A Bagdad avant les législatives, indifférence et désillusion

Affiches électorales de candidats aux législatives irakiennes, le 19 septembre à Bagdad (Photo, AFP).
Affiches électorales de candidats aux législatives irakiennes, le 19 septembre à Bagdad (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 20 septembre 2021

A Bagdad avant les législatives, indifférence et désillusion

  • Si à travers le pays les rassemblements électoraux mobilisent des partisans, des notables locaux et d'influents chefs de tribus, au quotidien le coeur n'y est pas
  • Le taux de participation au scrutin du 10 octobre pourrait s'avérer bien plus bas encore que pour les élections de 2018

BAGDAD: "C'est que des promesses". A la terrasse d'un café de Bagdad, Sajad sait déjà qu'il ne va pas voter aux législatives anticipées d'octobre en Irak, accueillies avec indifférence et désillusion par une large partie de la population.

Sur les places publiques et les grandes avenues de la capitale irakienne, ici et là des bannières géantes de candidats sont visibles. Il y a bien sûr des politiciens aguerris, mais la plupart sont des inconnus du grand public.

Si à travers le pays les rassemblements électoraux mobilisent des partisans, des notables locaux et d'influents chefs de tribus, au quotidien le coeur n'y est pas. Et pour des observateurs, le taux de participation au scrutin du 10 octobre pourrait s'avérer bien plus bas encore que pour les élections de 2018.

"Je vois des portraits dans la rue, mais je ne connais ni les noms ni les programmes", concède Sajad, 23 ans, tee-shirt blanc et crâne rasé, tatouages à l'avant-bras.

"Je pense qu'ils ont tous le même programme, ‘on va faire ceci, on va faire cela’. C'est que des promesses", lâche cet employé d'une maison de production, installé avec des amis sur un trottoir animé.

Initialement prévues en 2022, les législatives anticipées sont une des rares concessions offertes par le pouvoir pour désamorcer le mouvement de contestation inédit, déclenché à l'automne 2019 pour dénoncer corruption endémique, chômage des jeunes et déliquescence des services publics.

«Ce sont les mêmes»

Dans sa boutique où il vend tout type d'huiles ménagères, Mohamed le diplômé en économie n'est pas convaincu. A 30 ans, il reporte sans cesse l'idée du mariage, à cause des difficultés économiques. Pour lui, les élections "n'apportent aucun changement".

"Les services de base, on ne me les fournis pas. Pourquoi je vais voter?", ajoute-t-il, dans un pays abonné aux délestages électriques quotidiens.

"La dernière fois que le revêtement des routes a été fait dans mon quartier, c'était avant 2003".

Dans sa circonscription à Bagdad, il connaît deux des cinq candidats, mais ne s'est pas donné la peine de consulter leur programme. "Ce sont les mêmes factions politiques depuis 2003. Ce qui change c'est les visages".

"Ceux qui votent, c'est parce qu'on leur a promis un boulot. Ou alors c'est pour un proche ou quelqu'un de leur tribu", accuse le jeune homme, dénonçant ce clientélisme.

En principe, le 10 octobre, près de 25 millions d'électeurs sont appelés à choisir parmi les quelque 3.249 candidats en lice pour 329 sièges au Parlement. Un quota de 25% a été réservé aux femmes.

Le scrutin à liste --qui favorisait les partis-- a été remplacé par un scrutin uninominal visant, en théorie, à promouvoir les indépendants.

Mais les candidats peuvent toujours se présenter au nom d'un parti ou d'une coalition. Et il est fort probable de voir les blocs traditionnels coopter les notables et les potentats locaux qui remporteront la course dans chacune des 83 circonscriptions. Et bien souvent en Irak, les alliances se font et se défont après le scrutin.

«Apathie et désespoir»

Difficile de prédire un grand gagnant. Dans cet Irak polarisé, le camp chiite pro-Iran du Hachd al-Chaabi rivalise avec le courant sadriste, du très populaire leader chiite Moqtada al-Sadr.

Pour la politologue Marsin Alshamary, le scrutin se tiendra dans un climat "d'apathie et de désespoir, surtout parmi les jeunes".

"Le taux de participation n'a fait que décliner au fil des élections en Irak", reconnaît la chercheuse.

En 2018, la participation s'était établie à 44,52%, selon des chiffres officiels --gonflés selon les détracteurs. "Il y a de fortes chances que ça soit pire" cette année, avertit-elle.

