La diversité culturelle algérienne, «quelque part entre le silence et les parlers»

Oeuvre Walid Bouchouchi. (Fournie)
Oeuvre Walid Bouchouchi. (Fournie)
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Publié le Mardi 12 octobre 2021

La diversité culturelle algérienne, «quelque part entre le silence et les parlers»

  • Mounir Gouri présente des tableaux poignants de harraga (voyageurs clandestins). Il parvient à transformer leur périple en performance
  • «[L’Algérie est] un pays aussi familier que méconnu, et dont la complexité – sociale, politique, historique – est à la mesure de la diversité culturelle qui s'y exprime»

PARIS: Programmée du 26 juin au 28 novembre 2021 à la Maison des arts/centre d’art contemporain de Malakoff, dans le département des Hauts-de-Seine, «Quelque part entre le silence et les parlers» ravive les souvenirs d’un voyage en Algérie effectué par Florian Gaité, docteur en philosophie, critique d’art et commissaire de cette exposition.

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Pour Florian Gaité, l’Algérie est un pays marqué par de nombreux traumas et par une forme de rétention car, d’une génération à une autre, on ne raconte pas les mêmes blessures. (Fournie)

Cet événement «cherche à faire entendre les voix et le silence qui caractérisent si bien l’Algérie; c’est une oreille tendue par-delà la Méditerranée», précise à Arab News en français Florian Gaité lors de notre visite. «C’est un pays aussi familier que méconnu, et dont la complexité – sociale, politique, historique – est à la mesure de la diversité culturelle qui s'y exprime», affirme-t-il.

«J’ai monté ce projet avant que le Hirak ne prenne forme, au mois de février 2019, ce qui a bouleversé ma vision de la scène algérienne, un pays que je ne connaissais pas, au sujet duquel j’avais des préjugés, des idées préconçues, une grille de lecture exclusivement occidentale», nous raconte Florian Gaité, dont la grand-mère est née à Oran.

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«J’ai monté ce projet avant que le Hirak ne prenne forme, au mois de février 2019, ce qui a bouleversé ma vision de la scène algérienne». (Fournie)

«Expérience sensitive et sensorielle»

«Lorsque je suis arrivé, je me suis rendu compte que l’expérience sensitive et sensorielle que l’on éprouve en l’Algérie était constituée de deux pôles: d’un côté, c’est un pays extrêmement loquace, où l’on parle une multiplicité de langues, une sorte de bricolage langagier. D’une ville à l’autre, d’une génération à l’autre, on ne parle pas de la même façon. La génération des grands-mères parle amazigh, leurs enfants s’expriment en français et en arabe, et la jeune génération s’oriente davantage vers la langue arabe et l’anglais. Cette stratification des langues me paraissait folle car, par ailleurs, en Algérie, il y a aussi beaucoup de silence. C’est un pays où l’on chuchote, où il y a de la pudeur, car on ne dit pas tout», confie-t-il.

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«Quelque part entre le silence et les parlers» réunit des artistes qui sont nés, vivent ou travaillent en Algérie. (Fournie)

Pour lui, l’Algérie est un pays marqué par de nombreux traumas et par une forme de rétention car, d’une génération à une autre, on ne raconte pas les mêmes blessures. «Il y a deux écueils que je voulais éviter: le premier résidait dans le fait de me placer en critique occidental qui viendrait évoquer la scène artistique algérienne, sujet dont je ne suis pas un spécialiste. Le second consistait à choisir les artistes comme de simples intermédiaires pour témoigner de la scène artistique algérienne. En effet, ils connaissent leur pays mieux que moi et leurs témoignages sont, à mon sens, plus justes et plus authentiques», nous révèle-t-il.

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Oeuvres de Mounir Gouri sur les Harragas. (Fournie)

«Fonction testimoniale et documentaire»

Selon l’organisateur de l’exposition, la colonisation, l’islamisme, l’autoritarisme d’État constituent quelques-uns des multiples traumas de l’histoire contemporaine de l’Algérie. «Ce sont des successions de causes, d’interdits, de dénis, de refoulements qui inhibent la parole et empêchent souvent de la retranscrire sous forme de récit. L’apparition de la fonction testimoniale et documentaire dans l’art algérien contemporain répond ainsi à cette nécessité de témoigner du passé comme du présent – colonisation, guerre de libération, socialisme, décennie noire, ère Bouteflika, Hirak – et de proposer des réécritures, d’exhumer ce qui a été effacé ou falsifié, de donner une voix à tous les oubliés», souligne-t-il.  

