Réguler Facebook, la mission impossible des politiques

Mais jusqu'à présent, les efforts pour mieux réguler les plateformes omniprésentes du groupe américain ont été aussi lents qu'enthousiastes. (AFP)
Mais jusqu'à présent, les efforts pour mieux réguler les plateformes omniprésentes du groupe américain ont été aussi lents qu'enthousiastes. (AFP)
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Publié le Mercredi 06 octobre 2021

Réguler Facebook, la mission impossible des politiques

  • L'Australie a remporté une victoire en février, forçant les géants de la tech à payer en échange des contenus d'actualité, qui génèrent du trafic
  • La firme californienne fait aussi face à d'autres procédures de moins grande ampleur, portant souvent sur la confidentialité des données des utilisateurs

SAN FRANCISCO: Des sénateurs américains ont de nouveau promis, mardi, d'agir contre le pouvoir colossal de Facebook. Ils y sont vivement encouragés par une lanceuse d'alerte, une ancienne ingénieure du géant des réseaux sociaux venue témoigner au Congrès des dommages sociétaux causés par son ancienne entreprise.


Mais jusqu'à présent, les efforts pour mieux réguler les plateformes omniprésentes du groupe américain ont été aussi lents qu'enthousiastes.

Au Congrès

Réduire le pouvoir économique de Facebook et encadrer sa politique de modération sont les deux principaux enjeux pour les élus américains férus de régulation technologique.


Fin juin, une commission parlementaire a approuvé six projets de lois qui ouvrent la voie à de potentiels démantèlements de Google, Facebook, Apple et Amazon.


Ces nouvelles législations leur interdiraient d'acquérir des concurrents. 


Elles imposeraient aussi la "portabilité" des données, permettant aux utilisateurs de Facebook de quitter plus facilement la plateforme avec leurs contacts et infos personnelles.


Mais aucune date n'a encore été fixée pour un vote et la compatibilité avec le droit de la concurrence actuel n'est pas garantie. "L'élan antitrust va se briser contre un mur", a prédit l'analyste indépendant Dan Ives.


En outre, les élus sont divisés, surtout sur les questions de liberté d'expression.


Beaucoup veulent réformer la "Section 230", une loi de 1996 qui protège les hébergeurs sur internet de poursuites liées aux contenus publiés par des tiers, pierre angulaire des réseaux sociaux.


Mais un accord semble quasiment impossible à trouver entre des démocrates partisans de règles plus strictes contre la désinformation et des républicains qui crient régulièrement à la "censure".


Des Etats à majorité républicaine comme la Floride et le Texas essaient du coup d'adopter des lois pour empêcher les réseaux de policer les propos des candidats politiques.


Les autorités américaines ont néanmoins remporté une petite victoire récemment, grâce aux révélations de la lanceuse d'alerte : Instagram a temporairement suspendu le développement d'une version pour les moins de 13 ans.

Frances Haugen, l'ingénieure déterminée à rendre Facebook moins nocif

Frances Haugen, qui a livré mardi un témoignage accablant contre Facebook devant le Congrès américain, est convaincue de sa nouvelle mission: faire comprendre que le réseau social peut être aussi dangereux que bienfaisant et qu'il doit en conséquence être bridé. 


Cette femme de 37 ans, ancienne membre d'une équipe dédiée à l'intégrité civique au sein du groupe de Mark Zuckerberg, a récolté des milliers de documents internes avant de quitter l'entreprise en mai. 


Confiés notamment au Wall Street Journal, ils ont suffisamment alarmé les élus américains pour qu'ils organisent rapidement une audition sur la protection des enfants en ligne.


Frances Haugen avait déjà dévoilé son visage au grand public dimanche, dans l'émission "60 minutes". 


Mardi, vêtue d'un tailleur noir, cheveux blonds sur les épaules, elle a livré un témoignage clair, calme et incisif devant les parlementaires.


Frances Haugen dit avoir vu un ami proche se perdre dans les méandres des théories conspirationnistes. 


"C'est une chose d'étudier la désinformation, c'en est une autre d'y perdre quelqu'un", a-t-elle raconté dans une interview au Wall Street Journal.


Embauchée chez Facebook en 2019 avec l'espoir d'aider l'entreprise à corriger certains défauts, Frances Haugen s'est de plus en plus inquiétée des choix opérés par le groupe.