Il y a aussi les espoirs déçus du soulèvement d'octobre 2019 qui n'a rien changé --ou si peu-- tandis que des dizaines de militants ont même été victimes d'enlèvements, d'assassinats ou de tentatives d'assassinat.

Personne n'a revendiqué ces attaques. Mais pour les militants, il s'agit des "milices", dans un pays où les groupes armés financés par l'Iran n'ont cessé de gagner en influence.

Alors à tout juste 28 ans Ali ne veut pas être complice du "crime" que représentent pour lui ces élections, en raison d'un contexte antidémocratique.

"Il n'y aura pas d'élections transparentes", regrette le jeune homme. "L'argent des politiques domine, il y a une prolifération des armes dans toutes les circonscriptions. Celui qui a les armes va gagner".


L'attaque de mardi contre la flottille pour Gaza était une «agression préméditée», selon la Tunisie

Après la première annonce, la Garde nationale tunisienne avait démenti toute attaque, affirmant n'avoir détecté "aucun" drone. (AFP)
Après la première annonce, la Garde nationale tunisienne avait démenti toute attaque, affirmant n'avoir détecté "aucun" drone. (AFP)
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  • L'incertitude a plané toute la journée sur le programme, entre raisons de sécurité après les attaques rapportées par la flottille, retard dans les préparatifs pour certains bateaux et météo défavorable
  • Plusieurs bateaux convoyant de l'aide humanitaire pour Gaza sont arrivés de Barcelone ces derniers jours à Tunis. Des militants propalestiniens de Tunisie et d'ailleurs doivent les rejoindre, également en bateau, pour un départ collectif pour Gaza

TUNIS: L'attaque qui a visé mardi un bateau de la flottille pour Gaza, amarré près de Tunis, était "une agression préméditée", a affirmé mercredi le ministère tunisien de l'Intérieur.

Le ministère a indiqué dans un communiqué mener l'enquête pour "faire toute la lumière" sur l'affaire, afin que "l'opinion publique, pas seulement en Tunisie mais dans le monde entier, soit informée de l'identité de ceux ayant planifié (l'attaque), des complices et des exécutants de cette agression".

La "Global Sumud Flotilla", qui se trouve au large de Sidi Bou Saïd près de Tunis, a affirmé que deux de ses bateaux avaient été ciblés par des "attaques de drones", respectivement lundi soir et mardi soir.

Après la première annonce, la Garde nationale tunisienne avait démenti toute attaque, affirmant n'avoir détecté "aucun" drone.

Elle avait émis l'hypothèse que le feu à bord du bateau ait pu être provoqué par un mégot de cigarette, ce qui a été abondamment commenté sur les réseaux sociaux en Tunisie.

"Nous avions dit dès le premier jour (...) que c'était une attaque clairement préméditée", a affirmé à l'AFP Ghassen Henchiri, l'un des organisateurs tunisiens de la flottille, en réaction au communiqué du ministère de l'Intérieur.

"Les autorités sont libres de nommer ou pas le coupable. Nous, on dit que personne dans le monde à part Israël n'a intérêt à nuire à la flottille", a-t-il poursuivi.

L'AFP avait sollicité l'armée israélienne pour un commentaire après la première annonce dans la nuit de lundi à mardi, sans réponse dans l'immédiat.

Par ailleurs, la flottille a de nouveau reporté son départ pour le territoire palestinien assiégé par Israël, a annoncé mercredi l'un de ses principaux organisateurs, le Brésilien Thiago Avila.

"Nous vous dirons quel est le meilleur moment pour prendre la mer en fonction de la météo", a-t-il dit par mégaphone à une foule rassemblée à Sidi Bou Saïd.

"Nous espérons partir demain matin", a-t-il précisé à l'AFP.

L'incertitude a plané toute la journée sur le programme, entre raisons de sécurité après les attaques rapportées par la flottille, retard dans les préparatifs pour certains bateaux et météo défavorable.

Si les bateaux partent bien jeudi matin, ce ne sera pas encore pour Gaza mais pour le port de Bizerte, dans le nord de la Tunisie, ont affirmé à l'AFP plusieurs participants, le temps que les navires qui ne sont pas encore prêts le soient.

