Les Frères musulmans utilisent des Européens «woke» pour faire avancer leur programme

Des partisans des Frères musulmans en Jordanie. (Photo, AFP/Archives)
Des partisans des Frères musulmans en Jordanie. (Photo, AFP/Archives)
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Publié le Mercredi 24 novembre 2021

Les Frères musulmans utilisent des Européens «woke» pour faire avancer leur programme

  • Des alliances improbables avec des libéraux utilisées pour «camoufler» les islamistes politiques en Occident
  • Les Frères musulmans «possèdent une très grande capacité d'adaptation à leur environnement», affirme un professeur lors d'un événement auquel a participé Arab News

LONDRES: Les Frères musulmans et leurs affiliés utilisent des libéraux bien intentionnés à travers l'Europe pour couvrir et faire avancer leur propre programme antidémocratique, ont averti les experts.

Lors d'un événement auquel a participé Arab News et qui était organisé par le groupe de réflexion émirien Trends Research and Advisory, les experts ont également averti que malgré leur déclin relatif au cours de la dernière décennie, les Frères musulmans sont s’adaptent et doivent être continuellement contrés.

Le Dr Lorenzo Vidino, directeur du programme sur l'extrémisme à l'Université George Washington, a déclaré aux participants que les Frères musulmans utilisent un langage «woke» pour «camoufler leur vraie nature» à mesure qu'ils s’implantent en Europe.

«Nous assistons à une perte très généralisée de la popularité des Frères musulmans au sein des populations du monde arabe», a-t-il souligné.

«Les gens ont fait l’expérience de l'inefficacité du règne des Frères musulmans en 2012 et 2013. Les gens sont devenus désenchantés par ce groupe.»

Mais en Occident, et particulièrement en Europe, le statut du groupe est «une question plus complexe», a-t-il ajouté.

En Occident, il s’agit d’un «groupe différent de Frères musulmans, avec des objectifs et des priorités différents de ceux aux pays musulmans», a expliqué Vidino.

On assiste au «passage à l'âge adulte d'une deuxième génération de militants nés en Europe et extrêmement bien informés du discours politique européen et occidental», a-t-il ajouté.

«Grâce à cela, ils sont capables de faire ce que la première génération de pionniers aspirait à faire mais n'était pas vraiment en mesure de faire.»

L'objectif, a-t-il dit, est de se faire accepter par les établissements traditionnels, et ils utilisent leur compréhension native du discours politique occidental pour y parvenir.

«Ils ne ressemblent pas aux Frères musulmans», a déclaré Vidino. «Ils ont fait leurs débuts politiques dans les milieux du groupe, mais de leur langage aux alliances politiques qu'ils entretiennent, ils n’adoptent pas exactement le même mode de fonctionnement typique des Frères musulmans.» Ils ont opté pour «le langage de la théorie post-coloniale, une politique très progressiste», a-t-il clarifié.

«Les gens ont commencé à les appeler «islamistes woke», en utilisant beaucoup les concepts de racisme, d’intolérance, qui sont courants dans le discours politique en Europe et en camouflant leur véritable nature dans un langage qui les rend beaucoup plus acceptables, plus agréables, pour une intégration ordinaire.»

Par exemple, «nous voyons ces militants travailler en étroite collaboration avec des organisations LGBTQ, avec des mouvements très progressistes, avec lesquels ils ont en réalité très peu de points communs si l’on creuse un peu», a affirmé Vidino.

Il a ajouté: «Ce sont des alliances tactiques avec ces groupes, grâce à leur capacité à comprendre le discours politique qui fait vibrer l’ordre social européen.»

Le Dr Nasr Mohammed Aref, professeur de sciences politiques à l'Université du Caire, a révélé que cette capacité d'adaptation est en partie ce qui préserve l'influence des Frères musulmans.

Le groupe «possède une très grande capacité d'adaptation à son environnement», a-t-il ajouté. «Il change de «couleur» en fonction de son environnement pour attirer des membres.»

Selon Aref, la prospérité du groupe dans un pays donné dépend des décisions prises au niveau de l'État.

