Migrants: le Mexique, le «mur» des Etats-Unis qui s'ouvre difficilement

Des migrants haïtiens font la queue pour s'inscrire auprès de la Commission nationale pour les réfugiés (COMAR) à Tijuana, le 6 octobre 2021. (Photo, AFP)
Des migrants haïtiens font la queue pour s'inscrire auprès de la Commission nationale pour les réfugiés (COMAR) à Tijuana, le 6 octobre 2021. (Photo, AFP)
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Publié le Jeudi 07 octobre 2021

Migrants: le Mexique, le «mur» des Etats-Unis qui s'ouvre difficilement

  • Couloir vers la frontière sud des Etats-Unis, le Mexique a enregistré 90 314 demandes d'asile de janvier à septembre
  • Le Mexique a aussi déjà expulsé 54 000 migrants en 2021, d'après le directeur de l'ONG Human Rights Watch

MEXICO: Face à la fermeture des Etats-Unis, le Mexique, qui recevra vendredi le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken, mène aussi une politique migratoire très ferme envers les Haïtiens qui viennent augmenter les flux habituels de ressortissants d'Amérique centrale.

Couloir vers la frontière sud des Etats-Unis, le Mexique a enregistré 90 314 demandes d'asile de janvier à septembre, selon les derniers chiffres de la Commission d'aide aux réfugiés (Comar, organisme officiel).

C'est bien davantage que sur l'ensemble de l'année 2019 (70 406), avant la pandémie qui a fait chuté le nombre de candidats au statut de réfugiés en 2020 (41 059).

Comme les autres années, le Honduras arrive en tête (31 884 demandes), devant les demandeurs d'asile originaires d'Haïti, dont le nombre a fortement augmenté (26 007 en 2021, contre 5 954 en 2020).

Le Mexique a aussi déjà expulsé 54 000 migrants en 2021, d'après le directeur de l'ONG Human Rights Watch (HRW) pour l'Amérique latine, José Miguel Vivanco.

"Nous ne voulons pas que le Mexique soit un camp de migrants", a prévenu fin septembre le président de gauche Manuel Lopez Obrador.

Le chef de l'Etat s'exprimait alors que des milliers d'Haïtiens ont tenté en vain de gagner les Etats-Unis via le Mexique.

Déjà présents en Amérique latine, le plus souvent au Brésil et au Chili, ils avaient mal interprété une annonce de Washington sur une extension des délais de régularisation, selon le ministre mexicain des Affaires étrangères, Marcelo Ebrard. 

Or cette dernière ne s'adressait qu'à leurs compatriotes déjà présents aux Etats-Unis.

M. Ebrard a laissé entendre que 13 255 personnes pourraient bénéficier du statut de réfugiés au Mexique.

"Nous autres les Haïtiens nous rêvons d'aller aux Etats-Unis", confirme Joseph Yorel, 34 ans, rencontré fin septembre avec sa femme et son bébé dans un refuge à Monterrey, la grande ville industrielle du nord. 

"Mais si je trouve du travail pour vivre au Mexique, pour subvenir aux besoins de ma famille, je n'ai pas de problème pour rester ici", ajoutait cet Haïtien arrivé du Chili après avoir traversé une dizaine de pays.

«Le sale travail des Etats-Unis»

Mais ce rêve mexicain serait-il hors d'atteinte lui aussi ? 

Mercredi, le Mexique a rapatrié 129 migrants haïtiens vers Port-au-Prince, le deuxième vol de ce genre depuis fin septembre.

Les autorités mexicaines ont procédé à ce vol de rapatriement "dans le respect des droits de l'homme et en accord avec les autorités consulaires d'Haïti", a assuré l'Institut national des migrations (INM).

Avant leur départ, des migrants ont protesté, d'après des témoins. M. Vivanco de HRW affirme, vidéo à l'appui, qu'un Haïtien a tenté de sauter depuis la passerelle de l'avion qui est parti du Chiapas (sud), près de la frontière avec le Guatemala.

"Nous voulons qu'on s'attaque au problème de fond", proclame le président Lopez Obrador, dans une allusion à la pauvreté des pays d'origine, en plaçant Washington face à ses responsabilités.

