Le Vietnam et l'Afghanistan: récit de deux retraits de l'armée américaine

Ces photos présentent la chute de Saigon en 1975 par le photographe néerlandais Hugh van Es (à gauche) et une scène de chaos à l'aéroport de Kaboul, le 19 août 2021. (Wikimedia Commons et AFP)
Ces photos présentent la chute de Saigon en 1975 par le photographe néerlandais Hugh van Es (à gauche) et une scène de chaos à l'aéroport de Kaboul, le 19 août 2021. (Wikimedia Commons et AFP)
Des Afghans tentent de s'embarquer dans un avion de transport de l'US Air Force à l'aéroport de Kaboul après la prise de la capitale par les talibans le mois dernier. (Fichier AFP)
Des Afghans tentent de s'embarquer dans un avion de transport de l'US Air Force à l'aéroport de Kaboul après la prise de la capitale par les talibans le mois dernier. (Fichier AFP)
Des Afghans désespérés courent après avoir tenté sans succès de monter à bord d'un avion de transport de l'US Air Force à l'aéroport de Kaboul, après la prise de la capitale par les talibans le mois dernier. (Fichier AFP)
Des Afghans désespérés courent après avoir tenté sans succès de monter à bord d'un avion de transport de l'US Air Force à l'aéroport de Kaboul, après la prise de la capitale par les talibans le mois dernier. (Fichier AFP)
Short Url
Publié le Lundi 06 septembre 2021

Le Vietnam et l'Afghanistan: récit de deux retraits de l'armée américaine

  • Reste à voir si les talibans qui gouvernent l'Afghanistan et les États-Unis parviendront à enterrer la haine qui les oppose
  • Les images du chaos qui a entouré les derniers jours de la présence américaine en Afghanistan rappellent celles des dernières évacuations de la ville de Saigon, en 1975

WASHINGTON: Les images du chaos qui a entouré les derniers jours de la présence américaine en Afghanistan rappellent celles des dernières évacuations de la ville de Saigon, en 1975; l'armée nord-vietnamienne, victorieuse, entrait alors dans la capitale du Sud-Vietnam.

Entre les photos emblématiques de Vietnamiens qui escaladent avec désespoir les murs de l'ambassade américaine et celles de ces civils qui s'efforcent de franchir les portes de l'aéroport de Kaboul le mois dernier, espérant embarquer à bord de l'un des derniers vols en partance du pays, la ressemblance est saisissante.

Rétrospectivement, il est impossible d’occulter les nombreuses similitudes entre l'expérience américaine au Vietnam et celle qui vient d’être vécue en Afghanistan. À l'instar du retrait accéléré de l'armée américaine du Vietnam au lendemain de la signature des accords de paix de Paris avec le Nord-Vietnam en 1973, l'accord de Doha – conclu au mois de février 2020 entre les États-Unis et les Talibans – a ouvert la voie à une sortie précipitée des États-Unis de l'Afghanistan.

En 1975, seuls les Marines sont restés dans le Sud-Vietnam. Leur mission consistait à assurer la garde de l'ambassade américaine à Saigon et d'un petit contingent dans une base aérienne voisine. Cette année-là, à la fin du mois d'avril, la ville qui fut rebaptisée Ho Chi Minh-Ville est tombée aux mains de l'armée nord-vietnamienne (ANV).

 

photo
Des troupes de communistes en liesse se dirigent à bord de chars vers le centre de la ville de Saigon, passée sous leur contrôle le 30 avril 1975. (Photo de l'agence de presse vietnamienne via l'AFP)

À travers cet accord de paix, les États-Unis espéraient «vietnamiser» le conflit en confiant les combats et la sécurité de l'armée américaine à l'Armée de la république du Vietnam (ARVN).

