Procès 13-Novembre, les 2H30 de huis-clos des otages du Bataclan

A un moment, un otage est pris d'un rire nerveux. Il est emmené au bout du couloir, raconte David. «Un coup part. Je ne ressens plus rien, c'est une file d'attente pour l'enfer». Mais l'otage est ramené, on a tiré à côté de sa tête. (Photo, AFP)
A un moment, un otage est pris d'un rire nerveux. Il est emmené au bout du couloir, raconte David. «Un coup part. Je ne ressens plus rien, c'est une file d'attente pour l'enfer». Mais l'otage est ramené, on a tiré à côté de sa tête. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 20 octobre 2021

Procès 13-Novembre, les 2H30 de huis-clos des otages du Bataclan

  • Les otages du Bataclan ont faire vivre à la cour leurs deux heures et demi de huis-clos avec les jihadistes, entre terreur et conversations absurdes
  • «Moi j'ai baigné dans le sang et les tripes du terroriste, et j'ai eu beaucoup de plaisir. Encore aujourd'hui ça reste une joie, morbide, mais totalement assumée»

PARIS : "Pourquoi tu prends tes affaires ? Tu vas mourir". Au procès des attentats du 13-Novembre, les otages du Bataclan ont faire vivre à la cour leurs deux heures et demi de huis-clos avec les jihadistes, entre terreur et conversations absurdes.

Du balcon de la salle de spectacle, Grégory et Caroline ont d'abord entendu les tirs, avant de voir apparaître une silhouette "en jogging, avec une Kalachnikov". 

Ils s'accroupissent entre deux rangées de sièges et attendent les yeux fermés. "Un peu fatalistes", dit à la barre Grégory, informaticien de 39 ans. 

"Et là, une voix directive qui dit +debout+", se rappelle Grégory, chemise bleue, foulard bordeaux, voix douce. "Je garde les yeux fermés. Une deuxième fois. +Debout+". 

Grégory ouvre les yeux, une arme est braquée sur lui. Il se lève, prend son sac. "Pourquoi tu prends tes affaires ?", lui demande le jihadiste. "T'en as plus besoin, tu vas mourir".

Son amie Caroline, qui témoigne en fauteuil roulant devant la cour d'assises spéciale, a directement essayé de parler : "J'avais lu que c'était plus dur de tuer quelqu'un avec qui on avait dialogué", explique cette femme blonde de 40 ans. "Je lui ai dit que je ne pouvais pas me lever, que j'étais handicapée. Il m'a répondu qu'il n'en avait rien à foutre". 

Les deux assaillants rassemblent leurs otages, récupèrent David et Sébastien, agrippés en équilibre sur un rambarde de la façade extérieure du Bataclan. Au total, ils sont onze alignés, assis contre un mur du balcon. 

David, à l'époque barman de 23 ans qui ne pensait qu'"à boire des bières avec ses potes" est maintenant "certain" qu'il va mourir. 

Devant eux, le jihadiste Foued Mohamed Aggad a le pied appuyé sur la balustrade, exécute ceux qui n'ont pas pu fuir la fosse. 

Les assaillants ont "l'air de s'amuser", témoignent au procès les ex-otages. "Regarde, ils font semblant d'être morts", moque le jihadiste. 

Ismaël Omar Mostefaï prévient les otages: "celui qui essaie de faire le justicier, je le tue". 

Ils clament leurs revendications, "pour la Syrie", la faute "à François Hollande". Et veulent savoir qui a voté pour qui. Ils s'agacent très vite des réponses : "Mais attendez, y'a personne qui vote ici ?".

A un moment, un otage est pris d'un rire nerveux. Il est emmené au bout du couloir, raconte David. "Un coup part. Je ne ressens plus rien, c'est une file d'attente pour l'enfer". Mais l'otage est ramené, on a tiré à côté de sa tête. 

«Je suis chaud»

En bas près de la scène, le troisième assaillant, Samy Amimour, visé par des tirs policiers, actionne sa ceinture explosive. 

