La flambée des prix de l'énergie, phénomène mondial et complexe

Sur cette photo d'archives prise le 6 juin 2021, des sections du pipeline Enbridge Line 3 sont vues sur le chantier de construction à Park Rapids, Minnesota. Kerem Yucel / AFP
Sur cette photo d'archives prise le 6 juin 2021, des sections du pipeline Enbridge Line 3 sont vues sur le chantier de construction à Park Rapids, Minnesota. Kerem Yucel / AFP
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Publié le Vendredi 01 octobre 2021

La flambée des prix de l'énergie, phénomène mondial et complexe

  • La reprise économique mondiale, notamment en Chine, a soutenu la demande en énergie après le trou d'air du Covid-19
  • Des problèmes techniques ont également pesé sur l'offre ; il y a eu tout un tas de problèmes sur des installations de GNL (gaz naturel liquéfié) un peu partout dans le monde

PARIS, France : La flambée des prix du gaz qui touche les Français est un phénomène mondial qui obéit à de nombreux facteurs. Et pour en sortir, il existe plusieurs solutions.

Une flambée historique

"Les prix du gaz que l'on voit actuellement sur le marché au comptant [où livraison et règlement sont instantanés] en Asie et en Europe sont extrêmement élevés, c'est un record", souligne Anne-Sophie Corbeau, spécialiste de l'énergie à l'université de Columbia.

Idem pour le charbon, avec des prix autour de 200 dollars par tonne, le marché du carbone et du pétrole.

"Il y a un effet d'entraînement", estime Anne-Sophie Corbeau.

Cela se traduit par une série de fortes hausses pour le consommateur français: avec une hausse annoncée de 12,6% TTC au 1er octobre des tarifs réglementés du gaz appliqués par Engie. Et une nouvelle hausse de 15% pourrait intervenir dans un mois.

Au total, la facture du ménage moyen chauffé au gaz chez Engie, au tarif réglementé, a augmenté de 29% depuis 2019 et de 44% depuis janvier 2020, selon la Commission de régulation de l'énergie.

Au Royaume-Uni, dépendant du gaz pour générer de l'électricité et déjà en proie à des pénuries, dont l'essence, les prix du gaz ont augmenté de 85% depuis le début du mois et de 300% depuis le début de l'année. Jeudi, le gaz britannique pour livraison dans un mois a atteint un plus haut historique.

Comment en est-on arrivé là?

C'est d'abord la reprise économique mondiale, notamment en Chine, qui a soutenu la demande en énergie après le trou d'air du Covid-19.

Autre facteur: "les aléas climatiques", souligne Anne-Sophie Corbeau. Des hivers longs et froids en Asie et en Europe ont notamment tiré sur la demande pour le chauffage.

La météo a aussi entraîné une production éolienne décevante en Europe au deuxième trimestre, compensée par le gaz.

Des problèmes techniques ont également pesé sur l'offre. "Il y a eu tout un tas de problèmes sur des installations de GNL (gaz naturel liquéfié) un peu partout dans le monde", indique Geoffroy Hureau, secrétaire général de Cedigaz, une association professionnelle.

Enfin, "les stockages sont à un niveau historiquement bas" pour la période, rappelle M. Hureau.

Quid de l'électricité?

Les tarifs réglementés de l'électricité devraient connaître une nouvelle hausse "aux alentours de 12%" en début d'année prochaine, a indiqué jeudi la ministre française de la Transition écologique Barbara Pompili.

Le marché de gros de l'électricité suit en partie celui du gaz et augmente fortement actuellement. Mais cela ne se traduit pas de la même manière que pour le gaz dans les tarifs appliqués aux Français, qui ne sont revus que deux fois pas an.

"En électricité, il y a moins d'exposition aux prix de marché parce qu'en partie le risque est couvert par le coût du nucléaire historique, bien plus bas que le prix de marché", souligne Julien Teddé.

EDF est en effet obligé de vendre une partie de son électricité nucléaire, à bas prix, à ses concurrents.

Quelles solutions?

Côté approvisionnement, l'avenir dépendra de l'augmentation ou non des livraisons de gaz à l'Europe du russe Gazprom, qui s'est dit "prêt à étudier de nouveaux contrats pour augmenter les volumes". Mais cela pourrait aussi dépendre de la volonté politique derrière, juge Mme Corbeau.

Le ministre français de l'Economie Bruno Le Maire a dénoncé jeudi l'attitude du président russe Vladimir Poutine, pour qui "il suffit de jouer sur cet approvisionnement pour faire monter les prix et pour rogner sur notre indépendance".