«La présence des Frères musulmans est une décision nationale, une décision de l'État», a-t-il réitéré. «L'existence des Frères musulmans, ou leur non-existence, est la décision de l'État dans lequel ils sont présents. C’est aux pays de décider si ce groupe peut exister ou non».

La gestion des Frères musulmans, et plus largement de l'islam politique, «est la question du moment», a précisé le Dr Ziad Munson, professeur de sociologie à l'Université Lehigh de Pennsylvanie.

Mais «si c’était facile, ce serait déjà fait, car la façon de le faire est de réfléchir à la façon dont, pour la grande majorité des gens, l'idéologie est une chose qui est mise en œuvre dans la pratique et dans leur vie quotidienne», a-t-il souligné.

«La clé est donc de briser ce lien entre les formes toxiques d'idéologie qui existent et les activités quotidiennes pratiques dans lesquelles les gens sont engagés.»

Pour les musulmans, cela signifie que la liberté de prier, de manger de la nourriture halal et d'exprimer librement leur religion est préservée et complètement séparée de l'engagement dans la poursuite de soi-disant objectifs politiques panislamistes, a soutenu Munson, ajoutant que ce problème n'est pas exclusif aux Frères musulmans et aux musulmans en général.

«Les gouvernements occidentaux sont confrontés à ce problème sur l’ensemble du spectre politique avec la montée du populisme au sens large, souvent lié au radicalisme religieux, mais pas nécessairement en relation avec celui-ci», a-t-il conclu.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Russie: le suicide apparent d'un ministre sème la peur au sein de l'élite

Roman Starovoït avait été gouverneur de la région russe de Koursk, frontalière de l'Ukraine, avant d'être promu ministre à Moscou en mai 2024, trois mois avant que les troupes ukrainiennes ne prennent le contrôle d'une petite partie de ce territoire lors d'une offensive surprise. Une attaque qui avait été un revers pour le Kremlin. (AFP)
Roman Starovoït avait été gouverneur de la région russe de Koursk, frontalière de l'Ukraine, avant d'être promu ministre à Moscou en mai 2024, trois mois avant que les troupes ukrainiennes ne prennent le contrôle d'une petite partie de ce territoire lors d'une offensive surprise. Une attaque qui avait été un revers pour le Kremlin. (AFP)
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  • Si les circonstances de la mort de Roman Starovoït, âgé de 53 ans, restent floues, les médias russes ont évoqué une enquête pour corruption le visant, assurant qu'il devait être arrêté prochainement
  • Limogé par le président Vladimir Poutine, il s'est probablement donné la mort, selon les premiers résultats de l'enquête, qui est en cours

SAINT-PETERSBOURG: Le suicide probable du ministre russe des Transports, Roman Starovoït, annoncé peu après son limogeage lundi par Vladimir Poutine sur fond d'allégations de corruption, a profondément choqué l'élite politique, où chacun redoute de faire les frais de la chasse aux profiteurs.

Ses funérailles ont eu lieu vendredi dans un cimetière de Saint-Pétersbourg en présence de sa famille et de collègues, mais en l'absence de M. Poutine qui n'a pas non plus participé à la cérémonie d'adieu jeudi.

Si les circonstances de la mort de Roman Starovoït, âgé de 53 ans, restent floues, les médias russes ont évoqué une enquête pour corruption le visant, assurant qu'il devait être arrêté prochainement.

Limogé par le président Vladimir Poutine, il s'est probablement donné la mort, selon les premiers résultats de l'enquête, qui est en cours.

"C'est une grande perte pour nous, très inattendue. Nous sommes tous choqués", a déclaré à l'AFP Vassilissa, 42 ans, l'épouse d'un collègue de M. Starovoït, lors de la cérémonie de jeudi.

"Il était tellement actif, joyeux, il aimait énormément la vie. Je ne comprends pas comment cela a pu arriver", ajoute cette femme, les larmes aux yeux.

Après avoir déposé devant le cercueil de grands bouquets de roses rouges, des anciens collègues de M. Starovoït, en costumes sombres, sont repartis très vite dans leurs luxueuses voitures noires.

