Maroc-Algérie: la tragédie des familles séparées par la frontière fermée

Une photo prise depuis la région marocaine d'Oujda montre des Algériens faisant signe le long de la frontière avec le Maroc le 4 novembre 2021. (Photo, AFP)
Une photo prise depuis la région marocaine d'Oujda montre des Algériens faisant signe le long de la frontière avec le Maroc le 4 novembre 2021. (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 09 novembre 2021

Maroc-Algérie: la tragédie des familles séparées par la frontière fermée

  • La frontière a été fermée en 1994 par l'Algérie après que le Maroc, accusant son voisin d'être impliqué dans un attentat contre un hôtel à Marrakech, a instauré un visa obligatoire aux ressortissants algériens pour entrer sur son territoire
  • La tension est encore montée d'un cran ces derniers jours après que l'Algérie a fait état d'un bombardement ayant causé la mort de trois camionneurs algériens au Sahara occidental et qu'Alger a attribué à Rabat

OUJDA : "On est si près mais si loin", soupire la Marocaine Fatima Chaaoufi en regardant au loin le village algérien où vivent des proches, qu'elle n'a plus revus depuis des années.

Tout comme elle, des familles marocaines et algériennes sont déchirées, voire précarisées, par la frontière fermée depuis 1994 entre les deux frères ennemis du Maghreb.

Au village d'Oulad Bouarfa, à l'est d'Oujda, à un jet de pierre l'Algérie, Mme Chaaoufi pleure son frère cadet enterré il y a un mois dans le village algérien limitrophe sans qu'elle ait pu lui dire au revoir.   

 

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Un garde-frontière marocain patrouille le long de la frontière avec l'Algérie dans la région d'Oujda, le 4 novembre 2021. (Photo, AFP)

 

Postée devant la basse-cour de l'humble ferme familiale, le visage encadré par un foulard et tablier à la taille, la septuagénaire ressasse ce "jour maudit". 

"Quand j'ai appris sa mort, je n'ai pas pu me contrôler. J'ai couru jusqu'aux barbelés (de la frontière). On a essayé de me retenir mais c'était plus fort que moi", raconte-t-elle les yeux embués de larmes.  

"J'ai regardé de loin le cortège funèbre, impuissante et en pleurs, alors que j'aurais pu y être si la frontière n'était pas fermée", enchaîne-t-elle en fixant le cheval de frise délimitant les deux territoires.

La frontière a été fermée en 1994 par l'Algérie après que le Maroc, accusant son voisin d'être impliqué dans un attentat contre un hôtel à Marrakech, a instauré un visa obligatoire aux ressortissants algériens pour entrer sur son territoire.

Et les récentes tensions entre les deux pays ont éloigné tout espoir d'une éventuelle réouverture.

 

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Des Marocains se rassemblent le long de la frontière avec l'Algérie dans la région d'Oujda, le 4 novembre 2021. (Photo, AFP)

 

En août, après des mois de frictions, Alger a en effet rompu ses relations diplomatiques avec le Maroc, l'accusant "d'actions hostiles". Rabat a regretté une décision "complétement injustifiée".

La tension est encore montée d'un cran ces derniers jours après que l'Algérie a fait état d'un bombardement ayant causé la mort de trois camionneurs algériens au Sahara occidental --territoire disputé entre le Maroc et les indépendantistes du Front Polisario-- et qu'Alger a attribué à Rabat.

«Avenir sombre»

"Quel dommage de voir deux peuples frères séparés par des décisions politiques", déplore Bachir Chaouch, né en 1951 à El Amria, en Algérie, mais rentré à Oujda avant l'indépendance de l'Algérie en 1962.

Aujourd'hui, il a perdu tout contact avec ses oncles, ses tantes et ses cousins restés en Algérie. "Pourtant, avant (1994), c'était différent, on allait voir nos familles, les affaires se portaient bien, jamais on aurait pensé qu'on en arriverait là". 

Si la frontière est fermée depuis bientôt 30 ans, elle est restée poreuse dans cette région où prospérait le trafic de carburants et de marchandises jusqu'en 2013. 

