«Champion d'Auschwitz», un boxeur qui donnait l'espoir

Eleonora Szafran - fille du boxeur d'Auschwitz Tadeusz "Teddy" Pietrzykowski montre son livre sur son père lors d'une interview à Varsovie, le 26 août 2021. (Wojtek Radwanski/AFP)
Eleonora Szafran - fille du boxeur d'Auschwitz Tadeusz "Teddy" Pietrzykowski montre son livre sur son père lors d'une interview à Varsovie, le 26 août 2021. (Wojtek Radwanski/AFP)
Short Url
Publié le Dimanche 05 septembre 2021

«Champion d'Auschwitz», un boxeur qui donnait l'espoir

  • Pietrzykowski «était dangereux pour les Allemands parce qu'il incarnait l'espoir aux yeux des détenus, il montrait qu'il était possible de gagner contre le système, contre les méchants nazis»
  • L'acteur qui l'incarne à l'écran, Piotr Glowacki, a exprimé l'espoir que les spectateurs allaient s'en inspirer, «avoir le courage de suivre l'exemple de Teddy, de choisir le bien».

VARSOVIE, Pologne : Le boxeur polonais Tadeusz Pietrzykowski était un virtuose de l'esquive, mais tout jouait en sa défaveur lors de son premier combat au camp de la mort nazi d'Auschwitz.

Gravement amaigri, le prisonnier numéro 77 devait affronter un détenu allemand beaucoup plus lourd - un «kapo» chargé de superviser d'autres prisonniers.

«J'ai reçu des avertissements et les gens me faisaient des gestes comme quoi j'étais fou: +Il va te tuer, te bouffer+», se souvenait-il après-guerre, d'après ses déclarations officielles au musée d'Auschwitz.

«Il n'y avait pas une seconde pour réfléchir... Il y avait du pain à gagner. J'avais faim, mes amis avaient faim», disait Pietrzykowski, surnommé «Teddy», le champion de Varsovie d'avant-guerre, dans la catégorie poids coq.

Son courage a payé. Avec un coup gauche réussi au visage, Pietrzykowski a fait saigner le kapo, Walter Düning.

Le perdant a choisi de ne pas se venger et a récompensé le boxeur avec du pain et de la viande.

«Teddy» a mené ensuite des dizaines de combats à Auschwitz, les remportant presque tous, ce qui lui a valu des privilèges, assurant sa propre survie mais aussi celle d'autres détenus.

Peu connue même en Pologne, l'histoire de «Teddy» a inspiré le film «Le champion d'Auschwitz», qui vient de sortir en salle.

- Sports à Auschwitz -

«C'est une histoire incroyable. Très peu de gens savent qu'il y a eu de la boxe à Auschwitz, qu'il y a eu des événements sportifs», indique à l'AFP Piotr Witkowski, qui joue le rôle de Walter Düning.

Pietrzykowski «était dangereux pour les Allemands parce qu'il incarnait l'espoir aux yeux des détenus, il montrait qu'il était possible de gagner contre le système, contre les méchants nazis», dit-il.

Tadeusz Pietrzykowski, un catholique, arriva à Auschwitz en juin 1940 en tant que prisonnier politique arrêté pendant la tentative de rejoindre l'armée polonaise qui se formait en France.

Il faisait partie du premier transport de masse vers le camp. Près d'un an après, on lui offrit la possibilité de se battre contre Düning. Les Allemands en avaient assez de s'affronter uniquement entre eux et cherchaient d'autres adversaires.

«Il y avait des acclamations de la part de Polonais et de prisonniers allemands. C'était un événement intéressant, quelque chose de nouveau à Auschwitz. Ce combat en a donc déclenché d'autres, entre détenus de nationalités différentes», souligne Renata Koszyk, commissaire d'une nouvelle exposition sur le sport à Auschwitz, présentée sur le site jusqu'en mars prochain.

«Cependant, le sport n'y était pas un phénomène répandu. La plupart des détenus étaient tellement épuisés par le travail quotidien qu'ils n'arrivaient plus à faire un effort supplémentaire, parfois même celui de marcher pour aller voir» le combat, insiste-t-elle.

