A six mois de la présidentielle, le duel Macron-Le Pen vacille

Le tapis rouge est déroulé pour l'arrivée du président italien à l'Elysée à Paris le 5 juillet 2021. Ludovic MARIN / AFP
Le tapis rouge est déroulé pour l'arrivée du président italien à l'Elysée à Paris le 5 juillet 2021. Ludovic MARIN / AFP
Short Url
Publié le Vendredi 08 octobre 2021

A six mois de la présidentielle, le duel Macron-Le Pen vacille

  • À six mois de la présidentielle, l'irruption du trouble-fête Eric Zemmour dans la course à l'Elysée sème le doute sur le remake annoncé du duel de 2017 entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen
  • Près d'une trentaine de candidats se bousculent sur la ligne de départ, dont une partie seulement obtiendra le précieux sésame des 500 parrainages pour l'élection à la présidence de la République

PARIS : À six mois de la présidentielle, l'irruption du trouble-fête Eric Zemmour dans la course à l'Elysée sème le doute sur le remake annoncé du duel de 2017 entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen.

Près d'une trentaine de candidats se bousculent sur la ligne de départ, dont une partie seulement obtiendra le précieux sésame des 500 parrainages pour l'élection à la présidence de la République, prévue le 10 et 24 avril prochains, même si Emmanuel Macron et Eric Zemmour ne se sont pas encore officiellement déclarés. 

A ce stade, les sondages confirment les uns après les autres la présence d'Emmanuel Macron au second tour, qu'elles que soient les configurations, et pratiquement tous le donnent à nouveau vainqueur. 

Déjà une trentaine de candidats pour la présidentielle

Au moins une trentaine de candidats à la présidentielle de 2022, poids lourds de la politique ou "simples citoyens", se sont déjà déclarés, mais la liste définitive, qui devrait être réduite d'ici là, ne sera connue qu'au printemps.

Pour pouvoir se présenter au premier tour, ces candidats doivent en effet obtenir l'investiture de leur parti pour ceux qui s'inscrivent dans ce schéma, et le soutien de 500 élus issus de 30 départements et collectivités différents. Ces parrainages d'élus doivent ensuite être validés par le Conseil constitutionnel.

Les candidats non déclarés

Ils ne sont pas encore officiellement dans la course, mais font déjà beaucoup parler d'eux: 

- Le président sortant Emmanuel Macron n'a toujours pas annoncé son intention de briguer un second mandat. Il caracole en tête des sondages. 

- Le polémiste Eric Zemmour a fait une irruption tonitruante dans la campagne depuis la rentrée. Il maintient le doute sur sa candidature. Un sondage l'a placé cette semaine au second tour. 

A gauche, les sept compagnons

A gauche, ils sont nombreux à s'être déjà lancés dans la course, mais aucun d'entre eux ne parvient pour l'instant à décoller:

- L'eurodéputé EELV Yannick Jadot a remporté fin septembre la primaire des Verts, le seul parti qui ait choisi ce système pour désigner son candidat.

- Pour la France insoumise (LFI), le suspense est levé depuis bientôt une année: Jean-Luc Mélenchon sera son candidat. 

- La maire PS de Paris Anne Hidalgo a annoncé sa candidature début septembre, mais le maire du Mans Stéphane Le Foll maintient sa candidature à l'investiture du PS pour la présidentielle.

- L'ex-ministre socialiste Arnaud Montebourg a choisi de se lancer hors parti.

- Le PC lance son propre candidat, le secrétaire national Fabien Roussel, sans soutenir le candidat LFI comme lors des deux dernières présidentielles.

- Philippe Poutou, le conseiller municipal Nouveau Parti anticapitaliste et syndicaliste.

- La porte-parole de Lutte ouvrière Nathalie Arthaud.

A droite, un congrès pour choisir

Le parti Les Républicains n'a toujours pas de candidat à l'Elysée. Les militants le choisiront lors d'un congrès le 4 décembre. La date limite de dépôt des candidatures, le 13 octobre, mais ils sont déjà nombreux à avoir annoncé leur candidature soit au congrès soit directement à la présidentielle.

- Le président des Hauts-de France (ex-LR) Xavier Bertrand s'est lancé seul dans la course à l'Elysée ce printemps. Il n'a toujours pas annoncé s'il se soumettrait ou pas au congrès de LR. 

- La présidente ex-LR de l'Ile-de-France Valérie Pécresse a choisi de se soumettre au congrès de décembre, tout comme l'ancien négociateur pour le Brexit Michel Barnier, le député LR Eric Ciotti et le maire LR de La Garenne-Colombes Philippe Juvin.

- Le président de Debout la France Nicolas Dupont-Aignan, souverainiste de droite et ex-allié de Marine Le Pen, a lancé sa campagne dimanche. 