Témoigner 
Pour gagner de l'argent grâce aux publicités, explique-t-elle, le réseau social doit faire en sorte que ses membres restent sur la plateforme le plus longtemps possible. Et pour ce faire, les contenus haineux et sources de discorde sont souvent les plus à même de retenir l'attention.  


Facebook a bien mis en place des équipes pour limiter la désinformation au moment des élections et modifié ses algorithmes pour réduire la diffusion de fausses informations.


Mais son équipe, qui s'intéressait aux risques que pouvaient poser certains utilisateurs ou certains contenus à l'approche d'élections, a été démantelée peu après le scrutin présidentiel américain de novembre 2020. 


A peine deux mois plus tard, le 6 janvier, le Congrès américain était envahi par des émeutiers. 


Frances Haugen a alors vraiment commencé à mettre en doute la volonté du groupe de mettre suffisamment de moyens sur la table pour protéger ses membres. Facebook, conclut-elle, préfère privilégier ses profits.


En mars, elle s'installe à Porto Rico en espérant pouvoir continuer à travailler à distance. Les ressources humaines lui disent que ce n'est pas possible. Elle accepte alors de démissionner, a-t-elle expliqué au Wall Street Journal.


Mais il faut témoigner de ce qui se passe à l'intérieur du groupe, croit-elle fermement: les propres recherches de l'entreprise montrent bien que passer du temps sur Instagram peut nuire à la santé mentale des adolescents.


Elle collecte des documents sur Facebook jusqu'au dernier moment, s'attendant à être prise la main dans le sac à tout instant, et contacte en parallèle une ONG spécialisée dans l'aide aux lanceurs d'alerte.

«Je veux sauver» Facebook 
Sur son compte Twitter, tout juste créé, elle se définit comme une "militante pour la surveillance publique des réseaux sociaux". 


Ses premiers mots: "Ensemble nous pouvons créer des réseaux sociaux qui font ressortir le meilleur de nous-mêmes."


Née dans l'Iowa, Frances Haugen raconte sur son site avoir participé tout au long de son enfance, avec ses deux parents, professeurs, aux primaires de l'élection présidentielle, ce qui lui a "instillé un fort sentiment de fierté pour la démocratie et l'importance de la participation civique". 


Elle a assisté plusieurs fois au festival Burning Man, qui se tenait chaque année dans le désert du Nevada avant la pandémie, en tant que volontaire ayant pour rôle d'expliquer les règles aux participants et de les aider à résoudre les conflits.


Ingénieure de formation, elle se définit elle-même comme une spécialiste des algorithmes, une compétence qu'elle a exercée chez plusieurs géants de la tech. Elle a travaillé chez Google, pour l'application de rencontres Hinge, le site de recommandations de commerces Yelp, le réseau Pinterest, et finalement Facebook.


Le 17 mai, peu avant 19h00, elle se déconnecte pour la dernière fois du réseau interne à l'entreprise, a-t-elle raconté au Wall Street Journal. 


Comme pour se justifier, elle laisse une dernière trace écrite: "Je ne déteste pas Facebook", tape-t-elle alors sur son clavier. "J'aime Facebook, je veux sauver" le groupe.

Au tribunal

Le président américain Joe Biden a donné un nouvel élan aux enquêtes et poursuites visant la Silicon Valley, mais là non plus, personne n'attend de procès ou de condamnations rapides.


L'autorité américaine de la concurrence (FTC) et les procureurs de 48 Etats et territoires américains accusent Facebook de monopole illégal, mais leurs plaintes initiales ont été retoquées par un juge fédéral pour manque de précision.


En août, la FTC a revu sa copie. Elle y soutient que le groupe a "illégalement racheté ou enterré les nouveaux innovateurs quand leur popularité devenait une menace existentielle", en référence à Instagram et à la messagerie WhatsApp, acquises en 2012 et 2014.


L'autorité estime que "les réseaux sociaux personnels constituent un type de service en ligne unique et distinct", et un marché contrôlé à plus de 65% par Facebook et Instagram - donc un quasi-monopole.


Facebook assure de son côté que la présidente de la FTC, Lina Khan, réputée pour son hostilité aux monopoles des grandes plateformes technologiques, "cherche à servir ses propres intérêts".