Mais cette année là, déterminées à "faire la guerre au trafic de drogue", les autorités algériennes renforcent les patrouilles frontalières et creusent des tranchées. Rabat réplique en installant des clôtures. 

 

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Des gardes-frontières marocains patrouillent le long de la frontière avec l'Algérie, dans la région d'Oujda, le 4 novembre 2021. (Photo, AFP)

 

Les rares âmes d'Oulad Bouarfa, qui vivaient principalement de la contrebande, se souviennent avec amertume du temps d'avant. "C'était la belle époque. On travaillait des deux côtés de la frontière en ramenant du carburant d'Algérie et en vendant là-bas des vêtements", raconte Mohamed Haddouri, qui lui aussi a de la famille en Algérie, "comme presque tout le monde dans la région". 

"Aujourd'hui, on vivote en élevant du bétail, mais ce n'est pas assez pour faire vivre mes enfants", confesse l'ex-contrebandier. 

"Notre avenir s'annonce sombre", se désole le quinquagénaire. 

"C'est un coup dur pour nous. Mes quatre enfants sont au chômage", lâche Meriem Hamouyi, une villageoise aux grands yeux clairs et aux mains couvertes de henné. 

«Supplice»

Si aucune embellie entre les deux voisins ne se profile, "la cause humanitaire n'a pas besoin de calculs politiques", regrette Oualid Kébir, un Algérien basé à Oujda depuis plus de dix ans.

 

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Une photo prise depuis la région marocaine d'Oujda montre des gardes-frontières algériens patrouillant le long de la frontière avec le Maroc le 4 novembre 2021. (Photo, AFP)

 

"Il n'y a pas un +Oujdi+ (habitant d'Oujda) qui n'a pas de familles en Algérie. Pareil côté algérien. C'est une erreur grave d'entretenir ces divisions", estime M. Kébir, qui "fait du business dans les télécoms pour gagner sa vie".

Ce Youtubeur et activiste politique, habillé d'une veste de chasseur, dit vivre "un supplice psychologique" du fait de la séparation avec sa famille, mais affirme croire "à une relation apaisée entre les deux pays".


Négociations de paix au Soudan: le chef de l'armée prêt à «collaborer» avec Trump

Le chef de l'armée soudanaise et dirigeant de facto du pays, le général Abdel Fattah al-Burhane, s'est dit prêt à collaborer avec le président américain Donald Trump, au moment où les négociations pour un cessez-le-feu menées par les Etats-Unis sont à l'arrêt. (AFP)
Le chef de l'armée soudanaise et dirigeant de facto du pays, le général Abdel Fattah al-Burhane, s'est dit prêt à collaborer avec le président américain Donald Trump, au moment où les négociations pour un cessez-le-feu menées par les Etats-Unis sont à l'arrêt. (AFP)
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  • Le général al-Burhane "a affirmé la volonté du Soudan de travailler avec le président Trump, son secrétaire d'État (Marco Rubio) et son envoyé pour la paix au Soudan (Massad Boulos)"
  • Ce voyage était destiné à discuter de l'initiative présentée par le dirigeant saoudien au président américain lors d'une récente visite officielle à Washington, selon une source gouvernementale soudanaise

PORT-SOUDAN: Le chef de l'armée soudanaise et dirigeant de facto du pays, le général Abdel Fattah al-Burhane, s'est dit prêt à collaborer avec le président américain Donald Trump, au moment où les négociations pour un cessez-le-feu menées par les Etats-Unis sont à l'arrêt.

Le général al-Burhane "a affirmé la volonté du Soudan de travailler avec le président Trump, son secrétaire d'État (Marco Rubio) et son envoyé pour la paix au Soudan (Massad Boulos)", a déclaré le ministère des Affaires étrangères pro-armée dans un communiqué publié à l'issue d'un déplacement officiel à Ryad, à l'invitation du prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane.

