Les marchés sceptiques sur l'utilisation concertée des réserves stratégiques de pétrole

Les réserves stratégiques américaines de pétrole ont été créées en 1975 pour contrecarrer les chocs pétroliers.  (AFP).
Les réserves stratégiques américaines de pétrole ont été créées en 1975 pour contrecarrer les chocs pétroliers. (AFP).
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Publié le Mercredi 24 novembre 2021

Les marchés sceptiques sur l'utilisation concertée des réserves stratégiques de pétrole

  • La rumeur courrait depuis plusieurs semaines, et a été confirmée mardi: les Etats-Unis vont relâcher dans les mois qui viennent 50 millions de barils de brut, puisés dans leurs réserves stratégiques, pour faire pression sur les prix à la pompe
  • Paradoxalement, les cours du brut sont repartis en forte hausse mardi, après l'annonce de cette initiative coordonnée qui va augmenter l'offre de pétrole

ATHENES: Alors que s'enchaînent les déclarations tendant des pays quant à l'utilisation des réserves stratégiques de pétrole, les marchés tardent à réagir. Premier pays à prendre cette décision inédite, les Etats-Unis l'ont annoncé mardi à qui veut bien l'entendre. La Maison Blanche espère, par ces mesures exceptionnelles, apaiser la tension sur les prix de l'essence, alors que le prix du gallon (3,78 litres) a grimpé de 60% en un an aux Etats-Unis, pour atteindre 3,41 dollars, selon l'Association automobile AAA. 

Puiser dans les réserves est une "initiative majeure" qui va "faire la différence", a assuré le président Joe Biden.

"Les prix de l'essence à la pompe sont trop hauts à l'heure actuelle (...) mais on va tourner la page au début de 2022", a promis sa secrétaire à l'Energie, Jennifer Granholm, à la Maison Blanche.

La rumeur courrait depuis plusieurs semaines, et a été confirmée mardi: les Etats-Unis vont relâcher dans les mois qui viennent 50 millions de barils de brut, puisés dans leurs réserves stratégiques, pour faire pression sur les prix à la pompe.

Chine, Inde, Japon, Corée du Sud et Royaume-Uni emboîtent le pas à Washington

Initiative inédite, d'autres pays consommateurs vont rejoindre les Etats-Unis en déversant aussi du pétrole sur le marché: Chine, Inde, Japon, Corée du Sud, Royaume-Uni.

L'Inde s'est engagée à participer à hauteur de 5 millions de barils. L'apport des autres nations, en revanche, est encore flou.

De son côté, la Chine a confirmé mercredi qu'elle allait puiser dans ses réserves de pétrole, en collaboration avec d'autres pays, afin de faire baisser les cours de l'or noir.


"La Chine, au regard de ses besoins et de ses conditions actuelles, puisera dans ses réserves nationales de pétrole brut et prendra d'autres mesures nécessaires afin de maintenir la stabilité du marché", a déclaré devant la presse un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Zhao Lijian.


M. Zhao n'a pas précisé quand ces prélèvements auraient lieu ni quelle quantité de pétrole Pékin envisageait de mettre sur le marché.


Interrogé, le porte-parole de la diplomatie chinoise n'a pas cité les Etats-Unis ni d'autres pays participants.


Il s'est borné à déclarer avoir pris note des "récentes mesures prises par d'importants pays consommateurs pour maintenir la stabilité du marché".


"La Chine est en communication étroite avec les différentes parties prenantes, y compris les consommateurs et les producteurs de pétrole", a-t-il dit.

Malgré les appels du pied répétés de la Maison Blanche aux pays de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) pour qu'ils augmentent leur production --ce qui ferait baisser les cours--, ceux-ci s'en tiennent à leur programme de restauration prudente et progressive.

"Si les prix du brut ont augmenté, c'est parce que les pays producteurs ont été chiches sur leur production", reproche John Kilduff d'Again Capital.

Pour l'analyste du marché pétrolier de Rystad energy, Bjornar Tonhaugen, l'initiative pourrait être vue "comme un geste agressif vis-à-vis de l'Opep+". 

"Le groupe des pays producteurs pourrait alors en théorie couper dans sa production en janvier pour maintenir ses profits", a-t-il suggéré.

Paradoxalement, les cours du brut sont repartis en forte hausse mardi, après l'annonce de cette initiative coordonnée qui va augmenter l'offre de pétrole.

