Rétrospective 2021: Une hausse exponentielle des réfugiés dans le monde en dépit de la pandémie

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Publié le Mercredi 29 décembre 2021

Rétrospective 2021: Une hausse exponentielle des réfugiés dans le monde en dépit de la pandémie

  • Au cours des onze premiers mois de l'année 2021, l'Europe a accueilli près de 14 000 personnes, soit un nombre supérieur à celui enregistré sur l'ensemble de l'année 2020
  • La Méditerranée reste la voie privilégiée de ceux qui fuient l'Afrique et l’Asie à la recherche d'une vie meilleure

LONDRES: La bataille contre la pandémie de Covid-19 a pris le dessus pendant deux ans sur la crise mondiale des réfugiés. Mais l'année 2021 a été marquée par une hausse inquiétante du nombre de personnes fuyant la pauvreté et les conflits. Tout laisse à penser que cette situation prendra des proportions encore plus dramatiques en 2022.

Quiconque a suivi la couverture médiatique des querelles inconvenantes entre la Grande-Bretagne et l'Union européenne (UE) en novembre dernier, à la suite de la mort tragique de vingt-sept migrants dans la Manche, pourrait être pardonné de penser que le fardeau économique et social de la crise mondiale des réfugiés en 2021 pesait principalement sur l'Europe du Nord.

Mais la réalité est tout autre. Comme le souligne fréquemment l’Agence des nations unies pour les réfugiés (HCR), 85 % des réfugiés dans le monde, qui sont au nombre de 20 millions ou plus, trouvent refuge dans les pays voisins ou dans d'autres pays en développement.

Prenons l'exemple de la Turquie: elle héberge sur son territoire plus de réfugiés que tout autre pays – leur nombre est estimé à 3, 5 millions voire plus (soit 43 réfugiés pour 1 000 citoyens turcs). La Jordanie accueille près de 3 millions de réfugiés, tandis que le Liban, ce pays minuscule, en accueille 1,5 million, ce qui représente 13 réfugiés pour 100 Libanais.

Avec le million de réfugiés qu'elle abrite depuis le début de la crise, l'Allemagne fait preuve de la plus grande générosité parmi les États européens. Le Royaume-Uni héberge un dixième de ce nombre; il reçoit bien moins de demandes d'asile que l'Allemagne ou la France, et les politiciens attisent l'animosité envers les migrants en suggérant, à tort, que ceux-ci envahissent le pays.

Par ailleurs, les Iraniens ont été les plus nombreux à demander asile au Royaume-Uni au cours de l'année, en septembre 2021.

Fin novembre, le nombre de migrants ayant réussi à traverser la Manche en 2021 s’est élevé à 23 500 personnes, soit le double du nombre en 2020. La France, quant à elle, a empêché 18 000 autres personnes de traverser la Manche.

La Méditerranée, cette mer traîtresse, reste cependant la voie privilégiée de ceux qui fuient l'Afrique et le Moyen-Orient à la recherche d'une vie meilleure. Les chiffres du HCR révèlent que 81 647 personnes ont risqué leur vie entre janvier et octobre 2021 pour rejoindre l'Espagne, l'Italie, Malte, la Grèce ou Chypre.

Un drame a bien entendu touché le cœur de beaucoup de gens: vingt-sept personnes, dont trois enfants, sont mortes au large des côtes françaises, le 25 novembre, lorsque le bateau de fortune qui les transportait a coulé.

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Sur cette photo prise le 25 novembre 2021, des agents sanitaires libyens récupèrent les corps de migrants noyés, qui espéraient se rendre en Europe par la mer, après un naufrage au large de la plage de Sabratha, à quelque 120 kilomètres à l'ouest de la capitale libyenne, Tripoli. AFP

Mais les médias ont omis de signaler la noyade de 2 543 personnes en Méditerranée ou dans l'Atlantique Est au cours de l'année écoulée, alors qu'elles cherchaient refuge en Europe.

