Soudan: l'«intolérable» répression a douché de «grands espoirs» selon l'ambassadrice du Norvège

Des manifestants soudanais anti-coup d'État brûlent des pneus au milieu des manifestations en cours contre la prise de contrôle militaire largement condamnée le mois dernier, dans la capitale Khartoum le 17 novembre 2021. (Photo, AFP)
Des manifestants soudanais anti-coup d'État brûlent des pneus au milieu des manifestations en cours contre la prise de contrôle militaire largement condamnée le mois dernier, dans la capitale Khartoum le 17 novembre 2021. (Photo, AFP)
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Publié le Samedi 20 novembre 2021

Soudan: l'«intolérable» répression a douché de «grands espoirs» selon l'ambassadrice du Norvège

  • Le putsch mené le 25 octobre par le général Abdel Fattah al-Burhane, les purges, les centaines d'arrestations et la répression qui a fait une quarantaine de morts et des centaines de blessés ont mis un brutal coup d'arrêt à la transition
  • Mercredi, aussitôt après avoir coupé toutes les communications, les forces de sécurité ont de nouveau tiré sur des manifestants, les poursuivant jusque dans les hôpitaux et les maisons, selon des médecins

KHARTOUM : L'ambassadrice de Norvège, membre de la Troïka sur le Soudan, dénonce une répression "intolérable" des anti-putsch dans un pays où, dit Therese Loken Gheziel, le monde nourrissait "de grands espoirs", douchés par un coup d'Etat "qui nous a pris par surprise".

Depuis des années, la Grande-Bretagne, les Etats-Unis et la Norvège accompagnaient le Soudan sur son tortueux chemin vers la démocratie. Mme Gheziel elle-même est arrivée à l'automne 2020 au moment où Khartoum faisait la paix avec d'ex-rebelles, mettant fin à des conflits sanglants.

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"Entraver l'accès aux hôpitaux (...) est intolérable et illégal, de même que couper les communications et tous ces actes ne mènent à aucun dialogue constructif, déplore Therese Loken Gheziel, ambassadrice de Norvège au Soudan. (Photo, AFP)

Mais le putsch mené le 25 octobre par le général Abdel Fattah al-Burhane, les purges, les centaines d'arrestations et la répression qui a fait une quarantaine de morts et des centaines de blessés ont mis un brutal coup d'arrêt à la transition, née du renversement en 2019 sous la pression de la rue du général Omar el-Béchir, après 30 ans de dictature.

Mercredi, aussitôt après avoir coupé toutes les communications, les forces de sécurité ont de nouveau tiré sur des manifestants, les poursuivant jusque dans les hôpitaux et les maisons, selon des médecins.

"Entraver l'accès aux hôpitaux (...) est intolérable et illégal, de même que couper les communications et tous ces actes ne mènent à aucun dialogue constructif", affirme la diplomate, qui dit à l'AFP avoir déjà plaidé auprès des généraux contre l'"usage disproportionné de la force".

«Colère et frustration»

Le général Burhane, lui, n'en démord pas: il jure n'avoir agi et fait arrêter la plupart des civils avec lesquels il partageait le pouvoir depuis 2019, que pour "corriger le cours de la révolution".

Pour Mme Gheziel toutefois, "une action unilatérale a été menée par un des partenaires de la transition, le partenaire militaire".

Et pour cela, le gouvernement norvégien "considère qu'il s'agit d'un coup d'Etat".

Un putsch, qui a été rondement mené le 25 octobre à l'aube dans un pays où depuis des semaines la crise grondait. 

Le bloc civil n'en finissait pas de se fracturer, des centaines de manifestants en sit-in réclamaient "un gouvernement militaire" et le général Burhane lui-même annonçait avoir déjoué un coup d'Etat fin septembre.

"Nous savions qu'il y avait des problèmes mais cela pouvait être discuté et réglé par les partenaires eux-mêmes", explique Mme Gheziel. 

Régulièrement depuis le coup d'Etat, elle rencontre le Premier ministre Abdallah Hamdok en résidence surveillée et le général Burhane, également chef du Conseil de souveraineté, soit la plus haute des institutions intérimaires. 