De façon plus immédiate, le gouvernement peut aider les ménages en jouant sur la fiscalité au travers de la TVA ou de taxes spécifiques.

Il peut aussi élargir des aides comme le chèque énergie, versé à 6 millions de ménages modestes, déjà rallongé de 100 euros.

Les entreprises peuvent acheter "sur le plus long terme" et profiter de tarifs plus avantageux à l'horizon de quelques années, préconise Julien Teddé.

Autre solution: le gouvernement pourrait décider de "lisser" les hausses de tarifs en anticipant sur les baisses futures, en en répercutant seulement une partie sur les consommateurs pour l'instant.

En contrepartie, quand les cours baisseront, les consommateurs devront attendre avant de voir baisser les prix.


Engie confirme ses perspectives 2025 malgré un contexte "incertain et mouvant"

Cette photographie montre le parc éolien offshore de Yeu-Noirmoutier au large de l'Ile-d'Yeu, dans l'ouest de la France, le 23 juin 2025. (AFP)
Cette photographie montre le parc éolien offshore de Yeu-Noirmoutier au large de l'Ile-d'Yeu, dans l'ouest de la France, le 23 juin 2025. (AFP)
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  • Engie a confirmé vendredi ses perspectives pour 2025 malgré un contexte "incertain" et une baisse des prix qui a pesé sur ses résultats au premier semestre
  • L'énergéticien se dit confiant sur la suite et maintient ses prévisions pour 2025

PARIS: Engie a confirmé vendredi ses perspectives pour 2025 malgré un contexte "incertain" et une baisse des prix qui a pesé sur ses résultats au premier semestre, et se dit désormais plus confiant pour ses projets renouvelables aux Etats-Unis après une période d'incertitude.

Son résultat net récurrent a reculé de 19% à 3,1 milliards d’euros au cours des six premiers mois de l'année. Le résultat opérationnel (Ebit) hors nucléaire est ressorti à 5,1 milliards d'euros, en baisse de 9,4% en raison d'une base de comparaison élevée par rapport au premier semestre 2024 et "dans un contexte de baisse des prix".

Mais l'énergéticien se dit confiant sur la suite et maintient ses prévisions pour 2025.

"Nous abordons les prochains mois avec confiance et nous confirmons notre +guidance+ annuelle", a commenté Catherine MacGregor, sa directrice générale, citée dans le communiqué de résultats.

Elle a néanmoins insisté sur le contexte économique et géopolitique "assez incertain et mouvant", lors d'une conférence téléphonique.

A la Bourse de Paris, Engie cédait 2,45% à 10H53 (8H53 GMT) à 19,15 euros vendredi, après avoir lâché 5% à l'ouverture.

Interrogée sur les Etats-Unis, Catherine MacGregor s'est montrée plus confiante après une période d'incertitude qui a suivi l'entrée en fonction du gouvernement Trump.

"Avec la promulgation du +Big beautifull bill+ (la loi budgétaire de Donald Trump, ndlr) et une première clarification du cadre réglementaire et fiscal qui était attendue, nous nous apprêtons à lancer trois projets pour plus de 1,1 GW de capacité totale, éolien, solaire et batteries qui vont conforter notre croissance jusqu'en 2028", a-t-elle déclaré.

Engie a pour l'heure "juste en dessous de 9 GW en opération aux États-Unis", a-t-elle rappelé.

"Il y avait beaucoup, beaucoup d'incertitudes sur le traitement qui serait donné à ces projets", a-t-elle souligné, mais avec cette nouvelle loi, "on a beaucoup plus de clarté".

"Le marché aux États-Unis reste évidemment très, très porteur", a-t-elle poursuivi. "Les projections de demande d'électricité sont absolument massives et aujourd'hui, il n'y a pas de scénarios (...) sans une grande partie de projets renouvelables", notamment en raison du fort développement des centres de données dans le pays.

Le groupe table sur un résultat net récurrent - qui exclut des coûts de restructuration et la variation de la valeur de ses contrats de couverture - "entre 4,4 et 5,0 milliards d'euros" en 2025.

Engie vise par ailleurs un Ebit hors nucléaire "dans une fourchette indicative de 8,0 à 9,0 milliards d'euros" en 2025.

"Comme prévu, l'Ebit hors nucléaire va atteindre son point bas cette année et le second semestre 2025 sera en hausse par rapport à 2024", a indiqué Catherine MacGregor.

