«Les Siècles», orchestre caméléon

«Les Siècles» est un «musée vivant» des instruments historiques (Photo, AFP)
«Les Siècles» est un «musée vivant» des instruments historiques (Photo, AFP)
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Publié le Dimanche 10 octobre 2021

«Les Siècles», orchestre caméléon

«Les Siècles» est un «musée vivant» des instruments historiques (Photo, AFP)
  • C'est le seul orchestre au monde qui joue des répertoires multiples, de Jean-Philippe Rameau à Luciano Berio, avec les instruments de l'époque de l'oeuvre
  • «Les Siècles» sont d'une versatilité sans pareille, allant jusqu'à changer trois fois d'instruments en une soirée pour passer du baroque au XXe siècle

PARIS: C'est le seul orchestre au monde qui joue des répertoires multiples, de Jean-Philippe Rameau à Luciano Berio, avec les instruments de l'époque de l'oeuvre. Depuis près de 20 ans, « Les Siècles » est un « musée vivant » des instruments historiques, selon son fondateur, le chef d'orchestre François-Xavier Roth. 

« C'est comme un chef cuisinier qui ferait une recette du temps de Louis XIV avec les légumes de l'époque », s'amuse à dire ce Français de 49 ans au cours d'un entretien accordé à l'AFP. 

Etre au plus près de ce qu'a entendu le compositeur, telle a été l'« utopie » de M. Roth qui dirige depuis samedi l'opéra « Pelléas et Mélisande » de Debussy au Théâtre des Champs-Elysées, à Paris, où il entame une résidence. 

Ce qui a commencé par des répétitions dans son salon en 2003 avec un groupe d'amis musiciens est devenu un orchestre à succès, jouant dans les plus grandes salles du monde. 

« C'est comme un musée, mais un musée vivant (...). D'entendre l'orchestre qu'a pu entendre, Debussy, Berlioz, Mahler, c'est vraiment ma grande fierté », affirme François-Xavier Roth, également directeur musical de Cologne et principal chef invité de l'Orchestre symphonique de Londres. 

« On peut retranscrire ce que les compositeurs ont voulu dire bien mieux avec les instruments qu'ils ont connus (...) et les musiciens des ‘Siècles’ sont des caméléons qui ont appris à jouer de tous ces différents instruments ». 

« Pas une prouesse sportive »  

Alors que les ensembles jouant sur des instruments d'époque se focalisent généralement sur un seul répertoire, « Les Siècles » sont d'une versatilité sans pareille, allant jusqu'à changer trois fois d'instruments en une soirée pour passer du baroque au XXe siècle. 

« Ce n'est pas une prouesse sportive. Musicalement, quelque chose fait sens », souligne M. Roth, qui a même dirigé avec « Les Siècles » le « Get Lucky » de Daft Punk aux concerts des Proms à Londres en 2017. 

A l'époque où il étudiait au Conservatoire de musique à Paris, « il y avait d'un côté ceux qui adoraient la création contemporaine; de l'autre, tout un pan de musiques était redécouvert, baroque, classique, préromantique et on redécouvrait les instruments d'époque », se rappelle-t-il. 

« J'étais fasciné par ces deux mondes mais frustré qu'ils se rencontrent assez rarement au sein d'un même concert ».  

Pour Hélène Mourot, hautboïste au sein des Siècles, jouer des instruments historiques - qu'ils soient des originaux ou des copies faites par des luthiers - donne « des micro-nuances, des couleurs en plus ». 

Et plus encore à mesure qu'on recule dans le temps. 

« Quand je jouais du Berlioz (XIXe siècle) sur un instrument moderne, je ne comprenais rien. Je trouvais ça fatigant et impraticable sur l'instrument », explique-t-elle. 

Et en quoi résident les nuances? 

« La différence principale (entre un hautbois moderne et celui de la musicienne datant de 1894), c'est la perce, c'est-à-dire la façon dont le trou est fait à l'intérieur du bois. Comme la perce (à l'époque de Debussy) est plus fine, le son a moins de volume mais plus de timbre, donc on va jouer moins fort mais avec une couleur plus marquée », précise-t-elle. 

Brocantes et eBay 

Roth rappelle que la forme des archets des instruments à cordes a changé, et qu'un violon moderne a des cordes en métal alors que jusqu'à la Seconde guerre mondiale, en Europe, elles « étaient en boyaux, donc la couleur du son est totalement différente ».  

« Les Siècles » respecte également les différences géographiques puisqu'au XIXe siècle, les instruments n'étaient pas les mêmes en Allemagne qu'en France. 

Constituer cet impressionnant parc instrumental est toute une aventure. Hélène Mourot, qui a à elle seule une quinzaine de hautbois, a acheté son instrument auprès d'une personne qui l'a trouvé dans le grenier de son grand-père. 

