Allemagne: des élections à gros enjeux nationaux et européens

A gauche, le leader du parti conservateur CDU Armin Laschet. A droite, le chef des Sociaux-Démocrates du SPD, Olaf Scholz. Les deux hommes sont favoris à la succession d’Angela Merkel au poste de Chancelier et votaient aujourd’hui aux élections législatives allemandes (Photo, AFP).
A gauche, le leader du parti conservateur CDU Armin Laschet. A droite, le chef des Sociaux-Démocrates du SPD, Olaf Scholz. Les deux hommes sont favoris à la succession d’Angela Merkel au poste de Chancelier et votaient aujourd’hui aux élections législatives allemandes (Photo, AFP).
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Publié le Dimanche 26 septembre 2021

Allemagne: des élections à gros enjeux nationaux et européens

  • Vue d’ensemble des principaux partis politiques allemands en amont de la publication des résultats des élections législatives
  • Ce scrutin va façonner l'Allemagne de l'après-Merkel

BERLIN: L'Allemagne post-Merkel va-t-elle devenir plus instable? quel cap pour sa politique ? la gauche va-t-elle réussir à s'emparer de la chancellerie aux dépens des conservateurs? Les écologistes et les Libéraux seront-ils dans le prochain gouvernement ?

Tels sont les principaux enjeux des élections législatives allemandes dimanche, à l'issue très indécise.  

La fin d'une époque ? 

Ce scrutin va façonner l'Allemagne de l'après-Merkel. 

A 67 ans, celle qui gouverne la première puissance économique européenne depuis 2005, ne se représente plus après quatre mandats et 16 ans en poste. Angela Merkel avait fait part de ses intentions dès octobre 2018, suite à un revers électoral dans l'Etat régional de Hesse de son parti. Elle n'entend pas non plus entamer de carrière dans les institutions européennes ou internationales, comme certains médias lui en prêtaient l'intention.

C'est la première fois depuis 1949 qu'un chef de gouvernement sortant décide de ne pas se représenter.

Sous son règne, l'Allemagne a été synonyme de prévisibilité en Europe. Cela pourrait changer après le scrutin, qui promet un émiettement des voix et un gouvernement à trois partis, par nature instable, pour piloter la première économie européenne.

Les conservateurs en danger ?

Au vu des derniers sondages, le camp conservateur de la chancelière risque d'essuyer son plus mauvais score depuis la fondation de l'Allemagne moderne en 1949, avec autour de 23%, contre 32,8% en 2017.

Ils pourraient du coup perdre la chancellerie et même être relégués dans l'opposition pour la première fois depuis 2005.

Les sociaux-démocrates sont placés devant les démocrates-chrétiens - bien que de peu - dans les dernières enquêtes et rêvent de diriger le gouvernement, pour la première fois depuis Gerhard Schröder. Alors qu'ils étaient donnés moribonds il y a un an encore.

Leur chef de file a d’ailleurs commis une grosse bourde dimanche lors du vote pour les législatives à Aix-la-Chapelle, en omettant de dissimuler son bulletin de vote face aux caméras comme le stipule pourtant le code électoral.

Armin Laschet, qui a déjà multiplié les faux pas durant la campagne électorale pour la succession d'Angela Merkel, n'a pas replié comme il le fallait son bulletin sur lequel chaque électeur allemand doit apposer deux croix pour les deux voix dont il dispose.

Résultat: au moment où il l'a inséré dans l'urne, ostensiblement devant les caméras, chacun a pu voir qu'il avait inscrit deux croix pour son parti, l'Union chrétienne-démocrate (CDU) alors que le vote doit être tenu secret selon la législation allemande.

Armin Laschet avait déjà commis un impair qui lui a coûté cher en terme de popularité lors des inondations meurtrières dans l'ouest du pays en juillet. 

Des caméras l'avaient filmé hilare, en arrière-plan, alors que le président allemand, Frank-Walter Steinmeier prononçait un discours dans les régions ravagées par une catastrophe qui a fait quelque 180 morts et provoqué d'immenses dégâts.

Les résultats du scrutin attendus à partir de 18H00 (16H00 GMT) s'annoncent serrés entre les sociaux-démocrates, qui font la course en tête au vu des derniers sondages, et les conservateurs, plombés notamment par l'impopularité d'Armin Laschet.

