En Afghanistan, sur les traces du mystérieux "chef suprême" des talibans

Sur cette photo prise le 7 novembre 2021, le villageois Abdul Qayum qui se souvient du chef suprême des talibans Hibatullah Akhundzada est photographié dans le village de Sperwan dans le district de Panjwai à Kandahar. (AFP)
Sur cette photo prise le 7 novembre 2021, le villageois Abdul Qayum qui se souvient du chef suprême des talibans Hibatullah Akhundzada est photographié dans le village de Sperwan dans le district de Panjwai à Kandahar. (AFP)
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Publié le Vendredi 03 décembre 2021

En Afghanistan, sur les traces du mystérieux "chef suprême" des talibans

  • Le 30 octobre en début de soirée à Kandahar, "capitale de l'ombre" du nouveau régime, dans le sud afghan, la rumeur enfle. Le "chef suprême" a prononcé un discours dans une école coranique de la ville. Il s'agirait de sa première apparition publique offic
  • Barbe grise, nez large et regard sombre pointé sur l'objectif: une seule photo de lui a émergé en 2016 et elle date d'une vingtaine d'années selon les talibans. Akhundzada aurait désormais entre 60 et 70 ans, selon des témoignages recoupés. 

KANDAHAR : Depuis plus de trois mois, l'Afghanistan des talibans est dirigé par un être invisible. Dans son bastion du sud, le chef suprême, mollah Hibatullah Akhundzada, reste le secret le mieux gardé du pays, vénéré par ses partisans mais si discret que certains experts doutent qu'il soit toujours en vie.

Le 30 octobre en début de soirée à Kandahar, "capitale de l'ombre" du nouveau régime, dans le sud afghan, la rumeur enfle. Le "chef suprême" a prononcé un discours dans une école coranique de la ville. Il s'agirait de sa première apparition publique officielle depuis sa nomination en 2016.

A Kaboul, l'état-major taliban finit par confirmer l'information à 23h30, enregistrement audio de 10 minutes et 30 secondes à l'appui. 

La bande son crépite. "Que Dieu récompense le peuple d'Afghanistan qui a lutté contre les infidèles et l'oppression pendant 20 ans". La voix d'un homme âgé, perdue dans un écho, psalmodie des bénédictions.

L'existence du "Commandeur des croyants" taliban, auquel Al-Qaïda a prêté allégeance, n'était jusque-là attestée que par de rares messages écrits qui lui étaient attribués lors des fêtes islamiques.

Jusqu'à la prise de pouvoir des fondamentalistes à la mi-août, personne, hors de cercles talibans rapprochés, ne savait où il se trouvait.

Barbe grise, nez large et regard sombre pointé sur l'objectif: une seule photo de lui a émergé en 2016 et elle date d'une vingtaine d'années selon les talibans. Akhundzada aurait désormais entre 60 et 70 ans, selon des témoignages recoupés. 

"Il est vivant et en bonne santé, et se trouve à Kandahar d'où il dirige le mouvement taliban", martèle son entourage.

 L'apparition 

Dans l'un des faubourgs les plus pauvres de Kandahar, entre une rivière de détritus et une allée de terre battue, deux talibans montent la garde devant le portail bleu et blanc de la madrassa Hakimia, où certains curieux se pressent de loin depuis la visite consacrée du 30 octobre.

Ce jour-là, le chef suprême était accompagné de "trois gardes" et "était lui-même armé", témoigne auprès de l'AFP, Massum Shakrullah, le chef de la sécurité du centre d'étude coranique. 

"Il a choisi une madrassa d'un quartier pauvre" qui a fourni pendant 20 ans aux talibans nombre de jeunes combattants morts "en martyrs", souligne le mollah Saeed Ahmed, directeur du centre où étudient 600 garçons et adolescents.

Etait-ce bien le chef suprême des talibans qui a parlé ce soir là? "Nous le regardions tous et nous pleurions", témoigne un mois plus tard auprès de l’AFP, Mohammed, 19 ans, qui dit avoir été trop ému sur le moment pour "prêter attention à son visage". 

