Au procès du 13-Novembre, plongée aux «Béguines», le café des frères Abdeslam

Ce croquis d'audience réalisé le 8 septembre 2021 montre Salah Abdeslam, le dernier membre survivant de la cellule djihadiste des attentats de Paris du 13 novembre 2015. (AFP)
Ce croquis d'audience réalisé le 8 septembre 2021 montre Salah Abdeslam, le dernier membre survivant de la cellule djihadiste des attentats de Paris du 13 novembre 2015. (AFP)
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Publié le Vendredi 17 décembre 2021

Au procès du 13-Novembre, plongée aux «Béguines», le café des frères Abdeslam

  • Rafik H. est visé par une procédure miroir en Belgique pour avoir conduit Abdeslam à l'aéroport pour un périple vers la Syrie, début 2015
  • «Brahim regardait de temps en temps des vidéos sur Youtube». De quel genre ? «Des trucs terroristes». Ça se passait en Syrie ? «Voilà»

PARIS : Au procès des attentats jihadistes du 13 novembre 2015 en région parisienne, deux habitués du café belge des frères Abdeslam ont raconté l'ambiance aux "Béguines" dans les mois précédant les attentats.

Rafik H. témoigne auprès de la justice française en visioconférence, des locaux du parquet fédéral belge, préférerait être ailleurs. Ses réponses sont brèves, son audition laborieuse.

Crâne rasé, gros pull, il a 36 ans, est originaire de Molenbeek, une commune de la région de Bruxelles où il a grandi avec Brahim Abdeslam, le gérant du bistrot et futur tueur des terrasses parisiennes. Il est visé par une procédure miroir en Belgique pour l'avoir conduit à l'aéroport pour un périple vers la Syrie, début 2015.

Un an plus tôt, Rafik H. s'était associé avec celui qui était "comme un frère", au café Les Béguines. C'est de là qu'il connaît certains des accusés. "C'était 'bonjour, au revoir'", nuance-t-il. 

Le président l'interroge sur le lieu - selon le dossier, on y vendait de la drogue, note-t-il. "C'était surtout Brahim", balaie Rafik H. 

S'y passait-il d'autres choses ?, s'enquiert Jean-Louis Périès. "Brahim regardait de temps en temps des vidéos sur Youtube". De quel genre ? "Des trucs terroristes". Ça se passait en Syrie ? "Voilà". 

Lui, "au comptoir", s'occupait des clients. "Je faisais pas trop attention".

Poussé par la cour, il confirme que Brahim Abdeslam descendait souvent à la cave où il avait aménagé une pièce "spécialement" pour discuter sur Skype avec Abdelhamid Abaaoud, futur coordinateur des attentats, à ce moment-là en Syrie. "Je suis descendu une fois, j'ai vu qu'il parlait avec Abaaoud. Il m'a crié de remonter, je suis remonté".

«Chien qui aboie...»

Sur les écrans de la salle d'audience, c'est Bilal S. qui apparaît ensuite dans les mêmes locaux.

"Je suis sociable, je parle à tout le monde", prévient ce brun de 35 ans au débit ultra-rapide. Également très proche de Brahim Abdeslam, il passait "tous les soirs" après le travail pour "jouer au cartes, boire un café". "Une bonne ambiance", à part "les gens qui regardaient les vidéos". 

Il mime de ses bras, "moi j'étais assis là", "le comptoir", et "l'ordinateur à côté des toilettes". Comme les autres, il a vu les vidéos "en passant" devant. Brahim Abdeslam les regardait avec son petit frère Salah, et son ami Ahmed Dahhmani, autre accusé jugé en son absence, certifie-t-il. 

"Brahim, il disait: 'regardez ce qu'ils font, c'est injuste, ils tuent des enfants'. Dès qu'il commençait à boire ou à fumer, il s'excitait. Mais pour moi, un chien qui aboie, il ne fait rien".

En septembre 2015, raconte-t-il, Salah Abdeslam lui demande de louer une voiture pour lui. "Je lui dis 'non je sais pas ce que tu vas faire'". 

Salah Abdeslam, seul membre encore en vie des commandos parisiens, est aussi jugé pour ses allers-retours en voiture - louées - pour ramener les autres assaillants en Belgique. 

"Je pensais plus à des amendes, ou qu'il rende pas la voiture à temps", dit Bilal S., qui a l'impression de l'avoir échappé belle, contrairement à certains accusés "qui ont pas eu de chance" et ont "rendu service". 

Comme Hamza Attou, l'un de ceux jugés pour être allés chercher Salah Abdeslam à Paris le soir des attentats qui ont fait 130 morts et plus de 350 blessés à Paris et en proche banlieue. 

"Ils étaient pas au courant, Salah leur a dit dans la voiture. Moi je lui ai dit à Hamza, 'tu aurais dû quitter la voiture, tu appelles la police tu expliques'". 

"Salah est un sale type", conclut Bilal S. "J'aurais pu être à leur place. D'un autre côté, ils ont vraiment été cons".


Accord EU-USA: Bayrou juge que la France a été "un peu seule"

Le Premier ministre français, François Bayrou, s'adresse à la presse après une visite au siège de Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment d'argent du ministère des Finances, à Montreuil, près de Paris, le 31 juillet 2025. (AFP)
Le Premier ministre français, François Bayrou, s'adresse à la presse après une visite au siège de Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment d'argent du ministère des Finances, à Montreuil, près de Paris, le 31 juillet 2025. (AFP)
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  • Le Premier ministre, François Bayrou, a jugé jeudi que la France avait été "un peu seule" dans la bataille commerciale face aux Etats-unis
  • Le chef du gouvernement, qui avait vivement critiqué lundi l'accord commercial conclu entre l'Union européenne et les Etats-Unis, déplorant une "soumission" de l'Europe, a estimé que ce n'était "pas la fin de l'histoire"

PARIS: Le Premier ministre, François Bayrou, a jugé jeudi que la France avait été "un peu seule" dans la bataille commerciale face aux Etats-unis, en marge d'un déplacement dans les locaux de Tracfin, organisme de lutte contre la criminalité financière, à Montreuil (93).