L’heure de la victoire pour les sociaux-démocrates ?

Vice-chancelier et grand argentier du gouvernement, le très modéré social-démocrate Olaf Scholz s'est hissé au rang de favori pour prendre les rênes de l'Allemagne en suivant une stratégie simple: apparaître comme le véritable héritier d'Angela Merkel.

Régulièrement moqué pour son allure austère et ses discours débités d'un ton d'automate - qui lui valent le surnom de "Scholzomat" - l'ancien maire de Hambourg est parvenu grâce à ce tour de force à se placer en pole position des législatives de dimanche.

Sans faire de vague et en profitant des faiblesses et erreurs de ses adversaires, il est ainsi en mesure de succéder à une Angela Merkel dont il cherche à apparaître comme le seul légataire, cultivant un mimétisme avec la dirigeante jusque dans la gestuelle.

Une stratégie en forme de pied-de-nez à son rival conservateur Armin Laschet, à qui ce rôle devrait en principe être dévolu puisqu'il dirige le parti (CDU) de la chancelière.

Le rebond du SPD dans les intentions de vote est inespéré pour un parti donné il y a un an encore comme moribond.

Social-démocrate tendance centriste, M. Scholz, a réussi à convaincre à 63 ans avec une image de compétence.

Malgré le désaveu de 2019, le SPD, un des plus vieux partis européens, a ainsi choisi Olaf Scholz pour défendre ses couleurs, en dépit des critiques visant le ministre suite à la faillite retentissante de la société financière Wirecard.

Celui qui assure "rire plus souvent que les gens ne pensent", a aussi été rattrapé en fin de campagne par une affaire de blanchiment d'argent mettant en cause son ministère, sans grave conséquence dans les sondages.

Quel score pour l'extrême-droite ?

Après être devenue au précédent scrutin de 2017 la première force d'opposition à la chambre des députés, en surfant sur les craintes d'une partie de l'opinion face à l'arrivée de centaines de milliers de migrants, l'extrême-droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) semble plafonner, à environ 11% des intentions de vote. L'immigration faisant moins recette, elle a tenté de se repositionner en défenseur des "libertés" face aux restrictions anti-Covid. Son score sera du coup très suivi. 

Ecologistes et Libéraux au gouvernement ?

Tant les écologistes, crédités de 16% environ, que le parti de droite des Libéraux (FDP), avec environ 11%, pourraient se retrouver en position de "faiseur de roi" dans un futur gouvernement de coalition.

De multiples combinaisons majoritaires devraient toutefois être possibles dans le futur parlement, allant d'une coalition purement de gauche à un gouvernement penchant à droite. Tout cela augure de négociations ardues pour former le prochain gouvernement. 

Les partenaires de l'Allemagne redoutent une longue période d'immobilisme, au moment où l'Europe redoute une marginalisation géopolitique.

Quelle politique extérieure ?

Le profil final du gouvernement aura un impact important sur la future politique internationale de l'Allemagne, même si les trois grands partis ont fait campagne au centre.

Le pays serait plus enclin à la solidarité financière en Europe avec un gouvernement dominé par les sociaux-démocrates et Verts qu'avec les conservateurs et Libéraux. Ces derniers sont plus favorables à des missions militaires à l'étranger que la gauche.

L'Allemagne pourrait connaître une phase de tensions avec l'Otan si un gouvernement incluant la gauche radicale de Die Linke, qui promeut la dissolution de l'Alliance atlantique, devait voir le jour.

L'évolution du couple franco-allemand, qui a parfois connu des ratés du temps d'Angela Merkel, dépendra de l'équation finale également. Et ce d'autant plus que les Français se rendront également aux urnes, en avril 2022.

Avec l'arrivée d'un nouveau gouvernement, "on attend de l'Allemagne qu'elle soit une force de proposition plus importante au niveau européen", souligne Paul Maurice, du Comité d'études franco-allemandes de l'IFRI. 

(Avec AFP)


Washington cible l'Autorité palestinienne, en plein débat sur la reconnaissance d'un Etat de Palestine

Le président de l'Autorité palestinienne Mahmud Abbas. (File/AFP)
Le président de l'Autorité palestinienne Mahmud Abbas. (File/AFP)
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  • Les Etats-Unis ont annoncé jeudi des sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), en pleine offensive en faveur d'un Etat de Palestine

WASHINGTON: Les Etats-Unis ont annoncé jeudi des sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), en pleine offensive en faveur d'un Etat de Palestine.

