La contagion jihadiste hors du Sahel vers le littoral s'accélère

Cette photo publiée le 16 mai 2019 par l'agence de presse Aamaq de l'État islamique (EI), montre un groupe de combattants en train de célébrer une opération terroriste contre une patrouille de l'armée au Niger qui a tué au moins 28 soldats. (AFP)
Cette photo publiée le 16 mai 2019 par l'agence de presse Aamaq de l'État islamique (EI), montre un groupe de combattants en train de célébrer une opération terroriste contre une patrouille de l'armée au Niger qui a tué au moins 28 soldats. (AFP)
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Publié le Mercredi 08 décembre 2021

La contagion jihadiste hors du Sahel vers le littoral s'accélère

  • «La métastase a commencé et probablement plus qu'on ne le sait, et plus que les autorités de ces pays seront prêtes à l'admettre»
  • Depuis plusieurs années, à intervalles réguliers, des attaques attribuées aux jihadistes frappent des pays situés hors du cœur du combat mené au Sahel

DAKAR: Bénin, Togo, Cote d'Ivoire... la violence jihadiste qui ravage depuis des années la région du Sahel déborde toujours plus vers les pays côtiers du Golfe du Guinée, phénomène qui va se poursuivre et qui pose un défi urgent aux gouvernements..

Différents experts et responsables interrogés par l'AFP au Forum international de Dakar sur la paix et la sécurité en Afrique alertent sur la tendance à une propagation depuis le foyer constitué par le Mali, le Burkina Faso et le Niger.

"Cela n'a fait que commencer, cela va continuer, cela va s'accélérer", affirme sous couvert d'anonymat un haut-responsable africain.

"La métastase a commencé et probablement plus qu'on ne le sait, et plus que les autorités de ces pays seront prêtes à l'admettre, en tout cas publiquement", affirme un diplomate européen, également sous couvert d'anonymat.

"Le risque que nous voyons de plus en plus est celui de voir ce qui se passe au Sahel se transférer aux pays côtiers", a déclaré au Forum le Tchadien Annadif Mahamat Saleh, représentant spécial chargé du Bureau des Nations Unies pour l'Afrique de l'Ouest et le Sahel (ONU-UNOWAS).

Depuis plusieurs années, à intervalles réguliers, des attaques attribuées aux jihadistes frappent des pays situés hors du cœur du combat mené au Sahel.

Cette poussée "se traduit depuis maintenant plusieurs mois par des affrontements armés dans le nord de la Côte d'Ivoire et depuis quelques jours par les premiers affrontements avec les forces armées béninoises", explique le général Michel Delpit à la tête des éléments français au Sénégal (EFS).

"On voit des signes concrets de cette avancée, comme l'attaque récemment survenue au Bénin, même si le groupe qui en est l'auteur n'a pas encore été identifié. Il y a quelques semaines également, une attaque au nord du Togo, couplée à des rumeurs sur la présence d'éléments de l'EIGS (l'Etat islamique au grand Sahara, ndlr) dans cette zone, a mis en avant le risque d'expansion de la menace jihadiste dans le pays", explique Pierre-Elie De Rohan Chabot, chercheur sur le Sahel à l'International Crisis Group.

"Au début de la crise sahélienne vers 2014, les pays côtiers se considéraient en dehors de la zone où le jihadisme pouvait se propager", rappelle Bakary Sambe, directeur régional du Timbuktu Institute. "Malheureusement, ils sont dans une culture du déni" notamment pour continuer à attirer les investissements étrangers et la manne touristique, ajoute-t-il.

Le problème est que la poussée jihadiste, même si elle ne se traduit pas par des attaques massives, en est déjà à un stade avancé.

"La violence est la phase finale du cycle de l'implantation", explique Alain Antil, directeur du centre Afrique subsaharienne de l'Ifri. "Quand on la voit éclater, en réalité, ils sont là depuis au moins un an, ils ont essayé de trouver des alliés. Ils ont étudié la zone, vu ses fragilités, les ressentiments entre certaines communautés ou envers l'Etat central".

"Par exemple, à des éleveurs qui ne se sentent pas protégés par les autorités, ils vont proposer une protection contre l'utilisation de leurs terres par d'autres communautés, qui elles bénéficient de protections étatiques".