«Quelque part entre le silence et les parlers» réunit des artistes qui sont nés, vivent ou travaillent en Algérie: Louisa Babari, Adel Bentounsi, Walid Bouchouchi, Fatima Chafaa, Dalila Dalléas Bouzar, Mounir Gouri, Fatima Idiri, Sabrina Idiri Chemloul, Amina Menia et Sadek Rahim. Ces créateurs algériens ou franco-algériens ont été sélectionnés par Florian Gaité, qui précise que certains d'eux sont encore peu représentés dans les lieux d'art en France. «Cette représentation, composée de plus de femmes que d’hommes, présente des œuvres réalisées avec des matériaux divers comme le papier, le charbon ou encore le tissu», indique le commissaire de l’exposition lors de notre rencontre.

Lors de son séjour à Oran, Florian Gaité a rencontré Sabrina Idiri Chemloul, une réalisatrice franco-algérienne, lors d’une manifestation du Hirak. Originaire, comme lui, de la ville de Pantin, dans la région parisienne, l’artiste lui a présenté sa maman, Fatima Idiri.

Née dans les Aurès, au nord-est de l’Algérie, Fatima Idiri a vécu à Nancy dans une famille qui fait partie des réseaux de résistants du Front de libération nationale (FLN). Rentrée au pays après l’indépendance, elle s'intéresse en autodidacte à l’art, du stylisme-modélisme à la peinture sur soie, de la mosaïque à la broderie berbère. Fortement influencée par l’impressionnisme et l’orientalisme, elle réalise des copies de tableaux. «La ferveur du Hirak a changé la donne: cela lui a donné l’envie de peindre ses propres tableaux. En choisissant le dessin figuratif comme identité artistique, elle cherche, à travers son œuvre, à perpétuer la mémoire de l’une des traditions de sa région natale, les Aurès», nous confie Florian Gaité.

«En réalisant ses œuvres avec du marc de café et de l’acrylique, l’artiste a souhaité rendre hommage à des poétesses et des chanteuses libres et émancipées qui sont les Azriat», indique-t-il, avant de préciser que l’artiste a longuement étudié des clichés de la photographie coloniale et qu’elle a cherché à les déconstruire afin de retrouver la spontanéité et la nature profonde de ces artistes avant-gardistes qui étaient mal vues, voire marginalisées, dans la société de la période coloniale.

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Fatima Idri, peintures représentants les Azriat. (Fournie)

Tableaux poignants de harraga

Dans les locaux de la Maison des arts de Malakoff, on trouve aussi des œuvres de Mounir Gouri. Cet artiste originaire d’Annaba a gagné le Prix des amis de l’IMA (Institut du monde arabe). Installé en France, Mounir Gouri présente des tableaux poignants de harraga (voyageurs clandestins). Il parvient à transformer leur périple en performance. Florian Gaité évoque le tableau en particulier, qui représente un ciel étoilé, peint avec du charbon. «Le message de l’artiste consiste à dire que, lorsque les harraga sont en pleine Mer méditerranée, dans la nuit noire, leurs seules lueurs sont les étoiles», nous explique-t-il.

Sont également présentes des créations de la plasticienne Amina Menia. Née en 1976, cette artiste vit et travaille à Alger. Son travail se présente sous la forme d’une archéologie urbaine aux croisements de l’histoire, de la mémoire des lieux et du langage architectural. Ses œuvres ont été exposées dans de nombreux musées, centres d’art et galeries, parmi lesquels le Centre Pompidou, à Paris, le New Museum of Contemporary Art de New York, le Museum of African Design de Johannesburg, le Musée d’art contemporain de Marseille ou encore le Royal Hibernian Academy de Dublin.

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Dans les locaux de la Maison des arts de Malakoff, on trouve aussi des œuvres de Mounir Gouri. Cet artiste originaire d’Annaba a gagné le Prix des amis de l’IMA (Institut du monde arabe). (Fournie)

Dessin, peinture, sculpture, installations, photographie, vidéo: Sadek Rahim est quant à lui un artiste pluridisciplinaire. Il a vécu en Syrie et en Jordanie et a été formé à l’École des beaux-arts de Beyrouth. Diplômé du prestigieux Central Saint Martins College of Arts and Design de Londres, il vit et travaille en Algérie depuis 2004 et poursuit sa carrière internationale. Il a notamment exposé aux Émirats arabes unis, en France, en Corée, en Espagne, en Argentine, en Allemagne, en Grande-Bretagne, au Liban, en Slovaquie, en Tunisie, au Maroc, au Sénégal et aux États-Unis.