La firme californienne fait aussi face à d'autres procédures de moins grande ampleur, portant souvent sur la confidentialité des données des utilisateurs.

A l'étranger

Bruxelles et Londres ont ouvert en juin des enquêtes contre Facebook pour déterminer si l'entreprise a exercé une concurrence déloyale, et ont prévu de collaborer.


La Commission européenne soupçonne notamment le géant de la publicité numérique d'avoir utilisé des données recueillies auprès d'annonceurs présents sur ses plateformes, afin de les concurrencer sur leurs propres marchés.


En matière de régulation, le vieux continent a pris une longueur d'avance avec l'entrée en vigueur en 2018 du règlement européen sur la protection des données (RGPD), qui encadre la récolte des informations personnelles à des fins publicitaires, le moteur économique de Facebook. Une loi ensuite copiée par certains Etats américains, comme la Californie.


Du côté de la modération, la France oblige depuis l'été 2020 les plateformes à retirer sous 24 heures les contenus "manifestement" illicites.


L'Australie, elle, a remporté une victoire en février, forçant les géants de la tech à payer en échange des contenus d'actualité, qui génèrent du trafic. Les médias australiens percevront ainsi des millions de dollars de Google et Facebook.


En revanche, le projet de plusieurs pays européens de créer une taxe numérique internationale patine, notamment à cause de la réticence des Etats-Unis.


Allemagne: l'auteur syrien de l'attaque au couteau de Solingen condamné à perpétuité

Au premier soir du festival d'été de Solingen, l'agresseur avait frappé au hasard devant la scène où se déroulait un concert, visant "le cou et le haut du corps" des spectateurs, "principalement par derrière", selon l'accusation.  Il a ensuite pris la fuite, avant de se rendre le lendemain aux autorités. Le même jour, l'organisation Etat Islamique a revendiqué l'attaque. (AFP)
Au premier soir du festival d'été de Solingen, l'agresseur avait frappé au hasard devant la scène où se déroulait un concert, visant "le cou et le haut du corps" des spectateurs, "principalement par derrière", selon l'accusation. Il a ensuite pris la fuite, avant de se rendre le lendemain aux autorités. Le même jour, l'organisation Etat Islamique a revendiqué l'attaque. (AFP)
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  • Le condamné est originaire de la région de Deir Ezzor, dans l'est de la Syrie, bastion de cette organisation jihadiste pendant la guerre civile ayant démarré en 2011
  • Issa al Hasan était passé aux aveux à l'ouverture de son procès fin mai, admettant dans une déclaration lue par son avocat avoir "commis un crime grave"

DUSSELDORF: L'auteur syrien de l'attaque jihadiste au couteau dans la ville allemande de Solingen, qui avait fait trois morts lors de festivités en août 2024, a été condamné à la prison à perpétuité mercredi par le tribunal de Düsseldorf.

Cet attentat, et d'autres commis par des ressortissants étrangers, avait pesé sur les élections législatives de l'hiver suivant, qui ont vu un essor record du parti d'extrême droite Alternative pour l'Allemagne (AfD).

Le tribunal a retenu la motivation islamiste de l'attaque, revendiquée par l'organisation jihadiste Etat islamique (EI), qui avait également fait huit blessés graves.

Selon le président du tribunal, Issa al Hasan, âgé de 27 ans, "approuvait les objectifs de l'État islamique" et a agi "en raison de ses convictions islamistes radicales".

Il voulait "répondre à l'appel des dirigeants de l'EI à commettre des attentats en Europe de l'Ouest", et ce afin notamment de "se venger pour les combattants de l'EI morts au combat", a-t-il aussi déclaré.

Le condamné est originaire de la région de Deir Ezzor, dans l'est de la Syrie, bastion de cette organisation jihadiste pendant la guerre civile ayant démarré en 2011.

Issa al Hasan était passé aux aveux à l'ouverture de son procès fin mai, admettant dans une déclaration lue par son avocat avoir "commis un crime grave".

"J'ai tué et blessé des innocents, pas des infidèles", avait-il déclaré.

En plus de la prison à vie, le tribunal a retenu la reconnaissance de la "gravité particulière de sa culpabilité", ce qui rend peu probable une éventuelle libération.