Face à la menace grandissante, les Etats côtiers s'organisent, notamment avec l'initiative d'Accra lancée en 2017 par le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire, le Ghana et le Togo, pour renforcer leur coopération sécuritaire.

"Le Togo a adopté sa première Loi de programmation militaire récemment, la Côte d'Ivoire et le Burkina Faso ont mené plusieurs opérations militaires conjointes ces derniers mois, et la Côte d'Ivoire vient d'acheter deux avions pour renforcer sa capacité", rappelle M. de Rohan Chabot.

Mais pour Bakary Sambe, ces pays "ont raté le coche de la prévention". "Dans le Sahel, on s'est concentré sur la lutte contre le terrorisme par des moyens militaires pour éliminer des cibles en oubliant qu'elles peuvent se régénérer, alors que prévenir c'est s'attaquer aux causes structurelles" en apportant des réponses économiques, sociales, judiciaires aux problèmes de certaines parties de la population.

Dans cette propagation, "il y a bien sûr de la grande géopolitique, des courants wahhabites, etc, mais aussi des micro-conflits qui se contaminent, on est au niveau du terroir, ce sont des insurrections jihadisées, et dans certains cas, si l'Etat intervenait à temps, cela se réglerait", abonde M. Antil.

Pour ces groupes, un des intérêts à se propager ainsi vers la côte est d'avoir un accès maritime. "L'extension vers les pays du Golfe répond aussi à l'impératif d'avoir des couloirs logistiques, pour s'approvisionner en biens, se ravitailler", explique M. Antil. "Une opportunité pour mieux se connecter aux autres formes d'économie criminelle", pour M. Sambe.

Face à ce panorama, le diplomate européen juge que "2022, c'est le moment pour discuter et réussir à faire une sorte de +barrière sociale+" contre ces mouvements.


La flottille pour Gaza quitte la Tunisie, direction le territoire palestinien

Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
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  • Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place
  • Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser"

BIZERTE: Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire.

"Nous essayons d'envoyer un message à la population de Gaza, (de lui dire) que le monde ne l'a pas oubliée", a dit à l'AFP la militante écologiste suédoise Greta Thunberg avant d'embarquer dans le port de Bizerte, dans le nord de la Tunisie.

"Lorsque nos gouvernements ne prennent pas leurs responsabilités, nous n'avons pas d'autre choix que de prendre les choses en main", a-t-elle ajouté.

Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place.

Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser", "nous partons par solidarité, dignité et pour la justice".

Les embarcations arrivées d'Espagne s'étaient transférées à Bizerte après un séjour mouvementé à Sidi Bou Saïd, près de Tunis.

La "Global Sumud Flotilla", accueillie par des rassemblements de soutien, a indiqué que deux de ses bateaux avaient été visés par des attaques de drones deux nuits de suite la semaine passée, publiant des vidéos à l'appui. Après la deuxième annonce, les autorités tunisiennes ont dénoncé "une agression préméditée" et dit mener une enquête.

L'eurodéputée franco-palestinienne Rima Hassan qui, comme Greta Thunberg, avait été détenue à bord du "Madleen" lors d'une précédente traversée vers Gaza, a dit à l'AFP redouter "bien entendu" de nouvelles attaques, ajoutant: "on se prépare aux différents scénarios".

Selon elle, les personnalités les plus en vue - dont l'actrice française Adèle Haenel - ont été réparties entre les deux plus gros bateaux de coordination "de manière à équilibrer et (ne) pas concentrer toutes les personnalités visibles dans un seul et même bateau".

Le départ de Tunisie a été repoussé à plusieurs reprises en raison de motifs de sécurité, de retard dans les préparatifs pour certains bateaux et de la météo.

La Global Sumud Flotilla ("sumud" signifie "résilience" en arabe), qui comprend aussi des embarcations parties ces derniers jours de Corse (France), Sicile (Italie) et Grèce, avait initialement prévu d'atteindre le territoire palestinien à la mi-septembre, après deux tentatives bloquées par Israël en juin et juillet.