Cependant, le même scénario s'est produit. L'armée afghane, qui a reçu une formation et des équipements à hauteur de plusieurs milliards de dollars (1 dollar = 0,84 euro) de la part des États-Unis, n'est pas parvenue à assurer la sécurité du pays par elle-même. Il s’est produit la même chose avec l'ARVN, qui s’était effondrée en l’absence d’un soutien d'unités de combat terrestres et de conseillers de terrain américains.

Après la guerre humiliante du Vietnam, les États-Unis ont longtemps souffert, semble-t-il, d’un manque de confiance. Ils ont ainsi été amenés à douter de leur force, du rayonnement de leurs principes mais, surtout, de leur rôle sur la scène internationale.

«C'est le dernier message envoyé depuis la station de Saigon», écrit Thomas Polgar, le dernier commandant de station de la CIA à Saigon, avant son évacuation. «Nous avons mené un combat long et rude et nous l'avons perdu. Cette expérience inédite dans l'histoire des États-Unis ne signifie pas nécessairement que les États-Unis cesseront de jouer leur rôle de puissance mondiale.»

Il ajoute: «Ceux qui ne parviennent pas à tirer des leçons de l'histoire sont condamnés à la vivre une nouvelle fois. Espérons que nous ne revivrons pas une nouvelle expérience du Vietnam et que nous saurons tirer la leçon de cette histoire. La station de Saigon clôt ses activités.»

photo
Des Afghans se regroupent sur le tarmac de l'aéroport de Kaboul, le 16 août 2021, pour fuir un Afghanistan désormais contrôlé par les talibans. (Fichier AFP)

À juste titre, les historiens militaires américains diraient que les leçons apprises au Vietnam sont parties en fumée au moment où les États-Unis se sont lancés dans une autre guerre à durée indéterminée, ses objectifs initiaux et précis ayant été éclipsés par la volonté de construire une nation.

À l'instar de Saigon à la fin des années 1960 et au début des années 1970, le gouvernement de Kaboul, soutenu par l'armée américaine, ne possédait pas les compétences ni la légitimité nécessaires pour affronter seul une insurrection.

En 1969, Henry Kissinger, qui était à l’époque conseiller américain pour la sécurité nationale, a fait part de sa profonde inquiétude au sujet d’une victoire militaire qu’il jugeait improbable. Ces craintes ont été relayées au président Richard Nixon dans un mémo de 1969 désormais déclassifié.

photo
Des soldats américains rattrapent un bébé à travers une barrière à l'aéroport de Kaboul, alors que la foule, le mois dernier, tentait de prendre l'avion pour fuir l'assaut des talibans. (Fichier AFP)

«Je ne pense pas que l'armée sud-vietnamienne soit capable d'assumer un fardeau plus grand que celui qu’elle assume actuellement», écrit-il, avant d'ajouter que «la stratégie adoptée par le gouvernement de Hanoï consiste à nous faire attendre; elle découle de sa philosophie en matière de guerre révolutionnaire, mais aussi de ses prédictions, qui prévoient que les États-Unis affronteront des problèmes de plus en plus importants.»

Au Vietnam comme en Afghanistan, le temps et le manque de patience stratégique sont apparus comme les grands points faibles de l'Amérique face à une insurrection obstinée. Les quatre administrations qui ont piloté la politique étrangère des États-Unis depuis le début de la guerre en Afghanistan n'ont pas évalué les chances de succès de manière aussi rationnelle et impartiale que l'avait fait Kissinger dans son mémo de 1969.

Certes, la mission en Afghanistan n'a pas engendré les troubles civils et l'agitation politique observés lors de la guerre du Vietnam. Cependant, les politiciens américains s'accordaient, depuis un certain temps déjà, pour juger peu judicieuse cette implication militaire indéterminée dans un pays d'Asie centrale dont la culture est radicalement différente.

À l'heure où la saga de l'Afghanistan touche à sa fin, certains constatent que la période qui a suivi l'année 1975 a donné lieu à un rapprochement lent mais frappant entre les États-Unis et le Vietnam.