La majorité de ces victimes (1 422 personnes) sont mortes en empruntant la tristement célèbre route de la Méditerranée centrale en direction de l'Italie ou de Malte. Selon le Missing Migrants Project (un organisme appartenant à l'Organisation mondiale pour les migrations de l'ONU, qui établit la liste des disparitions), le nombre de décès en Méditerranée a considérablement augmenté au cours des neuf premiers mois de 2021, par rapport à la même période en 2020. L’organisme attribue ce phénomène en partie à l'assouplissement des restrictions sur les déplacements imposées en 2020 en réponse à la pandémie de Covid-19.

En 2021, 959 autres personnes ont perdu la vie; elles tentaient de traverser l'Afrique de l'Ouest pour se rendre aux îles espagnoles des Canaries, à 100 kilomètres au large du point le plus proche du Maroc ou du Sahara occidental. Quoique dangereuse, cette traversée gagne en popularité.

Parmi les dernières victimes de cette traversée figure un bébé retrouvé mort dans l'un des cinq canots pneumatiques qui transportaient près de 300 personnes venues d'Afrique subsaharienne et interceptées au large des îles début décembre.

En dépit de ces drames, la compassion semble s'épuiser.

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Des membres de l'ONG espagnole Maydayterraneo sauvent un bébé à bord du bateau de sauvetage Aita Mari dans le cadre d'une opération de sauvetage de quelque 90 migrants en pleine mer Méditerranée, au large des côtes libyennes, le 9 février 2020. (AFP)

Autrefois, ce genre de catastrophe aurait fait la une des journaux du monde entier; on se souvient tous du corps du petit réfugié syrien Aylan Kurdi (3 ans) qui s'était échoué sur la côte turque non loin de Bodrum en 2015.

On a cru – ne serait-ce que pour un instant – que le tollé suscité par les photos poignantes du corps de l'enfant, allongé sur le ventre à quelques centaines de mètres d'un lieu touristique populaire, allait faire basculer l'opinion publique en faveur des réfugiés dans le monde.

Depuis, cependant, les noyades se succèdent, et un monde désormais préoccupé par la pandémie de Covid-19 s'est largement désintéressé du sort des réfugiés.

Au cours des cinq années qui ont suivi la mort d’Aylan en 2015, 17 000 personnes au moins sont mortes en traversant la Méditerranée pour rejoindre l'Europe. On ignore le nombre précis d'enfants parmi ces victimes. Toutefois, un migrant sur cinq étant un enfant, on peut supposer que 3 400 enfants ont connu le même sort qu’Aylan.

Le déluge de statistiques généré par la crise des réfugiés depuis sa flambée en 2015 masque la réalité qui sous-tend les innombrables tragédies humaines qui se cachent derrière ces chiffres: il s'agit en effet de familles et de communautés dévastées par la mort de mères, pères et enfants. Et il semble que ce cauchemar se prolongera.

Avec un total de 109 726 arrivées de réfugiés en Europe à la fin du mois de novembre, l’année 2021 n'a pas été une année particulièrement mauvaise, surtout si on la compare à 2015, lorsque plus d'un million de personnes ont cherché refuge sur les côtes nord de la Méditerranée.

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Un drapeau de l'Union européenne flotte derrière des barbelés dans un nouveau centre fermé destiné aux migrants sur l'île de Kos, en Grèce, le 27 novembre 2021. (AFP)

En effet, les chiffres diminuent d'année en année depuis 2015 – ils ont connu une baisse spectaculaire en 2016 pour atteindre 380 300 personnes, et à nouveau en 2017, où 178 700 personnes «seulement» ont débarqué en Europe. Au cours des trois années qui ont suivi, les chiffres n'ont cessé de baisser: de 141 400 (2018) à 95 700 (2020).