"Les Etats-Unis n'investissent pas en Amérique latine, dans les Caraïbes, pour soutenir les peuples pauvres", déplore-t-il.

Le président mexicain demande notamment à son voisin d'abandonner "l'initiative de Mérida" lancée en 2008 par Washington pour financer les efforts du Mexique dans la lutte contre le narcotrafic. Trois milliards de dollars auraient depuis été investis depuis. 

À la place, "nous voulons une aide au développement (...). Nous sollicitons l'aide des Etats-Unis, mais pour les pays d'Amérique centrale", a répété M. Lopez Obrador à la veille de la visite d'Antony Blinken.

En matière migratoire, le Mexique fait le "sale travail pour les Etats-Unis", relevait dès 2019 l'intellectuel et ex-ministre des Affaires étrangères Jorge G. Castaneda, sous la présidence de Donald Trump (2017-2021) et de sa volonté d'élever un mur à la frontière.

Sous Joe Biden comme sous Donald Trump, les Etats-Unis souhaitent toujours "que le Mexique soit une espèce de mur face aux migrants", estime le politologue Gaspard Estrada, spécialiste de l'Amérique latine. 

"Le Mexique est surtout un pays qui expulse des migrants. Il répond aux désiderata de l'administration démocrate", souligne-t-il.


A l'ONU, l'enquêtrice en chef sur Gaza a encore espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés

Navi Pillay, la présidente de la commission d'enquête indépendante de l'ONU qui a accusé cette semaine Israël de commettre un génocide à Gaza, ne perd pas espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés. (AFP)
Navi Pillay, la présidente de la commission d'enquête indépendante de l'ONU qui a accusé cette semaine Israël de commettre un génocide à Gaza, ne perd pas espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés. (AFP)
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  • Selon les enquêteurs, le président israélien, Isaac Herzog, le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, et l'ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, ont "incité à commettre un génocide"
  • Israël a "rejeté catégoriquement" ce "rapport biaisé et mensonger"

GENEVE: Navi Pillay, la présidente de la commission d'enquête indépendante de l'ONU qui a accusé cette semaine Israël de commettre un génocide à Gaza, ne perd pas espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés.

"La justice est lente", a affirmé l'ancienne juge sud-africaine, dans un entretien à l'AFP.

Mais "comme l'a dit (Nelson) Mandela, cela semble toujours impossible, jusqu'à ce qu'on le fasse. Je considère qu'il n'est donc pas impossible qu'il y ait des arrestations et des procès" à l'avenir, a-t-elle ajouté.

La commission d'enquête, qui ne s'exprime pas au nom de l'ONU, a établi qu'Israël commet un génocide à Gaza depuis le début de la guerre déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas du 7-Octobre.

Selon les enquêteurs, le président israélien, Isaac Herzog, le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, et l'ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, ont "incité à commettre un génocide".

Israël a "rejeté catégoriquement" ce "rapport biaisé et mensonger".

La Cour pénale internationale (CPI) avait déjà émis des mandats d'arrêt contre MM. Netanyahu et Gallant.

Mme Pillay reconnaît que la CPI dépend des Etats pour la mise en œuvre des mandats d'arrêt car elle n'a "ni shérif, ni forces de police".

Mais elle veut y croire, faisant une comparaison : "Je n'aurais jamais pensé que l'apartheid prendrait fin de mon vivant".

"Tellement douloureux" 

Jeune avocate d'origine indienne dans l'Afrique du Sud de l'apartheid, devenue juge et Haute-Commissaire aux droits de l'homme à l'ONU (2008-2014), Mme Pillay, 83 ans, a l'art de traiter des dossiers difficiles.

Sa carrière l'a menée des cours sud-africaines, où elle a défendu les activistes anti-apartheid et obtenu des droits cruciaux pour les prisonniers politiques, au Tribunal pénal international pour le Rwanda, en passant par la CPI.

Sa mission est des plus ardues depuis qu'elle préside, depuis sa création en 2021, la commission chargée par le Conseil des droits de l'homme de l'ONU d'enquêter sur les atteintes aux droits dans les territoires palestiniens et en Israël.

Elle déplore d'avoir été qualifiée d'"antisémite" depuis et dénonce les appels sur les réseaux sociaux de ceux qui réclament que les Etats-Unis la sanctionnent, comme Washington l'a fait pour une rapporteure de l'ONU, des juges de la CPI et des ONG palestiniennes.