En vingt ans, les nations autrefois belligérantes ont su forger une relation qui se traduit aujourd'hui par un réel partenariat stratégique, comme en témoigne le partenariat global de 2013 conclu entre les États-Unis et le Vietnam.

Ainsi, vingt-cinq ans après le lancement, en 1995, des relations bilatérales entre les États-Unis et le Vietnam, ces deux pays sont liés par une amitié nourrie de respect mutuel et de méfiance envers les motivations géopolitiques de la Chine.

Ce partenariat s'étend désormais aux relations politiques, économiques, sécuritaires et humaines. Des dizaines de milliers de Vietnamiens qui étudient aux États-Unis injectent près d'un milliard de dollars dans l'économie américaine.

«Il ne faut pas oublier que les répercussions immédiates de la guerre du Vietnam ont été effroyables. De nombreux Sud-Vietnamiens ont été placés dans des camps puis assassinés, ce qui constitue une violation flagrante des droits de l'homme», confie à Arab News James Carafano, membre de l'Heritage Foundation (laboratoire d’idées et lobby américain situé à Washington, NDLR). «Le Vietnam d'aujourd'hui est un pays tout à fait différent. Les Vietnamiens sont terrifiés par la Chine et ils ont besoin des États-Unis pour les défendre.»

C’est un Vietnam puissant, prospère et indépendant qui sert les intérêts de Washington. En revanche, Hanoï et Pékin ne parviennent pas à résoudre leurs différends relatifs aux revendications territoriales en mer de Chine méridionale.

En effet, le commerce bilatéral entre les États-Unis et le Vietnam est passé de 451 millions de dollars en 1995 à plus de 90 milliards de dollars en 2020. La même année, les exportations de produits américains vers le Vietnam représentaient plus de 10 milliards de dollars alors que les importations s'élevaient à 79,6 milliards de dollars. En 2019, les investissements américains au Vietnam se sont chiffrés à 2,6 milliards de dollars.

photo
Sur cette photo prise le 31 mai 2017, les forces de sécurité afghanes se tiennent sur les lieux d'une explosion meurtrière attribuée au réseau Haqqani. (Fichier AP)

 À l'heure où la guerre en Afghanistan s'achève et où les talibans poursuivent leurs discussions avec les pays de la région pour normaliser les relations diplomatiques, on peut tirer des enseignements de l'évolution des relations américano-vietnamiennes, qui sont passées de l'inimitié à un partenariat florissant.

Il convient de se demander si l'effet de levier économique associé aux intérêts communs en matière de sécurité et à une diplomatie avisée ne permettrait pas de réaliser en Afghanistan ce que n'ont pas suffi à accomplir les milliards de dollars dépensés pour bâtir une force de défense calquée sur le modèle des armées occidentales.

En outre, les talibans n'ont pas hésité à signaler qu'ils étaient disposés à nouer des relations diplomatiques avec les puissances régionales, notamment la Chine, les pays arabes du Golfe, la Turquie ou encore l'Inde.

L'objectif immédiat des États-Unis en termes de sécurité consiste à empêcher Al-Qaïda et Daech d'établir une base d'opérations d'où ils pourraient mener des attaques terroristes de portée internationale. Pour y parvenir, il incombe aux États-Unis de faire appel à tous les moyens dont ils disposent: le soft power, la diplomatie et les incitations économiques.

Lors de la défaite des Américains, en 1975, on craignait par-dessus tout que la victoire des communistes ne provoque au Sud-Vietnam un «effet domino» entraînant sur son passage la chute des gouvernements des pays d'Asie du Sud-Est alliés aux États-Unis. Mais ce scénario est resté sans suite.

Le tournant spectaculaire qu'ont pris les relations américano-vietnamiennes laisse entrevoir une lueur d'espoir pour l'Afghanistan, non sans faire naître quelques réticences.

