Dans les campagnes isolées de France, aide alimentaire pour les plus précaires

Créée en 1985 par le célèbre humoriste français Coluche (1944-86), les Restos du Cœur ont alerté fin novembre sur «l'aggravation de la précarité» des plus démunis provoquée par la crise sanitaire. (Photo, AFP)
Créée en 1985 par le célèbre humoriste français Coluche (1944-86), les Restos du Cœur ont alerté fin novembre sur «l'aggravation de la précarité» des plus démunis provoquée par la crise sanitaire. (Photo, AFP)
Short Url
Publié le Samedi 04 décembre 2021

Dans les campagnes isolées de France, aide alimentaire pour les plus précaires

  • La pandémie de Covid-19 avait marqué les esprits l'an dernier, avec l'allongement des files d'attente devant les centres de distribution alimentaire
  • Plus que de fabriquer de «nouveaux pauvres», l'épidémie de Covid-19 a surtout enfoncé ceux qui étaient déjà fragilisés

AUXERRE : A moins de 200 km de Paris, les camions des Restos du Coeur sillonnent les routes deux fois par semaine, de village en village. Ils apportent aux personnes pauvres et isolées, de plus en plus nombreuses depuis le début de la pandémie, des produits alimentaires et d'hygiène, mais aussi du contact humain.

Créée en 1985 par le célèbre humoriste français Coluche (1944-86), les Restos du Cœur ont alerté fin novembre sur "l'aggravation de la précarité" des plus démunis provoquée par la crise sanitaire.

La pandémie de Covid-19 avait marqué les esprits l'an dernier, avec l'allongement des files d'attente devant les centres de distribution alimentaire. L'association a aidé 1,2 million de personnes depuis novembre 2020 et distribué 142 millions de repas, contre 136 millions l'année précédente.

Trois camions floqués "Restos du Coeur" entrent sur le parking de la salle des fêtes de Seignelay, à quinze kilomètres d'Auxerre (centre). Plusieurs voitures stationnent déjà, à l'écart du centre ville. "Ils sont là", murmure Babeth Manseau, responsable de la maraude itinérante.

Il est presque 9h30, le thermomètre peine à atteindre trois degrés. Un café fumant pour se réchauffer, puis les bénévoles de l'association, emmitouflés, bonnet sur la tête, rejoignent leur poste, prêts à servir les bénéficiaires.

Leur nombre a augmenté depuis la crise sanitaire, qui a précipité la venue d'une "nouvelle population": "des personnes licenciées", mais aussi "énormément de jeunes", a constaté Babeth Manseau.

Seignelay est une bourgade de 1 500 habitants, peu desservie par les transports en commun. Une vingtaine de personnes attendent la venue des Camions le mardi, et reçoivent l'équivalent de six repas par membre de leur foyer.

«Les sous qu'on n'a pas»

"On va au devant des gens, (...) chez ceux qui sont loin de tout, n'ont pas forcément de moyen pour se déplacer", explique Jean-Bernard Gaudry, bénévole retraité de 69 ans. "Dans ces patelins paumés, les gens sont contents de nous voir".

Pour Aurore Berthet, 45 ans, sans emploi et mère d'une famille recomposée de sept enfants, la venue des Camions est une aubaine. Elle habite à quelques minutes de marche.

"Je n'ai pas le permis, juste un scooter, et avec les enfants à la maison, c'est pas évident", confie-t-elle, en remplissant son caddie d'une douzaine de briques de lait. À ses pieds, plusieurs sacs remplis à ras bord.

Dans des cartons, de petits pères Noël nagent au milieu de guirlandes à accrocher sur le sapin. Aurore en choisit un. "Ça fera plaisir aux enfants", dit-elle en souriant.

Sur le parking, Michel Gohon, 64 ans, charge le coffre de sa voiture. Cet ancien mécanicien, cheveux longs et barbe grise, perçoit 250 euros d'allocation par mois. "Ça nous évite de dépenser les sous qu'on n'a pas", souffle-t-il, ému.

A Ligny-le-Châtel (20 km d'Auxerre), deuxième stop de la journée. Michel et Françoise sont deux habitués, retraités. "Avec le prix du gasoil, on se déplace le moins possible", déclare Michel.

«Ils n'ont rien »

Les Camions du Coeur, c'est aussi une des seules sorties de la semaine. "On leur apporte non seulement de quoi manger, mais aussi du lien social. Il y a certaines personnes qui n'ont que nous", lâche Jean-Bernard Gaudry.Chablis (20 km d'Auxerre) est la troisième étape de la tournée.

Elizabeth N'Guessan élève seule ses cinq enfants, et se rend au point de distribution toutes les semaines, à proximité de son lieu de travail. "Sans cela, je serais dans la rue", admet cette aide à domicile.