Les rumeurs sur une telle action avaient déjà fait perdre 5 dollars au prix du baril, depuis son pic de fin octobre pour le Brent.

Le prix du baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en janvier a bondi de 3,27% à 82,31 dollars.  

À New York, le baril de West Texas Intermediate (WTI) pour le même mois a engrangé 2,22% à 78,50 dollars.

Puiser dans les réserves stratégiques de pétrole, une mesure rare mais temporaire

Les réserves stratégiques américaines de pétrole ont été créées en 1975 pour contrecarrer les chocs pétroliers. Enfouies dans d'immenses cavernes de sel allant jusqu'à 800 mètres de profondeur le long de la côte du Golfe du Mexique, ces réserves peuvent emmagasiner jusqu'à 714 millions de barils d'or noir. 

Ces réserves hautement surveillées, qui représentent la plus grande manne d'urgence de brut au monde, sont conservées dans une soixantaine de réservoirs forés dans une strate de sel répartis sur quatre sites, en Louisiane et au Texas. 

Actuellement, le niveau des stocks se situe à 609 millions de barils, selon le département américain de l'Energie.

"La consommation de brut des Américains s'élevant à 19,5 millions de barils par jour, la mise sur le marché de 50 millions de barils correspond à trois jours de demande des raffineries du pays", a indiqué Andy Lipow de Lipow Oil Associates, soulignant l'aspect symbolique de la mesure. 

"L'impact sur les prix ne devrait pas persister", doutaient aussi les analystes de TD Commodities.

Les précédents: guerres du Golfe et ouragans

En 1991, George H. W Bush avait ordonné le tirage de quelque 17 millions de barils pendant la première guerre du Golfe.

En 2005, c'est George W. Bush fils qui avait fait prélever dans ces réserves 11 millions de barils après le passage de l'ouragan Katrina qui avait dévasté la Louisiane et ses structures pétrolières.

En 2011, Barack Obama avait libéré pour 30 millions de barils afin de suppléer aux interruptions de livraison de Libye.

A l'inverse, en 2001, juste après les attentats du 11-Septembre, le président Bush avait ordonné par précaution un remplissage des cuves à ras bord.


France: la pleine puissance du nouveau réacteur nucléaire EPR repoussée à la fin de l'automne

Cette photographie prise le 25 avril 2024 montre la centrale nucléaire de Flamanville, dans le nord-ouest de la France, alors que la centrale nucléaire Flamanville 3 est prête à démarrer. (AFP)
Cette photographie prise le 25 avril 2024 montre la centrale nucléaire de Flamanville, dans le nord-ouest de la France, alors que la centrale nucléaire Flamanville 3 est prête à démarrer. (AFP)
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  • EDF prévoit désormais que son nouveau réacteur EPR de Flamanville, en Normandie dans l'ouest du pays, atteindra sa pleine puissance "avant la fin de l'automne"
  • Le redémarrage du réacteur est désormais prévu au 1er octobre, décalant de fait le passage à 100% de puissance du réacteur

PARIS: Electricité de France (EDF) prévoit désormais que son nouveau réacteur EPR de Flamanville, en Normandie dans l'ouest du pays, atteindra sa pleine puissance "avant la fin de l'automne", alors que le groupe espérait jusqu'à présent pouvoir franchir cette étape d'ici la fin de l'été.

La prolongation d'un arrêt "pour réaliser une opération de contrôle et de maintenance préventive sur une soupape de protection du circuit primaire principal" conduit à modifier "la date d'atteinte de la pleine puissance, désormais prévue avant la fin de l'automne", a indiqué l'électricien public français sur son site internet vendredi.

Alors que le réacteur à eau pressurisée de nouvelle génération était à l'arrêt depuis le 19 juin pour des opérations d'essais de mise en service, classiques pour de nouvelles installations nucléaires, EDF a décidé le 2 juillet de le maintenir à l'arrêt pour intervenir sur des soupapes.

EDF avait en effet constaté pendant les essais que deux des trois soupapes placées au sommet du pressuriseur qui permet de maintenir l'eau du circuit primaire à une pression de 155 bars "n'étaient pas complètement conformes" aux attendus en termes d'"étanchéité".

En raison de ces "aléas", EDF a décidé vendredi de prolonger cet arrêt pour mener une opération de maintenance préventive sur la 3e soupape.

