Au Liban, la ruée des «nouveaux pauvres» vers l'école publique

Face à cet afflux - le nombre d'élèves dans le public s'élève désormais à plus de 383 000 -, les autorités tentent de gérer une situation pour le moins atypique, grâce à de nombreuses donations étrangères. (AFP)
Face à cet afflux - le nombre d'élèves dans le public s'élève désormais à plus de 383 000 -, les autorités tentent de gérer une situation pour le moins atypique, grâce à de nombreuses donations étrangères. (AFP)
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Publié le Mardi 31 août 2021

Au Liban, la ruée des «nouveaux pauvres» vers l'école publique

  • «On est obligés de s'adapter (...) La crise a décimé la classe moyenne. Nous sommes devenus les nouveaux pauvres»
  • Quelque 122 écoles ont ainsi été équipées en panneaux solaires pour palier les pénuries de carburant. Elles seront suivies par 80 autres établissements

BEYROUTH: A l'instar de milliers de familles libanaises ayant vu leurs revenus dégringoler dans un Liban en plein effondrement, Roula Mrad et son époux ont décidé à contre-coeur d'inscrire leur cadet à l'école publique, considérée de moins bon niveau que le système privé.


L'an dernier, le couple avait déjà été acculé à inscrire leur aîné dans une école étatique. 


"Mes enfants ont toujours été scolarisés dans le privé (...) mais les choses ont drastiquement changé. Nous ne pouvons plus nous permettre ce privilège", confie Roula, employée au ministère des Finances depuis son appartement loué à Beyrouth.    


Le couple payait chaque année 8 000 euros pour scolariser ses trois enfants dans un collège privé. 


Mais depuis que la monnaie nationale a perdu plus de 90% de sa valeur face au dollar, Roula et son mari sont incapables d'honorer ce montant.  
Agé de 14 ans, leur fils Rayan devrait ainsi emboiter le pas à Rawad pour la rentrée fin septembre.   


La migration de l'aîné vers le public pour sa classe de terminale leur avait permis de souffler quelque peu, les frais annuels chutant de 2.600 à 150 euros, tandis que "les manuels ont été offerts".  

«Catastrophe»
La crise économique au Liban, l'une des pires au monde depuis 1850 selon la Banque mondiale, avait aussi poussé l'an dernier Sami Makhlouf à inscrire ses quatre enfants à l'école publique dans son village de Qaa, dans la vallée de la Bekaa (est) où la famille a migré. 


Ce plombier de 55 ans, reconverti dans l'agriculture, payait 13 000 dollars par an entre écolages, manuels scolaires et activités.  


"On est obligés de s'adapter (...) La crise a décimé la classe moyenne. Nous sommes devenus les nouveaux pauvres", lâche-t-il. 


Selon l'ONU, 78% de la population libanaise vit aujourd'hui sous le seuil de pauvreté. En avril, l'ONG Save the Children avait mis en garde contre une "catastrophe" éducative à l'ombre de cette paupérisation rampante. 


Depuis le début de la crise en 2019, plus de 90.000 élèves du privé ont rejoint l'école publique, dont environ 55 000 l'an dernier, selon des statistiques fournies à l'AFP par le ministère de l'Education. 


Le nombre d'élèves devrait encore augmenter respectivement cette année de 14% et 9% dans les cycles primaire et secondaire.   


Face à cet afflux - le nombre d'élèves dans le public s'élève désormais à plus de 383 000 -, les autorités tentent de gérer une situation pour le moins atypique, grâce à de nombreuses donations étrangères.  


Quelque 122 écoles ont ainsi été équipées en panneaux solaires pour palier les pénuries de carburant. Elles seront suivies par 80 autres établissements, tandis que les manuels scolaires seront offerts gratuitement pour tous les cycles.


"C'est un grandi défi", admet Hilda Khoury, directrice de l'orientation pédagogique au ministère.  


Mais c'est aussi une "opportunité" pour une refonte de l'école publique, dit-elle, dans un pays où les établissements gérés par l'Etat, longtemps laissés pour compte, souffrent de nombreuses failles.   

«La fin»
A contrario, les établissements privés sont en perte de vitesse. 


Fermetures, cures d'austérité, émigration d'enseignants et d'élèves, certains disent craindre le pire si la crise se poursuit. 


A lui seul, le réseau des écoles catholiques, qui comptait 321 établissements et 185 000 élèves, a perdu 9 000 élèves l'an dernier et a dû fermer 14 écoles. 


"Si le secteur privé n'est pas soutenu, ce sera la fin de l'éducation de qualité au Liban", prévient le père Boutros Azar, haut responsable du réseau.   