Dans ces campagnes reculées, certains se retrouvent "totalement à l'abandon et partent parfois à la dérive", déplore Babeth Manseau. "Si on n'est pas là, je ne sais pas ce qu'il se passe. Ils n'ont rien".

Il faudrait un camion supplémentaire pour pouvoir "distribuer des habits", dit-elle. "À Chablis, on a beaucoup de réfugiés, certains ne connaissent pas le froid".

Plus que de fabriquer de "nouveaux pauvres", l'épidémie de Covid-19 a surtout enfoncé ceux qui étaient déjà fragilisés, selon les Restos du Coeur. Plus de la moitié de ses bénéficiaires déclarent avoir subi une perte de revenus liée à la crise sanitaire.


Il sauve six personnes d'un incendie: Fousseynou Cissé, nouveau "héros" du 18e arrondissement

Cette photo montre la Tour Eiffel illuminée (à droite) et la basilique du Sacré-Cœur au sommet de la colline de Montmartre, à Paris, le 11 juin 2025. (AFP)
Cette photo montre la Tour Eiffel illuminée (à droite) et la basilique du Sacré-Cœur au sommet de la colline de Montmartre, à Paris, le 11 juin 2025. (AFP)
Short Url
  • Fousseynou Cissé n'a "pas hésité" à sauver vendredi six personnes piégées dans leur appartement par un incendie dans le 18e arrondissement de Paris
  • Même Emmanuel Macron y est allé de ses félicitations lors d'un appel à M. Cissé

PARIS: Fousseynou Cissé n'a "pas hésité" à sauver vendredi six personnes piégées dans leur appartement par un incendie dans le 18e arrondissement de Paris. Celui qui s'apprête à être décoré est désormais vu comme un "héros" dans son quartier.

Résidents, riverains, cousins... Dans la cour de l'immeuble du 18e arrondissement, dans le nord de la capitale, tous se succèdent pour saluer Fousseynou Cissé lundi, trois jours après son acte héroïque. Un homme qui le connaît se filme en selfie avec lui.

Cet agent d'accueil contractuel dans les collèges accepte timidement les sollicitations: "On me parle de héros, mais moi... avec l'humilité que j'ai...même aujourd'hui, ce mot-là ne me fait pas grand chose", confie-t-il à l'AFP.

Même Emmanuel Macron y est allé de ses félicitations lors d'un appel à M. Cissé, filmé par le média Brut: "Bravo à vous, parce que la vidéo est impressionnante", a salué le chef de l'Etat, saluant le "courage" du père de famille.

Le président de la République a également invité Fousseynou Cissé, d'origine sénégalaise, et sa famille aux festivités du 14 juillet.

- En équilibre -

Fousseynou Cissé, 39 ans, sera aussi décoré par le préfet de police de Paris Laurent Nuñez "pour acte de courage et de dévouement" le 13 juillet.

Tout commence vendredi, lorsqu'un incendie se déclare au deuxième étage de l'immeuble de ce foyer Adoma, bailleur du logement accompagné en France. L'explosion d'une batterie de vélo en train de recharger dans un appartement pourrait en être la cause.

Au sixième étage, deux mères de famille se retrouvent bloquées par les fumées. Elles craignent pour leurs bébés, qu'elles tiennent à bout de bras aux fenêtres pour les protéger de la fumée.

"Quand j'ai vu la femme tendre son bébé, j'ai compris qu'il fallait faire quelque chose tout de suite", raconte Fousseynou Cissé.

Filmé par un habitant de l'immeuble, la vidéo de son sauvetage risqué est devenue virale sur les réseaux sociaux.

On le voit, s'avançant sur une corniche, puis en équilibre dans l'angle entre les deux bâtiments de la résidence, faisant passer deux bébés, deux enfants et deux mères de famille de la fenêtre de l'appartement à un autre.

"Je ne regardais même pas en bas. Je me concentrais pour ne pas avoir le vertige et pour ne pas glisser", décrit celui qui habite depuis deux ans dans l'immeuble.

"J'ai pensé qu'on allait mourir. Mais quand j'ai vu le monsieur prendre le bébé, là, j'ai dit, voilà, on va y arriver", témoigne auprès de l'AFP Zaoidi Ali, 37 ans, secourue par Fousseynou Cissé avec ses deux enfants.

- "Grande, grande personne" -

La mère de famille, les yeux humides, se dit "reconnaissante". "Je vais le remercier. Je vais le remercier encore parce que c'est quelqu'un de volontaire".

Au final, le sinistre a fait douze blessés, la plupart provoqués par de légères intoxications, dont cinq enfants, a appris l'AFP de source policière.

Dans la résidence et le quartier, le trentenaire apparaît comme un "héros". "Je me suis dit, +il y a encore des gens qui sont humains+", relate Abdul (le prénom a été modifié), 30 ans, gérant d'un commerce voisin.

