«J'espère qu'il est parmi nous»: le Mexique cherche ses bébés disparus pendant la «guerre sale»

Roberto Martinez tient le portrait de sa sœur Lourdes, disparue en 1974, à Culiacan, le 18 octobre 2021. (Photo, AFP)
Roberto Martinez tient le portrait de sa sœur Lourdes, disparue en 1974, à Culiacan, le 18 octobre 2021. (Photo, AFP)
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Publié le Dimanche 24 octobre 2021

«J'espère qu'il est parmi nous»: le Mexique cherche ses bébés disparus pendant la «guerre sale»

  • L'Unité de recherche spécialisée sur la «guerre sale» a été créée en 2019 mais son travail ne débute qu'aujourd'hui
  • Les coupables présumés: des groupuscules militaires et policiers aujourd'hui dissous, responsables de graves violations des droits humains

MEXICO: Grâce à une commission d'enquête, Roberto Martinez a de nouveaux espoirs de retrouver son neveu, qui serait né pendant la détention de sa sœur victime de la répression contre les opposants politiques au Mexique entre les années 1960 et 1980, connue sous le nom de "guerre sale".

Cette affaire de bébés volés rappelle, dans une moindre ampleur, ce qu'ont connu des milliers de familles au Chili et en Argentine sous la dictature, dans les années 1970 et 1980.

Enseignant à la retraite, Roberto Martinez compte sur une commission mise en place par le gouvernement pour rechercher au moins 14 personnes nées pendant la disparition forcée de leur mère.

Les coupables présumés: des groupuscules militaires et policiers aujourd'hui dissous, responsables de graves violations des droits humains.

Lourdes Martinez, la soeur de Roberto, a été arrêtée en juin 1974 à Culiacan, dans l'Etat de Sonora (nord-est du Mexique) quand elle avait 23 ans.

Elle militait au sein de la Ligue communiste 23 septembre, dissoute en 1983 après avoir défié pendant une décennie le Parti révolutionnaire institutionnel (PRI) au pouvoir de 1929 à 2000.

"Ce que j'espère c'est que mon neveu ou ma nièce soit né et qu'il soit parmi nous", confie Roberto, 65 ans, depuis Culiacan.

C'est la première fois au Mexique qu'un gouvernement recherche des personnes qui auraient été adoptées après la disparition forcée de leurs mères.

L'Unité de recherche spécialisée sur la "guerre sale" a été créée en 2019 mais son travail ne débute qu'aujourd'hui.

Cruauté

Pendant cette période, environ 500 opposants politiques et étudiants ont disparu, selon la Commission nationale des droits humains, un organe gouvernemental.

Pour pousser l'Etat à les chercher, des proches se sont rapprochés des organisations qui tentent de retrouver les dizaines de milliers de disparus au Mexique depuis 2006, quand a été lancée une offensive anti-drogue controversée qui a fait monter en flèche la violence du crime organisé.

"J'espère du fond du cœur que les autorités m'aideront à retrouver mon neveu ou ma nièce et sa mère", "j'aimerais raconter à tous ceux qui sont nés dans les mêmes circonstances ce que leurs mères ont donné pour le pays", poursuit M. Martinez.

Pour les retrouver, la commission s'appuie sur les archives officielles et des témoignages.

"Organiser des accouchements clandestins, pour potentiellement s'approprier les enfants, c'est extrêmement cruel", estime Javier Yankelevich, directeur de l'unité spécialisée rattachée à la commission. 

Il appelle ceux "qui peuvent avoir des doutes sur leur identité" à "étudier la possibilité que l'histoire qu'on leur a racontée n'est pas la leur et à se rapprocher des institutions" pour vérifier.

Camilo Vicente, auteur d'un ouvrage sur les disparitions forcées au Mexique entre les années 1940 et 1980, a trouvé des indices sur des adoptions irrégulières dans le pays ces années-là, sans être de l'ampleur de ce qui s'est passé au Chili, où 8 000 bébés auraient été volés, ou en Argentine, où 500 enfants seraient concernés.