Mais la tendance à la baisse a été inversée en 2021 et ce, pour la première fois depuis cinq ans. Au cours des onze premiers mois de l'année 2021, l'Europe a accueilli près de 14 000 personnes, soit un nombre supérieur à celui enregistré sur l'ensemble de l'année 2020.

Les experts se divisent sur la cause de cette nouvelle flambée. Le déplacement des personnes permet certes de mesurer l'évolution de la situation dans le monde. La majorité des réfugiés en 2021 – quelque 25 % du nombre total – étant originaires de Tunisie, c’est l’illustration des problèmes socio-économiques dont souffre ce pays.

Le Bangladesh arrive en deuxième position après la Tunisie – plus de 11 % des réfugiés en 2021 sont des Bangladais. Ce pays a fait une entrée surprise l'année dernière dans le top dix des pays d'origine des réfugiés; ce sont les pays d'Afrique et du Moyen-Orient qui étaient jusque-là en tête du classement. De janvier à fin octobre de l'année en cours, 6 455 réfugiés ont quitté le Bangladesh pour rejoindre l'Europe. On ignore le nombre de ceux qui sont morts durant ce périple. En mai 2021, 50 personnes se sont noyées lorsque leur bateau a coulé au large de la Tunisie. À la surprise des sauveteurs, les 33 survivants qui se sont accrochés à une plate-forme pétrolière étaient originaires du Bangladesh.

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Des migrants sauvés par la garde nationale tunisienne alors qu'ils tentaient de traverser la Méditerranée en bateau, font halte au port d'El-Ketef à Ben Guerdane, dans le sud de la Tunisie, à proximité de la frontière avec la Libye, le 27 juin 2021. (AFP)

Il n'est toutefois pas certain qu'il s'agisse en réalité de Bangladais L'apparition soudaine du Bangladesh dans les statistiques pourrait s'expliquer par la situation critique des Rohingyas – la minorité musulmane de Birmanie qui est persécutée dans l'État de Rakhine, à majorité bouddhiste. En effet, un million de Rohingyas ont été contraints de chercher refuge au Bangladesh, de l'autre côté de la frontière. 

La situation dans les camps de réfugiés bangladais surpeuplés et démunis est de plus en plus insupportable. De nombreux Rohingyas se sont récemment établis sur une île isolée à cinquante kilomètres de la côte, dans le golfe du Bengale, et leurs conditions de vie suscitent de vives inquiétudes. 

Comme l'a indiqué le HCR au mois d'août, près de 3 046 Rohingyas (les deux tiers étant des femmes et des enfants) ont essayé, entre janvier 2020 et juin 2021, de traverser la mer d'Andaman et le golfe du Bengale pour se réfugier en Indonésie ou en Malaisie; ils venaient de l'État de Rakhine ou du Bangladesh. Plus de 200 ont péri en essayant.

On ignore encore de quelle manière évoluera la composition de la population des réfugiés dans le monde en 2022. Les événements qui secouent actuellement l'Érythrée et l'Éthiopie alourdiront sans doute le bilan pour l'année à venir. De la même façon, tout laisse à penser que des pays comme l'Égypte, l'Iran et la Syrie – leurs citoyens représentent ensemble plus de 20 % des personnes qui ont traversé la Méditerranée en 2021 – continueront de peser de tout leur poids dans la balance des réfugiés.

«En dépit de la pandémie qui frappe le monde, les guerres et les conflits continuent de faire rage à travers le monde; ils déplacent des millions de personnes et ils empêchent nombre d'entre elles de rentrer dans leur pays», explique Gillian Triggs, Haut-Commissaire assistante du HCR chargée de la protection internationale, lors de la publication du rapport Projected Global Resettlement Needs 2022.

«Les besoins humanitaires augmentent à un rythme bien plus soutenu que les solutions. Nous exhortons donc les pays à prévoir davantage de camps de réinstallation pour les réfugiés menacés ou dont la vie est en danger», poursuit Mme Triggs. Le HCR se donne pour mission de réinstaller les réfugiés, en persuadant les pays de prendre en charge une partie de la population croissante de réfugiés. Cette mission est à la fois noble et irréalisable.