Tous deux veulent, comme d'autres dirigeants, assure l'ambassadrice, "redessiner le partenariat" militaro-civil --clé de voûte de l'après-Béchir rapidement devenue pour les manifestants "le partenariat du sang" entre des responsables civils incapables de s'imposer, des généraux se rêvant inamovibles et d'ex-rebelles prompts à s'aligner sur l'armée.

"Dans toutes nos réunions, j'entends de la colère et de la frustration des deux côtés", rapporte Mme Gheziel.

 

En près d'un mois 40 morts dans la répression des manifestations

Le bilan des civils tués dans la répression des manifestations depuis le coup d'Etat du 25 octobre au Soudan est monté à 40 après le décès samedi d'un adolescent grièvement blessé mercredi, selon un nouveau bilan d'un syndicat de médecins.

Le 25 octobre, le général Abdel Fattah al-Burhane, chef de l'armée et auteur du coup d'Etat, a rebattu les cartes d'une transition chancelante depuis des mois au Soudan. Il a fait arrêter la quasi-totalité des civils au sein du pouvoir, mis un point final à l'union sacrée formée par civils et militaires et décrété l'état d'urgence.

Depuis, des protestations contre l'armée et appelant au retour du pouvoir civil ont eu lieu principalement à Khartoum, et ont été souvent réprimées par les forces de sécurité.

Mercredi 17 novembre a été la journée la plus meurtrière avec la mort de 16 personnes, la plupart à Khartoum-Nord, banlieue reliée à Khartoum par un pont sur le Nil, selon un syndicat de médecins prodémocratie. L'une d'elles touchée ce jour-là par balle a succombé samedi.   

"Un adolescent de 16 ans grièvement blessé par balle à la tête et à la jambe le 17 novembre est tombé en martyr", a déclaré ce syndicat dans un communiqué.

Ce décès porte à 40 le nombre de personnes, parmi lesquelles des adolescents, tuées lors des manifestations depuis le 25 octobre. La grande majorité sont des manifestants. 

La police assure qu'elle n'a jamais ouvert le feu contre les protestataires et ne recense qu'un seul mort et 30 blessés parmi eux du fait selon elle du gaz lacrymogène, contre 89 policiers blessés.

Jeudi, le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken a condamné la répression et exhorté l'armée à autoriser les manifestations pacifiques.

«Encore de l'espoir»

Mais si tous voulaient rebattre les cartes, c'est le général Burhane qui l'a finalement fait --en envoyant des soldats arrêter M. Hamdok, actuellement en résidence surveillée.

"Nous avons été pris par surprise parce que nous avions de grands espoirs" pour le Soudan, qui venait tout juste de commencer à faire baisser une inflation caracolant à près de 400%, revenait dans le concert des nations en sortant de la liste "terroriste" des Etats-Unis et promettait des élections libres en 2023, affirme Mme Gheziel.

A tel point qu'Oslo avait triplé son aide en 2020, à 27 millions d'euros. Des virements aujourd'hui suspendus, comme ceux des Etats-Unis ou de la Banque mondiale "car nous voulons d'abord un plan de sortie de crise", explique la diplomate.

Un plan qui, pour la Norvège comme pour les ambassadeurs américain et européens à Khartoum, passe par un retour de M. Hamdok à son poste.

Mais le général Burhane semble déterminé à consolider le nouvel état de fait. Le 11 novembre, il s'est renommé à la tête du Conseil de souveraineté dont il a écarté les derniers membres partisans d'un pouvoir entièrement civil. 

Un geste "compliquant les efforts pour remettre la transition sur les rails", avait alors insisté la Troïka. 

"La pression internationale se poursuit", assure l'ambassadrice norvégienne. "Il y a aussi une forte pression venue de l'intérieur". 

C'est pourquoi "il y a encore de l'espoir" pour la transition au Soudan, resté quasiment sans interruption sous la férule des militaires depuis son indépendance.