Mais le plus dur, pour elle et son équipe, est de visionner les vidéos provenant de Gaza.

"Nous nous inquiétons pour notre personnel. Nous les surmenons et c'est traumatisant ces vidéos", dit-elle, citant "des violences sexuelles contre les femmes" et "les médecins qui sont dénudés par l'armée".

"C'est tellement douloureux" à regarder même si "on ne peut pas comparer notre souffrance à celle de ceux qui l'ont vécue", poursuit-elle.

Alors qu'elle présidait le Tribunal pénal international pour le Rwanda, des vidéos de civils abattus ou torturés l'ont aussi "marqué à vie".

Selon elle, la comparaison entre le Rwanda et Gaza ne s'arrête pas là : "Je vois des similitudes. Ce sont les mêmes méthodes".

Du Rwanda à Gaza 

"Dans le cas du Rwanda, c'était le groupe des Tutsi qui était visé. Ici, tous les éléments de preuve montrent que c'est le groupe palestinien qui est visé", dit-elle.

Elle mentionne aussi les propos de dirigeants israéliens qui "déshumanisent" les Palestiniens en les comparant à des "animaux". Comme lors du génocide rwandais, lorsque les Tutsi étaient "traités de cafards", ce qui revient à dire qu'"il est acceptable de les tuer", dénonce-t-elle.

Mme Pillay a indiqué qu'à l'avenir la commission entendait se pencher aussi sur des crimes supposés commis par d'autres "individus", expliquant qu'une grande partie des preuves a été publiée par les soldats israéliens eux-mêmes sur les réseaux sociaux.

Elle déplore toutefois que, faute de financements, la commission n'ait pas pu encore examiner si certains Etats qui fournissent de l'armement à Israël pouvaient être considérés complices.

Un travail qu'elle laisse à son successeur. Elle quitte la commission le 3 novembre en raison de son âge et de problèmes de santé.

Avant cela, elle doit présenter un dernier rapport devant l'Assemblée générale de l'ONU à New York. "J'ai déjà un visa", confie-t-elle.


Gaza: Bruxelles propose de taxer des biens importés d'Israël dans l'UE et de sanctionner deux ministres

La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu.  "Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas. (AFP)
La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu. "Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas. (AFP)
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  • L'exécutif européen avait déjà proposé en août 2024 de sanctionner ces deux ministres. Une tentative vaine, faute d'accord au sein des 27 Etats membres
  • Ces sanctions pour être adoptées requièrent l'unanimité des pays de l'UE

BRUXELLES: La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu.

"Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas.

Les mesures commerciales devraient, si elles étaient adoptées par les pays de l'UE, renchérir de quelque 227 millions d'euros le coût de certaines importations israéliennes, principalement d'origine agricole.

La Commission européenne a également proposé de sanctionner deux ministres israéliens d'extrême droite, Itamar Ben-Gvir, chargé de la Sécurité nationale, et Bezalel Smotrich chargé des Finances, selon un responsable de l'UE.

L'exécutif européen avait déjà proposé en août 2024 de sanctionner ces deux ministres. Une tentative vaine, faute d'accord au sein des 27 Etats membres. Ces sanctions pour être adoptées requièrent l'unanimité des pays de l'UE.

"Tous les États membres conviennent que la situation à Gaza est intenable. La guerre doit cesser", a toutefois plaidé mercredi Mme Kallas. Ces propositions seront sur la table des représentants des 27 Etats membres dès mercredi.

Les sanctions dans le domaine commercial ne nécessitent que la majorité qualifiée des Etats membres. Mais là encore, un accord sera difficile à obtenir, jugent des diplomates à Bruxelles.

Des mesures beaucoup moins ambitieuses, également présentées par la Commission européenne il y a quelques semaines, n'avaient pas trouvé de majorité suffisante pour être adoptées. Avait notamment fait défaut le soutien de pays comme l’Allemagne ou l'Italie.

Les exportations israéliennes vers l'UE, son premier partenaire commercial, ont atteint l'an dernier 15,9 milliards d'euros.