Sur les 43.000 enseignants, cadres et contractuels, "quelques milliers sont déjà partis", selon Rodolphe Abboud, président du syndicat des enseignants du privé, qui évoque une "hémorragie" au sein du corps professoral. 


Les parents tirent aussi la sonnette d'alarme, alors que certaines écoles ont déjà annoncé une augmentation des frais de scolarité de 30 à 35%. 


"Nos revenus n'ont pas augmenté, certains parents ont même perdu leur emploi", déplore Lama Tawil, directrice de l'Union des comités des parents du privé.


Alors que de nouveaux départs sont prévus cette année, crise oblige, beaucoup de familles ont déjà émigré en Europe, aux Emirats arabes unis ou à Chypre.


"C'est du jamais vu", dit-elle. "Même l'éducation, le socle de notre société, s'écroule".


Soudan: Washington s'alarme d'une possible offensive «  imminente  » des paramilitaires au Darfour

Depuis un an, la guerre fait rage entre les forces armées soudanaises (FAS) du général Abdel Fattah al-Burhane et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), sous le commandement du général Mohamed Hamdane Daglo, plongeant le pays dans une grave crise humanitaire. (AFP).
Depuis un an, la guerre fait rage entre les forces armées soudanaises (FAS) du général Abdel Fattah al-Burhane et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), sous le commandement du général Mohamed Hamdane Daglo, plongeant le pays dans une grave crise humanitaire. (AFP).
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  • "Les Etats-Unis appellent toutes les forces armées du Soudan à immédiatement cesser leurs attaques sur el-Facher", a déclaré le porte-parole du département d'Etat Matthew Miller dans un communiqué
  • "Nous sommes alarmés par des éléments faisant état d'une offensive imminente des Forces de soutien rapide (FSR) et de ses milices affiliées", a-t-il ajouté

WASHINGTON: La diplomatie américaine a alerté mercredi d'une possible offensive "imminente" de paramilitaires au Soudan sur la ville d'el-Facher, au Darfour, un carrefour pour l'aide humanitaire dans ce pays ravagé par plus d'un an de guerre et au bord de la famine.

"Les Etats-Unis appellent toutes les forces armées du Soudan à immédiatement cesser leurs attaques sur el-Facher", a déclaré le porte-parole du département d'Etat Matthew Miller dans un communiqué.

"Nous sommes alarmés par des éléments faisant état d'une offensive imminente des Forces de soutien rapide (FSR) et de ses milices affiliées", a-t-il ajouté.

Depuis un an, la guerre fait rage entre les forces armées soudanaises (FAS) du général Abdel Fattah al-Burhane et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), sous le commandement du général Mohamed Hamdane Daglo, plongeant le pays dans une grave crise humanitaire.

El-Facher fait office de hub humanitaire pour le Darfour, région où vivent environ un quart des 48 millions d'habitants du Soudan. Accueillant de nombreux réfugiés, la ville avait jusque là été relativement épargnée par les combats.

Mais depuis mi-avril, des bombardements et des affrontements ont été rapportés dans les villages environnants.

"Les Etats-Unis sont extrêmement troublés par les informations crédibles selon lesquelles les FSR et ses milices affiliées ont rasé de nombreux villages à l'ouest d'el-Facher", a relevé Matthew Miller, ajoutant qu'une offensive sur la ville "mettrait les habitants dans une situation de danger extrême".

El-Facher est la seule capitale des cinq Etats du Darfour que les FSR ne contrôlent pas.

Vendredi, l'ONU avait déjà alerté sur ce "nouveau front" du conflit. Il pourrait "entraîner un conflit intercommunautaire sanglant à travers le Darfour" et freiner encore plus la distribution de l'aide humanitaire dans une région "déjà au bord de la famine", selon la sous-secrétaire générale de l'ONU pour les Affaires politiques Rosemary DiCarlo.

La région a déjà été ravagée il y a plus de 20 ans par la politique de la terre brûlée menée par les Janjawids --les miliciens arabes depuis enrôlés dans les FSR-- sous le président de l'époque Omar el-Béchir.

Le nouveau conflit au Soudan, qui a débuté le 15 avril 2023 a déjà fait des milliers de morts et provoqué le déplacement de plus de 8,5 millions de personnes, selon l'ONU.