Extrême droite

- La présidente du RN Marine Le Pen est officiellement candidate depuis plus d'un an. Dans la plupart des sondages, elle affronte Emmanuel Macron au second tour comme en 2017. 

Une multitude de "petits candidats"

Comme à chaque élection, nombre de candidats issus de formations plus modestes, des figures des "gilets jaunes" voire de complets inconnus du grand public, comptent se présenter.

Parmi eux:

- Le président des Patriotes Florian Philippot

- Anasse Kazib, syndicaliste Sud-Rail et candidat du CCR (Courant communiste révolutionnaire)-Révolution permanente, une ex-branche du NPA

- Le député Jean Lassalle, à la tête du mouvement "Résistons"

- Le président de l'Union populaire républicaine (UPR) François Asselineau

- Le président de "VIA, la voie du peuple" Jean-Frédéric Poisson, qui s'est dit prêt à se retirer en faveur d'Eric Zemmour

- Hélène Thouy pour le Parti animaliste

- Le "gilet jaune" Eric Drouet

- La "gilet jaune" Jacline Mouraud avec son parti Les Emergents

- L'enseignante Clara Egger pour le mouvement Espoir RIC 2022

- Antoine Martinez, ex-général de l'armée de l'Air, président de Volontaires pour la France et signataire au printemps d'une tribune controversée de militaires dans Valeurs Actuelles

- Alexandre Langlois, ex-policier et secrétaire général du syndicat Vigi, avec son parti Refondation

- Antoine Waechter, ex-candidat des Verts à la présidentielle de 1988.

- Georges Kuzmanovic, souverainiste, ex-LFI. 

En revanche, la présence de Marine Le Pen au second tour est en perte de vitesse.

"Toutes les enquêtes démontraient jusqu'à présent que les Français avaient décidé de remettre les deux challengers de 2017 face à face et que le match Macron-Le Pen se rejouerait avec des équilibres un peu différents", explique à l'AFP le politologue Pascal Perrineau, professeur à Sciences Po, pour qui l'ordre qui semblait "immuable depuis 2017 est en train d'être bouleversé".

Le responsable de ce chamboulement n'est autre qu'Eric Zemmour qui ne cesse de monter dans les sondages, l'un d'eux l'ayant même placé cette semaine pour la première fois au second tour avec 17 à 18% des intentions de vote, derrière Emmanuel Macron (24 à 27%).

Présidentielle: comment conjurer le spectre de l'abstention ?

A six mois de la présidentielle, le spectre d'une forte abstention, après le record des dernières régionales, hante les politiques qui cherchent la parade pour combattre la désaffection et remobiliser les électeurs.

Depuis l'arrivée d'Emmanuel Macron à l’Élysée, plus de la moitié des électeurs ont boudé les urnes à chaque suffrage, des législatives de 2017 (51,3% et 57,3%) aux municipales de 2020 (55,25% et 58,6%), à l'exception notable du sursaut inattendu des européennes de 2019 (49,88%). 

Jusqu'à atteindre, sur fond de crise du Covid, des records aux régionales en juin dernier (66,72% et 65,31%), un niveau proche du référendum sur le quinquennat en 2000, record absolu d'abstention sous la Ve République avec 69,8%.

Dans le passé, l'élection présidentielle bénéficiait d'un effet mécanique de remobilisation. Quid de 2022 ?

"C'est impossible à prédire", estime le sondeur Jean-Daniel Lévy (Harris Interactive), malgré des "paramètres", comme "l'éparpillement de la gauche qui peut démobiliser ses électeurs, faute de chance de victoire" et "un débat pour l'heure focalisé sur l'immigration et pas forcément à la hauteur des attentes des Français".

A ce stade, les dernières études des sondeurs relèvent des intentions de participation très en retrait par rapport à celles mesurées en septembre 2016 (17 points de moins pour Ipsos, 10 points pour Harris Interactive). 

Pour conjurer ce risque qui menace aussi leur légitimité, les politiques ont sonné la remobilisation.

Dans tous les camps, le débat sur l'abstention a rythmé la rentrée politique, chacun estimant qu'elle le dessert plus que les autres.

A l'Assemblée nationale, une mission d'information parlementaire a été lancée en juin, ponctuée par une "consultation citoyenne" auprès des Français en octobre.

En novembre, "on proposera des choses applicables immédiatement via la voie règlementaire ou une proposition de loi mais aussi des sujets de plus long terme pour le débat présidentiel ou une future réforme constitutionnelle", prévient le rapporteur de cette mission Stéphane Travert (LREM).

Simplification des procurations

Parmi les pistes évoquées, les députés étudient une simplification des procurations, peut-être sans passer par un commissariat ou une gendarmerie. 