Seuls 37% de ces importations seraient concernés par ces sanctions, si les 27 devaient donner leur feu vert, essentiellement dans le secteur agro-alimentaire.


Trump s'en prend à des magistrats après l'assassinat de Charlie Kirk

Cette capture d'écran provenant de la diffusion en direct du tribunal de l'Utah montre Tyler Robinson, suspect dans le meurtre du militant politique Charlie Kirk, assistant à une audience à distance depuis sa cellule de prison à Provo, dans l'Utah, le 16 septembre 2025. (AFP)
Cette capture d'écran provenant de la diffusion en direct du tribunal de l'Utah montre Tyler Robinson, suspect dans le meurtre du militant politique Charlie Kirk, assistant à une audience à distance depuis sa cellule de prison à Provo, dans l'Utah, le 16 septembre 2025. (AFP)
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  • Dans le viseur du locataire de la Maison Blanche, sur son réseau Truth, se trouvent deux de ses cibles privilégiées : l'ex-procureur spécial Jack Smith, et le juge Juan Merchan qui avait présidé son procès pour des paiements cachés à une star du X
  • Donald Trump reproche à Jack Smith d'avoir ouvert il y a quelques années une enquête sur Turning Point, le mouvement créé par l'influenceur ultraconservateur américain Charlie Kirk, assassiné le 10 septembre

WASHINGTON: Le président américain Donald Trump a de nouveau stigmatisé mercredi des magistrats qui l'avaient poursuivi et jugé durant le mandat de Joe Biden, prenant prétexte du récent assassinat de l'influenceur ultraconservateur Charlie Kirk.

Dans le viseur du locataire de la Maison Blanche, sur son réseau Truth, se trouvent deux de ses cibles privilégiées : l'ex-procureur spécial Jack Smith, et le juge Juan Merchan qui avait présidé son procès pour des paiements cachés à une star du X.

Donald Trump reproche à Jack Smith d'avoir ouvert il y a quelques années une enquête sur Turning Point, le mouvement créé par l'influenceur ultraconservateur américain Charlie Kirk, assassiné le 10 septembre.

"Pourquoi le merveilleux Turning Point a-t-il été mis sous ENQUÊTE par le +Dérangé+ Jack Smith et l'administration Biden Corrompue et Incompétente ?", s'interroge Donald Trump dans un message sur Truth.

"Ils ont essayé de forcer Charlie, ainsi que de nombreuses autres personnes et mouvements, à cesser leurs activités. Ils ont instrumentalisé le ministère de la Justice contre les opposants politiques de Joe Biden, y compris MOI!", s'offusque-t-il encore.

Jack Smith, lui-même visé par une enquête administrative depuis le retour au pouvoir de Donald Trump, avait été nommé procureur spécial en 2022.

Il avait lancé des poursuites fédérales contre Donald Trump, pour tentatives illégales d'inverser les résultats de l'élection de 2020 et rétention de documents classifiés après son départ de la Maison Blanche.

Les poursuites avaient été abandonnées après la réélection de Trump, en vertu de la tradition consistant à ne pas poursuivre un président en exercice. Jack Smith avait ensuite démissionné du ministère de la Justice.

Sans jamais le citer nommément, le président Trump s'en prend également sur le réseau Truth à Juan Merchan, qui a présidé le procès Stormy Daniels. Le président avait été reconnu coupable de 34 chefs d'accusation, pour des paiements cachés de 130.000 dollars à l'ex-star du X.

Donald Trump exprime le souhait que le juge "corrompu" paie "un jour un prix très élevé pour ses actions illégales".

Depuis l'assassinat de Charlie Kirk, le camp républicain redouble de véhémence contre les démocrates et organisations progressistes, accusés de promouvoir la violence politique.

"La gauche radicale a causé des dégâts énormes au pays", a affirmé le président républicain mardi, avant son départ au Royaume-Uni. "Mais nous y remédions".

Selon le Washington Post, un élu républicain du Wisconsin a déposé une proposition de loi visant à bloquer les fonds fédéraux aux organisations employant des personnes "qui tolèrent et célèbrent la violence politique".

Le New York Times précise pour sa part que sont notamment dans le viseur l'Open Society Foundation du milliardaire George Soros ainsi que la Ford Foundation, qui toutes deux financent des organisations de gauche.