La France et l'Italie ensemble dans une Europe en recomposition

Au premier plan : Le président français Emmanuel Macron serre la main du Premier ministre italien Mario Draghi après la signature d'un traité bilatéral, le 26 novembre 2021 à Rome. (Photo, AFP)
Au premier plan : Le président français Emmanuel Macron serre la main du Premier ministre italien Mario Draghi après la signature d'un traité bilatéral, le 26 novembre 2021 à Rome. (Photo, AFP)
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Publié le Samedi 27 novembre 2021

La France et l'Italie ensemble dans une Europe en recomposition

  • «Une relation plus forte entre l'Italie et la France contribue à construire une Europe plus forte»
  • «Nous avons besoin de structurer la relation franco-italienne face à une Allemagne qui vit un changement d'époque et face aux Polonais et aux Hongrois»

ROME : Exit le Royaume-Uni et Angela Merkel: dans une Europe en recomposition, chahutée sur ses frontières orientales par des capitales frondeuses, le traité bilatéral signé vendredi par la France et l'Italie marque la volonté de ses artisans, Emmanuel Macron et Mario Draghi, de prendre le leadership européen.


Le traité du Quirinal, du nom du palais présidentiel à Rome inspiré du traité de l'Elysée franco-allemand, contient des projets de coopération renforcée dans des domaines aussi divers que la production industrielle et l'innovation, la défense, culture et l'éducation.


Mais au-delà, le rapprochement de deux pays fondateurs de l'UE revêt une valeur symbolique dans une Europe sans boussole.


"Une relation plus forte entre l'Italie et la France contribue à construire une Europe plus forte, d'autant plus nécessaire aujourd'hui face aux défis que seule une Europe plus intégrée peut affronter", affirme ainsi le président italien Sergio Mattarella.


Après le Brexit, la France est à couteaux tirés avec Londres sur les quotas de pêche. A Berlin, Angela Merkel vide son bureau en attendant la formation d'une coalition par son probable successeur, Olaf Scholz. Et les tensions sont vives sur les valeurs et l'Etat de droit entre Bruxelles et les démocraties libérales de l'UE d'un côté, Varsovie et Budapest de l'autre.


Dans ce contexte, Paris et Rome se présentent en garants de la continuité et de la stabilité.


"Nous avons besoin de structurer la relation franco-italienne face à une Allemagne qui vit un changement d'époque et face aux Polonais et aux Hongrois. Nous ne savons pas quelle UE nous aurons dans cinq, dix ans", explique Giuseppe Bettoni, professeur à l'université Tor Vergata de Rome.


Le traité était dans les tiroirs depuis 2017. 


La France et l'Italie, membres de l'Otan, ont voulu accélérer après le retrait unilatéral d'Afghanistan de leur allié américain et après la crise des sous-marins australiens, explique Matthias Waechter, directeur du Centre international de formation européenne (CIFE). Ces deux événements légitiment selon lui "l'objectif d'autonomie stratégique européenne du président Macron", alors même que l'Allemagne, elle, reste "un peu hésitante".

Europe «végétative»

Un traité entre les 2e et 3e économies de la zone euro ne risque-t-il pas d'affaiblir l'Europe ?


"Bruxelles est déjà en état végétatif. Comment peut-on l'affaiblir davantage ? Ces rapports bilatéraux n'affaiblissent pas l'Europe. Ils se font parce que l'Europe est faible", estime Giuseppe Bettoni. Et de fait, approuve l'historien et professeur à Sciences Po Marc Lazar, "sur ces grands projets, on ne peut pas penser avancer tous à 27 en même temps, avec les mêmes mentalités".


Pour Matthias Waechter, il ne s'agit pas de créer une Europe à deux vitesses mais au contraire de remettre le pied sur l'accélérateur.


Et qui m'aime me suive.


"Toutes ces relations bilatérales peuvent aider à créer des noyaux dynamiques" et montrer à ses opposants que "l'Europe est en marche, qu'elle apporte des bénéfices et des solutions concrètes", assure-t-il.