Le vote électronique n'est en revanche pas plébiscité, en raison de "grosses difficultés en matière d'identité numérique". Les députés s'interrogent davantage sur le vote par correspondance ou anticipé.

Avec un souvenir douloureux pour la majorité: le tollé suscité en février par un amendement inattendu du gouvernement, sèchement retoqué au Sénat.

Il prévoyait que les électeurs puissent demander à voter de manière anticipée sur des machines à voter durant la semaine précédant le scrutin présidentiel. Les oppositions de tous bords avaient dénoncé un "tripatouillage".

Récemment le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, sans y être favorable à titre personnel, a expliqué "travailler à mettre en place le vote à distance", mais pas pour le scrutin de 2022.

Ces solutions "techniques" laissent cependant sceptiques nombre de spécialistes. "Je n'y crois pas un instant", répond Jean-Daniel Lévy, pour qui "le problème est avant tout politique", avec "des électeurs mécontents qui ne reviendront aux urnes que s'ils perçoivent clairement les enjeux de l'élection et y adhèrent". 

A l'Assemblée, Stéphane Travert insiste aussi sur "l'engagement" et la "citoyenneté" des jeunes: "on peut imaginer que quelqu'un de 18 ans qui reçoive sa carte d'électeur ait par exemple comme rôle de tenir un bureau de vote à l'élection suivante, dans une logique de droit et devoir", glisse-t-il.

Côté ministériel, la secrétaire d'État Sarah El Haïry travaille sur l'engagement citoyen avec les mouvements de jeunesse de tous les partis.

Mais les politiques ou les associations citoyennes ne sont pas les seuls à chercher des solutions.

L'animateur phare de C8 Cyril Hanouna entend par exemple "faire +campagne pour la campagne+", se fixant même pour objectif de faire reculer l'abstention de vingt points, écrit-il dans son livre "ce que m'ont dit les Français".

Pour ce faire, le présentateur et producteur va partir en tournée "dans ces villes que l'on voit rarement à la télévision", particulièrement dans des régions fortement abstentionnistes où ses émissions sont très suivies.

Selon Frédéric Dabi, directeur du pôle opinion de l'Ifop, Mme Le Pen apparaît désormais "relativement fragilisée" par la candidature de M. Zemmour, qu'il présente comme "un poison lent qui infuse dans une partie de l'électorat du Rassemblement national qui avait déjà des doutes sur la candidate du RN après sa campagne au second tour en 2017", quand elle avait raté son débat face à Emmanuel Macron. 

"Eric Zemmour apparaît comme un homme qui n'est pas du sérail, qui n'appartient pas à la classe politique et qui incarne assez bien le dégagisme. Il en joue, il en surjoue et en rejoue encore", estime M. Perrineau pour qui l'entrée en scène du polémiste n'est pas sans rappeler certains aspects de la candidature hors parti du président sortant en 2017.  

"Cela peut se dégonfler. Mais pour l'instant, en deux semaines, quel changement de perspective et quel désordre!", s'exclame le politologue.

Ticket plus accessible

Résultat: sous l'effet Zemmour, le ticket d'entrée au second tour devient plus accessible: "Avec une offre électorale morcelée, il baisse automatiquement", constate M. Dabi qui rappelle que Jean-Marie Le Pen avait accédé au second tour le 21 avril 2002 avec 16,8% des suffrages. 

Calendrier et mode d'emploi

L'élection présidentielle est prévue le 10 et le 24 avril et les candidats ayant obtenu 500 parrainages pourront s'y présenter. Elle sera suivie par les législatives en juin. Voici le mode d'emploi:

Calendrier

Le Conseil des ministres a fixé le 13 juillet les dates de la présidentielle. Le premier tour aura lieu le 10 et le second le 24 avril. Le choix était restreint compte tenu des impératifs fixés par la Constitution. Pour la présidentielle, il n'y avait que deux couples de dates possibles: 10 avril/24 avril ou 17 avril/1er mai. Le choix des dates a fait l'objet d'une concertation avec les partis politiques autour du ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin. Le scrutin se déroulera pendant une période de congés scolaires: le 10 avril, seule la zone B sera en vacances. Le 24 avril, toutes les zones, A, B et C, seront en congé.

Les législatives se dérouleront dans la foulée avec un premier tour le 12 juin et un second le 19 juin.

Mode de scrutin

Le chef de l'Etat est élu au suffrage universel direct, au scrutin uninominal majoritaire à deux tours, pour un mandat de cinq ans renouvelable une fois. 

Il doit recueillir la majorité absolue des suffrages exprimés en un ou deux tours, quel que soit le taux de participation.

Le vote blanc, qui permet d'exprimer un refus de choix, n'est pas reconnu en France. Depuis une loi de 2014, ces bulletins sont cependant décomptés séparément des votes nuls et annexés au procès-verbal de chaque bureau de vote, mais ils ne sont pas pris en compte dans le calcul des suffrages exprimés.