Liban: deux morts dans une frappe israélienne à Baalbeck 

Israël mène régulièrement des attaques au Liban, affirmant cibler le Hezbollah, malgré un accord de cessez-le-feu qui a mis fin en novembre 2024 à plus d'un an de conflit, dont deux mois de guerre ouverte, entre Israël et le mouvement libanais pro-iranien. (AFP)
Israël mène régulièrement des attaques au Liban, affirmant cibler le Hezbollah, malgré un accord de cessez-le-feu qui a mis fin en novembre 2024 à plus d'un an de conflit, dont deux mois de guerre ouverte, entre Israël et le mouvement libanais pro-iranien. (AFP)
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  • L'agence nationale d'information ANI a rapporté que la frappe avait été menée par un "drone israélien" dans la ville millénaire qui abrite un ensemble de temples romains classés au patrimoine mondial de l'Unesco
  • Ni ANI ni le ministère n'ont fourni d'autres précisions sur ce raid ou sur l'identité des victimes

BEYROUTH: Au moins deux personnes ont été tuées mercredi dans une frappe israélienne contre une voiture dans la ville de Baalbeck, dans l'est du Liban, a indiqué le ministère libanais de la Santé.

L'agence nationale d'information ANI a rapporté que la frappe avait été menée par un "drone israélien" dans la ville millénaire qui abrite un ensemble de temples romains classés au patrimoine mondial de l'Unesco.

Ni ANI ni le ministère n'ont fourni d'autres précisions sur ce raid ou sur l'identité des victimes.

Israël mène régulièrement des attaques au Liban, affirmant cibler le Hezbollah, malgré un accord de cessez-le-feu qui a mis fin en novembre 2024 à plus d'un an de conflit, dont deux mois de guerre ouverte, entre Israël et le mouvement libanais pro-iranien.

Sous pression américaine et craignant une intensification des frappes israéliennes, le gouvernement libanais a ordonné le mois dernier à l'armée d'élaborer un plan visant à désarmer le Hezbollah, sorti très affaibli par la guerre.

Selon Beyrouth, l'armée libanaise doit achever ce désarmement d'ici trois mois en ce qui concerne le sud du pays, proche de la frontière avec Israël.

 


Attaques israéliennes à Doha: le Qatar s'entretient avec la présidente de la CPI

L'émir du Qatar, Cheikh Tamim bin Hamad Al Thani, préside le sommet sur l'urgence arabo-islamique 2025 à Doha, au Qatar. (QNA/AFP)
L'émir du Qatar, Cheikh Tamim bin Hamad Al Thani, préside le sommet sur l'urgence arabo-islamique 2025 à Doha, au Qatar. (QNA/AFP)
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  • Le Qatar explore des recours légaux contre Israël après une frappe à Doha ayant tué plusieurs membres du Hamas et un agent de sécurité qatari
  • Bien que simple observateur à la CPI, Doha intensifie ses démarches diplomatiques et judiciaires pour demander des comptes à Israël

DOHA: Un haut représentant du Qatar a rencontré mercredi la présidente de la Cour pénale internationale (CPI) alors que Doha cherche à engager des poursuites contre Israël après des frappes sans précédent sur son territoire, selon un communiqué du ministère des Affaires étrangères qatari.

Mohammed Al-Khulaifi, qui a été chargé d'entreprendre d'éventuelles démarches légales après l'attaque israélienne, s'est entretenu avec la juge Tomoko Akane à La Haye, a indiqué le ministère.

Le pays du Golfe explore "toutes les voies juridiques et diplomatiques disponibles pour s'assurer que les responsables de l'attaque israélienne contre le Qatar rendent des comptes", a précisé jeudi auprès de l'AFP un responsable qatari, s'exprimant sous couvert d'anonymat en raison de la sensibilité des discussions.

Le Qatar, en tant qu'État observateur à la CPI, ne peut pas saisir directement la cour.

La frappe meurtrière menée la semaine dernière à Doha, visant des dirigeants du mouvement islamiste palestinien Hamas, a déclenché une vague de critiques à l'international, les Nations unies condamnant une "violation choquante du droit international". Elle a aussi valu à Israël une rare réprobation du président américain Donald Trump.

Israël et le Qatar, pays médiateur dans les négociations en vue d'une trêve à Gaza, sont tous deux alliés des États-Unis.

Le Hamas a affirmé que ses principaux dirigeants politiques, installés au Qatar avec l'aval de Washington depuis 2012, avaient survécu à l'attaque qui a tué cinq de ses membres, ainsi qu'un membre des forces de sécurité qataries.

À l'issue d'un sommet extraordinaire lundi à Doha, la Ligue arabe et l'Organisation de la coopération islamique ont appelé "tous les Etats (...) à revoir les relations diplomatiques et économiques avec Israël et à engager des poursuites à son encontre".