En effet, sur les 20,7 millions de réfugiés recensés dans le monde, seuls 35 000 ont été réinstallés l'an dernier. Le HCR prévoit que le nombre de réfugiés ayant besoin d'être réinstallés s'élèvera à 1,47 million en 2022.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com. 


Nouvelle date pour la conférence sur l’État palestinien relancée par la France et l’Arabie saoudite

Un drapeau palestinien flotte face aux colonies israéliennes en Cisjordanie occupée. La conférence franco-saoudienne sur la création d'un État palestinien, qui avait été reportée, a été reprogrammée pour les 28 et 29 juillet. (AFP/File Photo)
Un drapeau palestinien flotte face aux colonies israéliennes en Cisjordanie occupée. La conférence franco-saoudienne sur la création d'un État palestinien, qui avait été reportée, a été reprogrammée pour les 28 et 29 juillet. (AFP/File Photo)
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  • Initialement prévue du 17 au 20 juin, la conférence a été reportée après le lancement par Israël, le 13 juin, d'une guerre de 12 jours contre l'Iran
  • L'objectif de la conférence, reprogrammée pour les 28 et 29 juillet, est l'adoption urgente de mesures concrètes conduisant à la mise en œuvre d'une solution à deux États

NEW YORK : Une conférence internationale organisée et coprésidée par l'Arabie saoudite et la France pour discuter de la création d'un État palestinien, qui avait été reportée le mois dernier, a été reprogrammée pour la fin du mois.

"La conférence ministérielle sur la solution des deux États reprendra les 28 et 29 juillet ; les détails seront communiqués sous peu", ont confirmé des diplomates à Arab News vendredi.

Initialement prévu du 17 au 20 juin, l'événement, officiellement intitulé "Conférence internationale de haut niveau pour le règlement pacifique de la question de Palestine et la mise en œuvre de la solution à deux États", a été reporté après le lancement par Israël, le 13 juin, de son opération militaire de 12 jours contre l'Iran.

L'événement, convoqué par l'Assemblée générale des Nations unies, aura lieu au siège des Nations unies à New York. L'objectif est l'adoption urgente de mesures concrètes qui conduiront à la mise en œuvre d'une solution à deux États et mettront fin à des décennies de conflit entre Israéliens et Palestiniens.

Au moment du report, le mois dernier, le président français Emmanuel Macron avait déclaré que la conférence était repoussée pour des raisons logistiques et de sécurité, mais avait insisté sur le fait qu'elle se tiendrait "dès que possible".

Ce report ne "remet pas en cause notre détermination à aller de l'avant dans la mise en œuvre de la solution des deux États", avait-il ajouté

M. Macron devrait annoncer officiellement la reconnaissance par la France d'un État palestinien lors de cet événement. Cette semaine, il a exhorté les autorités britanniques à faire de même.

La Palestine est officiellement reconnue par 147 des 193 États membres de l'ONU. Elle bénéficie du statut d'observateur au sein de l'organisation, mais n'en est pas membre à part entière.

Lors d'une réunion préparatoire des Nations unies en mai, Manal Radwan, conseillère au ministère saoudien des affaires étrangères, a déclaré que la conférence intervenait à un moment "d'urgence historique", alors que Gaza "endurait des souffrances inimaginables".

Elle a déclaré que l'Arabie saoudite était honorée de se tenir aux côtés des autres nations engagées dans des efforts diplomatiques pour apporter "un changement réel, irréversible et transformateur, afin d'assurer, une fois pour toutes, le règlement pacifique de la question de la Palestine".