L'élection des députés pour un mandat de cinq ans se fait au scrutin uninominal majoritaire à deux tours, constamment utilisé sous la Ve République à l'exception des élections de 1986 qui se sont faites au scrutin proportionnel (listes départementales).

Parrainage

Pour entrer officiellement dans la course, les candidats doivent recueillir 500 parrainages d'élus (maires, parlementaires, conseillers régionaux et départementaux...) dans au moins 30 départements différents, et sans dépasser 50 signatures dans un même département. La période de collecte des parrainages débutera au lendemain de la publication du décret de convocation des électeurs début 2022. 

Les électeurs

Les Français inscrits sur les listes électorales pourront voter à la présidentielle, y compris ceux installés à l'étranger, qui étaient près d'un million en 2017. Le vote commence dès samedi dans les Antilles françaises, en Guyane (Amérique du Sud), à Saint-Pierre et Miquelon (archipel français d'Amérique du Nord) et en Polynésie française (Pacifique Sud). Traditionnellement, les Français découvrent le visage du président élu sur les écrans de télévision à 20h00.

Déjà huit présidents depuis 1959

Huit présidents ont été élus depuis l'instauration de la Ve République en 1958 :

Depuis 2017 : Emmanuel Macron (centre) 

2012-2017 : François Hollande (socialiste)

2007-2012: Nicolas Sarkozy (droite)

1995-2007: Jacques Chirac (droite), qui a enchaîné un septennat et un quinquennat 

1981-1995: François Mitterrand (socialiste), qui a effectué deux mandats de sept ans 

1974-1981: Valéry Giscard d'Estaing (droite), qui a effectué un septennat

1969-1974: Georges Pompidou (droite), décédé deux ans avant la fin de son mandat

1959-1969: Charles de Gaulle (droite), élu par un collège électoral pour un premier septennat puis réélu au suffrage universel direct en 1965. Il a démissionné après avoir perdu un référendum l'année suivante.

Cette baisse du ticket pourrait-il profiter à d'autres candidats qu'Eric Zemmour? Comme la droite ne désignera son candidat que début décembre, il est difficile de tirer des conclusions pour l'instant, mais les sondages placent Xavier Bertrand en embuscade derrière Marine Le Pen et Eric Zemmour. 

Pour M. Perrineau, rien n'est donc joué y compris au second tour: "Des sondages montrent que Xavier Bertrand pourrait battre Emmanuel Macron s'il accède au second tour", souligne-t-il.

Les militants ne désigneront pourtant leur candidat que le 4 décembre parmi M. Bertrand, s'il accepte de s'y soumettre, Valérie Pécresse, Michel Barnier ou encore Eric Ciotti. "LR n'a pas perdu, mais attendre le 4 décembre, ça ne peut que renforcer une certaine fébrilité du peuple de droite qui ne veut ni de Zemmour ni de Le Pen", explique M. Dabi. 

Les thèmes qui dominent le début de la campagne à la présidentielle

L'immigration, l'environnement ou encore le pouvoir d'achat : la course à l'Elysée a débuté cet automne sur des thèmes traditionnels. Voici quelques promesses des candidats: 

Immigration

Avec l'entrée en scène d'Eric Zemmour début septembre, les thèmes de l'immigration et de l'insécurité ont dominé le début de campagne, obligeant la plupart des candidats à se positionner. Marine Le Pen a, pour sa part, présenté les contours de son référendum pour combattre l'immigration. La droite cherche la parade, avec également des promesses de toucher à la Constitution et, à gauche, Jean-Luc Mélenchon a dénoncé une "vision rabougrie de la France"

Selon un sondage Ifop réalisé à la fin août, l'immigration et l'insécurité ne constituent pourtant pas la principale préoccupation des Français, largement devancées par les interrogations sur "l'avenir du système social", comme la réforme des retraites. Mais par tranche d'âges, 59% des plus de soixante ans se disent inquiets, 30 points de plus que les moins de 35 ans.

Le pouvoir d'achat

Depuis la rentrée et l'entrée en lice de plusieurs candidats, les promesses pour améliorer le pouvoir d'achat des Français se multiplient. La PS Anne Hidalgo a proposé de doubler le salaire des enseignants pendant le prochain quinquennat. A gauche, plusieurs candidats promettent une hausse du Smic, à l'image du communiste Fabien Roussel qui veut l'élever à 1.800 euros bruts par mois.   

A droite, Valérie Pécresse propose une "grande conférence salariale" et une augmentation du salaire net de 10% en abaissant les charges salariales. Quant à Xavier Bertrand, il défend l'idée d'une "prime au travail" pour qu'il n'y ait "plus un salarié à temps complet recevant moins de 1.500 euros net par mois". 