Le bénéfice net en données publiées s'établit à 2,9 milliards d'euros au premier semestre, en hausse de 50%, en raison d'un impact moindre de la variation de la valeur de ses contrats de couverture.

Le chiffre d'affaires a atteint 38,1 milliards d'euros au premier semestre, en croissance de 1,4%.

Engie disposait d'une capacité totale renouvelables et de stockage de 52,7 gigawatts (GW) à fin juin 2025, en hausse de 1,9 GW par rapport à fin 2024. A cela s'ajoutent 95 projets en cours de construction qui représentent une capacité totale de près de 8 GW.

Le groupe dispose d'un portefeuille de projets renouvelables et de batteries en croissance qui atteint 118 GW à fin juin 2025, soit 3 GW de plus qu'à fin décembre 2024.


ArcelorMittal: les taxes douanières américaines érodent la rentabilité au premier semestre

La cokerie d'ArcelorMittal Bremen sur le site de Bottrop est photographiée depuis la plate-forme d'observation Tetraeder à Bottrop, dans l'ouest de l'Allemagne, le 21 juillet 2025. (AFP)
La cokerie d'ArcelorMittal Bremen sur le site de Bottrop est photographiée depuis la plate-forme d'observation Tetraeder à Bottrop, dans l'ouest de l'Allemagne, le 21 juillet 2025. (AFP)
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  • ArcelorMittal a vu sa rentabilité érodée au premier semestre par les taxes douanières de Donald Trump sur les importations d'acier depuis le Canada ou le Mexiqu
  • ArcelorMittal espère la mise en place effective de mesures de soutien à l'acier en Europe d'ici à la fin de l'année

PARIS: ArcelorMittal, qui a vu sa rentabilité érodée au premier semestre par les taxes douanières de Donald Trump sur les importations d'acier depuis le Canada ou le Mexique, espère la mise en place effective de mesures de soutien à l'acier en Europe d'ici à la fin de l'année.

Malgré un résultat net en hausse de 39% au premier semestre 2025, à 2,6 milliards de dollars, le bénéfice avant intérêt, impôt, dépréciation et amortissement (Ebitda) du deuxième fabricant d'acier mondial a reculé de 10%, à 3,4 milliards de dollars, notamment après l'application de droits de douane de 50% sur l'acier importé aux Etats-Unis depuis le Canada et le Mexique à partir du 4 juin, a expliqué le groupe dans un communiqué jeudi.

Le chiffre d'affaires a aussi pâti du recul de 7,5% des prix moyens de l'acier dans le monde: les ventes se sont amoindries de 5,5%, à 30,72 milliards de dollars au premier semestre.

Jeudi à la Bourse de Paris, après ces annonces, le titre ArcelorMittal a terminé la séance en recul de 2,58%, à 27,52 euros.

Le directeur général du groupe, Aditya Mittal, s'est félicité de la reprise à 100% du site de Calvert aux Etats-Unis, qui devient un site d'acier bas carbone grâce à la construction d'un nouveau four à arc électrique.

En Europe, les tendances à l'accroissement des dépenses publiques sur la défense et les infrastructures "sont un encouragement pour l'industrie de l'acier", a jugé M. Mittal.

Néanmoins, alors que le plan d'action annoncé en mars par la Commission européenne a lancé des "signaux clairs" pour défendre la production européenne d'acier, "nous attendons toujours la concrétisation des mesures de sauvegarde (ou quotas sur les importations d'acier en Europe, NDLR) du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières et sur les prix de l'énergie", a-t-il souligné.

A condition que ces mesures soient mises en place, le groupe prévoit d'investir 1,2 milliard d'euros pour un four à arc électrique sur son site français de Dunkerque (Nord), a-t-il rappelé.

Au total, ArcelorMittal en exploite 29 dans le monde, pour une capacité de production de 21,5 millions de tonnes d'acier recyclé par an, qui augmentera à 23,4 millions de tonnes en 2026 après la mise en service des deux sites espagnols de Gijon et Sestao.