"Les expertises menées sur les deux premières soupapes conduisent EDF, dans une démarche pro-active de sûreté, à étendre les vérifications à la troisième soupape en profitant de la logistique déjà en place et mobilisant les compétences disponibles", a expliqué le groupe.

Le redémarrage du réacteur est désormais prévu au 1er octobre, décalant de fait le passage à 100% de puissance du réacteur.

"Il y a 1.500 critères de sûreté qui sont testés lors d'un premier démarrage" de réacteur, a expliqué à l'AFP une porte-parole d'EDF. Lors de ces phases d'essais et de contrôle, il est parfois nécessaire de "refaire des réglages", selon elle.

Le réacteur de nouvelle génération a été raccordé au réseau électrique le 21 décembre 2024, avec douze ans de retard par rapport à la date prévue. Son coût a explosé par rapport au devis initial de 3,3 milliards d'euros: selon un rapport de la Cour des comptes française publié en,janvier, EDF l'estime aujourd'hui à 22,6 milliards d'euros aux conditions de 2023.


Engie confirme ses perspectives 2025 malgré un contexte "incertain et mouvant"

Cette photographie montre le parc éolien offshore de Yeu-Noirmoutier au large de l'Ile-d'Yeu, dans l'ouest de la France, le 23 juin 2025. (AFP)
Cette photographie montre le parc éolien offshore de Yeu-Noirmoutier au large de l'Ile-d'Yeu, dans l'ouest de la France, le 23 juin 2025. (AFP)
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  • Engie a confirmé vendredi ses perspectives pour 2025 malgré un contexte "incertain" et une baisse des prix qui a pesé sur ses résultats au premier semestre
  • L'énergéticien se dit confiant sur la suite et maintient ses prévisions pour 2025

PARIS: Engie a confirmé vendredi ses perspectives pour 2025 malgré un contexte "incertain" et une baisse des prix qui a pesé sur ses résultats au premier semestre, et se dit désormais plus confiant pour ses projets renouvelables aux Etats-Unis après une période d'incertitude.

Son résultat net récurrent a reculé de 19% à 3,1 milliards d’euros au cours des six premiers mois de l'année. Le résultat opérationnel (Ebit) hors nucléaire est ressorti à 5,1 milliards d'euros, en baisse de 9,4% en raison d'une base de comparaison élevée par rapport au premier semestre 2024 et "dans un contexte de baisse des prix".

Mais l'énergéticien se dit confiant sur la suite et maintient ses prévisions pour 2025.

"Nous abordons les prochains mois avec confiance et nous confirmons notre +guidance+ annuelle", a commenté Catherine MacGregor, sa directrice générale, citée dans le communiqué de résultats.

Elle a néanmoins insisté sur le contexte économique et géopolitique "assez incertain et mouvant", lors d'une conférence téléphonique.

A la Bourse de Paris, Engie cédait 2,45% à 10H53 (8H53 GMT) à 19,15 euros vendredi, après avoir lâché 5% à l'ouverture.

Interrogée sur les Etats-Unis, Catherine MacGregor s'est montrée plus confiante après une période d'incertitude qui a suivi l'entrée en fonction du gouvernement Trump.

"Avec la promulgation du +Big beautifull bill+ (la loi budgétaire de Donald Trump, ndlr) et une première clarification du cadre réglementaire et fiscal qui était attendue, nous nous apprêtons à lancer trois projets pour plus de 1,1 GW de capacité totale, éolien, solaire et batteries qui vont conforter notre croissance jusqu'en 2028", a-t-elle déclaré.

Engie a pour l'heure "juste en dessous de 9 GW en opération aux États-Unis", a-t-elle rappelé.

"Il y avait beaucoup, beaucoup d'incertitudes sur le traitement qui serait donné à ces projets", a-t-elle souligné, mais avec cette nouvelle loi, "on a beaucoup plus de clarté".

"Le marché aux États-Unis reste évidemment très, très porteur", a-t-elle poursuivi. "Les projections de demande d'électricité sont absolument massives et aujourd'hui, il n'y a pas de scénarios (...) sans une grande partie de projets renouvelables", notamment en raison du fort développement des centres de données dans le pays.

Le groupe table sur un résultat net récurrent - qui exclut des coûts de restructuration et la variation de la valeur de ses contrats de couverture - "entre 4,4 et 5,0 milliards d'euros" en 2025.

