste que la BBC reste ferme sur ce point", a soutenu mardi matin le secrétaire d'Etat britannique à la Santé Stephen Kinnock, sur Sky News.

Le gouvernement a également annoncé mardi le début du réexamen de la charte royale de la BBC, un processus qui a lieu tous les dix ans, pour éventuellement faire évoluer sa gouvernance, son financement ou ses obligations envers le public britannique.

La plainte de Donald Trump estime que, malgré ses excuses, la BBC "n'a manifesté ni véritables remords pour ses agissements ni entrepris de réformes institutionnelles significatives afin d'empêcher de futurs abus journalistiques".

Le président américain a lancé ou menacé de lancer des plaintes contre plusieurs groupes de médias aux Etats-Unis, dont certains ont dû verser d'importantes sommes pour mettre fin aux poursuites.

Depuis son retour au pouvoir, il a fait entrer à la Maison Blanche de nombreux créateurs de contenus et influenceurs qui lui sont favorables, tout en multipliant les insultes contre des journalistes issus de médias traditionnels.

L'un de ces nouveaux venus invités par le gouvernement Trump est la chaîne conservatrice britannique GB News, proche du chef du parti anti-immigration Reform UK, Nigel Farage.