Quant à l'Allemagne, le traité franco-italien ne devrait pas l'inquiéter. Emmanuel Macron a donné maints gages de son attachement à la relation franco-allemande pendant son mandat, et Mario Draghi, ex-patron de la BCE considéré comme le sauveur de l'euro en 2008, a la cote à Berlin.


"Mario Draghi pèse très lourd au Conseil européen" et il partage avec Emmanuel Macron "de nombreux points d'accord sur les politiques économiques et le plan de relance, en se heurtant aux pays frugaux", analyse Marc Lazar.


Le plan de relance et l'assouplissement des règles de déficit budgétaire dans l'UE "constituent en soi une victoire pour les pays du sud de l'Europe", note un diplomate européen à Rome.


L'axe franco-allemand reste de toute façon le plus important pour la France, selon les observateurs.


"L'Italie est contente que son partenaire se rappelle à elle, mais l'objectif de la France c'est de remettre un peu de piquant dans son alliance avec l'Allemagne", souligne Marc Lazar.


A terme, la France souhaite signer un tel accord avec l'Espagne, et l'Italie et l'Allemagne pourraient leur emboîter le pas. "Ces quatre pays auraient un poids considérable pour faire évoluer l’UE, notamment sur les critères de Maastricht, les questions démocratiques, l'immigration, la défense", estime-t-il.


L'Ukraine s'attend à une détérioration sur le front vers la mi-mai

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo, AFP).
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo, AFP).
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  • L'armée ukrainienne traverse une période délicate, confronté à une pénurie de nouvelles recrues et de munitions en raison de retards importants de livraisons d'aide occidentale, notamment américaine
  • La Russie, qui est à l'initiative depuis l'automne 2023, a revendiqué lundi la conquête d'un village de l'Est ukrainien situé non loin de Vougledar

KIEV: La situation sur le front ukrainien va empirer autour de la mi-mai et début juin, qui sera une "période difficile", a prévenu lundi le chef du renseignement militaire ukrainien Kyrylo Boudanov, sur fond de craintes d'une nouvelle offensive russe.

La Russie, qui est à l'initiative depuis l'automne 2023, a revendiqué lundi la conquête d'un village de l'Est ukrainien situé non loin de Vougledar, localité à la jonction des fronts Est et Sud, dont elle cherche à s'emparer depuis deux ans.

"N'allons pas trop dans les détails, mais il y aura une période difficile, à la mi-mai et début juin", a prévenu M. Boudanov, interrogé sur l'état du front, dans une interview au service ukrainien de la BBC.

L'armée russe "mène une opération complexe", a-t-il dit.

"Nous pensons qu'une situation plutôt difficile nous attend dans un futur proche. Mais il faut comprendre que ce ne sera pas catastrophique", a estimé Kyrylo Boudanov.

"Armageddon ne se produira pas, contrairement à ce que beaucoup disent en ce moment. Mais il y aura des problèmes à partir de la mi-mai", a-t-il ajouté.

L'armée ukrainienne traverse une période délicate, confronté à une pénurie de nouvelles recrues et de munitions en raison de retards importants de livraisons d'aide occidentale, notamment américaine.

En face, les troupes russes, bien plus nombreuses et mieux armées, ne cessent de pousser à l'Est et revendiquent régulièrement la prise de petits villages dans le Donbass.

En février, Moscou s'est emparé d'Avdiïvka, une ville forteresse, et vise désormais la cité  stratégique de Tchassiv Iar.

Cette cité, perchée sur une hauteur, s'étend à moins de 30 kilomètres au sud-est de Kramatorsk, la principale ville de la région sous contrôle ukrainien, qui est un important nœud ferroviaire et logistique pour l'armée ukrainienne.

Offensive estivale? 

Lundi, le ministère russe de la Défense a affirmé avoir "libéré" Novomykhaïlivka, à une trentaine de kilomètres de Donetsk.

Ce village est proche de Vougledar, une cité minière à la jonction des fronts Sud et Est. Début 2023, l'Ukraine était parvenue à y repousser un assaut de l'armée russe, infligeant des pertes humaines importantes.

Kiev craint désormais une offensive estivale russe encore plus puissante.

