Chili: sanction des marchés, le nouveau président entend «apporter des certitudes»

La tâche qui attend le nouveau président sera d'autant plus compliquée par une situation économique délicate. (Photo, AFP)
La tâche qui attend le nouveau président sera d'autant plus compliquée par une situation économique délicate. (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 21 décembre 2021

Chili: sanction des marchés, le nouveau président entend «apporter des certitudes»

  • Gabriel Boric, devenu à 35 ans l'un des plus jeunes dirigeants de la planète, a été élu dimanche avec un million de voix d'avance sur son adversaire d'extrême droite
  • Une victoire mal accueillie par la Bourse de Santiago, qui a fondu de 6,83% à l'ouverture et clôturant à 6,18%

SANTIAGO DU CHILI : La Bourse de Santiago a terminé lundi sur une baisse sanctionnant le triomphe de la gauche au Chili tandis que le jeune président élu, Gabriel Boric, a fait ses premiers pas au Palais présidentiel où il a annoncé vouloir "apporter des certitudes", notamment aux marchés.

Gabriel Boric, devenu à 35 ans l'un des plus jeunes dirigeants de la planète, a été élu dimanche avec un million de voix d'avance sur son adversaire d'extrême droite (55,9% contre 44,1%), sur la promesse de la mise en place d'un Etat-providence, un changement d'ampleur dans un pays considéré comme le laboratoire du libéralisme en Amérique latine mais devenu le plus inégalitaire de l'OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques).

Une victoire mal accueillie par la Bourse de Santiago, qui a fondu de 6,83% à l'ouverture et clôturant à 6,18%. Le dollar a quant à lui dépassé son plus haut niveau par rapport au peso depuis le 18 mars 2020.

Si elle était "attendue", "le marché s'attendait à une baisse plus importante", tempère cependant le directeur de l'Ecole de commerce de l'Université Mayor de Santiago, Francisco Castaneda.

Après avoir rencontré le président sortant de centre droit, Sebastian Piñera pour un traditionnel échange avant la passation officielle de pouvoir, le 11 mars, M. Boric a annoncé qu'il allait accélérer l'annonce de son gouvernement afin de "fournir des certitudes", notamment aux marchés.

"L'essentiel sera de savoir qui sera son ministre des Finances afin de donner confiance aux marchés", note M. Castaneda. "Et qu'il soit capable de comprendre que le rôle du secteur privé est vital pour mener à bien ses programmes sociaux".

Car le président élu, qui se présente en costume mais sans cravate, bousculant le protocole par ses nombreuses poignées de mains, entend mener une grande réforme fiscale pour faire participer les plus riches à son programme de meilleur accès à la santé, à l'éducation et à la création d'un nouveau système de retraite, aujourd'hui entièrement privé.

Il a promis dimanche soir, devant des milliers de ses partisans en liesse rassemblés pour fêter sa victoire, "plus de droits sociaux tout en restant fiscalement responsables".

Si la victoire de Gabriel Boric à la tête d'une coalition allant du centre gauche au Parti communiste "oriente vers une plus grande intervention de l'État dans l'économie (...), un changement radical semble peu probable", estime le Centre de recherche économique indépendant Capital economics.

"Le ratio de la dette publique par rapport au PIB semble devoir encore augmenter sous le nouveau gouvernement. Cette situation, ainsi que l'incertitude persistante concernant la nouvelle Constitution (en cours de rédaction) maintiendra probablement les marchés financiers locaux sous pression", ajoute-t-il.

Processus historique

La tâche qui attend le nouveau président sera d'autant plus compliquée par une situation économique délicate.

Le PIB a augmenté artificiellement de 11,5% en 2021 en raison de subventions d'Etat et de retraits autorisés dans l'épargne privée. Selon les estimations, la croissance devrait être nulle à l'horizon 2023.

L'inflation touche aussi le Chili longtemps considéré comme un modèle de développement économique, au détriment de l'équilibre social, nourrissant une colère sourde qui a fini par éclater au grand jour en octobre 2019 avec des manifestations d'ampleur.

M. Boric est l'héritier politique de ce mécontentement mais aura des difficultés à imposer son programme social face à un Parlement qui n'est pas acquis à sa cause.

"Bien que la victoire ait été confortable, le Parlement bicaméral, avec des équilibres clairs, peut agir comme un contrepoids évident aux politiques de gauche plus radicales", a jugé M. Castaneda.