Plusieurs bateaux convoyant de l'aide humanitaire pour Gaza sont arrivés de Barcelone ces derniers jours à Tunis. Des militants propalestiniens de Tunisie et d'ailleurs doivent les rejoindre, également en bateau, pour un départ collectif pour Gaza.

Parmi les militants venus de dizaines de pays figurent la militante écologiste suédoise Greta Thunberg et l'actrice française Adèle Haenel.


L'OMS affirme vouloir rester dans la ville de Gaza

La guerre a provoqué un désastre humanitaire dans la bande de Gaza, où les quelque deux millions d'habitants plusieurs fois déplacés vivent dans des conditions très dures. L'ONU y a déclaré la famine, ce que Israël dément. (AFP)
La guerre a provoqué un désastre humanitaire dans la bande de Gaza, où les quelque deux millions d'habitants plusieurs fois déplacés vivent dans des conditions très dures. L'ONU y a déclaré la famine, ce que Israël dément. (AFP)
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  • "Aux civils de Gaza : L'OMS et ses partenaires restent dans la ville de Gaza", a indiqué l'organisation sur le réseau X
  • L'ONU estime qu'environ un million de personnes vivent dans la ville de Gaza et ses alentours

GENEVE: L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a affirmé mercredi qu'elle allait rester dans la ville de Gaza en dépit des appels d'Israël pour que les habitants évacuent le principal centre urbain du territoire palestinien.

"Aux civils de Gaza : L'OMS et ses partenaires restent dans la ville de Gaza", a indiqué l'organisation sur le réseau X.

Près de deux ans après le début de la guerre, déclenchée par une attaque sans précédent du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023, l'armée israélienne a intensifié ces dernières semaines ses bombardements et opérations terrestres dans la ville de Gaza, qu'elle présente comme le dernier grand bastion du mouvement islamiste.

L'armée a appelé mardi tous les habitants de la ville à en partir immédiatement vers le sud, avertissant qu'elle allait y frapper durement le mouvement palestinien Hamas.

L'ONU estime qu'environ un million de personnes vivent dans la ville de Gaza et ses alentours.

L'OMS a indiqué mercredi être "consternée" par l'ordre d'évacuation israélien, indiquant que la "soit-disant +zone humanitaire+ désignée par Israël dans le sud (...) ne dispose ni de la taille ni de l'envergure des services nécessaires pour soutenir les personnes déjà présentes, et encore moins les nouveaux arrivants".

Près de la moitié des hôpitaux qui fonctionnent encore se trouvent dans la ville de Gaza, selon l'OMS, qui souligne que le système de santé "ne peut se permettre de perdre aucun de ces établissements restants".

"Bien que les derniers ordres d'évacuation n'incluent pas encore les hôpitaux, les incidents passés montrent à quelle vitesse ils deviennent inopérants lorsque les combats bloquent l'accès aux patients, empêchent les ambulances d'y accéder et interrompent le réapprovisionnement de l'OMS et de ses partenaires", poursuit l'organisation.

La guerre a provoqué un désastre humanitaire dans la bande de Gaza, où les quelque deux millions d'habitants plusieurs fois déplacés vivent dans des conditions très dures. L'ONU y a déclaré la famine, ce que Israël dément.

 


Le Qatar veut que Netanyahu soit «traduit en justice» et reconsidère sa médiation

"Je pense que ce qu'a fait Netanyahu hier (mardi, ndlr), c'est d'avoir tué tout espoir pour les otages", a indiqué M. Al-Thani dans une déclaration à CNN, jugeant qu'"il doit être traduit en justice". (AFP)
"Je pense que ce qu'a fait Netanyahu hier (mardi, ndlr), c'est d'avoir tué tout espoir pour les otages", a indiqué M. Al-Thani dans une déclaration à CNN, jugeant qu'"il doit être traduit en justice". (AFP)
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  • Le Qatar "réévalue tout" concernant son rôle de médiateur dans les pourparlers - jusqu'à présent infructueux - en vue d'un cessez-le-feu dans le conflit provoqué par l'attaque du Hamas le 7-Octobre
  • "J'ai réfléchi à l'ensemble du processus ces dernières semaines, et je me suis dit que Netanyahu ne fait que nous faire perdre notre temps", a-t-il déclaré selon le blog en direct de CNN

DOHA: Le Premier ministre du Qatar, Mohammed ben Abdelrahmane Al-Thani, a affirmé mercredi que son homologue israélien, Benjamin Netanyahu, devait être traduit en justice après l'attaque israélienne contre des chefs du Hamas à Doha mardi, estimant que celle-ci avait "tué tout espoir" de libérer les otages à Gaza.