«Les États-Unis sont restés en Afghanistan pour deux raisons: tout d'abord pour empêcher que le terrorisme transnational ne trouve un nouveau terrain d'action; en second lieu, pour prévenir une déstabilisation en Asie du Sud. Ces deux motifs étaient des intérêts américains légitimes», explique James Carafano.

«Nous ne possédons à l'heure actuelle aucune présence, aucune idée quant au statut des terroristes et aucune force de dissuasion contre les acteurs impliqués dans la région. Nos alliés ne nous font plus confiance.»

Au sujet de l'avenir, Carafano estime que «les talibans sont loin de traverser l'évolution qu'a connue l'Allemagne au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Il est illusoire de supposer qu’ils vont devenir une entité normalisée et former un gouvernement. Les membres de Daech sont des idiots utiles et incapables de menacer quiconque. Ils ne posent pas une menace pour nous, mais pour les talibans».

«Les talibans vont-ils se dissocier du réseau Haqqani et d'Al-Qaïda? Certainement pas. Les talibans ne prévoient pas de perpétrer de nouveaux attentats comme ceux du 11-Septembre, mais Al-Qaïda et Haqqani le feront certainement.»

Force est de constater que le partenariat tribal qui unit depuis longtemps le réseau Haqqani (partie intégrante des Talibans) et Al-Qaïda gênera considérablement la capacité ou la volonté des talibans à freiner le retour en force du groupe terroriste international.

À l'heure actuelle, les talibans font passer un grand nombre de messages positifs. Leurs dirigeants ont affirmé qu’ils entendaient privilégier une vision nationaliste plutôt que transnationale.

Il faudra toutefois attendre pour savoir si ce groupe parviendra à privilégier les intérêts de l'État, qui requièrent un financement extérieur et une expertise technique considérables, au détriment d’une vision «révolutionnaire» délirante qui entraînerait l’horreur.

«La défaite militaire des États-Unis au Vietnam ne s'est pas soldée par une défaite stratégique des États-Unis et du bloc anticommuniste dans le monde», explique James Carafano à Arab News.

«Les administrations républicaines et démocrates ont toutes deux adopté une série de mesures qui visent à raffermir l'engagement de Washington en faveur d'un partenariat en matière de sécurité avec le Vietnam. Fait autrefois impensable, les porte-avions de la marine américaine accostent aujourd’hui dans les ports vietnamiens.»

photo
La vice-présidente américaine, Kamala Harris, s'entretient avec le Premier ministre vietnamien, Pham Minh Chinh, à Hanoï, le 25 août 2021. (Reuters/Evelyn Hockstein/Pool)

«Reste à savoir si les États-Unis et l'Afghanistan tenu par les talibans parviendront à mettre en place un dispositif de sécurité qui repose sur une perception commune des menaces», ajoute-t-il.

«La Chine et la Russie nous montrent déjà qu'elles sont désireuses de jouer un rôle plus actif en Afghanistan dans le sillage du retrait des troupes américaines. Toutefois, ces deux pays s'engageront probablement avec prudence dans ce pays. Les deux puissances ont tout intérêt à remporter la victoire en Afghanistan sans devoir livrer bataille; mais elles prendront tout leur temps.»

Que ce soit au Vietnam ou en Afghanistan, le temps est le facteur décisif qui a provoqué la défaite militaire de l'Amérique face aux insurgés. Cependant, c'est le temps qui s'est écoulé depuis la guerre du Vietnam qui a fait des adversaires d'hier les amis d'aujourd'hui; ce qui les unit, ce sont les menaces et les intérêts communs.

La question est de savoir si les décideurs américains ont tiré des enseignements de ces deux retraits honteux pour éviter de subir une troisième humiliation. Dans le cas du Vietnam, les États-Unis sont parvenus à tirer une certaine victoire diplomatique de la défaite militaire qu'ils ont essuyée. En Afghanistan, tout dépendra de la capacité et de la volonté des dirigeants talibans de rompre définitivement avec le passé.