« Pour les instruments d'avant 1830, c'est rare de trouver des originaux en bon état ou qui ne soient pas dans les musées », dit-elle. Si des instruments se chiffrent à des milliers d'euros, il y a aussi de bonnes affaires sur internet. 

« Nos musiciens sont de véritables Indiana Jones qui recherchent ces instruments partout dans le monde (...) dans des brocantes ou sur eBay », affirme M. Roth, dont l'orchestre est financé par le public et plusieurs mécènes. 

Avec parfois des trouvailles émouvantes, comme un basson qui aurait joué à la première du Sacre du Printemps de Stravinsky. 


La fête de la musique sous le signe du dialogue culturel franco-saoudien

Du 20 au 26 juin 2025, la Fête de la Musique résonnera dans trois grandes villes d’Arabie saoudite : Riyad, Khobar et Djeddah. (Photo Fournie)
Du 20 au 26 juin 2025, la Fête de la Musique résonnera dans trois grandes villes d’Arabie saoudite : Riyad, Khobar et Djeddah. (Photo Fournie)
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  • Née en France en 1982, la Fête de la Musique s’est imposée comme un événement planétaire célébré dans plus de 120 pays.
  • L’édition 2025 proposera une programmation riche et éclectique, reflet de la vitalité des scènes française et saoudienne contemporaines.

RIYAD : Du 20 au 26 juin 2025, la Fête de la Musique résonnera dans trois grandes villes d’Arabie saoudite : Riyad, Khobar et Djeddah. À l’initiative de l’ambassade de France, en collaboration avec l’Alliance française, Saudi Music Hub, Unstable, Hayy Jameel et MDL Beast, une série d’événements musicaux viendra marquer ce rendez-vous culturel international devenu emblématique.

Née en France en 1982, la Fête de la Musique s’est imposée comme un événement planétaire célébré dans plus de 120 pays. Fidèle à son principe fondateur, elle vise à rendre la musique accessible à tous gratuitement. Elle reste, cette année encore, un puissant vecteur de dialogue culturel. En Arabie saoudite, cette célébration musicale prend une dimension particulière, s’inscrivant dans un contexte de renouveau artistique et d’ouverture culturelle, en pleine résonance avec les objectifs de Vision 2030.

L’édition 2025 proposera une programmation riche et éclectique, reflet de la vitalité des scènes française et saoudienne contemporaines. Des artistes français seront présents, comme Karimouche, figure singulière du spoken word et de la chanson engagée, ou DJ SÔNGE, productrice électro aux univers immersifs et afro-futuristes.

Ces artistes partageront la scène avec des talents saoudiens tels que Kosh, beatmaker fusionnant rythmes traditionnels et basses électroniques, ou Seera, jeune espoir de la scène folk locale. Plusieurs artistes émergents, sélectionnés avec soin en collaboration avec les partenaires saoudiens, viendront compléter cette mosaïque sonore.

Chacune des villes participantes offrira une atmosphère unique. Riyad ouvrira le bal le 20 juin avec une nuit musicale au Unstable, lieu hybride emblématique de la scène urbaine saoudienne. Le 21 juin, Khobar prendra le relais au Saudi Music Hub, un espace dédié à la formation musicale, pour une soirée plus intimiste. Enfin, Djeddah clôturera cette semaine de célébration les 25 et 26 juin, au cœur du centre culturel Hayy Jameel, avec deux concerts présentés par des artistes féminines marquantes.

Au-delà des concerts, ces rencontres musicales seront l'occasion de moments de partage, de découvertes et d'échanges, favorisant la création de liens entre artistes et publics des deux pays. En soutenant la circulation des talents et la coopération artistique, la France réaffirme son engagement en faveur de la diversité culturelle et du dialogue entre les sociétés.

La Fête de la Musique 2025 est ainsi bien plus qu’un simple rendez-vous festif : elle est le symbole vivant d’une amitié en construction, portée par des sons, des voix et des émotions partagées.


La bibliothèque Jadal est une oasis culturelle dans la province orientale de l'Arabie saoudite

Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
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  • Ali Al-Herz a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres, offrant aux visiteurs un espace où la mémoire, la philosophie et la culture prennent vie.
  • adal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

DHAHRAN : Dans le village tranquille d'Umm Al-Hamam, situé dans la province orientale de l'Arabie saoudite, une passion de longue date pour les livres s'est transformée en un havre culturel.

Ali Al-Herz, bibliophile et archiviste littéraire, a transformé sa maison en une bibliothèque d'exception nommée Jadal, un véritable trésor contenant plus de 37 000 livres, plus de 100 000 journaux et magazines, ainsi que des antiquités, dont certaines datent de plus d'un siècle.