Fin mars, le commandant des forces terrestres ukrainiennes Oleksandre Pavliouk avait jugé "possible" un tel scénario, impliquant un groupe de 100.000 soldats russes.

Le commandant en chef des forces ukrainiennes, Oleksandre Syrsky, a déjà admis mi-avril que la situation sur le front Est s'était "considérablement détériorée" récemment.

Il a affirmé voir une "intensification significative" de l'offensive russe depuis mars, aboutissant à des "succès tactiques".

La grande contre-offensive ukrainienne de l'été 2023 s'était heurtée à de puissantes lignes de défense russes qui ont épuisé les ressources de l'armée ukrainienne, sans permettre de libérer les régions occupées par la Russie.

L'Ukraine fait désormais face aux hésitations de ses alliés occidentaux, même si une aide militaire américaine de 61 milliards, longtemps bloquée, a finalement été votée par la Chambre des représentants des Etats-Unis samedi. Le texte doit encore être adopté par le Sénat puis promulgué par le président Joe Biden.

Kiev espère désormais que l'aide des Etats-Unis pourra atteindre le front très rapidement. Le Kremlin a, lui, jugé que qu'elle ne changerait "rien"


Espagne : l'homme clé d'un scandale de corruption garde le silence devant le Sénat

Koldo Garcia, ancien conseiller du ministre espagnol des Transports, assiste à une commission d'enquête sur une affaire de corruption liée à l'achat de masques pendant la pandémie, au Sénat de Madrid, le 22 avril 2024. (Photo, AFP)
Koldo Garcia, ancien conseiller du ministre espagnol des Transports, assiste à une commission d'enquête sur une affaire de corruption liée à l'achat de masques pendant la pandémie, au Sénat de Madrid, le 22 avril 2024. (Photo, AFP)
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  • Placé en garde à vue le 21 février, Koldo García est soupçonné de s'être enrichi en prélevant de lucratives commissions sur des contrats de vente de masques entre mars et juin 2020
  • Selon la justice, l'affaire aurait généré 9,5 millions d'euros de profits, pour des contrats d'un montant total de 53 millions d'euros

MADRID: L'homme de confiance d'un ex-ministre espagnol, très proche du Premier ministre socialiste Pedro Sánchez, a invoqué lundi son droit au silence devant une commission d'enquête mise en place par le Sénat qui l'entendait dans une affaire de corruption embarrassante pour l'exécutif.

Mis en cause pour son rôle dans un scandale lié à des achats de masques pour des administrations publiques durant la pandémie de Covid-19, Koldo Garcia était invité à s'exprimer pour la première fois publiquement sur cette affaire par cette commission du Sénat, dominé par le Parti populaire (PP, droite), principale formation d'opposition.

Bombardé de questions, cet homme à la stature imposante a invoqué son "droit à ne pas témoigner" en raison de la procédure ouverte par la justice sur ce scandale. "Par bon sens, je pense que je dois attendre" de "témoigner devant" le juge avant d'évoquer l'affaire, a-t-il expliqué.

M. Garcia a toutefois assuré avoir la conscience "très" tranquille. Visiblement agacé, il a dénoncé le traitement réservé à l'affaire par les journaux. "Médiatiquement, on m'a déjà crucifié vivant", a-t-il jugé.

Placé en garde à vue le 21 février, Koldo García est soupçonné de s'être enrichi en prélevant de lucratives commissions sur des contrats de vente de masques entre mars et juin 2020.

Selon la justice, l'affaire aurait généré 9,5 millions d'euros de profits, pour des contrats d'un montant total de 53 millions d'euros.

L'affaire est très sensible politiquement, car Koldo García était l'homme de confiance de José Luis Ábalos, ministre des Transports de 2018 à 2021 et membre important du premier cercle de Pedro Sánchez - l'un des rares à lui être resté fidèle après son éviction en 2016 de la tête du parti socialiste à la suite de résultats électoraux désastreux.

Mi-mars, le chef de file du PP, Alberto Núñez Feijóo, avait accusé le Premier ministre d'avoir été "au courant" et d'avoir "couvert" l'affaire. "Nous sommes face à une très grave affaire potentielle de corruption qui touche votre gouvernement, votre parti et probablement vous-même", avait-il ajouté.