Parmi les spectateurs se trouvaient des officiers SS qui s'amusaient à faire des paris.

Dans cette photo d’archives prise à Varsovie avant la Seconde Guerre mondiale et publiée par Eleonora Szafran le 26 août 2021, le boxeur d'Auschwitz Tadeusz «Teddy» Pietrzykowski pose dans son équipement de sport. Le boxeur est devenu connu sous le nom de «Champion d'Auschwitz» - le titre d'un nouveau film basé sur son histoire - pour avoir remporté des dizaines de matchs dans le camp d'extermination nazi allemand. (Polycopié / Document de famille/AFP)
Dans cette photo d’archives prise à Varsovie avant la Seconde Guerre mondiale et publiée par Eleonora Szafran le 26 août 2021, le boxeur d'Auschwitz Tadeusz «Teddy» Pietrzykowski pose dans son équipement de sport. Le boxeur est devenu connu sous le nom de «Champion d'Auschwitz» - le titre d'un nouveau film basé sur son histoire - pour avoir remporté des dizaines de matchs dans le camp d'extermination nazi allemand. (Polycopié / Document de famille/AFP)

- «Courage, bienveillance» -

En échange de ses combats, «Teddy» a bénéficié de divers avantages: un travail plus léger, davantage de nourriture, qu'il partageait avec d'autres, selon les témoignages de codétenus.

La marge de manœuvre dont il jouissait en tant que boxeur vedette au camp lui a permis de se procurer des médicaments pour des prisonniers, de transmettre diverses informations et de remplir des missions pour le mouvement de résistance.

«Mon père a combattu et fait preuve de courage et de générosité envers ses codétenus (...) et a été aidé en retour aussi», déclare à l'AFP sa fille Eleonora Szafran.

Au moment où Pietrzykowski souffrait du typhus, à l'hôpital du camp, le bruit courut que les SS comptaient envoyer des patients dans les chambres à gaz. Pour sauver la vie au boxeur, ses amis l'ont fait sortir clandestinement de l'hôpital et l'ont caché pendant un moment.

Le livre «Mistrz» («Champion») rédigé par sa fille, présente les souvenirs de guerre de Pietrzykowski, notamment sa tentative d'assassiner le commandant d'Auschwitz, des scènes de brutalité et de cruauté nazies dont il fut témoin.

Un million de Juifs sont morts à Auschwitz-Birkenau, ainsi que des dizaines de milliers d'autres prisonniers, dont des Polonais catholiques, des Roms et des prisonniers de guerre soviétiques, entre 1940 et 1945.

Tadeusz Pietrzykowski a survécu à Auschwitz et à d'autres camps de concentration. Après la guerre, il a tenté de retrouver le ring, mais en fut empêché par la maladie.

Il est devenu professeur d'éducation physique, poursuivant aussi sa passion de toujours pour la peinture. Il est décédé en 1991.

L'acteur qui l'incarne à l'écran, Piotr Glowacki, a exprimé l'espoir que les spectateurs allaient s'en inspirer, «avoir le courage de suivre l'exemple de Teddy, de choisir le bien».

«De défendre ceux qui subissent la ségrégation à cause de leur race, nationalité, orientation sexuelle, opinions (...), de se mettre du côté des opprimés».


Pour Liam Cunningham, star de « Game of Thrones », le monde « n'oubliera pas » ceux qui sont restés silencieux sur Gaza

L'acteur irlandais Liam Cunningham a déclaré que le public « n'oubliera pas » ceux qui n'ont pas exprimé leur soutien aux Palestiniens pendant le conflit entre Israël et le Hamas à Gaza. (AP/File Photo)
L'acteur irlandais Liam Cunningham a déclaré que le public « n'oubliera pas » ceux qui n'ont pas exprimé leur soutien aux Palestiniens pendant le conflit entre Israël et le Hamas à Gaza. (AP/File Photo)
Short Url
  • L'Irlandais est un ardent défenseur de la cause palestinienne depuis des décennies
  • « Ce qui me préoccupe, c'est que les personnes qui se sentent concernées et qui ne font rien sont, à mon avis, pires que celles qui ne se sentent pas concernées », a-t-il déclaré

LONDRES : L'acteur irlandais Liam Cunningham a déclaré que le public « n'oubliera pas » ceux qui n'ont pas exprimé leur soutien aux Palestiniens pendant le conflit actuel entre Israël et le Hamas à Gaza.