En 2024, la CPI a émis des mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, pour crimes de guerre et de crimes contre l'humanité à Gaza.

L'offensive israélienne, qui a fait plus de 65.000 morts dans le territoire palestinien selon les chiffres du Hamas, fiables selon l'ONU, a été déclenchée par l'attaque sans précédent du mouvement islamiste le 7 octobre 2023 sur le sol israélien.

La CPI a également émis des mandats d'arrêt contre l'ancien ministre israélien de la Défense Yoav Gallant et le commandant militaire du Hamas Mohammed Deif, tué depuis par Israël.


L'Arabie saoudite et le Pakistan signent un pacte de défense mutuelle

Le chef de l'armée pakistanaise, le maréchal Syed Asim Munir (à droite), le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane (2e à droite), le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif (2e à gauche) et le ministre saoudien de la Défense photographiés après la signature d'un pacte de défense historique à Riyad, le 17 septembre 2025. (PMO)
Le chef de l'armée pakistanaise, le maréchal Syed Asim Munir (à droite), le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane (2e à droite), le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif (2e à gauche) et le ministre saoudien de la Défense photographiés après la signature d'un pacte de défense historique à Riyad, le 17 septembre 2025. (PMO)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane reçoit le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif au palais d'Al-Yamamah à Riyad, mercredi. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane reçoit le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif au palais d'Al-Yamamah à Riyad, mercredi. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane reçoit le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif au palais d'Al-Yamamah à Riyad, mercredi. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane reçoit le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif au palais d'Al-Yamamah à Riyad, mercredi. (SPA)
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  • Le pacte marque une étape majeure dans le renforcement des liens sécuritaires et économiques entre deux alliés de longue date
  • L'accord de Riyad transforme des décennies de coopération militaire en un engagement sécuritaire contraignant

​​​​​ISLAMABAD : Le Pakistan et l’Arabie saoudite ont signé mercredi un « Accord stratégique de défense mutuelle », s’engageant à considérer toute agression contre l’un des deux pays comme une attaque contre les deux, renforçant ainsi la dissuasion conjointe et solidifiant des décennies de coopération militaire et sécuritaire.

Cet accord intervient moins de deux semaines après les frappes aériennes israéliennes à Doha visant des dirigeants du Hamas, un événement ayant intensifié les tensions régionales et souligné l’urgence pour les États du Golfe de renforcer leurs partenariats sécuritaires.

L'accord de Riyad marque également une volonté des deux gouvernements de formaliser leurs liens militaires de longue date en un engagement contraignant.

Le pacte a été signé lors de la visite officielle du Premier ministre Shehbaz Sharif à Riyad, où il a rencontré le prince héritier et Premier ministre Mohammed ben Salmane au palais Al-Yamamah. Accompagnés de ministres et responsables militaires de haut niveau, les deux dirigeants ont passé en revue ce que le bureau de Sharif a qualifié de relation « historique et stratégique » entre les deux nations, en discutant également des développements régionaux.

« L’accord stipule que toute agression contre l’un des deux pays sera considérée comme une agression contre les deux », a déclaré le communiqué conjoint.

Il décrit le pacte comme un reflet de l’engagement commun des deux gouvernements à renforcer la coopération en matière de défense et à œuvrer pour la sécurité et la paix dans la région et dans le monde.

Depuis des décennies, l’Arabie saoudite et le Pakistan entretiennent des liens étroits sur les plans politique, militaire et économique. Le Royaume accueille plus de 2,5 millions de ressortissants pakistanais — la plus grande communauté d’expatriés pakistanais — et a souvent soutenu financièrement Islamabad lors de crises économiques. La coopération en matière de défense a inclus des formations, des achats d’armes et des exercices militaires conjoints.

Le nouvel accord formalise cette coopération sous la forme d’un engagement de défense mutuelle, une étape qui, selon de nombreux analystes, place cette relation au même niveau que d’autres partenariats stratégiques dans la région.

Bien que le communiqué n’ait pas précisé les mécanismes de mise en œuvre, il a souligné que l’accord visait à développer les aspects de la coopération en matière de défense et à renforcer la dissuasion conjointe face à toute agression.

Cette visite intervient également alors que le Pakistan cherche à renforcer ses liens avec les États du Golfe, dans un contexte de défis économiques persistants.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.pk