Dans une ambiance très lourde rappelant les funérailles dans le film culte "Le Parrain" de Francis Ford Coppola, d'autres personnes interrogées par les journalistes de l'AFP dans la foule ont refusé de parler.

"Bouc émissaire" 

Roman Starovoït avait été gouverneur de la région russe de Koursk, frontalière de l'Ukraine, avant d'être promu ministre à Moscou en mai 2024, trois mois avant que les troupes ukrainiennes ne prennent le contrôle d'une petite partie de ce territoire lors d'une offensive surprise. Une attaque qui avait été un revers pour le Kremlin.

Son successeur à la tête de cette région, Alexeï Smirnov, a lui été arrêté au printemps pour le détournement des fonds destinés à renforcer les fortifications à la frontière. Celle-là même que les Ukrainiens ont traversé facilement, pour n'être repoussés que neuf mois plus tard.

Les autorités "ont essayé de faire de lui (Roman Starovoït) un bouc émissaire", accuse auprès de l'AFP Andreï Pertsev, analyste du média indépendant Meduza, reconnu "indésirable" et interdit en Russie.

L'incursion ukrainienne "s'est principalement produite parce qu'il n'y avait pas assez de soldats pour protéger la frontière", mais c'était "plus facile de rejeter la faute sur un responsable civil", explique-t-il.

L'affaire Starovoït s'inscrit dans une vague récente de répression visant de hauts responsables soupçonnés de s'être enrichis illégalement pendant l'offensive russe en Ukraine. Et selon des analystes, si les scandales de corruption on toujours existé en Russie, la campagne militaire a changé les règles du jeu politique.

"Il existait des règles auparavant, selon lesquelles les gens savaient: une fois qu'ils montaient suffisamment haut, on ne les embêtait plus", estime M. Pertsev. "Mais elles ne fonctionnent plus."

"On ne vole pas" 

Alors que Vladimir Poutine promettait régulièrement de s'attaquer à la corruption - étant lui même accusé de s'être enrichi illégalement par ses détracteurs -, les rares arrestations médiatisées ont été davantage utilisées pour cibler des opposants ou résultaient de luttes internes entre les échelons inférieurs du pouvoir en Russie.

Depuis l'offensive en Ukraine lancée en février 2022, "quelque chose dans le système a commencé à fonctionner de manière complètement différente", souligne la politologue Tatiana Stanovaïa du Centre Carnegie Russie Eurasie, interdit en Russie en tant qu'organisation "indésirable".

"Toute action ou inaction qui, aux yeux des autorités, accroît la vulnérabilité de l'État face aux actions hostiles de l'ennemi doit être punie sans pitié et sans compromis", estime Mme Stanovaïa en définissant la nouvelle approche du pouvoir.

Pour le Kremlin, la campagne en Ukraine est une "guerre sainte" qui a réécrit les règles, confirme Nina Khrouchtcheva, professeure à The New School, une université de New York, et arrière-petite-fille du dirigeant soviétique Nikita Khrouchtchev.

"Pendant une guerre sainte, on ne vole pas (...) on se serre la ceinture et on travaille 24 heures sur 24", résume-t-elle.

Signe des temps, plusieurs généraux et responsables de la Défense ont été arrêtés pour des affaires de détournement de fonds ces dernières années. Début juillet, l'ancien vice-ministre de la Défense Timour Ivanov a été condamné à 13 ans de prison.

Cette ambiance, selon Mme Stanovaïa, a créé un "sentiment de désespoir" au sein de l'élite politique à Moscou, qui est peu susceptible de s'atténuer.

"À l'avenir, le système sera prêt à sacrifier des figures de plus en plus en vue," avertit-elle.