Mohammed Musa, 13 ans, qui était au moment du discours à "100 ou 200 mètres" du chef suprême, assure que ce dernier "ressemblait parfaitement" à la photo qui circule de lui depuis 2016.

Tous racontent qu'il était vêtu de blanc et d'un turban tantôt noir, tantôt blanc.

Aucune vidéo ou photo n'a filtré de cette visite inédite, avant laquelle les talibans avaient confisqué les téléphones portables des centaines de témoins.

« Hibatullah est mort »

Cette apparition "a fait taire les rumeurs et la propagande à son propos", juge le directeur de la madrassa. 

Mais il en faudra plus pour convaincre certains cadres de l'ancien régime afghan, qui soupçonnent qu'Akhundzada est mort depuis déjà une voire plusieurs années.

Ils voient dans l'épisode de la madrassa une mise en scène, qui en rappelle une autre: la mort en 2013 du mollah Omar, fondateur mythique des talibans. Les talibans l'ont cachée pendant deux ans, avant de la confirmer en 2015 lorsque le secret a été éventé par leurs ennemis du NDS, les services de renseignement du gouvernement de l'époque.

"Il est mort depuis longtemps et n'a eu aucun rôle dans la prise de Kaboul", affirme à l'AFP un responsable du NDS, qui assure qu'Akhundzada a été tué en août 2019 dans une attaque-suicide à Quetta, un sanctuaire pakistanais des talibans.

D'autres services de sécurité étrangers jugent ce scénario crédible, a appris l'AFP.

Les rumeurs de mort ne sont "ni infirmées, ni confirmées", admet une source sécuritaire régionale, qui penche toutefois du côté du NDS, estimant l'émir absent des affaires du nouveau régime.

Interrogés par l'AFP sur le sujet, le Pentagone et la CIA n'ont pas souhaité répondre.

 Jeune prodige 

Dans le district de Panjwai, un vaste plateau aride à la sortie de Kandahar, tout le monde connaît le village des Akhundzada, une lignée de théologiens respectés.

Deux combattants islamistes enfourchent leur moto et acceptent de guider à travers les dunes, turban au vent, jusqu'à Sperwan, le village natal du numéro un du régime. 

"Au moment de l'invasion soviétique (fin 1979), les combats ont éclaté dans le village et Hibatullah est parti au Pakistan", explique à l'AFP Niamatullah, jeune combattant de la région qui a suivi ses enseignements au Pakistan, "le plus beau souvenir de sa vie". 

Akhundzada devient alors un érudit respecté et gagne le titre de "Sheikh al-hadith", une distinction réservée aux plus éminents spécialistes des paroles du prophète.

Au début des années 1990, au moment où l'insurrection islamiste émerge dans les ruines de l'occupation soviétique, Akhundzada, alors âgé d'une trentaine d'années, revient sur ses terres.

A la mosquée de Sperwan, où il s'installe pendant "cinq à six ans", selon les témoignages, "les oulémas (spécialistes de la loi islamique) venaient de la ville et du Pakistan pour le rencontrer et le consulter", se souvient Abdul Qayum, un villageois de 65 ans.

Selon les bribes de sa biographie officielle, à l'arrivée au pouvoir du premier régime taliban en 1996, l'ascension du jeune prodige en théologie est fulgurante. En 2001 il devient le chef du tribunal militaire de Kaboul.

Lors de l'invasion américaine, fin 2001, Akhundzada fuit à Quetta et devient le chef de la justice des talibans, et un formateur encensé par la nouvelle génération de moudjahidine.

 « Centre de gravité » 

Depuis la mort du mollah Omar puis de son successeur mollah Mansour en 2016, "il a été le centre de gravité des talibans, il a su préserver le groupe intact", indique à l'AFP un cadre taliban vivant au Pakistan.

Ces dernières années, mollah Hibatullah aurait ainsi joué un rôle décisif sur le plan diplomatique. Il peut aussi se montrer plus inattendu, comme lorsqu'il appelle en 2017 chaque Afghan à "planter des arbres" pour "la protection de l'environnement et le développement économique".