L’exposition «Quelque part entre le silence et les parlers» est programmée du 26 au 28 novembre 2021 à la Maison des arts de Malakoff, dans les Hauts-de-Seine, en région parisienne.  


Des auteurs se retirent des prix littéraires PEN America pour protester contre la position de l’organisation sur Gaza

Dans une lettre ouverte adressée au conseil d'administration cette semaine, les écrivains ont demandé la démission de la directrice générale de l'organisation, Suzanne Nossel, de sa présidente, Jennifer Finney Boylan, ainsi que de l'ensemble du comité exécutif. (PEN America)
Dans une lettre ouverte adressée au conseil d'administration cette semaine, les écrivains ont demandé la démission de la directrice générale de l'organisation, Suzanne Nossel, de sa présidente, Jennifer Finney Boylan, ainsi que de l'ensemble du comité exécutif. (PEN America)
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  • Une trentaine d’écrivains ont signé une lettre ouverte qui critique l'organisation en raison de son «échec à dénoncer le génocide du peuple palestinien»
  • Ils appellent la directrice générale, Suzanne Nossel, la présidente, Jennifer Finney Boylan, et l'ensemble du comité exécutif à démissionner

DUBAÏ: Trente auteurs et traducteurs ont signé une lettre ouverte à PEN America dans laquelle ils ont décliné l’invitation ou retiré leurs œuvres de la course aux prix littéraires 2024 de l'organisation en signe de protestation contre son «échec à dénoncer le génocide du peuple palestinien et à défendre nos confrères écrivains à Gaza». 

Dans cette missive adressée au conseil d'administration cette semaine, les signataires «rejettent fermement PEN America pour son incapacité à dénoncer le génocide à Gaza» et réclament la démission de la directrice générale de l'organisation, Suzanne Nossel, de sa présidente, Jennifer Finney Boylan, et de l'ensemble du comité exécutif. 

Parmi les signataires figurent la cofondatrice du festival PEN World Voices, Esther Allen, ainsi que Joseph Earl Thomas, Kelly X. Hui, Nick Mandernach, Alejandro Varela, Maya Binyam et Julia Sanches. 

Allen a annoncé au cours de ce mois avoir décliné le prix PEN/Ralph Manheim de traduction. Dans un message publié sur X le 5 avril, elle a expliqué l’avoir fait en solidarité avec plus de 1 300 écrivains qui avaient critiqué PEN America pour son silence «sur le meurtre génocidaire des Palestiniens» et «en célébration, en mémoire et en deuil de tous les Palestiniens à jamais réduits au silence par les forces israéliennes soutenues par les États-Unis». 

De même, Binyam a récemment retiré son premier roman, Le Bourreau, de la course aux prix PEN/Jean Stein et PEN/Hemingway. 

Dans un courriel adressé à PEN America dont elle a publié une copie sur X le 11 avril, elle a expliqué qu'elle considérait comme «honteux que cette reconnaissance [de son travail] puisse exister sous la bannière de PEN America, dont la direction a été ferme dans son rejet du génocide en cours et de la lutte historique pour la libération de la Palestine». 

Dans leur lettre ouverte cette semaine, les signataires ont affirmé: «Les écrivains ont la responsabilité d’assumer leur rôle de gardiens attentifs de l'histoire pour mieux servir nos communautés». 

Ils ont ajouté qu'ils étaient «solidaires d'une Palestine libre» et qu’ils refusaient d'être «honorés par une organisation qui agit comme une façade culturelle pour l'impérialisme américain» ou «de participer à des célébrations qui serviront à occulter la complicité de PEN dans la normalisation du génocide». 

En réponse, PEN America a déclaré: «Les mots ont de l'importance et cette lettre mérite une attention particulière pour son langage et ses affirmations alarmantes.» 

«La guerre actuelle à Gaza est horrible. Mais nous ne pouvons pas accepter que la réponse à ses dilemmes déchirants et à ses conséquences réside dans la fermeture du dialogue et la suppression des points de vue.» 

«Nous respectons tous les écrivains pour avoir agi en leur âme et conscience et nous continuerons à défendre leur liberté d'expression.» 