"Même s'il n'y avait qu'un ou deux cas, c'est le devoir de l'Etat de les rechercher" et de "dire combien d'enfants sont morts lors d'opérations militaires ou ont subi des tortures, autre pan caché de cette contre-insurrection mexicaine largement niée", estime M. Vicente.

Identité retrouvée

C'est ce qui est arrivé aux enfants de Roberto Antonio Gallangos et Carmen Vargas, membres de la Ligue communiste arrêtés en 1975 puis portés disparus. 

Lucio Antonio, âgé de 4 ans, et Aleida, deux ans, ont été séparés et gardés par des amis du couple avant que le fils soit enlevé par des agents et blessé, et que la fille soit confiée à une autre famille, sans que son histoire ne soit révélée.

Placé en orphelinat, Lucio Antonio a été adopté en 1976 et rebaptisé Juan Carlos Hernandez.

À l'initiative de son père adoptif, Aleida a finalement découvert sa véritable identité en 2001. En 2004, après avoir réussi à lever les obstacles administratifs pour pouvoir consulter les archives, elle a localisé son frère à Washington, où ils vivent aujourd'hui tous deux.

Ils espèrent aujourd'hui que la Cour interaméricaine des droits de l'homme, institution indépendante basée au Costa-Rica, obligera le Mexique à localiser leurs parents, à intégrer la "guerre sale" dans l'histoire officielle et à les indemniser.


La flottille pour Gaza quitte la Tunisie, direction le territoire palestinien

Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
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  • Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place
  • Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser"

BIZERTE: Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire.

"Nous essayons d'envoyer un message à la population de Gaza, (de lui dire) que le monde ne l'a pas oubliée", a dit à l'AFP la militante écologiste suédoise Greta Thunberg avant d'embarquer dans le port de Bizerte, dans le nord de la Tunisie.

"Lorsque nos gouvernements ne prennent pas leurs responsabilités, nous n'avons pas d'autre choix que de prendre les choses en main", a-t-elle ajouté.

Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place.

Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser", "nous partons par solidarité, dignité et pour la justice".

Les embarcations arrivées d'Espagne s'étaient transférées à Bizerte après un séjour mouvementé à Sidi Bou Saïd, près de Tunis.

La "Global Sumud Flotilla", accueillie par des rassemblements de soutien, a indiqué que deux de ses bateaux avaient été visés par des attaques de drones deux nuits de suite la semaine passée, publiant des vidéos à l'appui. Après la deuxième annonce, les autorités tunisiennes ont dénoncé "une agression préméditée" et dit mener une enquête.

L'eurodéputée franco-palestinienne Rima Hassan qui, comme Greta Thunberg, avait été détenue à bord du "Madleen" lors d'une précédente traversée vers Gaza, a dit à l'AFP redouter "bien entendu" de nouvelles attaques, ajoutant: "on se prépare aux différents scénarios".

Selon elle, les personnalités les plus en vue - dont l'actrice française Adèle Haenel - ont été réparties entre les deux plus gros bateaux de coordination "de manière à équilibrer et (ne) pas concentrer toutes les personnalités visibles dans un seul et même bateau".

Le départ de Tunisie a été repoussé à plusieurs reprises en raison de motifs de sécurité, de retard dans les préparatifs pour certains bateaux et de la météo.

La Global Sumud Flotilla ("sumud" signifie "résilience" en arabe), qui comprend aussi des embarcations parties ces derniers jours de Corse (France), Sicile (Italie) et Grèce, avait initialement prévu d'atteindre le territoire palestinien à la mi-septembre, après deux tentatives bloquées par Israël en juin et juillet.

 


Les ministres du Groupe E3 condamnent les frappes israéliennes à Doha

Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
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  • Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza
  • Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas

PARIS: Les ministres des Affaires étrangères de l’Allemagne, de la France et du Royaume-Uni ont condamné, dans une déclaration conjointe, les frappes israéliennes ayant visé Doha le 9 septembre. Ils estiment que ces attaques constituent une violation de la souveraineté du Qatar et représentent un risque d’escalade supplémentaire dans la région.

Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza. « Nous appelons toutes les parties à intensifier leurs efforts pour parvenir à un cessez-le-feu immédiat », ont-ils insisté.

Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas. Ils appellent les parties à « faire preuve de retenue » et à saisir l’opportunité de rétablir la paix.

Les ministres ont réaffirmé que la priorité devait rester la mise en place d’un cessez-le-feu permanent, la libération des otages et l’acheminement massif d’aide humanitaire à Gaza pour enrayer la famine. Ils demandent l’arrêt immédiat des opérations militaires israéliennes dans la ville de Gaza, dénonçant les déplacements massifs de civils, les pertes humaines et la destruction d’infrastructures vitales.

Ils exhortent par ailleurs à garantir aux Nations unies et aux ONG humanitaires un accès sûr et sans entrave à l’ensemble de la bande de Gaza, y compris dans le Nord.

Enfin, le Groupe E3 a rappelé sa condamnation « sans équivoque » des crimes commis par le Hamas, qualifié de mouvement terroriste, qui doit, selon eux, « libérer immédiatement et sans condition les otages, être désarmé et écarté définitivement de la gouvernance de la bande de Gaza ».


L’ONU adopte une résolution franco-saoudienne pour la paix israélo-palestinienne sans le Hamas

L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
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  • Résolution adoptée par 142 voix pour, 10 contre — dont Israël et les États-Unis
  • Le vote précède un sommet de haut niveau co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre

​​​​​​NEW YORK : L’Assemblée générale des Nations unies a voté massivement vendredi en faveur de l’adoption de la « Déclaration de New York », une résolution visant à relancer la solution à deux États entre Israël et la Palestine, sans impliquer le Hamas.

Le texte a été approuvé par 142 pays, contre 10 votes négatifs — dont Israël et les États-Unis — et 12 abstentions. Il condamne fermement les attaques du Hamas du 7 octobre 2023, exige le désarmement du groupe, la libération de tous les otages, et appelle à une action internationale collective pour mettre fin à la guerre à Gaza.

Intitulée officiellement « Déclaration de New York sur le règlement pacifique de la question de Palestine et la mise en œuvre de la solution à deux États », la résolution a été présentée conjointement par l’Arabie saoudite et la France, avec le soutien préalable de la Ligue arabe et de 17 États membres de l’ONU.

Le texte souligne la nécessité de mettre fin à l’autorité du Hamas à Gaza, avec un transfert des armes à l’Autorité palestinienne, sous supervision internationale, dans le cadre d’une feuille de route vers une paix durable. Celle-ci inclut un cessez-le-feu, la création d’un État palestinien, le désarmement du Hamas, et une normalisation des relations entre Israël et les pays arabes.

L’ambassadeur de France, Jérôme Bonnafont, qui a présenté la résolution, l’a qualifiée de « feuille de route unique pour concrétiser la solution à deux États », soulignant l’engagement de l’Autorité palestinienne et des pays arabes en faveur de la paix et de la sécurité. Il a aussi insisté sur l’urgence d’un cessez-le-feu immédiat et de la libération des otages.

Ce vote intervient à quelques jours d’un sommet de haut niveau de l’ONU, co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre, où le président Emmanuel Macron s’est engagé à reconnaître officiellement un État palestinien.

La représentante américaine, Morgan Ortagus, s’est vivement opposée à la résolution, la qualifiant de « coup de communication malvenu et malavisé » qui récompenserait le Hamas et nuirait aux efforts diplomatiques authentiques.

Elle a dénoncé la mention du « droit au retour » dans le texte, estimant qu’il menace le caractère juif de l’État d’Israël.

« Cette résolution est un cadeau au Hamas,» a déclaré Mme Ortagus, ajoutant que le désarmement du Hamas et la libération des otages étaient la clé de la fin de la guerre. Elle a exhorté les autres nations à se joindre aux États-Unis pour s'opposer à la déclaration.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com