Selon le cadre taliban vivant au Pakistan, qui dit avoir rencontré Akhundzada à trois reprises, la dernière fois en 2020, le chef suprême, qui fait un peu d'exercice physique entre la prière et ses prêches et audiences matinales, est connu pour son refus d'utiliser les nouvelles technologies, préférant les appels téléphoniques à l'ancienne ou les "lettres" envoyées aux membres du gouvernement taliban, avec lesquels il garde un lien étroit et fraternel. 

Parlant quatre langues et de bonne stature, 1,75 m, il s'habille du traditionnel shalwar kameez et d'un gilet, souvent accompagnés d'un châle.

L'été dernier, il aurait donné son feu vert pour la dernière offensive et suivi les opérations depuis Kandahar, où il se trouvait déjà clandestinement depuis des mois, selon le cadre taliban.

Toute nomination officielle au nouveau gouvernement porte désormais sa signature.

"Voyez, un homme qui n'apparaît jamais en public a conquis un pays", s'amuse le cadre taliban.

« Quand cela sera possible »

S'il est maintenu dans la clandestinité la plus stricte, c'est d'abord par crainte qu'il ne soit éliminé, soulignent de nombreuses sources talibanes.

Même si les Américains ont quitté l'Afghanistan fin août, les talibans redoutent toujours leurs redoutables tirs de drone. Et les attaques, de plus en plus nombreuses, de leurs rivaux sunnites du groupe Etat islamique (EI). 

Le peu de traces d'Akhundzada interpelle Kate Clark, de l'Afghanistan Analysts Network (AAN), qui rappelle que "même le mollah Omar, sans se laisser photographier ou filmer, a fait des déclarations et des interviews à la radio et a rencontré des responsables étrangers".

Mais contrairement aux années 2013-2015, où de nombreux talibans admettaient en privé ne pas savoir où était le mollah Omar et s'il était encore en vie, ils assurent tous aujourd'hui qu'Hibatullah est vivant et va bien.

Pour le responsable sécuritaire régional, si l'émir taliban est mort, le mouvement islamiste n'a aucun intérêt à l'annoncer, au risque de déclencher une guerre de succession "qui va encore plus fractionner les talibans", et dont l'EI pourrait "tirer avantage".

Dans ce cas de figure, note l'ancien responsable sécuritaire afghan, les talibans ne révéleront sa mort "que lorsque les choses seront plus stables" et qu'ils auront une "forme de reconnaissance internationale". Et cela, "personne ne sait quand ça arrivera", dit-il.

Quand le chef suprême apparaîtra-t-il aux yeux du monde entier? La réponse officielle des talibans suggère que l'ambiguïté n'est pas prête d'être levée. 

"Il n'est pas nécessaire pour le Cheikh Sahib (autre surnom d'Akhundzada) d'apparaître, puisque même de cette manière il parvient à commander de manière ordonnée et efficace", répond à l'AFP le porte-parole adjoint du gouvernement, Ahmadullah Waseeq, tout en promettant qu'il se montrera "quand cela sera possible".


CIJ: l'impartialité de l'UNRWA suscite de «sérieux doutes» selon les Etats-Unis

En décembre, l'Assemblée générale des Nations unies avait adopté une résolution demandant à la CIJ de rendre un avis consultatif "à titre prioritaire et de toute urgence". (AFP)
En décembre, l'Assemblée générale des Nations unies avait adopté une résolution demandant à la CIJ de rendre un avis consultatif "à titre prioritaire et de toute urgence". (AFP)
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  • La CIJ, située à La Haye (Pays-Bas), a ouvert lundi sa semaine d'audiences plus de 50 jours après l'instauration d'un blocus total sur l'aide entrant dans la bande de Gaza ravagée par la guerre
  • Israël, qui ne participe pas à ces audiences, a dénoncé lundi une "persécution systématique" de la CIJ

LA HAYE: Un représentant des Etats-Unis a fait part mercredi à la Cour internationale de Justice de "sérieux doutes" concernant l'impartialité de l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) lors d'audiences consacrées aux obligations humanitaires d'Israël envers les Palestiniens.

"L'impartialité de l'UNRWA suscite de sérieux doutes, du fait d'informations selon lesquelles le Hamas a utilisé les installations de l'UNRWA et que le personnel de l'UNRWA a participé à l'attentat terroriste du 7 octobre contre Israël", a déclaré Josh Simmons, de l'équipe juridique du département d'État américain.