 

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


A l'ONU, l'enquêtrice en chef sur Gaza a encore espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés

Navi Pillay, la présidente de la commission d'enquête indépendante de l'ONU qui a accusé cette semaine Israël de commettre un génocide à Gaza, ne perd pas espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés. (AFP)
Navi Pillay, la présidente de la commission d'enquête indépendante de l'ONU qui a accusé cette semaine Israël de commettre un génocide à Gaza, ne perd pas espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés. (AFP)
Short Url
  • Selon les enquêteurs, le président israélien, Isaac Herzog, le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, et l'ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, ont "incité à commettre un génocide"
  • Israël a "rejeté catégoriquement" ce "rapport biaisé et mensonger"

GENEVE: Navi Pillay, la présidente de la commission d'enquête indépendante de l'ONU qui a accusé cette semaine Israël de commettre un génocide à Gaza, ne perd pas espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés.

"La justice est lente", a affirmé l'ancienne juge sud-africaine, dans un entretien à l'AFP.

Mais "comme l'a dit (Nelson) Mandela, cela semble toujours impossible, jusqu'à ce qu'on le fasse. Je considère qu'il n'est donc pas impossible qu'il y ait des arrestations et des procès" à l'avenir, a-t-elle ajouté.

La commission d'enquête, qui ne s'exprime pas au nom de l'ONU, a établi qu'Israël commet un génocide à Gaza depuis le début de la guerre déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas du 7-Octobre.

Selon les enquêteurs, le président israélien, Isaac Herzog, le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, et l'ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, ont "incité à commettre un génocide".

Israël a "rejeté catégoriquement" ce "rapport biaisé et mensonger".

La Cour pénale internationale (CPI) avait déjà émis des mandats d'arrêt contre MM. Netanyahu et Gallant.

Mme Pillay reconnaît que la CPI dépend des Etats pour la mise en œuvre des mandats d'arrêt car elle n'a "ni shérif, ni forces de police".

Mais elle veut y croire, faisant une comparaison : "Je n'aurais jamais pensé que l'apartheid prendrait fin de mon vivant".

"Tellement douloureux" 

Jeune avocate d'origine indienne dans l'Afrique du Sud de l'apartheid, devenue juge et Haute-Commissaire aux droits de l'homme à l'ONU (2008-2014), Mme Pillay, 83 ans, a l'art de traiter des dossiers difficiles.

Sa carrière l'a menée des cours sud-africaines, où elle a défendu les activistes anti-apartheid et obtenu des droits cruciaux pour les prisonniers politiques, au Tribunal pénal international pour le Rwanda, en passant par la CPI.

Sa mission est des plus ardues depuis qu'elle préside, depuis sa création en 2021, la commission chargée par le Conseil des droits de l'homme de l'ONU d'enquêter sur les atteintes aux droits dans les territoires palestiniens et en Israël.

Elle déplore d'avoir été qualifiée d'"antisémite" depuis et dénonce les appels sur les réseaux sociaux de ceux qui réclament que les Etats-Unis la sanctionnent, comme Washington l'a fait pour une rapporteure de l'ONU, des juges de la CPI et des ONG palestiniennes.

Mais le plus dur, pour elle et son équipe, est de visionner les vidéos provenant de Gaza.

"Nous nous inquiétons pour notre personnel. Nous les surmenons et c'est traumatisant ces vidéos", dit-elle, citant "des violences sexuelles contre les femmes" et "les médecins qui sont dénudés par l'armée".

"C'est tellement douloureux" à regarder même si "on ne peut pas comparer notre souffrance à celle de ceux qui l'ont vécue", poursuit-elle.

Alors qu'elle présidait le Tribunal pénal international pour le Rwanda, des vidéos de civils abattus ou torturés l'ont aussi "marqué à vie".