Un responsable du Hamas affirme qu'Israël n'atteindra pas ses objectifs avec une offensive à Rafah

La communauté internationale redoute un carnage à Rafah où s'entassent selon l'ONU 1,5 million de personnes, dont plus d'un million déplacées par les combats dans la bande de Gaza. (AFP).
La communauté internationale redoute un carnage à Rafah où s'entassent selon l'ONU 1,5 million de personnes, dont plus d'un million déplacées par les combats dans la bande de Gaza. (AFP).
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  • Le Hamas a averti "l'Egypte, le Qatar" ainsi que "d'autres pays arabes et internationaux" du "danger que représente une invasion de Rafah" et du fait qu'"Israël s'apprête à commettre davantage de massacres"
  • Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu martèle qu'une offensive sur Rafah est indispensable pour anéantir le Hamas, l'un des objectifs affichés de la guerre qu'Israël mène à Gaza

TERRITOIRES PALESTINIENS: Un membre du bureau politique du mouvement islamiste palestinien Hamas, Ghazi Hamad, a déclaré jeudi à l'AFP qu'un assaut militaire israélien sur Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, ne permettrait pas à Israël d'obtenir "ce qu'il veut".

"Même si (Israël) entre dans Rafah et l'envahit, il ne remplira pas (...) ses deux principaux objectifs, que ce soit éliminer le Hamas ou récupérer" les otages enlevés par les combattants palestiniens en Israël le 7 octobre, a déclaré Ghazi Hamad, contacté depuis Gaza au Qatar, Etat faisant partie d'un groupe de pays assurant une médiation entre le mouvement palestinien et le gouvernement israélien.

Le Hamas a averti "l'Egypte, le Qatar" ainsi que "d'autres pays arabes et internationaux" du "danger que représente une invasion de Rafah" et du fait qu'"Israël s'apprête à commettre davantage de massacres", a souligné M. Hamad.

Après plus de six mois de frappes et de combats acharnés au sol, qui ont laissé l'essentiel de la bande de Gaza --2,4 millions d'habitants-- en ruines, Israël estime que le Hamas dispose de quatre bataillons regroupés à Rafah, dans l'extrême sud du territoire, à la frontière avec l'Egypte.

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu martèle qu'une offensive sur Rafah est indispensable pour anéantir le Hamas, l'un des objectifs affichés de la guerre qu'Israël mène à Gaza.

La guerre a été déclenchée le 7 octobre par une attaque sans précédent menée depuis Gaza contre Israël par des commandos du Hamas, qui a entraîné la mort de 1.170 personnes, essentiellement des civils, selon un bilan de l'AFP établi à partir de données officielles israéliennes.

Un million de déplacés 

Plus de 250 personnes ont été enlevées et 129 restent captives à Gaza, dont 34 sont mortes selon des responsables israéliens.

En représailles, Israël a promis de détruire le mouvement islamiste, au pouvoir à Gaza depuis 2007 et classé organisation terroriste par Israël, les Etats-Unis et l'Union européenne notamment.

Sa vaste opération militaire dans la bande de Gaza a fait jusqu'à présent 34.305 morts, majoritairement des civils, selon le Hamas.

Jeudi encore, le cabinet de guerre israélien s'est réuni pour préparer cette offensive, malgré une large opposition internationale, y compris de la part des Etats-Unis, l'allié historique d'Israël.

La communauté internationale redoute un carnage à Rafah où s'entassent selon l'ONU 1,5 million de personnes, dont plus d'un million déplacées par les combats dans la bande de Gaza.

« Après-guerre »

"Les négociations sont au point mort" et c'est "l'obstination d'Israël" qui "fait tourner les négociations en rond ces derniers mois", affirme Ghazi Hamad.

"M. Netanyahu et ses ministres disent que la guerre doit continuer, que le Hamas doit être détruit et que Rafah doit être prise. Clairement ils n'ont pas l'intention de négocier", fait-il valoir.

Le Hamas de son côté "a clairement et explicitement présenté sa position aux médiateurs", a poursuivi M. Hamad.

"Nos demandes fondamentales invariablement exprimées sont une déclaration claire et explicite de cessez-le-feu, un retrait complet" des forces israéliennes de la bande de Gaza et "le retour des déplacés", a-t-il dit.

Les plus récentes propositions de la partie israélienne ne répondaient pas à ces "demandes fondamentales", a-t-il affirmé.

M. Hamad accuse M. Netanyahu de "tergiverser" pour "tromper le public israélien" et "leurrer la communauté internationale en disant qu'il y a des négociations et en déformant la vérité en affirmant que le Hamas constitue l'obstacle dans ces négociations".

Quelques heures plus tôt, un porte-parole du gouvernement israélien, David Mencer, avait affirmé que le Hamas se sentait "encouragé" par "certains acteurs régionaux" et "c'est pourquoi il s'éloigne" des négociations.