La CIJ, située à La Haye (Pays-Bas), a ouvert lundi sa semaine d'audiences plus de 50 jours après l'instauration d'un blocus total sur l'aide entrant dans la bande de Gaza ravagée par la guerre.

Israël, qui ne participe pas à ces audiences, a dénoncé lundi une "persécution systématique" de la CIJ.

M. Simmons a déclaré aux juges qu'Israël avait "de nombreuses raisons" de mettre en doute l'impartialité de l'UNRWA.

"Il est clair qu'Israël n'a aucune obligation d'autoriser l'UNRWA à fournir une assistance humanitaire", a-t-il déclaré.

Israël a promulgué une loi interdisant à l'UNRWA, d'opérer sur le sol israélien, après avoir accusé certains membres du personnel d'avoir participé aux attaques du Hamas le 7 octobre 2023, qui a déclenché le conflit.

Une série d'enquêtes, dont l'une menée par l'ancienne ministre française des Affaires étrangères Catherine Colonna, a révélé des "problèmes de neutralité" à l'UNRWA, mais a souligné qu'Israël n'avait pas fourni de preuves de son allégation principale.

Philippe Lazzarini, directeur de l'UNRWA, a déclaré mardi que plus de 50 membres de son personnel à Gaza avaient été maltraités et utilisés comme boucliers humains alors qu'ils étaient détenus par l'armée israélienne.

Lors de sa déposition face à la Cour, Diégo Colas, représentant la France, a appelé Israël à lever "sans délai" son blocage de l'aide vers la bande de Gaza".

"L'ensemble des points de passage doivent être ouverts, le travail des acteurs humanitaires doit être facilité, et le personnel doit être protégé conformément aux droits internationaux", a-t-il déclaré .

"Conséquences mortelles" 

Israël contrôle tous les flux d'aide internationale, vitale pour les 2,4 millions de Palestiniens de la bande de Gaza frappés par une crise humanitaire sans précédent, et les a interrompus le 2 mars dernier, quelques jours avant l'effondrement d'un fragile cessez-le-feu après 15 mois de combats incessants.

"L'interdiction totale de l'aide et des fournitures humanitaires décrétée par les autorités israéliennes depuis le 2 mars a des conséquences mortelles pour les civils de Gaza", a déclaré dans un communiqué Claire Nicolet, responsable de la réponse d'urgence de l'ONG Médecins sans Frontières dans la bande de Gaza.

"Les autorités israéliennes utilisent l'aide non seulement comme une monnaie d'échange, mais aussi comme une arme de guerre et un moyen de punition collective pour plus de 2 millions de personnes vivant dans la bande de Gaza," a-t-elle ajouté.

En décembre, l'Assemblée générale des Nations unies avait adopté une résolution demandant à la CIJ de rendre un avis consultatif "à titre prioritaire et de toute urgence".

La résolution demande à la CIJ de clarifier les obligations d'Israël concernant la présence de l'ONU, de ses agences, d'organisations internationales ou d'États tiers pour "assurer et faciliter l'acheminement sans entrave des fournitures urgentes essentielles à la survie de la population civile palestinienne".

Les avis consultatifs de la CIJ ne sont pas juridiquement contraignants, mais celui-ci devrait accroître la pression diplomatique sur Israël.

En juillet dernier, la CIJ avait aussi rendu un avis consultatif jugeant "illégale" l'occupation israélienne des Territoires palestiniens, exigeant qu'elle cesse dès que possible.


Après la panne géante, les énergies renouvelables sur le banc des accusés en Espagne

Des passagers attendent avant de monter dans leur train à la gare de Sants à Barcelone, le 29 avril 2025, au lendemain d'une panne d'électricité massive qui a touché toute la péninsule ibérique et le sud de la France. (Photo par Josep LAGO / AFP)
Des passagers attendent avant de monter dans leur train à la gare de Sants à Barcelone, le 29 avril 2025, au lendemain d'une panne d'électricité massive qui a touché toute la péninsule ibérique et le sud de la France. (Photo par Josep LAGO / AFP)
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  • Deux jours après la panne géante qui a touché la péninsule, la nature du mix énergétique ibérique est au cœur de vifs débats mercredi en Espagne.
  • Dans le viseur de ces deux quotidiens, mais aussi des partis d'opposition, se trouve la politique énergétique mise en place depuis plusieurs années par le gouvernement du Premier ministre socialiste Pedro Sánchez.