C'est la peine qu'avait requise le parquet fédéral, compétent pour les affaires de terrorisme.

Failles du règlement 

Au premier soir du festival d'été de Solingen, l'agresseur avait frappé au hasard devant la scène où se déroulait un concert, visant "le cou et le haut du corps" des spectateurs, "principalement par derrière", selon l'accusation.

Il a ensuite pris la fuite, avant de se rendre le lendemain aux autorités. Le même jour, l'organisation Etat Islamique a revendiqué l'attaque.

Celle-ci avait aussi mis en lumière les failles du règlement européen de Dublin, selon lequel le premier pays de l'Union dans lequel est entré un étranger est responsable de sa demande d'asile.

Issa Al Hassan se trouvait en situation illégale en Allemagne et aurait dû être expulsé vers la Bulgarie où son arrivée avait été enregistrée en 2022, selon les lois européennes.

Mis sous pression par l'extrême droite et les conservateurs, le gouvernement de centre-gauche d'Olaf Scholz avait, après l'attentat, durci la législation sur le port de couteaux et rétabli des contrôles à l'ensemble de ses frontières pour lutter contre l'immigration illégale.

L'immigration et la sécurité ont été des thèmes majeurs de la campagne législative qui a suivi.

Selon un sondage pour le compte de la chaîne publique WDR, près d'un habitant de Solingen sur quatre assure avoir durci ses positions sur l'immigration de réfugiés après l'attaque.

Vent favorable pour l'AfD 

Depuis un an, d'autres attaques au couteau ou à la voiture-bélier ont choqué l'Allemagne et favorisé les discours anti-immigration.

Pour les attaques au couteau visant un rassemblement anti-Islam à Mannheim (ouest), qui a fait un mort en mai 2024, et celle visant un groupe d'écoliers, qui avait fait deux morts en janvier 2025 à Aschaffenbourg (sud), les suspects sont des ressortissants afghans.

Si les conservateurs (CDU) du chancelier Friedrich Merz ont remporté les législatives de février, le scrutin a été marqué par le score record du parti d'extrême droite AfD, arrivé deuxième avec un cinquième des voix.

Aujourd'hui, la formation anti-immigration fait quasiment jeu égal avec la CDU dans les sondages.

Pour enrayer cette ascension, Friedrich Merz a opéré un nouveau tour de vis sur la politique migratoire, instaurant notamment le refoulement des demandeurs d'asile aux frontières.

En juillet, sa coalition a organisé le rapatriement de 81 condamnés afghans dans leur pays, malgré la présence au pouvoir des talibans. L'initiative a aussitôt été dénoncée par l'ONU.


Deal avec Trump: von der Leyen attendue au tournant au Parlement européen

Le président américain Donald Trump (à droite) et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen (à gauche) s'adressent à la presse après avoir convenu d'un accord commercial entre les deux économies à l'issue de leur rencontre, à Turnberry, au sud-ouest de l'Écosse, le 27 juillet 2025. (AFP)
Le président américain Donald Trump (à droite) et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen (à gauche) s'adressent à la presse après avoir convenu d'un accord commercial entre les deux économies à l'issue de leur rencontre, à Turnberry, au sud-ouest de l'Écosse, le 27 juillet 2025. (AFP)
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  • Les eurodéputés attendent des explications de la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen mercredi à Strasbourg sur l'accord commercial avec Donald Trump

STRASBOURG: Les eurodéputés attendent des explications de la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen mercredi à Strasbourg sur l'accord commercial avec Donald Trump qui laisse nombre d'entre eux amers.

Elle devrait aussi s'exprimer sur la situation géopolitique particulièrement tendue, après des opérations de la Pologne d'interception de drones "hostiles" entrés dans son espace aérien au cours d'une attaque russe contre l'Ukraine voisine.

Sur l'accord commercial avec Trump, la cheffe de l'exécutif européen aura fort à faire pour rassurer les parlementaires lors de ce traditionnel "discours sur l'état de l'Union" durant lequel elle doit présenter ses grandes orientations politiques.

"C'est une rentrée difficile. L'Europe est perçue comme assez faible", convient une source au sein de la Commission. Mais "sur Trump, le juge de paix, ce n'est pas l'accord, c'est l'après. S'il ne respecte pas l'accord, il faudra être très dur", insiste ce responsable, sous couvert d'anonymat.