La star de « Game of Thrones » est un fervent défenseur des causes palestiniennes depuis des décennies. Lors d'une manifestation à Dublin menée par l'Irlando-Palestinien Ahmed Alagha, qui a perdu 44 membres de sa famille dans le récent assaut israélien contre Gaza, Cunningham a déclaré qu'il avait été félicité par ses pairs dans le passé pour son activisme.

« Ce qui me préoccupe, c'est que les personnes qui se sentent concernées et qui ne font rien sont, à mon avis, pires que celles qui ne se sentent pas concernées », a-t-il déclaré.

On a demandé à Cunningham s'il avait parlé à d'autres acteurs pour les convaincre de soutenir la cause palestinienne, mais il a répondu en disant qu'il ne pouvait répondre des autres, a rapporté The Independent.

Il a toutefois ajouté : « Internet n'oublie pas. Lorsque cela se produira, lorsque la CIJ (Cour internationale de justice) et la CPI (Cour pénale internationale) feront, je l'espère, leur travail honorablement, cela se saura », a-t-il déclaré.

« Et les gens qui n'ont pas parlé ne seront pas oubliés. Ce génocide est retransmis en direct et il n'est pas possible de dire que l'on ne savait pas. Vous saviez. Et vous n'avez rien fait. Vous êtes restés silencieux. Je dois pouvoir me regarder dans le miroir, et c'est pourquoi je parle », a-t-il ajouté.

Un mois après qu'Israël a lancé son assaut sur Gaza en réponse aux incursions du Hamas sur le territoire israélien, le 7 octobre, qui ont fait près de 1 200 morts et quelque 250 otages, Cunningham a déclaré que, pour les Irlandais, ignorer le traitement réservé aux Palestiniens reviendrait à « trahir » leur histoire.

« Si nous nous permettons d'accepter ce comportement, alors nous acceptons que cela nous arrive », avait-il déclaré à l'époque. « Nous devons défendre des normes. Nous devons défendre le droit international et cela nous réduit en tant qu'êtres humains si nous ne le faisons pas ».

L'assaut israélien sur Gaza a tué plus de 34 000 Palestiniens, dont environ deux tiers d'enfants et de femmes, selon les autorités sanitaires de l'enclave dirigées par le Hamas.

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com


Le pape François à Venise, son premier déplacement en sept mois

Le pape François salue lors d'une audience avec des pèlerins hongrois dans la salle Paul VI du Vatican, le 25 avril 2024 (Photo, AFP).
Le pape François salue lors d'une audience avec des pèlerins hongrois dans la salle Paul VI du Vatican, le 25 avril 2024 (Photo, AFP).
Short Url
  • En se rendant à Venise pour la première fois depuis son élection en 2013, le pape entend d'abord rassurer sur sa capacité à assurer son ministère
  • Depuis sa visite à Marseille en septembre 2023, Jorge Bergoglio n'a plus voyagé

VATICAN: Le pape François, 87 ans, est attendu dimanche à Venise pour une visite éclair, son premier déplacement hors de Rome en sept mois en raison de son état de santé précaire.

Depuis sa visite à Marseille en septembre 2023, Jorge Bergoglio n'a plus voyagé. Une bronchite l'a contraint à annuler son voyage à Dubaï en décembre et son état général, de plus en plus fragile, à éviter les déplacements.

En se rendant à Venise pour la première fois depuis son élection en 2013, le pape entend d'abord rassurer sur sa capacité à assurer son ministère, quelques semaines après les inquiétudes suscitées par son accès de fatigue au moment des fêtes de Pâques.

François doit arriver en hélicoptère à 08H00 (06H00 GMT) à la prison pour femmes de l'île de la Giudecca, qui abrite le pavillon du Saint-Siège à la 60e Biennale d'art contemporain de Venise.