L'annonce des sanctions américaines survient en effet au moment où de nombreux Etats, dont la France et le Canada, ont promis de reconnaître un Etat de Palestine en marge de l'Assemblée générale de l'ONU en septembre, provoquant la colère d'Israël et des Etats-Unis qui parlent d'une "récompense" faite au Hamas dans la bande de Gaza.

La France et l'Arabie saoudite ont co-présidé lundi et mardi à l'ONU une conférence internationale, plaidant ainsi pour la solution à deux Etats, israélien et palestinien, seul chemin pour parvenir à la paix au Proche-Orient.

Washington, qui rejette toute reconnaissance unilatérale d'un Etat palestinien, a décrit la conférence comme étant une "insulte" faite aux victimes de l'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023.

Dans un communiqué jeudi, le département d'Etat américain a fait part de sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'OLP, sans les identifier, accusés notamment d'"internationaliser le conflit avec Israël".

Washington reproche aux deux institutions de "soutenir des actions au sein d'organisations internationales qui sapent et contredisent les engagements antérieurs" notamment à travers la Cour internationale de justice (CIJ) et la Cour pénale internationale (CPI).

Washington avait sanctionné en juin quatre magistrates de la CPI, estimant que leurs procédures visant l'exécutif israélien étaient "illégitimes" et "politisées".

Washington, principal allié d'Israël, accuse aussi l'OLP et l'Autorité palestinienne de "continuer à soutenir le terrorisme, y compris par l'incitation et la glorification de la violence" dans les livres scolaires, une accusation de longue date.

Les sanctions consistent en un refus de visa pour des membres des deux institutions.

- "Distorsion morale" -

"Il est dans l'intérêt de notre sécurité nationale d'imposer des sanctions et de tenir l'OLP et l'Autorité palestinienne responsables du non-respect de leurs engagements et de la remise en cause des perspectives de paix", a indiqué le département d'Etat.

Le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar, s'est aussitôt félicité de cette décision, jugeant que "l'Autorité palestinienne doit payer le prix de sa politique actuelle consistant à verser des indemnités aux terroristes et à leurs familles pour les attentats commis et pour l'incitation à la haine contre Israël dans les écoles, les manuels scolaires, les mosquées et les médias palestiniens".

Il a également relevé, sur X, que cette mesure "met en évidence la distorsion morale de certains pays qui se sont empressés de reconnaître un Etat palestinien virtuel tout en fermant les yeux sur le soutien de l'Autorité palestinienne au terrorisme et à l'incitation à la haine".

L'Autorité palestinienne, dont le président est Mahmoud Abbas, administre la Cisjordanie occupée, tandis que l'OLP, créée en 1964, est le mouvement fondateur représentant les Palestiniens, longtemps dirigée par leur leader historique Yasser Arafat.

L'OLP rassemble la majorité des mouvements politiques palestiniens mais pas le mouvement islamiste Hamas, qui s'est emparé du pouvoir à Gaza en 2007.

Des pays arabes et occidentaux voudraient voir l'Autorité palestinienne, très affaiblie, jouer un rôle dans la gouvernance de la bande de Gaza après la guerre qui y fait rage depuis octobre 2023.

Depuis son retour au pouvoir en janvier, le président Donald Trump, qui a accueilli le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu par trois fois à la Maison Blanche, plus qu'aucun autre dirigeant étranger, a apporté un soutien inconditionnel à Israël, tout en oeuvrant sans succès pour un cessez-le-feu à Gaza.

Mais il s'est montré peu disert sur l'Autorité palestinienne, décriée pour le manque de réformes et la corruption.

Parmi ses premiers décrets, le président Trump avait levé des sanctions imposées sous son prédécesseur Joe Biden visant des colons israéliens extrémistes en Cisjordanie, en proie à une recrudescence des violences.