La fébrilité reste de mise à Strasbourg comme à Bruxelles plus d'un mois après la poignée de main entre Donald Trump et Ursula von der Leyen.

D'autant que le milliardaire américain multiplie les menaces contre la législation européenne sur le numérique, dont l'amende géante infligée par la Commission européenne à Google vendredi, qu'il a fustigée.

Ursula von der Leyen aura "probablement un ton plus offensif" pour "essayer de faire passer la pilule, de vendre son accord" aux eurodéputés, grince Marina Mesure, membre du groupe de la gauche radicale.

- "Humiliation" -

Le Parlement européen a très mal accueilli ce "deal" avec Donald Trump scellé fin juillet: 15% de taxes américaines avec des exceptions pour des produits de l'UE comme l'aéronautique, assorties de promesses de l'Europe d'acheter massivement de l'énergie américaine et de réduire des taxes sur une série de produits made in USA.

"Tout le monde s'accorde sur le fait que c'est un mauvais deal" qui "traduit la faiblesse de l'Europe", tranche la cheffe du groupe centriste Valérie Hayer.

Mais Ursula von der Leyen avait un "mandat" d'Etats membres comme l'Allemagne et l'Italie, et les industriels voulaient de la prévisibilité pour les mois qui viennent, reconnaît-elle.

Plus de la moitié des Européens (52%) ont ressenti de "l'humiliation" avec cet accord, selon un sondage publié dans le média Le Grand Continent et réalisé par l'institut Cluster17 dans cinq pays.

Les eurodéputés devront se prononcer dans les semaines qui viennent sur l'un des volets de l'accord, la baisse des taxes européennes. Les centristes entretiennent le suspense et les sociaux-démocrates menacent de voter contre.

L'argument "selon lequel un mauvais accord vaut mieux que rien du tout est totalement inacceptable", a tonné mardi la cheffe du groupe social-démocrate, Iratxe Garcia Pérez.

La droite, dont est issue Ursula von der Leyen, assume quant à elle un vote en faveur de cet accord, même à contrecœur. Les droits de douane, "ça ne nous fait pas plaisir", mais il faut de la stabilité et s'adapter à la "réalité" voulue par le président américain, a défendu le chef du Parti populaire européen (PPE), Manfred Weber.

Même position chez les eurodéputés italiens du parti de Giorgia Meloni, qui siègent dans l'un des trois groupes d'extrême droite du Parlement.

En matière diplomatique, Ursula von der Leyen sera également très attendue sur la guerre à Gaza, au lendemain de raids israéliens au Qatar visant des responsables du Hamas, mouvement islamiste palestinien.

Depuis des mois, l'Union européenne semble paralysée diplomatiquement tant ses divisions sont nombreuses.

Les dissonances se manifestent jusqu'au sein de la Commission, où la socialiste espagnole Teresa Ribera a qualifié la situation à Gaza de "génocide", déplorant l'inaction des 27 Etats membres.

"Débattre des mots divise l'Europe. Ca ne nous aide pas, ça ne nous apporte pas plus de crédibilité", lui a rétorqué Manfred Weber.

Sur le dossier ukrainien, Ursula von der Leyen ne manquera pas à l'inverse de souligner la mobilisation des Européens.

Une série de pays dont la France et l'Allemagne ont promis des garanties de sécurité à Kiev si le conflit avec la Russie s'arrête: un soutien militaire au sol, en mer ou dans les airs afin de dissuader Moscou d'attaquer à nouveau.

En attendant, l'UE prépare un 19e paquet de sanctions, qui pourrait cibler certains pays achetant des hydrocarbures russes, selon des diplomates à Bruxelles.


La flottille pour Gaza déterminée à partir malgré une «attaque de drone» au large de Tunis

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  • La Garde nationale tunisienne, l'équivalent de la gendarmerie, a elle démenti toute frappe de drone, assurant que selon ses premières constatations, "aucun" engin n'avait été détecté
  • Elle a jugé possible que le feu ait été déclenché par un mégot de cigarette

TUNIS: La flottille pour Gaza s'est dite mardi plus déterminée que jamais à mettre le cap vers le territoire palestinien assiégé par Israël, malgré "une attaque de drone" dont elle affirme avoir été victime dans la nuit au large de Tunis.