Les otages sont transférés dans un local minuscule. Les deux assaillants ne semblent pas avoir de plan, veulent appeler les médias, demandent des talkies-walkies puis finalement des téléphones, pour "négocier". 

"J'ai vite senti qu'ils n'avaient rien à négocier", dit Caroline, comme d'autres ex-otages.

L'un d'eux se met à "faire un jogging sur place", se souvient-elle. "Je suis chaud pour la faire durer cette prise d'otages", annonce-t-il. 

Plus tard, il s'assoit à côté d'elle, nerveux. "Son coude contre mon genou", "le pouce sur le détonateur" de sa ceinture, dit-elle. Elle se concentre pour ne pas bouger.

Grégory est chargé d'être le porte-voix des jihadistes quand la police investit les lieux : "On est à deux, on a des Kalachnikov et des ceintures explosives", "si vous ne reculez pas, on tue tout le monde et on se fait sauter".

Il essaie ensuite de faire passer un numéro de téléphone au négociateur de la BRI, mais le policier a un fort accent du sud et ils ont dû mal à se comprendre. David pense à "une publicité très connue pour l'huile d'olive", tous les otages sourient un instant.

A la barre, Grégory s'excuse d'avoir raconté cet épisode dans les médias, "certaines personnes l'ont mal pris". "C'est juste que ça nous a un peu fait souffler dans cette horreur", dit-il.

"Ça fait un peu souffler l'accent, par moment", répond avec le sien - du sud également - le président Jean-Louis Périès, faisant rire la salle. 

Les otages sortiront tous vivants de l'assaut de la BRI, "un miracle", répètent ceux qui sont depuis devenus amis, des "potages". 

Les deux preneurs d'otages seront tués dans l'assaut, l'un en déclenchant sa ceinture.

Arnaud était à quelques pas. A la barre, ce grand chauve rappelle les témoignages terribles de ceux qui ont "baigné dans le sang" des 90 personnes décédées au Bataclan ce soir là. 

"Je veux dire une chose. Moi j'ai baigné dans le sang et les tripes du terroriste, et j'ai eu beaucoup de plaisir", soutient-il. "Encore aujourd'hui ça reste une joie, morbide, mais totalement assumée".


L’histoire de Donia, arrivée de Gaza à Paris, le quotidien morbide des Gazaouis qui ne veulent que vivre

Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous. (AFP)
Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous. (AFP)
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  • Donia Al-Amal Ismail, poète, journaliste et mère de quatre enfants, habitante de Gaza, arrivée à Paris il y a presque trois mois. Elle raconte son histoire à Arab News en français.
  • Difficile de ne pas se sentir anéantie face à ce visage doux et tendre, à ces yeux verts empreints d’une tristesse insondable.

PARIS: Depuis le début de la guerre à Gaza, les récits qui parviennent à franchir les ruines et le silence imposé sont rares.
Derrière les chiffres et les bilans atones relayés par les médias, il y a des voix : celles de civils qui ont vu leur existence basculer en quelques heures.
Parmi elles, Donia Al-Amal Ismail, poète, journaliste et mère de quatre enfants, habitante de Gaza, arrivée à Paris il y a presque trois mois. Elle raconte son histoire à Arab News en français.
Difficile de ne pas se sentir anéantie face à ce visage doux et tendre, à ces yeux verts empreints d’une tristesse insondable. Donia témoigne de ce que signifie vivre la guerre : vivre avec la peur, la faim, fuir sous les bombes, errer d’un abri de fortune à un autre.
Marcher pour ne pas crever, marcher avec le seul souci de garder en vie ses deux enfants (une fille et un garçon) restés avec elle, les deux autres étant en Égypte.
Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous.
Son récit, émouvant par-dessus tout, saccadé par de longs silences et des larmes qui coulent spontanément sur les joues, n’en est pas moins ferme : pour elle, indéniablement, Gaza est le foyer des Gazaouis qui feront tout pour reconstruire.