MADRID : L'essor des énergies renouvelables a-t-il fragilisé le réseau électrique espagnol ? Deux jours après la panne géante qui a touché la péninsule, la nature du mix énergétique ibérique est au cœur de vifs débats mercredi en Espagne, malgré les messages rassurants des autorités.

« Le manque de centrales nucléaires et la multiplication par dix des énergies renouvelables ont mis à terre le réseau électrique », assure en une le quotidien conservateur ABC mercredi matin. « Les alertes sur les renouvelables depuis cinq ans » ont été « ignorées », regrette de son côté El Mundo, également classé à droite.

Dans le viseur de ces deux quotidiens, mais aussi des partis d'opposition, se trouve la politique énergétique mise en place depuis plusieurs années par le gouvernement du Premier ministre socialiste Pedro Sánchez, qui a fait de l'Espagne l'un des champions européens de la transition verte.

Selon le gestionnaire du réseau électrique espagnol REE, le solaire et l'éolien ont représenté en 2024 près de 40 % du mix électrique espagnol. C'est près de deux fois plus qu'en 2014, et près du double également de la part du nucléaire, tombée l'an dernier à 20 %. 

Cette évolution est défendue par l'exécutif, qui s'est engagé à fermer toutes les centrales nucléaires d'ici dix ans, mais elle est source de tensions dans le pays, plusieurs rapports ayant pointé ces derniers mois de possibles risques en l'absence de mesures fortes pour adapter le réseau.

- Une énergie « sûre » ?

Dans son document financier annuel publié fin février, Redeia, la maison-mère de REE, avait ainsi mis en garde contre « la forte pénétration de la production renouvelable sans les capacités techniques nécessaires à un comportement adéquat face aux perturbations ».

Cela pourrait « provoquer des coupures de production », qui « pourraient devenir sévères, allant jusqu'à entraîner un déséquilibre entre la production et la demande, ce qui affecterait significativement l'approvisionnement en électricité » de l'Espagne, avait-elle écrit. 

Un message relayé par l'organisme espagnol de la concurrence (CNMC) dans un rapport de janvier. « À certains moments, les tensions du réseau de transport d'électricité ont atteint des valeurs maximales proches des seuils autorisés, dépassant même ces seuils à certains moments », avait écrit l'organisme.

Après la coupure de lundi, certains experts du secteur se sont interrogés sur un éventuel déséquilibre entre production et demande (difficile à corriger dans un réseau où l'éolien et le solaire ont une place prépondérante) qui aurait pu contribuer à l'effondrement du système électrique espagnol.

Dans un entretien accordé mercredi matin à la radio Cadena Ser, Beatriz Corredor, la présidente de Redeia et REE (l'ex-députée socialiste) a cependant assuré que la production d'énergies renouvelables était « sûre ».

« Relier l'incident si grave de lundi à une pénétration des énergies renouvelables n'est pas vrai, ce n'est pas correct », a-t-elle insisté, en assurant que le rapport de février ne faisait que dresser la liste de risques potentiels, comme l'y oblige la législation. 

- « Ignorance » -

Mardi déjà, Pedro Sánchez avait lui aussi défendu le modèle énergétique mis en œuvre par son gouvernement, rappelant que la cause précise de la panne qui a provoqué le chaos au Portugal et en Espagne durant de longues heures lundi n'était toujours pas connue à ce stade.

« Ceux qui lient cet incident au manque de nucléaire mentent franchement ou démontrent leur ignorance », a assuré le dirigeant socialiste.

« Les centrales nucléaires, loin d'être une solution, ont été un problème » durant la panne, car « il a été nécessaire de rediriger vers elles de grandes quantités d'énergie pour maintenir leurs réacteurs stables », a insisté le chef du gouvernement. 