Vidéos à l'appui, la "Global Sumud Flotilla", qui doit prendre la mer avec des militants et de l'aide humanitaire afin de "briser le blocus israélien", a dit qu'un de ses bateaux avait été visé par un drone alors qu'il était ancré au large de Sidi Bou Saïd, près de Tunis.

La Garde nationale tunisienne, l'équivalent de la gendarmerie, a elle démenti toute frappe de drone, assurant que selon ses premières constatations, "aucun" engin n'avait été détecté. Elle a jugé possible que le feu ait été déclenché par un mégot de cigarette.

La flottille a affirmé que les six personnes à bord du "Family" étaient saines et sauves, dénonçant "des actes d'agression visant à faire dérailler (sa) mission".

Charge explosive 

Interrogé par l'AFP sur l'origine de l'attaque rapportée par la flottille, le militant palestinien Saif Abukeshek a indirectement impliqué Israël.

"Aucune partie n'a intérêt à empêcher la flottille (de partir), à part l'Etat occupant", a-t-il déclaré.

L'AFP a sollicité l'armée israélienne pour un commentaire, sans réponse dans l'immédiat.

La Belgique a réclamé une enquête "complète et transparente" sur l'incident.

Le militant portugais Miguel Duarte, qui se trouvait à bord du "Family", a affirmé mardi à la presse dans le centre-ville de Tunis avoir vu un drone lâcher une charge explosive.

"J'étais sur le pont, à l'arrière du navire, et j’ai entendu un drone. Je suis sorti (...) et j'ai vu un drone qui planait à environ 3 ou 4 mètres au-dessus de ma tête", a-t-il décrit.

"J'ai appelé les autres membres de l'équipage. Puis nous avons vu le drone se déplacer vers l'avant du pont. Il est resté quelques secondes au-dessus d'un paquet de gilets de sauvetage, puis a lâché une bombe. La bombe a explosé et il y a eu de grandes flammes, un incendie s'est déclaré immédiatement", a-t-il ajouté.

Dans l'une des vidéos publiées par la flottille, présentée comme ayant été prise depuis un autre bateau, on voit une masse lumineuse frapper un navire.

Dans une autre vidéo, provenant d'une caméra de surveillance du bateau lui-même selon la flottille, on entend un vrombissement. Puis on peut voir un homme lever les yeux, s'exclamer et reculer avant qu'une explosion ne se fasse entendre. Un éclair de lumière illumine ensuite la zone.

"Le message est très clair: nous restons soudés et déterminés à partir demain" mercredi, a dit à Tunis l'eurodéputée franco-palestinienne Rima Hassan, tandis qu'un organisateur tunisien, Ghassen Henchiri, affirmait que les militants étaient "plus déterminés (que jamais) à briser le blocus contre Gaza".

"Sûreté de l'Etat" 

Interrogés par la presse sur la version de l'incident donnée par les autorités tunisiennes, les membres de la flottille ont dit préférer ne pas s'exprimer en raison de la sensibilité du sujet.

"Nous n'allons pas présenter de données sur cette affaire (...) qui touche la sûreté de l'Etat", a ainsi dit le militant tunisien Wael Naouar.

"S'il est confirmé qu'il s'agit d'une attaque de drone, ce serait (...) une agression contre la Tunisie et la souveraineté tunisienne", a dit dans la nuit la rapporteure de l'ONU Francesca Albanese, qui vit à Tunis, devant des journalistes au port.

Le port de Sidi Bou Saïd se trouve non loin du palais présidentiel de Carthage.

La bande de Gaza est le théâtre d'une guerre dévastatrice, déclenchée par l'attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien Hamas sur le sol israélien le 7 octobre 2023.

Les Nations unies ont déclaré en août l'état de famine à Gaza, avertissant que 500.000 personnes se trouvent en situation "catastrophique".

Des navires de la Global Sumud Flotilla ("sumud" signifie "résilience" en arabe) sont arrivés ces derniers jours en Tunisie d'où ils doivent partir cette semaine pour Gaza.

Ils avaient initialement prévu d'atteindre le territoire palestinien à la mi-septembre afin d'y acheminer de l'aide humanitaire et "briser le blocus israélien", après deux tentatives bloquées par Israël en juin et juillet.