Selon elle, la comparaison entre le Rwanda et Gaza ne s'arrête pas là : "Je vois des similitudes. Ce sont les mêmes méthodes".

Du Rwanda à Gaza 

"Dans le cas du Rwanda, c'était le groupe des Tutsi qui était visé. Ici, tous les éléments de preuve montrent que c'est le groupe palestinien qui est visé", dit-elle.

Elle mentionne aussi les propos de dirigeants israéliens qui "déshumanisent" les Palestiniens en les comparant à des "animaux". Comme lors du génocide rwandais, lorsque les Tutsi étaient "traités de cafards", ce qui revient à dire qu'"il est acceptable de les tuer", dénonce-t-elle.

Mme Pillay a indiqué qu'à l'avenir la commission entendait se pencher aussi sur des crimes supposés commis par d'autres "individus", expliquant qu'une grande partie des preuves a été publiée par les soldats israéliens eux-mêmes sur les réseaux sociaux.

Elle déplore toutefois que, faute de financements, la commission n'ait pas pu encore examiner si certains Etats qui fournissent de l'armement à Israël pouvaient être considérés complices.

Un travail qu'elle laisse à son successeur. Elle quitte la commission le 3 novembre en raison de son âge et de problèmes de santé.

Avant cela, elle doit présenter un dernier rapport devant l'Assemblée générale de l'ONU à New York. "J'ai déjà un visa", confie-t-elle.


Gaza: Bruxelles propose de taxer des biens importés d'Israël dans l'UE et de sanctionner deux ministres

La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu.  "Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas. (AFP)
La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu. "Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas. (AFP)
Short Url
  • L'exécutif européen avait déjà proposé en août 2024 de sanctionner ces deux ministres. Une tentative vaine, faute d'accord au sein des 27 Etats membres
  • Ces sanctions pour être adoptées requièrent l'unanimité des pays de l'UE

BRUXELLES: La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu.

"Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas.

Les mesures commerciales devraient, si elles étaient adoptées par les pays de l'UE, renchérir de quelque 227 millions d'euros le coût de certaines importations israéliennes, principalement d'origine agricole.

La Commission européenne a également proposé de sanctionner deux ministres israéliens d'extrême droite, Itamar Ben-Gvir, chargé de la Sécurité nationale, et Bezalel Smotrich chargé des Finances, selon un responsable de l'UE.

L'exécutif européen avait déjà proposé en août 2024 de sanctionner ces deux ministres. Une tentative vaine, faute d'accord au sein des 27 Etats membres. Ces sanctions pour être adoptées requièrent l'unanimité des pays de l'UE.

"Tous les États membres conviennent que la situation à Gaza est intenable. La guerre doit cesser", a toutefois plaidé mercredi Mme Kallas. Ces propositions seront sur la table des représentants des 27 Etats membres dès mercredi.

Les sanctions dans le domaine commercial ne nécessitent que la majorité qualifiée des Etats membres. Mais là encore, un accord sera difficile à obtenir, jugent des diplomates à Bruxelles.

Des mesures beaucoup moins ambitieuses, également présentées par la Commission européenne il y a quelques semaines, n'avaient pas trouvé de majorité suffisante pour être adoptées. Avait notamment fait défaut le soutien de pays comme l’Allemagne ou l'Italie.

Les exportations israéliennes vers l'UE, son premier partenaire commercial, ont atteint l'an dernier 15,9 milliards d'euros.

Seuls 37% de ces importations seraient concernés par ces sanctions, si les 27 devaient donner leur feu vert, essentiellement dans le secteur agro-alimentaire.