Le chef du gouvernement, qui avait vivement critiqué lundi l'accord commercial conclu entre l'Union européenne et les Etats-Unis, déplorant une "soumission" de l'Europe, a estimé que ce n'était "pas la fin de l'histoire", et qu'il fallait "un processus encore pas totalement élucidé de ratification" de cet accord.

"Il y a à vérifier quelle est la portée exacte de ces accords, et les Etats auront d'une manière ou d'une autre leur mot à dire", a-t-il ajouté.

"Je sais que toutes les autorités françaises, et en particulier le président de la République (Emmanuel Macron), ont été ceux qui se sont battus le plus contre des concessions qu'on considérait comme excessives", a-t-il affirmé avant de s'interroger: "Est-ce que nous avons été un peu seuls? Oui".

"Est-ce qu'on a le sentiment qu'à l'intérieur de l'Union européenne, des forces politiques et économiques étaient plutôt sur une ligne de trouver des accommodements? Oui", a-t-il ajouté, en estimant que de son point de vue, "la voie pour l'Europe est une voie d'affirmation et de résistance quand il faut et de fierté le plus souvent possible".

La classe politique française a été unanime à dénoncer l'accord conclu entre le président américain, Donald Trump, et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui prévoit notamment une hausse de 15% des droits de douane sur les exportations européennes.

Le président Emmanuel Macron a déploré mercredi en Conseil des ministres que l'Union européenne n'ait pas été assez "crainte" dans ses négociations commerciales avec les Etats-Unis, affirmant que la France continuerait de faire montre "d'exigence et de fermeté" dans la suite des discussions.


Lille: enquête ouverte après les propos sur internet d'une étudiante gazaouie

L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
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  • Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie

LILLE: Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie, dont Sciences Po Lille a annulé l'inscription mercredi.

"Une enquête a été ouverte pour apologie du terrorisme, apologie de crime contre l'humanité avec utilisation d'un service de communication au public en ligne", a écrit la procureure de la République de Lille, Carole Etienne, à l'AFP.

Des captures d'écran circulant sur les réseaux sociaux montrent qu'un compte, attribué à cette étudiante par des internautes et fermé depuis, a repartagé des messages appelant à tuer des juifs.

Elle a été désinscrite de l'Institut d'études politiques de Lille, où elle devait étudier à partir de septembre, en raison du contenu de certaines de ses publications qui "entre en contradiction frontale avec les valeurs portées par Sciences Po Lille", a indiqué l'établissement mercredi.

"Pourquoi on est passé à travers? Il y a quand même une question, il faut y répondre", a reconnu jeudi sur RMC François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre de l'Intérieur.

"Il y aura des poursuites qui seront engagées et sur la base de ces éléments-là, elle est susceptible d'être renvoyée dans son pays, bien évidemment", a-t-il ajouté.

"Administrativement, semble-t-il, je suis très prudent, il n'y avait pas de difficulté particulière, sauf que sur les réseaux sociaux, voilà, on s'en est rendu compte", a-t-il ajouté, précisant que "les services des titres de séjour relèvent du ministère des Affaires étrangères".

Sollicité par l'AFP, Sciences Po Lille a expliqué avoir "accueilli cette étudiante sur proposition du consulat général de France à Jérusalem".

L'incident a fait largement réagir dans la classe politique, jusqu'au gouvernement.

"Une étudiante gazaouie tenant des propos antisémites n'a rien à faire en France", a réagi sur X le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. Il a indiqué avoir "demandé à ce qu'une enquête interne soit diligentée pour que cela ne puisse en aucun cas se reproduire".

Le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a souligné sur le même réseau social avoir "demandé de faire fermer ce compte haineux", et a martelé que "les propagandistes du Hamas n'ont rien à faire dans notre pays".


Restitutions coloniales: le gouvernement français annonce un projet de loi

La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
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  • Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation
  • Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises

PARIS: Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation.

S'appliquant en priorité aux pays africains mais de "portée géographique universelle", ce texte vise à accélérer le retour dans leur pays d'origine de biens culturels appartenant aux collections nationales françaises.

Ils doivent revenir à des "Etats qui, du fait d'une appropriation illicite, en ont été privés" entre 1815 et 1972, selon le ministère français de la Culture.

Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises. Les oeuvres à restituer devront avoir été acquises "dans une situation de vol, de pillage, de cession ou de libéralité obtenue par contrainte ou violence ou d'une personne qui ne pouvait en disposer", a précisé le ministère.

La décision de sortie des collections pour opérer cette restitution ne passera plus par un processus législatif au cas par cas mais pourra intervenir sur seul décret du Conseil d'Etat et après avis, le cas échéant, d'une commission scientifique bilatérale.

Cette commission devra en effet documenter et déterminer, si besoin, le caractère illicite de l'appropriation des oeuvres réclamées à travers un travail qui associerait des experts et historiens français et l'Etat demandeur, selon le ministère.

Concernant la période historique retenue, 1815 correspond à la date d'un règlement des conquêtes napoléoniennes qui est dû à un premier mouvement de restitution d'œuvres à l'échelle européenne. 1972 est celle de l'entrée en application de la convention internationale de l'Unesco protégeant les biens culturels contre le trafic illicite.