Le Parti socialiste, qui a promis d'enquêter sur cette affaire avec "une transparence absolue", a exclu M. Ábalos de ses rangs, tandis que le gouvernement a limogé un haut fonctionnaire du ministère des Transports qui avait géré l'achat des masques.

Comme le Sénat, la Chambre des députés, où les socialistes et leurs alliés sont majoritaires, a voté la création d'une commission d'enquête sur les affaires de corruption autour de contrats d'achat de matériel sanitaire, mais élargie à plusieurs autres affaires dont l'une implique le compagnon d'Isabel Díaz Ayuso, le présidente de la région de Madrid et une figure du PP.

 

 


Expulsion de migrants au Rwanda: Londres «prêt» à appliquer son projet avant un vote au Parlement

Le Premier ministre britannique Rishi Sunak a déclaré qu'il ne détaillerait pas les détails opérationnels exacts du plan, mais a déclaré que le gouvernement avait fait des préparatifs spécifiques (Photo, AP).
Le Premier ministre britannique Rishi Sunak a déclaré qu'il ne détaillerait pas les détails opérationnels exacts du plan, mais a déclaré que le gouvernement avait fait des préparatifs spécifiques (Photo, AP).
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  • M. Sunak a pointé du doigt l'opposition de la chambre haute du Parlement, où les conservateurs n'ont pas la majorité, et qui tente depuis des semaines d'adoucir le texte
  • Conçu depuis deux ans par le gouvernement conservateur au pouvoir, et présenté comme une mesure phare de sa politique de lutte contre l'immigration clandestine

LONDRES: Le Premier ministre britannique Rishi Sunak a assuré lundi que tout était "prêt" pour expulser des demandeurs d'asile vers le Rwanda "quoi qu'il arrive", une fois que le projet de loi controversé en ce sens sera voté au Parlement.

"Ces vols décolleront, quoi qu'il arrive", a affirmé le Premier ministre lors d'une conférence de presse destinée à présenter les moyens déployés par le gouvernement pour organiser ces expulsions, en amont d'une journée cruciale au Parlement durant laquelle le projet de loi pourrait être voté.

"Le premier vol partira dans dix à douze semaines", a assuré Rishi Sunak, soit "plus tard que ce que nous aurions souhaité". Le gouvernement avait jusqu'ici affiché sa volonté de voir ces vols débuter au printemps.

M. Sunak a pointé du doigt l'opposition de la chambre haute du Parlement, où les conservateurs n'ont pas la majorité, et qui tente depuis des semaines d'adoucir le texte.

Conçu depuis deux ans par le gouvernement conservateur au pouvoir, et présenté comme une mesure phare de sa politique de lutte contre l'immigration clandestine, ce projet vise à envoyer au Rwanda les demandeurs d'asile entrés illégalement au Royaume-Uni.

Enjeu électoral 

L'enjeu est également électoral pour le parti conservateur et Rishi Sunak, à quelques mois des prochaines élections législatives, pour lesquelles l'opposition travailliste est donnée largement en tête.

Adossé à un nouveau traité entre Londres et Kigali, le projet de loi vise à répondre aux conclusions de la Cour suprême qui a jugé le projet initial illégal en novembre dernier. Il définit notamment le Rwanda comme un pays tiers sûr.

"Dès que la loi sera votée, nous commencerons le processus d'expulsion des (migrants) identifiés pour le premier vol", a insisté Rishi Sunak.

Le gouvernement a mobilisé des centaines de personnels, notamment des juges, pour traiter rapidement les éventuels recours de migrants illégaux, et débloqué 2.200 places en détention pour eux en attentant que leurs cas soient étudiés, a-t-il précisé.

Des "avions charter" ont été réservés pour effectuer ces expulsions, a ajouté le Premier ministre.

Le projet britannique est vivement critiqué jusqu'à l'ONU, dont le Haut-Commissaire aux droits de l'homme Volker Türk, a estimé qu'il va "à l'encontre des principes fondamentaux des droits humains".