 


Lecornu recevra les socialistes mercredi, annonce Olivier Faure

Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure. (AFP)
Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure. (AFP)
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  • Depuis sa nomination mardi, Sébastien Lecornu a commencé ses consultations avec d'abord les partis de son "socle commun" (bloc central et LR), puis les syndicats et organisations patronales avec qui il a des entretiens encore lundi et mardi
  • Mais le rendez-vous le plus attendu est celui avec les socialistes. Déjà menacé de censure par LFI et le RN, c'est eux qui peuvent éviter à M. Lecornu de connaître le même sort que ses prédécesseurs

PARIS: Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure.

"On a rendez-vous mercredi matin et donc nous le verrons pour la première fois", a déclaré M. Faure lundi sur France 2. Les Ecologistes de Marine Tondelier et le Parti communiste de Fabien Roussel ont également indiqué à l'AFP être reçus mercredi, respectivement à 14H et 18H.

Depuis sa nomination mardi, Sébastien Lecornu a commencé ses consultations avec d'abord les partis de son "socle commun" (bloc central et LR), puis les syndicats et organisations patronales avec qui il a des entretiens encore lundi et mardi.

Mais le rendez-vous le plus attendu est celui avec les socialistes. Déjà menacé de censure par LFI et le RN, c'est eux qui peuvent éviter à M. Lecornu de connaître le même sort que ses prédécesseurs.

Au coeur de ce rendez-vous le projet de budget 2026 que le nouveau gouvernement devra présenter avant la mi-octobre au Parlement.

Les socialistes posent notamment comme conditions un moindre effort d'économies l'année prochaine que ce qu'envisageait François Bayrou et une fiscalité plus forte des plus riches, à travers la taxe sur les très hauts patrimoines élaborée par l'économiste Gabriel Zucman (2% sur les patrimoines de plus de 100 millions d'euros).

Mais Sébastien Lecornu, s'il s'est dit prêt samedi à "travailler sans idéologie" sur les questions "de justice fiscale" et de "répartition de l'effort", a déjà fait comprendre son hostilité à cette taxe Zucman, et notamment au fait de taxer le patrimoine professionnel "car c'est ce qui permet de créer des emplois".

"Quand on parle patrimoine professionnel, vous pensez à la machine outil ou aux tracteurs mais pas du tout. On parle d'actions, la fortune des ultrariches, elle est essentiellement en actions", lui a répondu M. Faure.

"Si vous dites que, dans la base imposable, on retire ce qui est l'essentiel de leur richesse, en réalité, vous n'avez rien à imposer", a-t-il argumenté.

"C'était déjà le problème avec l'Impôt sur la fortune (ISF, supprimé par Emmanuel Macron) qui touchait les +petits riches+ et épargnaient les +ultrariches+ parce que les +ultrariches+ placent leur argent dans des holdings", a-t-il reconnu.

 


Pour Sébastien Lecornu, un premier déplacement consacré à la santé

Sébastien Lecornu assiste à la présentation du supercalculateur Asgard au Mont Valérien à Suresnes, près de Paris, le 4 septembre 2025. (AFP)
Sébastien Lecornu assiste à la présentation du supercalculateur Asgard au Mont Valérien à Suresnes, près de Paris, le 4 septembre 2025. (AFP)
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  • Déplacement symbolique à Mâcon : Pour son premier déplacement, Sébastien Lecornu met l'accent sur l'accès aux soins et le quotidien des Français
  • Conscient de l'absence de majorité, il consulte partis et syndicats, cherchant des terrains d'entente sur le budget, tout en laissant la porte ouverte à une fiscalité plus juste

PARIS: Sébastien Lecornu se rend samedi en province, à Mâcon, pour son premier déplacement en tant que Premier ministre consacré à la santé et à "la vie quotidienne" des Français, délaissant pendant quelques heures les concertations qu'il mène activement à Paris avant de former un gouvernement.

Quatre jours à peine après sa nomination, le nouveau et jeune (39 ans) locataire de Matignon va à la rencontre des Français, pour qui il reste encore un inconnu. Il échangera notamment avec des salariés d'un centre de santé de Saône-et-Loire dont le but est d'améliorer l'accès aux soins.