 


Un trafic de stupéfiants démantelé entre Espagne et France, 13 arrestations

reize personnes, dont le "donneur d'ordres" présumé, ont été arrêtées par des policiers qui ont démantelé un "important" trafic de drogues importées d'Espagne pour alimenter la région Auvergne-Rhône-Alpes, au terme d'une enquête de près de deux ans, a annoncé vendredi la police. (AFP)
reize personnes, dont le "donneur d'ordres" présumé, ont été arrêtées par des policiers qui ont démantelé un "important" trafic de drogues importées d'Espagne pour alimenter la région Auvergne-Rhône-Alpes, au terme d'une enquête de près de deux ans, a annoncé vendredi la police. (AFP)
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  • 2,4 tonnes de résine de cannabis ont été saisies par les enquêteurs de Office anti-stupéfiants (OFAST) de la police judiciaire de Lyon, qui ont mené ces opérations
  • Dans cette première phase, les 11 suspects ont été mis en examen et sont, depuis, en détention provisoire, selon la DIPN

LYON: Treize personnes, dont le "donneur d'ordres" présumé, ont été arrêtées par des policiers qui ont démantelé un "important" trafic de drogues importées d'Espagne pour alimenter la région Auvergne-Rhône-Alpes, au terme d'une enquête de près de deux ans, a annoncé vendredi la police.

Onze suspects ont été interpellés entre décembre 2023 et juillet 2024, notamment grâce à l'interception par les policiers de deux poids-lourds et d'un convoi de voitures "entre la région lyonnaise et le Gard", "au moment où les stupéfiants étaient remis à des équipes locales", explique la Direction interdépartementale de la police (DIPN) du Rhône dans un communiqué.

Dans le même laps de temps, 2,4 tonnes de résine de cannabis ont été saisies par les enquêteurs de Office anti-stupéfiants (OFAST) de la police judiciaire de Lyon, qui ont mené ces opérations.

Dans cette première phase, les 11 suspects ont été mis en examen et sont, depuis, en détention provisoire, selon la DIPN.

Puis l'enquête a permis l'interpellation, le 30 juin dernier, d'un homme "soupçonné d'être le donneur d'ordres" et, le lendemain, d'un autre suspect, "fugitif condamné en 2016" à sept ans de prison pour trafic de stupéfiants. A son domicile dans l'Ain, "54 kg de cocaïne et plusieurs dizaines de milliers d'euros" ont été saisis, précise le communiqué qui n'en dit pas plus sur le profil de ces hommes. Ils ont été mis en examen le 4 juillet et placés en détention provisoire.

La police considère ainsi avoir réussi le "démantèlement de ce groupe criminel organisé (...) réalisant des importations de stupéfiants depuis l'Espagne vers la région Auvergne-Rhône-Alpes" pour des "quantités importantes".

 


Iran: la lauréate du prix Nobel de la Paix Mohammadi se dit «menacée d'élimination physique», selon le comité Nobel

La prix Nobel de la paix iranienne, Narges Mohammadi, dit avoir été "directement et indirectement menacée d'élimination physique" par les autorités iraniennes, a indiqué vendredi le comité Nobel qui s'est entretenu avec elle par téléphone. (AFP)
La prix Nobel de la paix iranienne, Narges Mohammadi, dit avoir été "directement et indirectement menacée d'élimination physique" par les autorités iraniennes, a indiqué vendredi le comité Nobel qui s'est entretenu avec elle par téléphone. (AFP)
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  • La prix Nobel de la paix iranienne, Narges Mohammadi, dit avoir été "directement et indirectement menacée d'élimination physique"
  • Ces menaces "montrent clairement que sa sécurité est en jeu, à moins qu'elle ne s'engage à mettre fin à tout engagement public en Iran"

OSLO: La prix Nobel de la paix iranienne, Narges Mohammadi, dit avoir été "directement et indirectement menacée d'élimination physique" par les autorités iraniennes, a indiqué vendredi le comité Nobel qui s'est entretenu avec elle par téléphone.

Ces menaces "montrent clairement que sa sécurité est en jeu, à moins qu'elle ne s'engage à mettre fin à tout engagement public en Iran" ainsi qu'à "toute apparition dans les médias", ajoute le comité Nobel dans un communiqué. Mme Mohammadi a été récompensée en 2023 pour "son combat contre l'oppression des femmes en Iran et pour la promotion des droits de l'homme".