Trump s'en prend à des magistrats après l'assassinat de Charlie Kirk

Cette capture d'écran provenant de la diffusion en direct du tribunal de l'Utah montre Tyler Robinson, suspect dans le meurtre du militant politique Charlie Kirk, assistant à une audience à distance depuis sa cellule de prison à Provo, dans l'Utah, le 16 septembre 2025. (AFP)
Cette capture d'écran provenant de la diffusion en direct du tribunal de l'Utah montre Tyler Robinson, suspect dans le meurtre du militant politique Charlie Kirk, assistant à une audience à distance depuis sa cellule de prison à Provo, dans l'Utah, le 16 septembre 2025. (AFP)
Short Url
  • Dans le viseur du locataire de la Maison Blanche, sur son réseau Truth, se trouvent deux de ses cibles privilégiées : l'ex-procureur spécial Jack Smith, et le juge Juan Merchan qui avait présidé son procès pour des paiements cachés à une star du X
  • Donald Trump reproche à Jack Smith d'avoir ouvert il y a quelques années une enquête sur Turning Point, le mouvement créé par l'influenceur ultraconservateur américain Charlie Kirk, assassiné le 10 septembre

WASHINGTON: Le président américain Donald Trump a de nouveau stigmatisé mercredi des magistrats qui l'avaient poursuivi et jugé durant le mandat de Joe Biden, prenant prétexte du récent assassinat de l'influenceur ultraconservateur Charlie Kirk.

Dans le viseur du locataire de la Maison Blanche, sur son réseau Truth, se trouvent deux de ses cibles privilégiées : l'ex-procureur spécial Jack Smith, et le juge Juan Merchan qui avait présidé son procès pour des paiements cachés à une star du X.

Donald Trump reproche à Jack Smith d'avoir ouvert il y a quelques années une enquête sur Turning Point, le mouvement créé par l'influenceur ultraconservateur américain Charlie Kirk, assassiné le 10 septembre.

"Pourquoi le merveilleux Turning Point a-t-il été mis sous ENQUÊTE par le +Dérangé+ Jack Smith et l'administration Biden Corrompue et Incompétente ?", s'interroge Donald Trump dans un message sur Truth.

"Ils ont essayé de forcer Charlie, ainsi que de nombreuses autres personnes et mouvements, à cesser leurs activités. Ils ont instrumentalisé le ministère de la Justice contre les opposants politiques de Joe Biden, y compris MOI!", s'offusque-t-il encore.

Jack Smith, lui-même visé par une enquête administrative depuis le retour au pouvoir de Donald Trump, avait été nommé procureur spécial en 2022.

Il avait lancé des poursuites fédérales contre Donald Trump, pour tentatives illégales d'inverser les résultats de l'élection de 2020 et rétention de documents classifiés après son départ de la Maison Blanche.

Les poursuites avaient été abandonnées après la réélection de Trump, en vertu de la tradition consistant à ne pas poursuivre un président en exercice. Jack Smith avait ensuite démissionné du ministère de la Justice.

Sans jamais le citer nommément, le président Trump s'en prend également sur le réseau Truth à Juan Merchan, qui a présidé le procès Stormy Daniels. Le président avait été reconnu coupable de 34 chefs d'accusation, pour des paiements cachés de 130.000 dollars à l'ex-star du X.

Donald Trump exprime le souhait que le juge "corrompu" paie "un jour un prix très élevé pour ses actions illégales".

Depuis l'assassinat de Charlie Kirk, le camp républicain redouble de véhémence contre les démocrates et organisations progressistes, accusés de promouvoir la violence politique.

"La gauche radicale a causé des dégâts énormes au pays", a affirmé le président républicain mardi, avant son départ au Royaume-Uni. "Mais nous y remédions".

Selon le Washington Post, un élu républicain du Wisconsin a déposé une proposition de loi visant à bloquer les fonds fédéraux aux organisations employant des personnes "qui tolèrent et célèbrent la violence politique".

Le New York Times précise pour sa part que sont notamment dans le viseur l'Open Society Foundation du milliardaire George Soros ainsi que la Ford Foundation, qui toutes deux financent des organisations de gauche.