Mais Jadal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

Al-Herz a déclaré à Arab News : « Depuis ma naissance, j'ai été entouré des livres de ma mère. J'ai grandi immergé dans cette passion, à tel point qu'elle m'a complètement envahi ; je suis devenu un rat de bibliothèque. »

L'étincelle qui a tout déclenché a été la rencontre d'Al-Herz avec l'épopée Sirat Antar à l'âge de 13 ans. « À partir de cette épopée, et à travers elle, j'ai commencé à explorer d'autres mondes », a-t-il déclaré. 

C'est cette curiosité et cette fascination qui ont finalement conduit Al-Herz à créer l'une des initiatives les plus originales du royaume d'Arabie saoudite.

Le nom « Jadal » signifie « débat » ou « discussion » en arabe, reflétant l'esprit curieux de la bibliothèque. Pour Al-Herz, l'objectif n'est pas seulement de préserver les textes, mais aussi l'idée de questionner et d'explorer les idées.

Al-Herz a déclaré : « J'ai choisi ce nom pour la bibliothèque, car il est profondément ancré dans l'histoire philosophique de la Grèce antique, ainsi que dans notre propre tradition culturelle arabo-islamique, en particulier dans notre héritage religieux. »

L'atmosphère philosophique imprègne les trois salles principales, nommées d'après Socrate, Platon et Aristote, qui accueillent les visiteurs dans un univers dédié à la lecture et à la réflexion. 

Des manuscrits rares, des textes anciens, des journaux et des antiquités ont été soigneusement archivés. Chaque pièce est un murmure du passé qui s'adresse à l'avenir. 

Al-Herz explique : « Même mon intérêt récent pour l'achat de livres s'est principalement orienté vers les éditions rares et les imprimés anciens, afin de créer une harmonie entre patrimoine et modernité. »

Mais Jadal ne se laisse pas envahir par la nostalgie, car Al-Herz organise toutes les deux semaines une réunion littéraire. Cet événement fait revivre une tradition qui était autrefois importante dans la vie intellectuelle des Arabes.

C'est un environnement où écrivains, universitaires et penseurs se réunissent autour d'un café arabe pour échanger des idées dans une atmosphère animée. 

À une époque où les gens recherchent des informations instantanées en ligne, Al-Herz continue d'utiliser des méthodes traditionnelles. « Il y a une lutte permanente entre deux générations », observe-t-il. « La victoire reviendra finalement à cette dernière génération, une fois que ma génération aura disparu. Les bibliothèques papier seront alors transformées en musées. »

Il a peut-être raison, mais pour l'instant, au cœur de la campagne de Qatif, la bibliothèque Jadal continue d'exister, et c'est un lieu où l'encre, la mémoire, le débat et le patrimoine continuent de façonner l'âme culturelle du Royaume. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com 


Amin Maalouf apporte un soutien inattendu aux langues régionales

Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
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  • Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs,
  • Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale.

PARIS : Une initiative d'un collectif visant à enseigner le patrimoine littéraire dans les langues régionales de France a reçu lundi  un soutien inattendu : celui du secrétaire perpétuel de l'Académie française, Amin Maalouf.

M. Maalouf, écrivain franco-libanais, a été élu en 2023 à la tête d'une institution dont la mission est de veiller au rayonnement et à l'intégrité de la langue française.

Toutefois, il soutient la démarche du Collectif pour les littératures en langues régionales, qui suggère un enseignement de ce type au collège ou au lycée, a indiqué ce collectif à l'AFP.

Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs, afin de sensibiliser à la « richesse de la production littéraire » dans d'autres langues que le français. 

« M. Maalouf, comme nous, est convaincu qu'il est nécessaire que les élèves français découvrent ces trésors culturels », écrit ce collectif à M. Bayrou, qui parle lui-même le béarnais.

Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale (de l'alsacien au tahitien, en passant par le basque ou le corse), traduits en français.

On y trouve entre autres un poème en provençal de Frédéric Mistral (prix Nobel de littérature en 1904) intitulé Mirèio, une chronique en breton de Pierre-Jakez Hélias intitulée Bugale ar Republik, un court récit en créole martiniquais de Raphaël Confiant intitulé Bitako-a, ainsi qu'une chanson en picard d'Alexandre Desrousseaux intitulée Canchon dormoire (plus connue sous le nom de P'tit Quinquin).

« Il ne s'agit pas de donner des cours de langues régionales, mais de présenter des œuvres issues des littératures en langues régionales, que ce soit en français ou en version bilingue », précise le collectif.

Idéalement, selon lui, les élèves aborderaient des langues issues d'autres régions que la leur. « Pourquoi seuls les élèves antillais apprendraient-ils qu'il existe une littérature en créole ? », demande ce collectif, qui présente son initiative à la presse lors d'une visioconférence lundi après-midi.