Les bénéfices du CAC 40 en baisse sur fond de guerre commerciale

Cette photographie montre les informations financières de l'indice CAC40 (en bas à gauche), l'indice français qui suit les 40 plus grandes valeurs françaises, affichées sur un immeuble de bureaux dans le quartier financier de La Défense à Paris, le 7 avril 2025. (AFP)
Cette photographie montre les informations financières de l'indice CAC40 (en bas à gauche), l'indice français qui suit les 40 plus grandes valeurs françaises, affichées sur un immeuble de bureaux dans le quartier financier de La Défense à Paris, le 7 avril 2025. (AFP)
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  • Les disparités sont fortes au premier semestre pour les entreprises du CAC 40, qui ont globalement vu leurs bénéfices nets reculer sur fond de guerre commerciale
  • Pour les 37 entreprises sur 40 qui ont publié leurs résultats semestriels jusqu'à jeudi soir inclus, le bénéfice net cumulé tombe à 45 milliards d'euros

PARIS: Automobile et luxe à la peine, aérien, défense et industrie en progression: les disparités sont fortes au premier semestre pour les entreprises du CAC 40, qui ont globalement vu leurs bénéfices nets reculer sur fond de guerre commerciale, d'après un décompte réalisé jeudi par l'AFP.

Pour les 37 entreprises sur 40 qui ont publié leurs résultats semestriels jusqu'à jeudi soir inclus, le bénéfice net cumulé tombe à 45 milliards d'euros, en baisse de 32% par rapport au premier semestre 2024 pour ces mêmes entreprises.

Cette somme des bénéfices nets part du groupe ne prend pas en compte d'éventuels résultats ajustés publiés par les entreprises et exclut Pernod Ricard, dont l'exercice comptable est décalé et donc pas comparable.

Le chiffre d'affaires cumulé est de 725 milliards d'euros, en légère baisse de près de 2%.

La première moitié de 2025 a été marquée par l'incertitude sur les droits de douane imposés par Donald Trump sur les produits européens, et a vu l'euro s'apprécier fortement par rapport à plusieurs devises, notamment face au dollar.

"C'est plutôt l'incertitude qui a pesé" avec le risque "qu'il y ait une guerre commerciale", souligne auprès de l'AFP Lionel Melka, gérant à Swann Capital.

Mais "globalement, (...) les résultats sont plutôt solides", avec, d'un côté, "les secteurs où les attentes étaient basses" comme le luxe ou la consommation, et, de l'autre, "les secteurs qui vont bien — défense, banque — là c'est bon comme prévu".

- Les banques résilientes -

Ce semestre "reste décevant", notamment en comparaison avec la situation américaine, juge pour sa part Christopher Dembik, conseiller en investissement pour Pictet AM: "il y a ce décrochage français et européen qui est perceptible".

D'autre part, "en début d'année, vous aviez un enthousiasme qui était indéniablement exagéré sur les actions européennes. (...) La réalité c'est qu'on n'est pas sur une période de résultats qui est mirobolante", ajoute-t-il.

Les entreprises de l'aérien et de la défense tirent leur épingle du jeu, portées par les tensions géopolitiques: Airbus a vu ses bénéfices bondir de 85%, Safran de 11%.

Les banques s'en sortent bien également et "sont sur des bonnes dynamiques depuis déjà deux, trois ans", relève Christopher Dembik.

Ensemble, BNP Paribas, Crédit Agricole et Société Générale réalisent au total 13,5 milliards d'euros de bénéfices, une hausse de 12%.

En face, le secteur automobile se casse la figure. Renault, notamment, enregistre une lourde perte de plus de 11,2 milliards d'euros, due à l'évolution comptable du traitement de son partenaire japonais Nissan et ses mauvais résultats.

Son concurrent Stellantis a lui publié une lourde perte nette de 2,3 milliards d'euros au premier semestre et son nouveau directeur général, l'Italien Antonio Filosa, a prévenu qu'il faudrait prendre des "décisions difficiles" pour "accélérer" fin 2025.

Le luxe a également souffert, avec un bénéfice net en chute de 46% pour Kering (Gucci, Yves Saint Laurent, Balenciaga, ...) et de 22% pour LVMH (Louis Vuitton, Dior, Celine...).

Le plus gros bénéfice revient d'ailleurs à BNP Paribas, qui vole la vedette à TotalEnergies et LVMH, duo en tête au premier semestre 2024.

- Risque de taux de change -

L'incertitude reste forte pour les troisième et quatrième trimestres, en raison notamment de la force de l'euro qui devrait peser sur les entreprises françaises.

Christopher Dembik table plutôt sur "un risque de taux de change, qu'un risque de droits de douane", et cela "va beaucoup plus se matérialiser dans les résultats à venir", dans les investissements, les importations, etc.

Concernant les droits de douane, malgré les questions en suspens, les entreprises avaient anticipé, "on savait que ce serait un tarif douanier important, donc elles avaient quand même prévu les choses", ajoute l'analyste.

Le président américain Donald Trump et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen ont mis fin à l'attente dimanche, en annonçant un accord prévoyant que les produits européens exportés aux États-Unis soient taxés à 15%.