Ce voyage était destiné à discuter de l'initiative présentée par le dirigeant saoudien au président américain lors d'une récente visite officielle à Washington, selon une source gouvernementale soudanaise.

Les négociations de paix menées par les Etats-Unis avec le groupe de médiateurs du Quad (réunissant Egypte, Arabe Saoudite et Emirats) sont à l'arrêt depuis que le général al-Burhane a affirmé que la dernière proposition de trêve transmise par M. Boulos était "inacceptable", sans préciser pourquoi.

Le militaire avait alors fustigé une médiation "partiale" et reproché à l'émissaire américain de reprendre les éléments de langage des Emirats, accusés d'armer les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).

Abou Dhabi nie régulièrement fournir des armes, des hommes et du carburant aux FSR, malgré des preuves fournies par des rapports internationaux et enquêtes indépendantes.

De leur côté, les FSR ont annoncé qu'ils acceptaient la proposition de trêve mais les attaques sur le terrain n'ont pas pour autant cessé au Kordofan, région au coeur de combats intenses.

Pour l'instant, aucune nouvelle date de négociations n'a été fixée, que ce soit au niveau des médiateurs du Quad ou de l'ONU qui essaie parallèlement d'organiser des discussions entre les deux camps.

Le Soudan est déchiré depuis avril 2023 par une guerre opposant l'armée, qui contrôle le nord et l'est du pays - aux FSR, dominantes dans l'ouest et certaines zones du sud.

Depuis la prise du dernier bastion de l'armée dans la vaste région voisine du Darfour, les combats se sont intensifiés dans le sud du pays, au Kordofan, région fertile, riche en pétrole et en or, charnière pour le ravitaillement et les mouvements de troupes.

Le conflit, entré dans sa troisième année, a fait plusieurs dizaines de milliers de morts, déraciné des millions de personnes et provoqué ce que l'ONU qualifie de "pire crise humanitaire au monde".

 


Le prince héritier saoudien rencontre le chef du conseil de transition soudanais pour discuter de la sécurité et de la stabilité

Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed bin Salman a rencontré lundi à Riyad Abdel Fattah Al-Burhan pour discuter des derniers développements au Soudan et des efforts visant à rétablir la sécurité et la stabilité dans le pays. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed bin Salman a rencontré lundi à Riyad Abdel Fattah Al-Burhan pour discuter des derniers développements au Soudan et des efforts visant à rétablir la sécurité et la stabilité dans le pays. (SPA)
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  • La réunion a eu lieu au palais Al-Yamamah, où le prince héritier s'est entretenu avec le président du Conseil de souveraineté transitoire du Soudan et sa délégation
  • Au cours des entretiens, les deux parties ont passé en revue la situation au Soudan, ses implications régionales et les efforts visant à assurer la sécurité et la stabilité dans le contexte de la crise persistante que traverse le pays

RIYADH : Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane a rencontré Abdel Fattah Al-Burhan à Riyad lundi pour discuter des derniers développements au Soudan et des efforts visant à restaurer la sécurité et la stabilité dans le pays, a rapporté l'Agence de presse saoudienne.

La réunion a eu lieu au palais Al-Yamamah, où le prince héritier s'est entretenu avec le président du Conseil de souveraineté transitoire du Soudan et sa délégation.

Au cours des entretiens, les deux parties ont passé en revue la situation au Soudan, ses implications régionales et les efforts visant à assurer la sécurité et la stabilité dans le contexte de la crise persistante que traverse le pays, a ajouté SPA.

Le ministre saoudien de la défense, le prince Khalid ben Salmane, le ministre des affaires étrangères, le prince Faisal bin Farhan, le ministre d'État et conseiller à la sécurité nationale, Musaed bin Mohammed Al-Aiban, le ministre des finances, Mohammed Al-Jadaan, et l'ambassadeur saoudien au Soudan, Ali Hassan Jaafar, ont également assisté à la réunion.