"J'ai vu la vidéo. Je ne sais pas si tout le monde aurait fait ça. Ça aurait pu être nous, juste en face", réagit Moussa (il n'a pas souhaité donné son nom de famille), 20 ans, employé d'un restaurant situé face la résidence.

Nougaoui Hichame, directeur territorial d'Adoma, le bailleur de la résidence, salue de son côté une action "hors norme". "Ma première réaction ça a été de dire, +on souhaite le rencontrer+", raconte M. Hichame, qui salue une "grande, grande personne".


Nouveau conseil de défense sur «l'entrisme» des Frères musulmans

Emmanuel Macron a convoqué lundi un nouveau conseil de défense sur "l'entrisme" des Frères musulmans, après une première réunion fin mai jugée insatisfaisante par le chef de l'Etat, qui avait demandé au gouvernement "de nouvelles propositions". (AFP)
Emmanuel Macron a convoqué lundi un nouveau conseil de défense sur "l'entrisme" des Frères musulmans, après une première réunion fin mai jugée insatisfaisante par le chef de l'Etat, qui avait demandé au gouvernement "de nouvelles propositions". (AFP)
Short Url
  • Le précédent conseil de défense consacré à "l'entrisme" des Frères musulmans avait tourné au recadrage, M. Macron s'étant agacé que le rapport qu'il avait commandé sur le sujet ait fuité dans la presse avant cette réunion
  • "Compte tenu de l'importance du sujet et de la gravité des faits établis, il a demandé au gouvernement de formuler de nouvelles propositions", s'était alors contenté d'indiquer l'Elysée

PARIS: Emmanuel Macron a convoqué lundi un nouveau conseil de défense sur "l'entrisme" des Frères musulmans, après une première réunion fin mai jugée insatisfaisante par le chef de l'Etat, qui avait demandé au gouvernement "de nouvelles propositions".

Ce conseil de défense et de sécurité nationale se tiendra lundi en fin de matinée à l'Elysée, a indiqué l'entourage du président à l'AFP, confirmant une information du Figaro, sans autre précision.

D'après le quotidien, y sont attendus le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, sa collègue de l'Education Elisabeth Borne, mais aussi celle des Sports Marie Barsacq.

Le précédent conseil de défense consacré à "l'entrisme" des Frères musulmans avait tourné au recadrage, M. Macron s'étant agacé que le rapport qu'il avait commandé sur le sujet ait fuité dans la presse avant cette réunion.

"Compte tenu de l'importance du sujet et de la gravité des faits établis, il a demandé au gouvernement de formuler de nouvelles propositions", s'était alors contenté d'indiquer l'Elysée.

Le rapport faisait état d'une "menace pour la cohésion nationale" avec le développement d'un islamisme "par le bas" de la part des Frères musulmans.

Née en 1928 en Egypte, la confrérie des Frères musulmans porte le projet d'un islam politique conservateur. Le mouvement a été interdit dans plusieurs pays, comme l'Arabie saoudite, l'Egypte et plus récemment la Jordanie.

En France, il existe "dans certains quartiers" des phénomènes d'entrisme "identifiés", avait affirmé M. Macron dans la foulée du premier conseil de défense, tout en appelant à ne pas "penser qu'il y en a partout, parce que ça peut rendre complotiste ou paranoïaque".

C'est précisément ce que lui reproche à gauche La France insoumise, dont le coordinateur national Manuel Bompard a encore dénoncé lundi sur TF1 une volonté de "pointer du doigt les Français de confession musulmane".

En pratique, les pistes avancées par M. Retailleau pour "s'attaquer aux écosystèmes islamistes" ont principalement pris la forme d'une réorganisation administrative, avec la création d'un rôle de "chef de file" en matière de renseignement, ou encore d'un "parquet administratif" capable par exemple de prononcer des dissolutions.

Des "mesurettes administratives" rejetées en bloc par la cheffe de file du Rassemblement national, Marine Le Pen, qui avait réclamé d'aller "chercher, dénoncer, débusquer, couper les financements, interdire les publications" de cette "idéologie totalitaire".

Les décisions actées par ce nouveau conseil de défense pourraient faire l'objet d'un communiqué, a fait savoir l'Elysée.