L'énergie

Avec les prix du gaz et de l'essence qui flambent, les candidats multiplient les idées pour réduire la facture énergétique des Français. Le Premier ministre, Jean Castex, a annoncé que le gouvernement allait "bloquer" le tarif réglementé du gaz jusqu'en avril 2022. Fabien Roussel (PCF) propose de "diviser par deux les factures d'énergie". Anne Hidalgo est favorable à une baisse de la TVA sur l'essence. Une idée que défend Marine Le Pen, qui souhaite abaisser TVA sur l'essence, le gaz et l'électricité à 5,5% au lieu de 20%. 

Jean-Luc Mélenchon veut, quant à lui, bloquer les prix des produits de première nécessité, dont ceux du gaz, de l'électricité et de cinq fruits et légumes. A droite, Valérie Pécresse promet la construction de six nouveaux EPR si elle est élue à la présidence.

Environnement

Les questions environnementales constituent la principale préoccupation des jeunes électeurs. Le candidat écologiste Yannick Jadot, désigné candidat fin septembre lors d'une primaire, promet notamment "d'aller vers l'ISF climatique", qui taxerait davantage "le patrimoine financier qui investit dans les énergies fossiles". A droite, Michel Barnier, l'ex-négociateur du Brexit, se dit favorable à l'instauration d'une taxe carbone aux frontières de l'UE. 

Autres idées

Ils sont plusieurs à prôner une nationalisation des autoroutes, comme Arnaud Montebourg et Marine Le Pen. Xavier Bertrand plaide, quant à lui pour "une République des territoires" qui serait plus décentralisée.

Quant à la gauche, dont les nombreux candidats ne décollent pas pour l'instant dans les sondages, elle court le risque de connaître un "troisième 21 avril", en étant éliminée du second tour comme en 2017 et en 2002, prévient M. Dabi. "On n'a jamais eu un bloc de gauche aussi faible autour de 25-27%.

Pour M. Perrineau, elle est même "en miettes". "Aucun leader n'arrive à exister. On a l'impression qu'en quelques semaines, la gauche a utilisé toutes les stratégies possibles, mais rien ne marche", observe-t-il. 


Pour le Noël des armées, Macron fait cette année le choix des Emirats

La ministre française de la Défense, Catherine Vautrin, quitte le palais présidentiel de l'Élysée à Paris après une réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, le 17 décembre 2025. (AFP)
La ministre française de la Défense, Catherine Vautrin, quitte le palais présidentiel de l'Élysée à Paris après une réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, le 17 décembre 2025. (AFP)
Short Url
  • En se rendant aux Émirats arabes unis pour le Noël des armées, Emmanuel Macron adresse un message de soutien aux militaires français tout en réaffirmant l’engagement stratégique de la France dans une région marquée par de fortes tensions géopolitiques
  • Ce déplacement met en lumière la solidité du partenariat de défense franco-émirien, pilier de la présence militaire française dans le Golfe et vecteur de stabilité régionale

En choisissant les Émirats arabes unis pour célébrer, les 21 et 22 décembre, le traditionnel Noël des armées françaises, le président Emmanuel Macron a voulu adresser un message clair à ses militaires engagés loin de leurs familles, mais aussi aux partenaires de la France dans une région marquée par de fortes turbulences géopolitiques.

Ce déplacement présidentiel, à la fois militaire et diplomatique, illustre la solidité d’un partenariat stratégique noué de longue date entre Paris et Abou Dhabi.

Comme le veut la tradition, le président de la République partagera un moment privilégié avec les forces françaises déployées sur place, après une séquence bilatérale avec les autorités émiriennes.

Selon le palais de l’Élysée, Emmanuel Macron se rendra directement auprès des militaires : il dînera avec eux, avant de consacrer la matinée suivante à des échanges de terrain et à des démonstrations opérationnelles, au plus près de la réalité de leur engagement en période de fêtes.

Si le choix des Émirats arabes unis n’a rien d’anodin, c’est parce que la région concentre aujourd’hui un grand nombre de crises majeures : conflits persistants au Moyen-Orient, tensions maritimes affectant le commerce mondial, instabilité chronique de plusieurs États.

Un déplacement stratégique dans une région sous tension

Le Golfe est devenu un carrefour stratégique où se croisent enjeux sécuritaires, diplomatiques et économiques et, en s’y rendant, le chef de l’État entend rappeler que la France demeure un acteur militaire et diplomatique engagé à l’échelle mondiale.

Mais ce déplacement est aussi l’occasion d’incarner la relation de confiance qui lie Paris et Abou Dhabi depuis plus de trente ans.