Plusieurs hypothèses ont été avancées pour expliquer la panne depuis deux jours, dont celle d'une cyberattaque. Mardi, la justice espagnole a ouvert une enquête pour déterminer si la panne avait été provoquée par un « sabotage informatique » susceptible d'être qualifié de « délit terroriste ».

REE estime cependant que cette hypothèse est peu crédible. « Au vu des analyses que nous avons pu réaliser avec l'aide notamment du Centre national du renseignement espagnol (CNI), nous pouvons écarter un incident de cybersécurité », a ainsi assuré le gestionnaire.

D'après REE, l'équivalent de 60 % de la consommation électrique de l'Espagne, soit 15 gigawatts, a disparu en l'espace de cinq secondes seulement lors de la panne survenue lundi à 12 h 33 (11 h 33 GMT), un phénomène qualifié d'« inédit » et « totalement extraordinaire ».


Des rapports internes concluent à un climat antisémite et anti-musulman à Harvard

Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël". (AFP)
Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël". (AFP)
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  • Harvard, comme d'autres universités américaines de renom, Columbia en particulier, est accusée par le président républicain d'avoir laissé prospérer l'antisémitisme sur son campus pendant les mouvements étudiants contre la guerre à Gaza menée par Israël
  • Un premier groupe de travail sur l'antisémitisme et les positions anti-Israël, composé principalement de membres du corps enseignant mais aussi d'étudiants

NEW YORK: Deux rapports distincts sur Harvard publiés mardi par l'université ont établi qu'un climat antisémite et anti-musulman s'était installé sur le campus de la prestigieuse université américaine, dans le viseur de Donald Trump, et la pressent d'agir pour y remédier.

Ces deux rapports de plusieurs centaines de pages, construits notamment à partir de questionnaires et de centaines de témoignages d'étudiants et d'encadrants menés depuis janvier 2024, sont rendus au moment où l'université implantée près de Boston (nord-est) s'est attiré les foudres de Donald Trump, qui l'a dernièrement dépeinte en "institution antisémite d'extrême gauche", "foutoir progressiste" et "menace pour la démocratie".

Harvard, comme d'autres universités américaines de renom, Columbia en particulier, est accusée par le président républicain d'avoir laissé prospérer l'antisémitisme sur son campus pendant les mouvements étudiants contre la guerre à Gaza menée par Israël après l'attaque du Hamas le 7 octobre 2023.

Un premier groupe de travail sur l'antisémitisme et les positions anti-Israël, composé principalement de membres du corps enseignant mais aussi d'étudiants, a établi que les deux phénomènes "ont été alimentés, pratiqués et tolérés, non seulement à Harvard, mais aussi plus largement dans le monde universitaire".

Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël".

Un autre groupe de travail distinct, lui consacré aux positions anti-musulmans, anti-arabes et anti-Palestiniens, a conclu à "un sentiment profondément ancré de peur parmi les étudiants, les enseignants et le personnel". Les personnes interrogées décrivent "un sentiment de précarité, d'abandon, de menace et d'isolement, ainsi qu'un climat d'intolérance omniprésent", écrivent ses auteurs.

"Harvard ne peut pas - et ne va pas - tolérer l'intolérance. Nous continuerons à protéger tous les membres de notre communauté et à les préserver du harcèlement", s'engage dans une lettre accompagnant les deux rapports le président de Harvard, Alan Garber, à l'initiative des deux rapports, en promettant de "superviser la mise en oeuvre des recommandations" préconisées.

Harvard, l'université la plus ancienne des Etats-Unis et une des mieux classées au monde, s'est distinguée en étant la première à attaquer en justice l'administration Trump contre un gel de plus de deux milliards de dollars de subventions fédérales, décidé après que la célèbre institution a refusé de se plier à une série d'exigences du président.

Donald Trump, qui reproche aux universités d'être des foyers de contestation progressiste, veut avoir un droit de regard sur les procédures d'admission des étudiants, les embauches d'enseignants ou encore les programmes.

L'accusation d'antisémitisme est fréquemment employée par son administration pour justifier ses mesures contre les établissements d'enseignement supérieur, ainsi que contre certains étudiants étrangers liés aux manifestations contre la guerre à Gaza.