Les prix seront remis lors d'une cérémonie qui se tiendra le 29 avril à Manhattan. 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Tunnel et mur de fortification mis au jour par des archéologues à Djeddah

La découverte de nouvelles preuves d’un établissement humain dans la grotte Umm Jirsan, située à Harrat Khaybar à Médine, a été annoncée par la Commission du patrimoine saoudien. (SPA)
La découverte de nouvelles preuves d’un établissement humain dans la grotte Umm Jirsan, située à Harrat Khaybar à Médine, a été annoncée par la Commission du patrimoine saoudien. (SPA)
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  • Découvertes liées à l’expansion des défenses de la ville aux XVIIIe et XIXe siècles
  • Découverte de nouvelles preuves de peuplement humain dans la grotte Umm Jirsan à Médine

RIYADH : Une série de découvertes archéologiques à Djeddah et à Médine ont été révélées jeudi par le Programme historique de Djeddah et la Commission saoudienne du patrimoine.

La Commission a annoncé la découverte de nouvelles preuves de l'existence d'un établissement humain dans la grotte d'Umm Jirsan, située dans le Harrat Khaybar de Médine, et les vestiges d'un ancien tunnel souterrain et d'un mur fortifié, qui entouraient autrefois la ville, ont été annoncés par le programme dans le cadre de la phase inaugurale du projet d'archéologie de Médine.

Situées dans le secteur nord de la ville historique de Djeddah, à côté de la place Al-Kidwa et à proximité de la place Al-Bayaa, ces structures historiques datent de plusieurs siècles.

Selon certaines estimations, Djeddah est devenue une ville fortifiée à la fin du Xe siècle ou au début du XIe siècle, mais les analyses en laboratoire suggèrent que les nouvelles découvertes appartiennent à une phase ultérieure de la fortification, probablement construite au cours des XVIIIe et XIXe siècles.

La découverte de nouvelles preuves d’un établissement humain dans la grotte Umm Jirsan, située à Harrat Khaybar à Médine, a été annoncée par la Commission du patrimoine saoudien. (SPA)
La découverte de nouvelles preuves d’un établissement humain dans la grotte Umm Jirsan, située à Harrat Khaybar à Médine, a été annoncée par la Commission du patrimoine saoudien. (SPA)

Des fouilles archéologiques ont révélé qu'au milieu du 19e siècle, le tunnel était devenu inutilisable et a été rapidement rempli de sable. Cependant, le mur est resté debout jusqu'en 1947, et certaines parties du mur de soutènement du tunnel sont restées intactes jusqu'à une hauteur de trois mètres.

Des céramiques européennes importées datant du 19e siècle ont également été trouvées, soulignant les liens commerciaux historiques de Jeddah. En outre, un fragment de poterie datant du 9e siècle a été découvert sur la place Al-Kidwa.

Ces découvertes font partie d'un ensemble plus large de découvertes archéologiques annoncées par le programme Historic Jeddah comme résultats de la première phase de son projet d'archéologie - un effort de collaboration qui implique des équipes nationales spécialisées, des experts saoudiens de la Commission du patrimoine et des archéologues étrangers.

Leur expertise combinée a révélé un trésor de 25 000 artefacts répartis sur quatre sites, ce qui constitue une avancée significative dans la compréhension de l'évolution culturelle de la Jeddah historique.

À Médine, la Commission du patrimoine a annoncé la découverte de nouvelles preuves d'un établissement humain dans la grotte d'Umm Jirsan à la suite de recherches menées par ses archéologues en coopération avec l'Université du roi Saud, l'Institut Max Planck d'Allemagne et le Service géologique d'Arabie saoudite, dans le cadre du Projet vert de la péninsule arabique, qui se concentre sur la recherche pluridisciplinaire sur le terrain.

Il s'agit de la première étude du Royaume portant sur la recherche archéologique à l'intérieur des grottes. Elle a donné lieu à des études archéologiques et à des fouilles dans plusieurs parties de la grotte, révélant des preuves remontant à la période néolithique.

L'élément de preuve le plus ancien remonte à 7 000 à 10 000 ans, ce qui englobe les périodes de l'âge du cuivre et de l'âge du bronze.

L'étude de la grotte a montré qu'elle a été utilisée par des groupes pastoraux.