Le partenariat de défense franco-émirien, formalisé et renforcé par un accord signé en 2009, s’est progressivement imposé comme l’un des piliers de la présence française dans la région. Il repose sur une coopération étroite, une interopérabilité accrue des forces et un partage d’objectifs communs en matière de stabilité régionale.

Les Émirats arabes unis accueillent en effet un dispositif militaire français structurant. À Abou Dhabi se trouve un état-major interarmées, à la tête duquel est placé un amiral commandant à la fois les Forces françaises aux Émirats arabes unis (FFAU) et les forces françaises déployées dans l’océan Indien.

Cette implantation est complétée par une base navale française, ainsi que par une base aérienne située à une cinquantaine de kilomètres au sud-ouest de la capitale, où sont notamment stationnés des avions de combat Rafale.

À environ 70 kilomètres à l’ouest d’Abou Dhabi, dans une zone désertique, est également déployé le 5ᵉ régiment de cuirassiers, équipé de matériels de dernière génération, dont des chars Leclerc et des véhicules blindés de combat.

C’est sur ce site que se déroulera l’essentiel de la séquence militaire du déplacement présidentiel, avec une démonstration interarmées illustrant les capacités opérationnelles françaises.

Au total, près de 900 militaires français sont stationnés aux Émirats arabes unis. Ils jouent un rôle clé dans plusieurs opérations majeures.

Un partenariat militaire franco-émirien au cœur de la présence française dans le Golfe

Les moyens aériens basés aux Émirats contribuent notamment à l’opération Chammal de lutte contre le terrorisme, tandis que les capacités maritimes participent à l’opération européenne Aspides, destinée à sécuriser le trafic international en mer Rouge, récemment menacé par des attaques visant la navigation commerciale.

Au-delà de la dimension opérationnelle, la présence française aux Émirats arabes unis constitue un symbole fort de coopération stratégique et traduit la volonté partagée de renforcer la stabilité régionale, de sécuriser les grandes routes maritimes internationales et de soutenir les efforts de paix dans des zones fragilisées comme l’Irak, le Yémen, la Libye ou encore le Soudan.

Tous ces sujets pourraient être abordés lors des échanges entre le président français et le président émirien, Cheikh Mohamed ben Zayed.

En se rendant auprès des forces françaises à Noël, accompagné de la ministre des Armées, Emmanuel Macron entend surtout témoigner de son attachement personnel aux militaires engagés loin de la métropole.

Le message qu’il veut leur adresser est autant humain que politique, puisqu’il s’agit d’exprimer la reconnaissance de leur engagement et d’affirmer la crédibilité militaire française.

Dans un contexte international tendu, le choix des Émirats arabes unis pour le Noël des armées apparaît ainsi comme un signal fort : celui d’une France fidèle à ses alliances, pleinement investie dans la sécurité internationale et consciente que sa présence militaire est indissociable de relations diplomatiques durables et de partenariats stratégiques solides.


Municipales à Paris: vers un accord historique à gauche dès le premier tour

A  Paris, socialistes, écologistes et communistes s'apprêtent à sceller pour la première fois leur union dès le premier tour des municipales, derrière l'ex-premier adjoint socialiste Emmanuel Grégoire. Une alliance arrachée au terme de négociations délicates, mais réclamée sur le terrain face à une droite revigorée autour de Rachida Dati. (AFP)
A Paris, socialistes, écologistes et communistes s'apprêtent à sceller pour la première fois leur union dès le premier tour des municipales, derrière l'ex-premier adjoint socialiste Emmanuel Grégoire. Une alliance arrachée au terme de négociations délicates, mais réclamée sur le terrain face à une droite revigorée autour de Rachida Dati. (AFP)
Short Url
  • Depuis 09H00 ce mercredi, les écologistes parisiens sont invités à voter pour cet accord afin de faire "une liste commune, une union très très large de toutes les forces de gauche qui le souhaitent. C'est nouveau, c'est vraiment quelque chose d'historique
  • Si socialistes et écologistes gouvernent ensemble la capitale depuis 2001, ils n'avaient encore jamais mené campagne commune dès le premier tour

PARIS: A Paris, socialistes, écologistes et communistes s'apprêtent à sceller pour la première fois leur union dès le premier tour des municipales, derrière l'ex-premier adjoint socialiste Emmanuel Grégoire. Une alliance arrachée au terme de négociations délicates, mais réclamée sur le terrain face à une droite revigorée autour de Rachida Dati.

Depuis 09H00 ce mercredi, les écologistes parisiens sont invités à voter pour cet accord afin de faire "une liste commune, une union très très large de toutes les forces de gauche qui le souhaitent. C'est nouveau, c'est vraiment quelque chose d'historique pour nous", a déclaré sur franceinfo le candidat écologiste David Belliard.