Lui-même élu local de l'Eure, où il a été maire, président de département et sénateur, ce fils d'une secrétaire médicale et d'un technicien de l'aéronautique avait assuré dès le soir de sa nomination "mesurer les attentes" de ses concitoyens et "les difficultés" qu'ils rencontraient.

Celles-ci sont souvent "insupportables" pour accéder à un médecin ou à un professionnel de santé, parfois "source d'angoisse", souligne son entourage. Le Premier ministre entend dans ce contexte "témoigner de la reconnaissance de la Nation à l’égard des personnels soignants" et "réaffirmer la volonté du gouvernement de faciliter l’accès aux soins".

Il s'agit aussi pour Sébastien Lecornu de convaincre l'opinion, autant que les forces politiques, du bien-fondé de sa méthode: trouver des terrains d'entente, en particulier sur le budget, permettant de gouverner sans majorité.

Sébastien Lecornu est très proche d'Emmanuel Macron, avec qui il a encore longuement déjeuné vendredi à l'Elysée.

- Mouvements sociaux -

Sa nomination coïncide avec plusieurs mouvements sociaux. Le jour de sa prise de fonction, une mobilisation lancée sur les réseaux sociaux pour "bloquer" le pays a réuni 200.000 manifestants, et une autre journée de manifestations à l'appel des syndicats est prévue jeudi.

"Il y a une grande colère" chez les salariés, a rapporté Marylise Léon, la secrétaire générale de la CFDT, premier syndicat de France, à l'issue d'une entrevue vendredi avec le nouveau Premier ministre, qui lui a dit travailler sur une "contribution des plus hauts revenus" dans le budget 2026.

C'est sur le budget que ses deux prédécesseurs, François Bayrou et Michel Barnier, sont tombés. Et Sébastien Lecornu cherche en priorité une forme d'entente avec les socialistes.

Mais il lui faut dans le même temps réduire les déficits, alors que l'agence de notation Fitch a dégradé vendredi soir la note de la dette française.

Le centre et la droite de la coalition gouvernementale se disent prêts à taxer plus fortement les ultra-riches sans pour autant aller jusqu'à l'instauration de la taxe Zucman sur les plus hauts patrimoines, mesure phare brandie par les socialistes et dont LR ne veut pas.

Une telle mesure marquerait en tout cas une des "ruptures" au fond prônées par Sébastien Lecornu à son arrivée, puisqu'elle briserait le tabou des hausses d'impôts de la macronie.

- Méthode -

Sébastien Lecornu veut aussi des changements de méthode.

Il a d'abord réuni jeudi --pour la première fois depuis longtemps-- les dirigeants des partis du "socle commun", Renaissance, Horizons, MoDem et Les Républicains, afin qu'ils s'entendent sur quelques priorités communes.

Un format "présidents de parti" qui "permet de travailler en confiance, de façon plus directe, pour échanger sur les idées politiques, sur les arbitrages", salue un participant.

Avant les oppositions et à quelques jours d'une deuxième journée de manifestations, il a consulté les partenaires sociaux, recevant vendredi la CFDT et Medef, avant la CGT lundi.

En quête d'un compromis pour faire passer le budget, le chef de gouvernement pourrait repartir du plan de son prédécesseur François Bayrou délesté de ses mesures les plus controversées. A l'instar de la suppression de deux jours fériés.

L'hypothèse d'une remise sur les rails du conclave sur les retraites semble aussi abandonnée. Les partenaires sociaux refusent de toute façon de le rouvrir.

Des gestes sont attendus à l'égard des socialistes alors qu'à l'Elysée, on estime que le Rassemblement national, premier groupe à l'Assemblée nationale, se range désormais comme la France insoumise du côté du "dégagisme".

Cultivant une parole sobre voire rare, Sébastien Lecornu ne s'exprimera qu'à l'issue de ces consultations "devant les Français", avant la traditionnelle déclaration de politique générale, devant le Parlement.