Mais dans la rue, l'espoir qu'il a suscité est immense, à la hauteur de la crainte que suscitait José Antonio Kast, un admirateur de la dictature d'Augusto Pinochet soutenu par l'ensemble de la droite chilienne, candidat de "l'ordre, de la justice et de la sécurité".

Il a reçu dans la matinée les félicitations de la présidente de la Convention constituante, l'universitaire mapuche Elisa Loncon, qui l'invite "à faire partie de ce processus historique de rédaction de la nouvelle Constitution".

Dimanche soir, M. Boric avait demandé de prendre "tous soin de ce processus afin que nous ayons une Constitution qui soit celle de la rencontre et non celle de la division (...) que nous avons eu tant de mal à changer".

La rédaction d'une nouvelle loi fondamentale pour remplacer celle datant de la dictature d'Augusto Pinochet (1973-1990) était une des principales revendications du soulèvement social de 2019, dont M. Boric est aujourd'hui l'héritier politique et dont il doit désormais satisfaire les attentes.


IA: Google investit 5 milliards de livres au Royaume-Uni avant la visite de Trump

Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
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  • Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat
  • Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres

LONDRES: Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays.

Cette somme financera "les dépenses d'investissement, de recherche et développement" de l'entreprise dans le pays, ce qui englobe Google DeepMind (le laboratoire d'IA du géant californien), a indiqué le groupe dans un communiqué.

Google ouvre mardi un centre de données à Waltham Cross, au nord de Londres, dans lequel il avait déjà annoncé l'an dernier injecter un milliard de dollars (850 millions d'euros). La somme annoncée mardi viendra aussi compléter ce financement, a précisé un porte-parole de l'entreprise à l'AFP.

Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat.

Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres.

Selon un responsable américain, qui s'exprimait auprès de journalistes, dont l'AFP, en amont de la visite, les annonces se porteront à "plus de dix milliards, peut-être des dizaines de milliards" de dollars.

Le gouvernement britannique avait déjà dévoilé dimanche plus d'un milliard de livres d'investissements de banques américaines dans le pays, là aussi en amont de la visite d'Etat du président Trump.

Et l'exécutif britannique a annoncé lundi que Londres et Washington allaient signer un accord pour accélérer les délais d'autorisation et de validation des projets nucléaires entre les deux pays.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Londres redouble d'efforts pour se dégager des hydrocarbures et a fait du nucléaire l'une de ses priorités.

Le partenariat avec Washington, baptisé "Atlantic Partnership for Advanced Nuclear Energy", doit lui aussi être formellement signé lors de la visite d'État de Donald Trump.

 


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".


La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, alerte le Secours populaire

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
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  • "La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire
  • "La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg

PARIS: La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, touchant tous les aspects de la vie des plus fragiles, alerte jeudi le Secours Populaire, qui publie un baromètre témoignant de cette situation jugée préoccupante.

"La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire.

L'association publie un baromètre qui indique qu'un tiers des Français (31%) rencontrent des difficultés financières pour se procurer une alimentation saine permettant de faire trois repas par jour. De même 39% ont du mal à payer leurs dépenses d'électricité et 49% à partir en vacances au moins une fois par an, selon ce sondage réalisé par l'Institut Ipsos, auprès d'un échantillon de 1.000 personnes, représentatif de la population nationale âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

"La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg.

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier.

Malgré un "léger mieux" constaté sur certains indicateurs lié au "ralentissement de l'inflation", ce baromètre révèle "une situation sociale toujours très préoccupante", selon le Secours populaire.

En début de semaine, la déléguée interministérielle à la prévention et la lutte contre la pauvreté, Anne Rubinstein, a évoqué des "difficultés" rencontrées par l'Etat pour résorber un taux de pauvreté qui a atteint un niveau record en 2023 en France métropolitaine.

Face à cette situation, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) a appelé mardi à une "mobilisation collective" pour "débloquer la lutte contre la précarité".

Au niveau européen, 28% de la population déclare se trouver en situation précaire, également selon ce baromètre du Secours Populaire, qui s'appuie aussi sur des échantillons de 1.000 personnes représentatifs de neuf autres pays (Allemagne, Grèce, Italie, Pologne, Royaume-Uni, Moldavie, Portugal, Roumanie, Serbie).

La part des personnes se considérant comme précaires demeure à un niveau "très alarmant" en Grèce (46%) et en Moldavie (45%), pointe le baromètre.

En 2024, le Secours populaire a soutenu 3,7 millions de personnes en France. L'association fournit notamment de l'aide alimentaire et organise des activités pour différents publics pour rompre l'isolement.