Si socialistes et écologistes gouvernent ensemble la capitale depuis 2001, ils n'avaient encore jamais mené campagne commune dès le premier tour.

Cet accord, qui prévoit le désistement de David Belliard et de son homologue communiste Ian Brossat, sera soumis au vote des trois formations politiques, dont les 2.500 adhérents écologistes.

"Ce soir, dans la nuit, on connaîtra la réponse et (...) dès demain (jeudi) moi je suis prêt, dans toutes les configurations, à continuer la campagne", a ajouté M. Belliard, disant souhaiter "bousculer cette élection en faisant quelque chose d'historique".

"Quand une droite extrémisée menace, nous avons le devoir d'unir nos forces", a posté sur X Ian Brossat.

Interrogé sur la possibilité d'une union au second tour avec LFI, David Belliard s'est dit favorable à une "candidature unique à gauche".

"On est dans une élection difficile, dans laquelle il y a des enjeux (...) énormes pour Paris (...)  Et nous avons face à nous une droite qui est une droite populiste, affairiste, qui aujourd'hui est très brutale", a-t-il souligné.

Selon l'accord consulté par l'AFP, les partenaires s'engagent "à tout faire pour qu'il n'y ait qu'une seule liste de gauche au second tour", excluant toute alliance avec le candidat Horizons soutenu par Renaissance Pierre-Yves Bournazel.

"Parfois douloureux" 

Initialement annoncée pour octobre, cette alliance, qui devrait également associer Place publique et possiblement L'Après (ex-LFI), est le fruit de plus de trois mois de tractations serrées.

"Si un accord historique comme celui-ci n'avait jamais été réalisé auparavant c'est d'abord parce que c'est difficile et parfois douloureux. Cela implique que certains sortent des listes", a glissé une source socialiste.

Les discussions achoppaient notamment sur la place des écologistes en lice pour le Conseil de Paris dans un contexte de changement de mode de scrutin. Cette réforme est vivement critiquée par l'exécutif sortant, qui y voit une manoeuvre visant à faire gagner la droite.

Selon l'accord, 36 écologistes seraient éligibles contre 28 élus actuellement.

Source de profondes crispations chez les militants socialistes, les écologistes ont également obtenu que David Belliard soit tête de liste dans le XIe arrondissement, où fut élu Léon Blum et où l'est l'actuelle maire socialiste Anne Hidalgo. Une troisième mairie verte en plus de celles du XIIe et du XIVe qu'ils administrent déjà.

"C'est une révolution du point de vue de la gouvernance car il prévoit un meilleur partage entre les différents membres de cette alliance au sein de laquelle personne n'aura la majorité seul", souffle un cadre écologiste.

Revendiquant leur rôle central dans la transformation de l'espace public, de l'essor des pistes cyclables aux "rues aux écoles", les écologistes conditionnaient de fait leur retrait à l'obtention de concessions significatives.

L'accord prévoit également un renforcement des pouvoirs des maires d'arrondissement.

Parmi les "marqueurs communs" figurent notamment la revalorisation du périscolaire, un service de garde d'enfant universel, l'objectif de 40% de logement public (dont 30% de logement social), ou encore la poursuite de la piétonnisation et du verdissement de la ville.

Parmi les points de divergence, on trouve l'avenir du Parc des Princes.

"C'est un rassemblement historique qui a un coût très important pour les socialistes", a reconnu une source à gauche, pour qui les écologistes en sortiront "renforcés" alors qu'ils "reculent partout en France".

"Avec cette liste d'union il y aura un effet vote utile (...) Ca va forcément ouvrir une dynamique", estime-t-on de même source.

A l'instar de Paris, la plupart des grandes villes dirigées par la gauche ont franchi le pas d'une alliance dès le premier tour.

 

 


Crise de la dermatose en France : les vétérinaires cibles de menaces

La colère des agriculteurs français contre l'abattage des troupeaux affectés par cette maladie, qui a d'abord visé le gouvernement, s'est aussi tournée depuis plusieurs jours contre les vétérinaires, chargés des "dépeuplements" des bovins, selon les termes utilisés par l'Ordre des vétérinaires, institution professionnelle chargée d'encadrer la profession. (AFP)
La colère des agriculteurs français contre l'abattage des troupeaux affectés par cette maladie, qui a d'abord visé le gouvernement, s'est aussi tournée depuis plusieurs jours contre les vétérinaires, chargés des "dépeuplements" des bovins, selon les termes utilisés par l'Ordre des vétérinaires, institution professionnelle chargée d'encadrer la profession. (AFP)
Short Url
  • La colère des agriculteurs français contre l'abattage des troupeaux affectés par cette maladie, qui a d'abord visé le gouvernement, s'est aussi tournée depuis plusieurs jours contre les vétérinaires, chargés des "dépeuplements" des bovins
  • "Il a essayé de péter ma vitre (de voiture) avec son poing", a raconté à l'AFP une vétérinaire libérale exerçant dans la Savoie (est), qui a requis l'anonymat à la suite de cet incident avec des éleveurs

PARIS: "Vétérinaires = assassins", cliniques taguées "vétos = collabos"... "On a le droit à tout", déplore David Quint, président du Syndicat français des vétérinaires libéraux, qui témoigne du malaise dans la profession, en première ligne dans la gestion de l'épizootie de dermatose nodulaire contagieuse (DNC).