 


France: entre protection et surtourisme, les menhirs de Carnac aux portes de l'Unesco

Ce site n'est qu'une petite partie d'un ensemble beaucoup plus vaste représentant un territoire de 1.000 km2 avec plus de 550 monuments répartis dans 28 communes bretonnes qui pourrait rejoindre le Machu Picchu, le Taj Mahal ou le Colisée sur la prestigieuse liste. (AFP)
Ce site n'est qu'une petite partie d'un ensemble beaucoup plus vaste représentant un territoire de 1.000 km2 avec plus de 550 monuments répartis dans 28 communes bretonnes qui pourrait rejoindre le Machu Picchu, le Taj Mahal ou le Colisée sur la prestigieuse liste. (AFP)
Short Url
  • "Un classement à l'Unesco a un côté schizophrène": la possible inscription ce weekend au patrimoine mondial des mégalithes de Bretagne, dans l'ouest de la France, a comme objectif de mieux protéger ces sites néolithiques
  • Ce site n'est qu'une petite partie d'un ensemble beaucoup plus vaste représentant un territoire de 1.000 km2 avec plus de 550 monuments répartis dans 28 communes bretonnes qui pourrait rejoindre le Machu Picchu, le Taj Mahal ou le Colisée

CARNAC: "Un classement à l'Unesco a un côté schizophrène": la possible inscription ce weekend au patrimoine mondial des mégalithes de Bretagne, dans l'ouest de la France, a comme objectif de mieux protéger ces sites néolithiques mais pose la question d'un éventuel afflux touristique.

Écoutant une guide conférencière, une vingtaine de touristes suivent une visite au Ménec, un des célèbres alignements de Carnac et des rives du Morbihan, avec ses longues allées rectilignes de menhirs ("pierre longue" en breton) de toute taille dont l'origine et la fonction restent un mystère.

Ce site n'est qu'une petite partie d'un ensemble beaucoup plus vaste représentant un territoire de 1.000 km2 avec plus de 550 monuments répartis dans 28 communes bretonnes qui pourrait rejoindre le Machu Picchu, le Taj Mahal ou le Colisée sur la prestigieuse liste.

L'estimation du nombre de visiteurs annuels pour Carnac avoisine les 300.000 personnes.

Au-delà de la fierté de devenir le premier site intégralement breton inscrit (la tour Vauban dans le Finistère fait partie des 12 fortifications Vauban classés à travers la France), une crainte grandit: l'apparition du célèbre logo de l'Unesco ne peut-il pas engendrer un tourisme de masse ?

"Il y a une autre tarte à la crème qu'on entend un petit peu avec des gens qui ne connaissent pas forcément les dossiers et qui disent +l'inscription Unesco c'est 30% de visiteurs+" de plus, explique Olivier Lepick, maire de Carnac et président de l'association Paysage de mégalithes qui a porté le projet depuis 2013.

"Pour les sites peu connus, oui parce que ça les met en lumière. Mais pour les sites qui ont déjà beaucoup de visiteurs l'augmentation est plutôt de 2% à 5%", observe le maire.

Venu de Belgique admirer quelques uns des 3.000 menhirs, "l'une des meilleures attractions historiques en Bretagne", Luka Pachta, 43 ans, ne croit guère au risque du surtourisme car le site, "très grand", est "déjà très connu".

"Circulation douce" 

En outre, des aménagements ont été entrepris pour répondre au mieux à l'afflux de visiteurs, notamment des travaux sur la route qui conduit au site.

Celle-ci était comme "une autoroute au bord de la Joconde", lance Olivier Lepick, évoquant également une photo des années 1950 où l'on voit des voitures circuler au milieu des alignements.

Pour Véronique André, retraitée venue de Marseille, cette inscription serait "à double tranchant" pour ces mégalithes vieux de 6.000 ans qui "dégagent un sentiment de puissance, de force, de surnaturel", étonnée qu'ils n'aient pas été déjà intégrés au patrimoine Unesco.

"Il est important qu'un tel site soit protégé et classé" mais "quand un lieu devient patrimoine de l'Unesco, ça amène encore plus de touristes. Moi-même quand je vais à l'étranger, si je vois qu'un monument est au patrimoine de l'Unesco, j'y vais!".

Pour Olivier Agogué, il est possible qu'il y ait "un surcroît de fréquentation d'un public lointain. On n'a pas beaucoup d'Asiatiques aujourd'hui or il semblerait qu'ils soient assez férus de sites Unesco".

Interrogée sur les conséquences de l'inscription, Victoire Dorise, directrice des Paysages de mégalithes, distingue les quatre sites disposant d'une billetterie, les monuments appartenant à des propriétaires privés (qui représentent les trois quarts des monuments) et enfin la cinquantaine de tailles intermédiaires.

Pour ces derniers, "on essaye de donner des éléments de compréhension archéologique et de paysage, mais aussi d'accessibilité très pratico-pratiques avec effectivement des études d'aménagement pour les cheminements ou les parkings".

Car, "on s'est collectivement donné pour objectif de ne pas accueillir plus mais d'accueillir mieux, et de faire connaître l'ensemble des sites et du paysage", plaide Mme Dorise, qui rappelle que l'objectif "principal, ultime, final" d'un classement Unesco est la "préservation des monuments".