 


Les ministres du Groupe E3 condamnent les frappes israéliennes à Doha

Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
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  • Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza
  • Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas

PARIS: Les ministres des Affaires étrangères de l’Allemagne, de la France et du Royaume-Uni ont condamné, dans une déclaration conjointe, les frappes israéliennes ayant visé Doha le 9 septembre. Ils estiment que ces attaques constituent une violation de la souveraineté du Qatar et représentent un risque d’escalade supplémentaire dans la région.

Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza. « Nous appelons toutes les parties à intensifier leurs efforts pour parvenir à un cessez-le-feu immédiat », ont-ils insisté.

Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas. Ils appellent les parties à « faire preuve de retenue » et à saisir l’opportunité de rétablir la paix.

Les ministres ont réaffirmé que la priorité devait rester la mise en place d’un cessez-le-feu permanent, la libération des otages et l’acheminement massif d’aide humanitaire à Gaza pour enrayer la famine. Ils demandent l’arrêt immédiat des opérations militaires israéliennes dans la ville de Gaza, dénonçant les déplacements massifs de civils, les pertes humaines et la destruction d’infrastructures vitales.

Ils exhortent par ailleurs à garantir aux Nations unies et aux ONG humanitaires un accès sûr et sans entrave à l’ensemble de la bande de Gaza, y compris dans le Nord.

Enfin, le Groupe E3 a rappelé sa condamnation « sans équivoque » des crimes commis par le Hamas, qualifié de mouvement terroriste, qui doit, selon eux, « libérer immédiatement et sans condition les otages, être désarmé et écarté définitivement de la gouvernance de la bande de Gaza ».


L’ONU adopte une résolution franco-saoudienne pour la paix israélo-palestinienne sans le Hamas

L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
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  • Résolution adoptée par 142 voix pour, 10 contre — dont Israël et les États-Unis
  • Le vote précède un sommet de haut niveau co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre

​​​​​​NEW YORK : L’Assemblée générale des Nations unies a voté massivement vendredi en faveur de l’adoption de la « Déclaration de New York », une résolution visant à relancer la solution à deux États entre Israël et la Palestine, sans impliquer le Hamas.

Le texte a été approuvé par 142 pays, contre 10 votes négatifs — dont Israël et les États-Unis — et 12 abstentions. Il condamne fermement les attaques du Hamas du 7 octobre 2023, exige le désarmement du groupe, la libération de tous les otages, et appelle à une action internationale collective pour mettre fin à la guerre à Gaza.

Intitulée officiellement « Déclaration de New York sur le règlement pacifique de la question de Palestine et la mise en œuvre de la solution à deux États », la résolution a été présentée conjointement par l’Arabie saoudite et la France, avec le soutien préalable de la Ligue arabe et de 17 États membres de l’ONU.

Le texte souligne la nécessité de mettre fin à l’autorité du Hamas à Gaza, avec un transfert des armes à l’Autorité palestinienne, sous supervision internationale, dans le cadre d’une feuille de route vers une paix durable. Celle-ci inclut un cessez-le-feu, la création d’un État palestinien, le désarmement du Hamas, et une normalisation des relations entre Israël et les pays arabes.

L’ambassadeur de France, Jérôme Bonnafont, qui a présenté la résolution, l’a qualifiée de « feuille de route unique pour concrétiser la solution à deux États », soulignant l’engagement de l’Autorité palestinienne et des pays arabes en faveur de la paix et de la sécurité. Il a aussi insisté sur l’urgence d’un cessez-le-feu immédiat et de la libération des otages.

Ce vote intervient à quelques jours d’un sommet de haut niveau de l’ONU, co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre, où le président Emmanuel Macron s’est engagé à reconnaître officiellement un État palestinien.

La représentante américaine, Morgan Ortagus, s’est vivement opposée à la résolution, la qualifiant de « coup de communication malvenu et malavisé » qui récompenserait le Hamas et nuirait aux efforts diplomatiques authentiques.

Elle a dénoncé la mention du « droit au retour » dans le texte, estimant qu’il menace le caractère juif de l’État d’Israël.

« Cette résolution est un cadeau au Hamas,» a déclaré Mme Ortagus, ajoutant que le désarmement du Hamas et la libération des otages étaient la clé de la fin de la guerre. Elle a exhorté les autres nations à se joindre aux États-Unis pour s'opposer à la déclaration.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com