L'envoyé de Trump rencontre Netanyahu, Israël face à des critiques accrues

L'envoyé du président américain Donald Trump pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, rencontre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu jeudi. (GPO)
L'envoyé du président américain Donald Trump pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, rencontre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu jeudi. (GPO)
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  • L'émissaire américain Steve Witkoff a discuté jeudi à Jérusalem avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu de la guerre à Gaza, à l'heure où de nombreux pays ont dit envisager de reconnaître un Etat palestinien au grand dam d'Israël
  • Les morts tombés sous les tirs et bombardements israéliens se comptent par dizaines chaque jour dans le territoire palestinien assiégé par Israël

Jérusalem, Non défini: L'émissaire américain Steve Witkoff a discuté jeudi à Jérusalem avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu de la guerre à Gaza, à l'heure où de nombreux pays ont dit envisager de reconnaître un Etat palestinien au grand dam d'Israël.

Après 22 mois d'une guerre dévastatrice déclenchée par une attaque du Hamas sur le sol israélien le 7 octobre 2023, la bande de Gaza est menacée d'une "famine généralisée" selon l'ONU et est totalement dépendante de l'aide humanitaire distribuée par camions ou larguée depuis les airs.

Les morts tombés sous les tirs et bombardements israéliens se comptent par dizaines chaque jour dans le territoire palestinien assiégé par Israël, selon la Défense civile locale qui a fait état de 38 Palestiniens tués jeudi.

Plusieurs dizaines de corps gisaient empilés à la morgue de l'hôpital al-Chifa dans le nord de Gaza, dans l'attente d'être collectés par leurs proches, a constaté un correspondant de l'AFP.

"Le moyen le plus rapide de mettre fin à la crise humanitaire à Gaza est que le Hamas CAPITULE ET LIBÈRE LES OTAGES !!!", a déclaré le président américain Donald Trump sur X.

Rien n'a filtré de la rencontre entre MM. Witkoff et Netanyahu mais en début de semaine, M. Trump a semblé se distancer de son allié israélien en évoquant une "vraie famine" à Gaza.

Avant l'arrivée jeudi de l'émissaire de M. Trump, des dizaines de mères et proches d'otages encore aux mains du Hamas ont manifesté devant le bureau du Premier ministre à Jérusalem, exigeant un "accord global" qui garantirait la libération des 49 otages encore détenus à Gaza, dont 27 ont été déclarés morts par l'armée.

- "Position minoritaire" -

L'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023 a entraîné du côté israélien la mort de 1.219 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de données officielles.

En riposte, Israël a juré de détruire le Hamas et lancé une offensive dévastatrice à Gaza qui a fait au moins 60.249 morts, en majorité des civils, d'après les données du ministère de la Santé à Gaza jugées fiables par l'ONU. La campagne aérienne et terrestre a dévasté le territoire et provoqué un désastre humanitaire.

Le chef de la diplomatie allemande Johann Wadephul a lui rencontré à Jérusalem son homologue israélien Gideon Saar, avant de rencontrer M. Netanyahu.

Avant de décoller pour Israël, M. Wadephul a estimé qu'Israël était "de plus en plus en position minoritaire", alors qu'un "nombre croissant de pays, y compris européens, sont prêts à reconnaître un Etat palestinien sans processus de négociation préalable".

Ces visites interviennent après la multiplication des alertes d'organisations internationales sur une famine à Gaza et l'échec de négociations indirectes, sous médiation américaine, qatarie et égyptienne, entre Israël et le Hamas en vue d'un cessez-le-feu.

Le gouvernement israélien a annoncé dimanche une pause limitée dans l'offensive afin de permettre l'acheminement de l'aide dans le petit territoire pauvre où s'entassent plus de deux millions de Palestiniens.

Mais ces aides sont jugées insuffisantes par les organisations internationales face aux besoins immenses de la population.

- "Pression déformée"

Le Portugal a indiqué jeudi envisager de reconnaître l'Etat de Palestine, après que plusieurs pays dont le Canada, la France et le Royaume-Uni ont annoncé leur intention de faire de même en marge de l'Assemblée générale de l'ONU en septembre.

Une telle reconnaissance reste néanmoins largement symbolique en raison du refus d'Israël de la création d'un tel Etat auquel aspirent les Palestiniens.

Dans ce contexte, Israël a dénoncé une "campagne de pression internationale déformée" venant "récompenser le Hamas et nuire aux efforts visant à obtenir un cessez-le-feu à Gaza".