Dans cet ancien couvent qui accueille des femmes condamnées à de longues peines, l'évêque de Rome, sensible à la place des marginalisés, rencontrera les 80 détenues et visitera l'exposition qu'elles ont montée aux côtés de dix artistes.

A l'écart des projecteurs et de la foule, le pavillon du Saint-Siège est l'un des plus en vue de la prestigieuse manifestation d'art et propose aux visiteurs une expérience immersive et déroutante, où les œuvres côtoient les barbelés.

"Ce sera un moment historique puisqu'il sera le premier pape à visiter la Biennale de Venise", a estimé le conservateur de l'exposition, le cardinal portugais José Tolentino de Mendonça, lors d'une conférence de presse.

Cela "démontre clairement la volonté de l'Eglise de consolider un dialogue fructueux et étroit avec le monde des arts et de la culture".

Messe place Saint-Marc 

Chiara Parisi, commissaire de l'exposition, a souligné "l'émerveillement" et "l'espérance" des détenues vis-à-vis de cette visite.

"Le pape agit au-delà de la parole" en se déplaçant auprès d'elles, des "personnes qui ont à cœur de jouer un rôle même quand elles sont dans une situation très dure", a-t-elle déclaré à l'AFP.

Le pape s'exprimera ensuite devant des jeunes à 10H00 (08H00 GMT) devant l'emblématique basilique Santa Maria della Salute, dont le dôme majestueux domine l'entrée sud du Grand Canal, à deux pas de la place Saint-Marc.

Après avoir rejoint la célèbre place grâce à un pont éphémère, il présidera une grande messe à 11H00 (09H00 GMT) en présence de nombreux responsables politiques et religieux. Il quittera la Lagune en début d'après-midi pour rentrer au Vatican.

Après Paul VI (1972), Jean-Paul II (1985) et Benoit XVI (2011), François est le quatrième pape à se rendre dans la Cité des Doges.

L'histoire de la Sérénissime est étroitement liée à celle de la papauté. Au XXe siècle, trois patriarches de Venise sont devenus papes.

Le diocèse de Venise est un des plus grands de la péninsule avec 125 paroisses. Venise est en outre l'un des rares patriarcats de l'Eglise latine.

La visite du pape intervient le week-end d'introduction d'une entrée payante de cinq euros pour les touristes à la journée: en tant qu'invité, il devrait en être exempté, mais les pèlerins non résidents y seront soumis.

Après ce déplacement, le jésuite argentin doit effectuer deux autres voyages dans le nord de l'Italie, à Vérone en mai et à Trieste en juillet.

Cette visite intervient aussi alors que le Vatican vient d'officialiser une ambitieuse tournée papale aux confins de l'Asie et de l'Océanie en septembre (Indonésie, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Timor oriental et Singapour), le plus long voyage de son pontificat, qui s'annonce comme un ambitieux défi sur le plan physique.


Tanger, le «havre de liberté» des grands noms du jazz

Abdellah El Gourd, légende marocaine de la musique gnawa âgée de 77 ans, pose pour une photo dans la vieille ville de Tanger le 23 avril 2024 (Photo, AFP).
Abdellah El Gourd, légende marocaine de la musique gnawa âgée de 77 ans, pose pour une photo dans la vieille ville de Tanger le 23 avril 2024 (Photo, AFP).
Short Url
  • Cette année, la cité, bordée par la Méditerranée et l'Atlantique, a été désignée ville-hôte de la Journée internationale du jazz, par l'Unesco
  • Randy Weston et Abdellah El Gourd vont de leur côté repousser les limites de la création, devenant les précurseurs de la fusion entre sonorités jazz et gnaoua

TANGER: Au siècle dernier, Randy Weston, Idrees Sulieman ou Max Roach ont traversé l'Atlantique pour découvrir Tanger, devenue le repère des grands jazzmen américains. Un héritage qui sera célébré mardi dans la métropole du nord du Maroc, lors de la Journée internationale du jazz.

"La ville a eu un pouvoir d'attraction fascinant sur une vague d'intellectuels et musiciens. Ce n'est pas pour rien qu'un écrivain disait qu'il y avait toujours un paquebot qui chauffait à New York en partance pour Tanger", explique à l'AFP Philippe Lorin, fondateur d'un festival de jazz dans la grande ville portuaire.