M. Al-Thani a également indiqué que le Qatar "réévalue tout" concernant son rôle de médiateur dans les pourparlers - jusqu'à présent infructueux - en vue d'un cessez-le-feu dans le conflit provoqué par l'attaque du Hamas le 7-Octobre.

"J'ai réfléchi à l'ensemble du processus ces dernières semaines, et je me suis dit que Netanyahu ne fait que nous faire perdre notre temps", a-t-il déclaré selon le blog en direct de CNN, après une interview avec la chaîne américaine.

L'armée de l'air israélienne a visé mardi des dirigeants du Hamas réunis dans un complexe à Doha, la capitale de ce pays pays allié des Etats-Unis et abritant régulièrement des pourparlers.

"Je pense que ce qu'a fait Netanyahu hier (mardi, ndlr), c'est d'avoir tué tout espoir pour les otages", a indiqué M. Al-Thani dans une déclaration à CNN, jugeant qu'"il doit être traduit en justice".

Cette attaque sans précédent a aussi suscité une rare réprimande du président américain Donald Trump, grand allié d'Israël, qui a dit en être "très mécontent".

M. Netanyahu avait a mis en garde les autorités qataries: "je dis au Qatar et à toutes les nations qui hébergent des terroristes: vous devez soit les expulser, soit les traduire en justice. Parce que si vous ne le faites pas, nous le ferons".

Le Hamas, en guerre contre Israël dans la bande de Gaza, a affirmé que ses hauts responsables visés avaient survécu mais que les raids israéliens avaient fait six morts.

Israël, qui a juré de détruire le mouvement islamiste et de le chasser du territoire palestinien d'où il a lancé son attaque sans précédent le 7 octobre 2023, a décimé sa direction depuis le début de la guerre.

 "Bras long" 

En riposte à l'attaque du 7-Octobre,  l'armée israélienne a lancé une offensive dévastatrice dans la bande de Gaza, faisant des dizaines de milliers de morts et provoquant une catastrophe humanitaire.

Mercredi, le ministre israélien de la Défense Israël Katz a prévenu que son pays frapperait ses ennemis partout. "La politique sécuritaire d'Israël est claire: son bras long agira contre ses ennemis, où qu'ils soient. Ils n'ont nulle part où se cacher."

"Si les meurtriers et les violeurs du Hamas n'acceptent pas les conditions posées par Israël pour mettre fin à la guerre, en premier lieu la libération de tous les otages, et leur désarmement, ils seront détruits et Gaza sera détruite", a-t-il ajouté.

Selon des sources du Hamas, six dirigeants dont Khalil al-Hayya, Khaled Mechaal, ancien numéro un, et Zaher Jabarine, responsable du mouvement en Cisjordanie, étaient dans le bâtiment au moment de l'attaque. L'AFP n'est parvenu à joindre aucun d'eux depuis.

Toujours selon le Hamas, les six morts sont le fils du négociateur en chef Khalil al-Hayya, le chef du bureau de M. Hayya, trois gardes du corps et un policier qatari.

Le représentant d'Israël à l'ONU, Danny Danon, a déclaré qu'il était "trop tôt pour se prononcer sur le résultat" de la frappe.

48 morts à Gaza selon les secours 

En dépit des pressions internationales pour un arrêt de la guerre dans la bande de Gaza, l'armée israélienne y a poursuivi son offensive faisant au moins 48 morts selon la Défense civile locale.

L'armée a affirmé qu'elle intensifierait "dans les prochains jours ses frappes à Gaza-ville", considérée comme l'un des derniers bastions du Hamas dans le territoire, "dans le but de démanteler l'infrastructure terroriste du Hamas, d'entraver sa capacité opérationnelle et de réduire la menace qui pèse sur les troupes".

L'attaque du 7-Octobre a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.

Sur les 251 personnes enlevées ce jour-là, 47 sont encore retenues à Gaza dont 25 décédées selon l'armée.

L'offensive de représailles israélienne a fait au moins 64.656 morts à Gaza, selon le ministère de la Santé du Hamas à Gaza, dont les chiffres sont jugés fiables par l'ONU. L'ONU  a déclaré la famine à Gaza, ce que Israël dément.