Cisjordanie: 25 immeubles d'habitation menacés de destruction dans un camp de réfugiés

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  • "Nous avons été informés par la coordination militaire et civile que l'occupation (Israël, NDLR) procédera à la démolition de 25 bâtiments le jeudi 18 décembre"
  • "Il n'y a aucune nécessité militaire à mener ces démolitions", a affirmé à l'AFP Roland Friedrich, responsable de l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (Unrwa) en Cisjordanie

TULKAREM: L'armée israélienne va démolir 25 immeubles d'habitation du camp de réfugiés de Nour Chams, dans le nord de la Cisjordanie, ont indiqué lundi à l'AFP des responsables locaux.

Abdallah Kamil, le gouverneur de Tulkarem où se situe le camp, a déclaré à l'AFP avoir été informé par le Cogat --l'organisme du ministère de la Défense israélien supervisant les activités civiles dans les Territoires palestiniens-- que les démolitions interviendraient d'ici la fin de la semaine.

"Nous avons été informés par la coordination militaire et civile que l'occupation (Israël, NDLR) procédera à la démolition de 25 bâtiments le jeudi 18 décembre", a indiqué à l'AFP Faisal Salama, responsable du comité populaire du camp de Tulkarem, proche de celui de Nour Chams, précisant qu'une centaine de familles seraient affectées.

Le Cogat n'a pas répondu dans l'immédiat aux sollicitations de l'AFP, l'armée israélienne indiquant se renseigner.

"Il n'y a aucune nécessité militaire à mener ces démolitions", a affirmé à l'AFP Roland Friedrich, responsable de l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (Unrwa) en Cisjordanie.

Il estime qu'elles s'inscrivent "dans une stratégie plus large visant à modifier la géographie sur le terrain", qualifiant la situation de "tout simplement inacceptable".

"Crise" 

La Cisjordanie est occupée par Israël depuis 1967.

Début 2025, l'armée israélienne y a lancé une vaste opération militaire visant selon elle à éradiquer des groupes armés palestiniens, en particulier dans les camps de réfugiés du nord, comme ceux de Jénine, Tulkarem et Nour Chams.

Au cours de cette opération, l'armée a détruit des centaines de maisons dans les camps, officiellement pour faciliter le passage des troupes.

Selon M. Friedrich, environ 1.600 habitations ont été totalement ou partiellement détruites dans les camps de la région de Tulkarem, entraînant "la crise de déplacement la plus grave que la Cisjordanie ait connue depuis 1967".

Lundi, une vingtaine de résidents de Nour Chams, tous déplacés, ont manifesté devant des véhicules militaires blindés bloquant l'accès au camp, dénonçant les ordres de démolition et réclamant le droit de rentrer chez eux.

"Toutes les maisons de mes frères doivent être détruites, toutes! Et mes frères sont déjà à la rue", a témoigné Siham Hamayed, une habitante.

"Personne n'est venu nous voir ni ne s'est inquiété de notre sort", a déclaré à l'AFP Aïcha Dama, une autre résidente dont la maison familiale de quatre étages, abritant environ 30 personnes, figure parmi les bâtiments menacés.

Disparaître 

Fin novembre, l'ONG Human Rights Watch a indiqué qu'au moins 32.000 personnes étaient toujours déplacées de chez elles dans le cadre de cette opération.

Comme des dizaines d'autres, le camp de Nour Chams a été établi au début des années 1950, peu après la création d'Israël en 1948, lorsque des centaines de milliers de Palestiniens ont fui ou été expulsés de leurs foyers.

Avec le temps, ces camps se sont transformés en quartiers densément peuplés, où le statut de réfugié se transmet de génération en génération.

De nombreux habitants ont affirmé à l'AFP ces derniers mois qu'Israël cherchait à faire disparaître les camps, en les transformant en quartiers des villes qu'ils jouxtent, afin d'éliminer la question des réfugiés.

Nour Chams a longtemps été un lieu relativement paisible où vivaient dans des maisons parfois coquettes des familles soudées entre elles.

Mais depuis quelques années, des mouvements armés s'y sont implantés sur fond de flambées de violence entre Palestiniens et Israéliens et de précarité économique.