Engie vise par ailleurs un Ebit hors nucléaire "dans une fourchette indicative de 8,0 à 9,0 milliards d'euros" en 2025.

"Comme prévu, l'Ebit hors nucléaire va atteindre son point bas cette année et le second semestre 2025 sera en hausse par rapport à 2024", a indiqué Catherine MacGregor.

Le bénéfice net en données publiées s'établit à 2,9 milliards d'euros au premier semestre, en hausse de 50%, en raison d'un impact moindre de la variation de la valeur de ses contrats de couverture.

Le chiffre d'affaires a atteint 38,1 milliards d'euros au premier semestre, en croissance de 1,4%.

Engie disposait d'une capacité totale renouvelables et de stockage de 52,7 gigawatts (GW) à fin juin 2025, en hausse de 1,9 GW par rapport à fin 2024. A cela s'ajoutent 95 projets en cours de construction qui représentent une capacité totale de près de 8 GW.

Le groupe dispose d'un portefeuille de projets renouvelables et de batteries en croissance qui atteint 118 GW à fin juin 2025, soit 3 GW de plus qu'à fin décembre 2024.


ArcelorMittal: les taxes douanières américaines érodent la rentabilité au premier semestre

La cokerie d'ArcelorMittal Bremen sur le site de Bottrop est photographiée depuis la plate-forme d'observation Tetraeder à Bottrop, dans l'ouest de l'Allemagne, le 21 juillet 2025. (AFP)
La cokerie d'ArcelorMittal Bremen sur le site de Bottrop est photographiée depuis la plate-forme d'observation Tetraeder à Bottrop, dans l'ouest de l'Allemagne, le 21 juillet 2025. (AFP)
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  • ArcelorMittal a vu sa rentabilité érodée au premier semestre par les taxes douanières de Donald Trump sur les importations d'acier depuis le Canada ou le Mexiqu
  • ArcelorMittal espère la mise en place effective de mesures de soutien à l'acier en Europe d'ici à la fin de l'année

PARIS: ArcelorMittal, qui a vu sa rentabilité érodée au premier semestre par les taxes douanières de Donald Trump sur les importations d'acier depuis le Canada ou le Mexique, espère la mise en place effective de mesures de soutien à l'acier en Europe d'ici à la fin de l'année.

Malgré un résultat net en hausse de 39% au premier semestre 2025, à 2,6 milliards de dollars, le bénéfice avant intérêt, impôt, dépréciation et amortissement (Ebitda) du deuxième fabricant d'acier mondial a reculé de 10%, à 3,4 milliards de dollars, notamment après l'application de droits de douane de 50% sur l'acier importé aux Etats-Unis depuis le Canada et le Mexique à partir du 4 juin, a expliqué le groupe dans un communiqué jeudi.

Le chiffre d'affaires a aussi pâti du recul de 7,5% des prix moyens de l'acier dans le monde: les ventes se sont amoindries de 5,5%, à 30,72 milliards de dollars au premier semestre.

Jeudi à la Bourse de Paris, après ces annonces, le titre ArcelorMittal a terminé la séance en recul de 2,58%, à 27,52 euros.

Le directeur général du groupe, Aditya Mittal, s'est félicité de la reprise à 100% du site de Calvert aux Etats-Unis, qui devient un site d'acier bas carbone grâce à la construction d'un nouveau four à arc électrique.

En Europe, les tendances à l'accroissement des dépenses publiques sur la défense et les infrastructures "sont un encouragement pour l'industrie de l'acier", a jugé M. Mittal.

Néanmoins, alors que le plan d'action annoncé en mars par la Commission européenne a lancé des "signaux clairs" pour défendre la production européenne d'acier, "nous attendons toujours la concrétisation des mesures de sauvegarde (ou quotas sur les importations d'acier en Europe, NDLR) du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières et sur les prix de l'énergie", a-t-il souligné.

A condition que ces mesures soient mises en place, le groupe prévoit d'investir 1,2 milliard d'euros pour un four à arc électrique sur son site français de Dunkerque (Nord), a-t-il rappelé.

Au total, ArcelorMittal en exploite 29 dans le monde, pour une capacité de production de 21,5 millions de tonnes d'acier recyclé par an, qui augmentera à 23,4 millions de tonnes en 2026 après la mise en service des deux sites espagnols de Gijon et Sestao.