La découverte de nouvelles preuves d’un établissement humain dans la grotte Umm Jirsan, située à Harrat Khaybar à Médine, a été annoncée par la Commission du patrimoine saoudien. (SPA)
La découverte de nouvelles preuves d’un établissement humain dans la grotte Umm Jirsan, située à Harrat Khaybar à Médine, a été annoncée par la Commission du patrimoine saoudien. (SPA)

Les objets découverts comprennent du bois, du tissu et quelques outils en pierre, ainsi que des façades d'art rupestre représentant des scènes de pâturage de chèvres, de moutons, de vaches et de chiens, ainsi que des activités de chasse avec différents types d'animaux sauvages.

La commission a noté que les découvertes scientifiques constituent la preuve d'un établissement humain dans la grotte, et qu'un grand nombre d'ossements d'animaux, y compris ceux d'hyènes rayées, de chameaux, de chevaux, de cerfs, de caribous, de chèvres, de vaches et d'ânes sauvages et domestiques, ont également été identifiés.

L'analyse des squelettes humains à l'aide d'isotopes radioactifs a révélé que les anciens hommes avaient un régime alimentaire essentiellement carnivore, mais qu'au fil du temps, des plantes ont été introduites, ce qui suggère l'émergence de l'agriculture.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 

 

 

 

 

 

 


Cinéma: «Frères», Mathieu Kassovitz et Yvan Attal en enfants sauvages

L'acteur et réalisateur français Yvan Attal pose en marge de la 8e édition du Festival Cinéma et musique de film à La Baule, dans l'ouest de la France, le 30 juin 2022. (Photo de Loic VENANCE / AFP)
L'acteur et réalisateur français Yvan Attal pose en marge de la 8e édition du Festival Cinéma et musique de film à La Baule, dans l'ouest de la France, le 30 juin 2022. (Photo de Loic VENANCE / AFP)
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  • Le scénario est inspiré de la vie de Michel de Robert de Lafregeyre et de son frère Patrice, qui grandirent dans un bois
  • Le film, deuxième long métrage d'Olivier Casas, revient, par allers-retours entre passé et présent, sur ces sept années de «liberté extrême»

BORDEAUX: Une mère absente, une forêt, la survie et une fraternité salvatrice: dans "Frères", film inspiré d'une histoire vraie en salles mercredi, Yvan Attal et Mathieu Kassovitz jouent deux frangins unis par le secret d'une enfance passée dans un bois de Charente-Maritime.

Le scénario est inspiré de la vie de Michel de Robert de Lafregeyre et de son frère Patrice, qui grandirent dans un bois situé près du quartier de pêcheurs de Châtelaillon-Plage, au sud de La Rochelle, de 1949 à 1956.

Le film, deuxième long métrage d'Olivier Casas, revient, par allers-retours entre passé et présent, sur ces sept années de "liberté extrême" durant lesquelles les enfants, âgés de 5 et 6 ans au début, ont vécu dans une cabane construite au milieu des arbres, se nourrissant de baies, de poissons et de lièvres.

Il s'agit d'une "histoire d'amour entre deux frères" plutôt que d'une "histoire de survie", a nuancé le réalisateur lors d'une avant-première à Bordeaux.

Les deux frères, que leur mère n'est jamais venue récupérer à la colonie de vacances où ils avaient passé l'été 1949, se sont retrouvés livrés à eux-mêmes dans la nature, s'adaptant au froid et au manque de nourriture grâce à leur ingéniosité.

Finalement récupérés par leur mère en 1956, ils vécurent ensuite chez un couple de précepteurs parisiens, avant d'être séparés puis envoyé en pension dans le Nord-Pas-de-Calais pour l'un, scolarisé dans un lycée parisien auprès de sa mère pour l'autre.

Michel de Robert de Lafregeyre, aujourd'hui âgé de 78 ans et incarné par Yvan Attal, a étudié l'architecture et en a fait son métier. Son frère Patrice, joué par Mathieu Kassovitz, devenu directeur d'une clinique en Alsace, s'est suicidé en 1993, à l'âge de 48 ans.

C'est après sa mort que Michel de Robert de Lafregeyre a raconté leur histoire, jusque-là gardée secrète, à ses proches.

Il y a neuf ans, il a répondu aux questions de son ami Olivier Casas, qui a voulu en faire un film. L'ancien architecte, qui ne pensait pas que sa vie se retrouverait ainsi "sur la place publique", a accepté. En hommage à son frère.