Cette année, la cité, bordée par la Méditerranée et l'Atlantique, a été désignée ville-hôte de la Journée internationale du jazz, par l'Unesco. A partir de samedi, elle abrite des conférences et spectacles en plein air qui culmineront dans un grand concert mondial avec le pianiste Herbie Hancock et les bassistes Marcus Miller et Richard Bona ou le guitariste Romero Lubambo.

Le cosmopolitisme de Tanger puise ses racines dans son statut d'ancienne zone internationale, administrée par plusieurs puissances coloniales de 1923 jusqu'en 1956 quand le Maroc a pris son indépendance.

Son rayonnement a été alimenté par le passage d'écrivains et poètes du mouvement littéraire de la "beat generation" mais aussi de jazzmen afro-américains "en quête de leurs racines africaines", souligne l'historien Farid Bahri, auteur de "Tanger, une histoire-monde du Maroc".

"Tanger était un havre de liberté comme l'est la musique jazz", note M. Lorin.

Weston débarque à Tanger 

"La présence des musiciens américains à Tanger était également liée à une diplomatie américaine très active", complète l'historien marocain.

Le célèbre pianiste Randy Weston a posé ses valises durant cinq ans à Tanger après une tournée dans 14 pays africains en 1967, organisée par le département d'Etat américain.

Le virtuose de Brooklyn a joué un rôle déterminant dans la construction du mythe de la ville du détroit, à laquelle il a dédié son album "Tanjah" (1973).

"Randy était un homme d'exception aimable et respectueux, il a beaucoup donné à la ville et ses musiciens", confie à l'AFP Abdellah El Gourd, un maître gnaoua (musique spirituelle originaire d'Afrique de l'ouest, introduite par les descendants d'esclaves), ami et collaborateur du pianiste américain décédé en 2018.

Un autre moment charnière de cette épopée est l'enregistrement en 1959 d'une session musicale avec le vénérable trompettiste Idrees Sulieman, le pianiste Oscar Dennard, le contrebassiste Jamil Nasser et le batteur Buster Smith au studio de la Radio Tanger International (RTI) à l'invitation de Jacques Muyal.

Ce Tangérois d'à peine 18 ans, animateur d'une émission de jazz sur RTI, produit alors, avec les moyens du bord et sans le savoir, un album de référence qui circulera dans les cercles de jazz avant son édition sous le titre "The 4 American Jazzmen In Tangier" en 2017.

«Expérience unique»

Randy Weston et Abdellah El Gourd vont de leur côté repousser les limites de la création, devenant les précurseurs de la fusion entre sonorités jazz et gnaoua.

"La barrière de la langue n'a jamais été un problème car notre communication se faisait à travers les gammes. Notre langage était la musique", raconte M. El Gourd, dans une salle de répétition aux murs tapissés de photos souvenirs de tournées internationales notamment avec Weston et le saxophoniste Archie Shepp.

Une longue collaboration qui donnera naissance 25 ans plus tard à l'album "The Splendid Master Gnawa Musicians of Morocco" (1992).

En 1969, le pianiste américain décide d'ouvrir un club de jazz baptisé "African Rythms Club" au-dessus du célèbre cinéma Mauritania.

"On répétait là-bas, Randy y invitait ses amis musiciens. C'était une belle époque", se remémore le maâlem (maître) de 77 ans qui a parcouru le monde aux côtés de Weston.

Puis en 1972, l'Américain se lance dans la folle aventure d'organiser un premier festival de jazz à Tanger avec des invités de marques dont le percussionniste Max Roach, le flûtiste Hubert Laws, le contrebassiste Ahmed Abdul-Malik, le saxophoniste Dexter Gordon mais aussi Abdellah El Gourd.

"C'était une expérience assez unique car c'était la première fois qu'on jouait devant un public aussi nombreux", se souvient le musicien, jusqu'alors habitué aux performances gnaouas réservées à l'époque à des cercles restreints.

L'expérience ne durera qu'une seule édition mais inspirera Philippe Lorin pour créer, près de trois décennies plus tard, le festival Tanjazz, organisé chaque année en septembre.