La colère des agriculteurs français contre l'abattage des troupeaux affectés par cette maladie, qui a d'abord visé le gouvernement, s'est aussi tournée depuis plusieurs jours contre les vétérinaires, chargés des "dépeuplements" des bovins, selon les termes utilisés par l'Ordre des vétérinaires, institution professionnelle chargée d'encadrer la profession.

"Il a essayé de péter ma vitre (de voiture) avec son poing", a raconté à l'AFP une vétérinaire libérale exerçant dans la Savoie (est), qui a requis l'anonymat à la suite de cet incident avec des éleveurs.

Durant l'été, elle a été mandatée pour abattre un cheptel dans une exploitation. "Deux voitures se sont garées au milieu de la route comme des cowboys pour nous bloquer le passage et on nous a demandé si nous étions +fiers de ce que nous avions fait+, mon confrère et moi", se souvient-elle.

"Ils étaient quatre, c'était stressant, j'ai appelé la gendarmerie et porté plainte le soir même", rapporte la vétérinaire.

"Pris en étau" 

"On est pris en étau entre la souffrance du monde agricole d'un côté et le fait de devoir faire notre métier de l'autre", a regretté auprès de l'AFP Jean-Yves Gauchot, président de la Fédération des syndicats vétérinaires.

Lundi, le vétérinaire a reçu cette menace: "dans un autre temps, votre tête aurait fini au bout d'une pique", après s'être exprimé sur la chaîne d'information BFMTV, une première en 35 années d'expérience.

Une enquête a été ouverte mardi par le parquet de Bergerac (sud-ouest) pour menaces de mort après la plainte du praticien.

"Il ne faut pas laisser passer", défend-il, appelant ses confrères à porter plainte en cas de menaces.

Il n'y a "rien qui justifie que l'on menace quelqu'un de mort", a réagi mardi David Quint, lors d'une conférence de presse de l'Ordre des vétérinaires et de plusieurs organisations syndicales, qualifiant ces intimidations d'"inacceptables".

La stratégie gouvernementale de lutte contre cette maladie animale très contagieuse, non transmissible à l'homme mais qui peut toucher très durement le cheptel, prévoit l'abattage systématique d'un troupeau dès la détection d'un cas, ce qui cristallise les tensions d'une partie des agriculteurs, notamment de la Coordination rurale (deuxième syndicat) et de la Confédération paysanne (3e).

"N'allez pas trop loin sinon vous n'aurez plus de vétérinaires !", a mis en garde le président du Conseil national de l'Ordre, Jacques Guérin, interrogé par l'AFP en marge de la conférence.

Droit de retrait ? 

Face à la pression qui a "monté d'un cran", il a appelé les vétérinaires à faire valoir leur droit de retrait "si les conditions ne réunissent pas leur sécurité et celle de leurs proches".

Cela signifie qu'un vétérinaire habilité et mandaté par une préfecture pour abattre un élevage pourrait refuser sa tâche, tout en argumentant les raisons auprès du préfet, explique l'Ordre, qui ne soutiendra toutefois pas les clauses de retrait "de principe".

Le standard de l'Ordre des vétérinaires est "submergé d'appels de personnes complotistes, antivax, anti-tout, qui déversent des tombereaux de bêtises à l'encontre de la profession. Cela finit par impacter fortement le moral des vétérinaires", déplorait son président il y a quelques jours auprès de l'AFP.

"C'est inadmissible de s'en prendre aux vétérinaires", a réagi auprès de l'AFP Stéphane Galais, porte-parole de la Confédération paysanne, arguant que la "responsabilité du climat de défiance" est à "aller chercher du côté du ministère de l'Agriculture".

La Coordination rurale, syndicat concurrent, "condamne" également "toutes les menaces" envers les vétérinaires, selon François Walraet, secrétaire général du syndicat, joint par l'AFP.

"Ce sont nos partenaires (...) Ce n'est pas à eux qu'il faut s'adresser si on veut que le protocole évolue", abonde-t-il.

Les mesures actuelles sont "absolument ce qu'il faut faire" pour éradiquer ce "virus extrêmement résistant dans les milieux extérieurs", insiste par ailleurs la présidente de l'association de vétérinaires SNGTV, Stéphanie Philizot.