Les Etats-Unis, qui ont dénoncé les annonces sur la reconnaissance d'un Etat palestinien, ont imposé des sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), accusant les deux organismes d'avoir pris des mesures pour "internationaliser leur conflit avec Israël" et de "continuer à soutenir le terrorisme".

Le gouvernement Netanyahu, qui veut chasser le Hamas de Gaza et a annoncé son intention de contrôler le territoire, semble peiner à trancher sur une solution politique d'après-guerre.

Dans ce contexte, la frange la plus radicale de sa coalition gouvernementale plaide pour un retour des colonies à Gaza, évacuées en 2005 avec le retrait unilatéral israélien du territoire après 38 ans d'occupation.

L'armée israélienne a par ailleurs annoncé le retrait du nord de Gaza de sa 98e Division, composée d'unités parachutistes et de commandos d'élite, qui a "se prépare désormais à de nouvelles missions".


Une experte de l’ONU : « La famine imposée à Gaza est une atteinte grave à la dignité humaine »

Des Palestiniens se rassemblent pour recevoir de la nourriture d'une cuisine caritative dans la ville de Gaza, le 28 juillet 2025. (Reuters)
Des Palestiniens se rassemblent pour recevoir de la nourriture d'une cuisine caritative dans la ville de Gaza, le 28 juillet 2025. (Reuters)
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  • Alice Jill Edwards dénonce une privation prolongée de nourriture entraînant malnutrition, défaillances d’organes et décès, notamment chez les nourrissons et femmes enceintes
  • « Des règles changeantes, une distribution militarisée et l’incertitude permanente sur l’accès aux besoins de base provoquent désespoir, stress et traumatismes », alerte-t-elle

NEW YORK: La rapporteuse spéciale de l’ONU sur la torture, Alice Jill Edwards, a exprimé mercredi sa vive inquiétude face à l’augmentation du nombre de décès liés à la famine parmi les Palestiniens de Gaza.

Elle a qualifié la famine infligée aux civils de « meurtrière, inhumaine et dégradante », appelant à une aide humanitaire rapide et sans entrave vers l’enclave dévastée.

« Priver des gens de nourriture, d’eau et de dignité constitue une violation grave et répétée dans ce conflit. Cela doit cesser », a-t-elle déclaré, citant des rapports « choquants » de civils tués en faisant la queue pour se nourrir, et des cas généralisés de faim et de malnutrition.

Elle a alerté sur un risque croissant de famine généralisée à Gaza, soulignant que toutes les parties au conflit ont des obligations juridiques, au regard du droit international, d’assurer un accès à l’eau et à la nourriture pour les civils sous leur contrôle, et de faciliter l’aide humanitaire.

« Ils ne doivent ni voler, ni détourner, ni bloquer délibérément l’acheminement de l’aide », a-t-elle averti.

Elle a décrit les « conséquences physiologiques catastrophiques » de la privation prolongée de calories : malnutrition, défaillance d’organes et décès, touchant particulièrement les groupes vulnérables comme les nourrissons et les femmes enceintes.

« L’impact psychologique d’un tel déni est d’une cruauté intrinsèque », a-t-elle poursuivi.

« Des règles constamment changeantes, des distributions militarisées, et une incertitude quotidienne sur l’accès aux besoins fondamentaux plongent les gens dans un désespoir et une détresse extrêmes. »

Elle a salué l’annonce par Israël de pauses humanitaires permettant au Programme alimentaire mondial d’opérer pendant trois mois, tout en soulignant que « davantage doit être fait » pour mettre fin aux hostilités et établir une paix durable fondée sur la solution à deux États.

« Personne ne devrait subir l’humiliation de devoir mendier pour se nourrir, surtout quand des stocks suffisants sont disponibles », a-t-elle déclaré.

Edwards a également renouvelé son appel à la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages, à la libération des Palestiniens détenus arbitrairement, et à la mise en place d’enquêtes indépendantes sur les allégations de torture, de mauvais traitements et d’éventuels crimes de guerre, de la part de toutes les parties.

Elle a indiqué avoir exprimé ses préoccupations à plusieurs reprises aux autorités concernées et continuer de réclamer une pleine reddition de comptes.

Les rapporteurs spéciaux font partie des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme de l’ONU. Ils sont indépendants, ne sont pas membres du personnel des Nations unies et travaillent bénévolement.