Ghazi Hamad a aussi affirmé à l'AFP que le Hamas travaillait déjà "jour et nuit" à "l'après-guerre".

"Nous avons de nombreux contacts avec des pays, des institutions et des organisations humanitaires", a-t-il assuré, "nous travaillons à la phase d'après-guerre pour faire en sorte qu'un effort considérable soit déployé pour reconstruire la bande de Gaza".


Les Etats-Unis ont commencé la construction d'une jetée à Gaza

L'aide arrivera dans un premier temps à Chypre, où elle fera l'objet de vérifications, puis sera préparée en vue de son acheminement, a précisé un haut responsable militaire américain. (AFP).
L'aide arrivera dans un premier temps à Chypre, où elle fera l'objet de vérifications, puis sera préparée en vue de son acheminement, a précisé un haut responsable militaire américain. (AFP).
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  • Face aux retards et blocages d'Israël concernant la livraison par voie terrestre d'aide humanitaire dans une bande de Gaza frappée par un désastre humanitaire, le président américain Joe Biden avait annoncé début mars la construction d'un port artificiel
  • La jetée devrait être opérationnelle à partir de début mai et "tout se déroule comme prévu pour l'instant", a assuré le porte-parole du Pentagone

WASHINGTON: Les Etats-Unis ont commencé la construction d'une jetée à Gaza, a annoncé jeudi le Pentagone, un projet destiné à faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire dans le territoire palestinien bombardé et assiégé par Israël.

Face aux retards et blocages d'Israël concernant la livraison par voie terrestre d'aide humanitaire dans une bande de Gaza frappée par un désastre humanitaire, le président américain Joe Biden avait annoncé début mars la construction d'un port artificiel.

Des navires militaires américains "ont commencé à construire (...) le port temporaire et la jetée en mer", a déclaré à la presse le porte-parole du Pentagone, le général Pat Ryder.

La jetée devrait être opérationnelle à partir de début mai et "tout se déroule comme prévu pour l'instant", a assuré le porte-parole du Pentagone.

L'aide arrivera dans un premier temps à Chypre, où elle fera l'objet de vérifications, puis sera préparée en vue de son acheminement, a précisé un haut responsable militaire américain.

Elle sera ensuite transportée par des navires commerciaux sur une plateforme flottante au large de la bande de Gaza, puis par des navires plus petits jusqu'à la jetée.

La capacité opérationnelle sera au début de 90 camions d'aide par jour, puis de 150 par jour, a-t-il encore précisé.

Un haut responsable de l'administration américaine a déclaré que l'Agence américaine pour le développement international (USAID) s'associerait "à des organisations des Nations unies afin d'acheminer l'aide vitale une fois qu'elle sera arrivée à Gaza via le corridor maritime".

"L'entière population de Gaza - 2,2 millions de personnes - fait face à une crise alimentaire aiguë", a-t-il souligné.

Pas de troupes au sol 

L'ONU et les ONG rappellent régulièrement que ce type d'initiatives ne peuvent toutefois pas se substituer à une augmentation indispensable de l'entrée d'aide humanitaire par voie terrestre, pour une population affamée et confrontée à des pénuries de matériel médical.

Le responsable américain a réaffirmé que cette démarche n'impliquerait pas de "troupes au sol" sur le territoire palestinien ravagé par la guerre, et a indiqué qu'une unité militaire israélienne se chargerait d'ancrer la jetée au rivage.

Le Pentagone a par ailleurs mentionné une "attaque au mortier" qui a causé des dommages minimes dans les environs de la zone où l'aide devrait être débarquée.

Le Cogat, organisme dépendant du ministère israélien de la Défense chargé des affaires civiles palestiniennes, a déclaré que des obus de mortier avaient visé la veille un site humanitaire non spécifié dans le nord de la bande de Gaza, sans que des victimes n'aient été signalées.

Un haut responsable militaire américain a indiqué ne pas penser que cette "attaque ait eu quoi que ce soit à voir avec la mission" américaine de construction de la jetée.

La guerre à Gaza a été déclenchée après l'attaque sans précédent du Hamas palestinien le 7 octobre sur le sol israélien, qui a entraîné la mort de 1.170 personnes, selon un bilan de l'AFP établi à partir de données officielles israéliennes.

La vaste opération militaire d'Israël a provoqué une catastrophe humanitaire et fait plus de 34.000 morts dans la bande de Gaza, essentiellement des civils, selon le ministère de la Santé du Hamas.