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Russie: le suicide apparent d'un ministre sème la peur au sein de l'élite

Roman Starovoït avait été gouverneur de la région russe de Koursk, frontalière de l'Ukraine, avant d'être promu ministre à Moscou en mai 2024, trois mois avant que les troupes ukrainiennes ne prennent le contrôle d'une petite partie de ce territoire lors d'une offensive surprise. Une attaque qui avait été un revers pour le Kremlin. (AFP)
Roman Starovoït avait été gouverneur de la région russe de Koursk, frontalière de l'Ukraine, avant d'être promu ministre à Moscou en mai 2024, trois mois avant que les troupes ukrainiennes ne prennent le contrôle d'une petite partie de ce territoire lors d'une offensive surprise. Une attaque qui avait été un revers pour le Kremlin. (AFP)
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  • Si les circonstances de la mort de Roman Starovoït, âgé de 53 ans, restent floues, les médias russes ont évoqué une enquête pour corruption le visant, assurant qu'il devait être arrêté prochainement
  • Limogé par le président Vladimir Poutine, il s'est probablement donné la mort, selon les premiers résultats de l'enquête, qui est en cours

SAINT-PETERSBOURG: Le suicide probable du ministre russe des Transports, Roman Starovoït, annoncé peu après son limogeage lundi par Vladimir Poutine sur fond d'allégations de corruption, a profondément choqué l'élite politique, où chacun redoute de faire les frais de la chasse aux profiteurs.

Ses funérailles ont eu lieu vendredi dans un cimetière de Saint-Pétersbourg en présence de sa famille et de collègues, mais en l'absence de M. Poutine qui n'a pas non plus participé à la cérémonie d'adieu jeudi.

Si les circonstances de la mort de Roman Starovoït, âgé de 53 ans, restent floues, les médias russes ont évoqué une enquête pour corruption le visant, assurant qu'il devait être arrêté prochainement.

Limogé par le président Vladimir Poutine, il s'est probablement donné la mort, selon les premiers résultats de l'enquête, qui est en cours.

"C'est une grande perte pour nous, très inattendue. Nous sommes tous choqués", a déclaré à l'AFP Vassilissa, 42 ans, l'épouse d'un collègue de M. Starovoït, lors de la cérémonie de jeudi.

"Il était tellement actif, joyeux, il aimait énormément la vie. Je ne comprends pas comment cela a pu arriver", ajoute cette femme, les larmes aux yeux.

Après avoir déposé devant le cercueil de grands bouquets de roses rouges, des anciens collègues de M. Starovoït, en costumes sombres, sont repartis très vite dans leurs luxueuses voitures noires.

Dans une ambiance très lourde rappelant les funérailles dans le film culte "Le Parrain" de Francis Ford Coppola, d'autres personnes interrogées par les journalistes de l'AFP dans la foule ont refusé de parler.

"Bouc émissaire" 

Roman Starovoït avait été gouverneur de la région russe de Koursk, frontalière de l'Ukraine, avant d'être promu ministre à Moscou en mai 2024, trois mois avant que les troupes ukrainiennes ne prennent le contrôle d'une petite partie de ce territoire lors d'une offensive surprise. Une attaque qui avait été un revers pour le Kremlin.

Son successeur à la tête de cette région, Alexeï Smirnov, a lui été arrêté au printemps pour le détournement des fonds destinés à renforcer les fortifications à la frontière. Celle-là même que les Ukrainiens ont traversé facilement, pour n'être repoussés que neuf mois plus tard.

Les autorités "ont essayé de faire de lui (Roman Starovoït) un bouc émissaire", accuse auprès de l'AFP Andreï Pertsev, analyste du média indépendant Meduza, reconnu "indésirable" et interdit en Russie.

L'incursion ukrainienne "s'est principalement produite parce qu'il n'y avait pas assez de soldats pour protéger la frontière", mais c'était "plus facile de rejeter la faute sur un responsable civil", explique-t-il.

L'affaire Starovoït s'inscrit dans une vague récente de répression visant de hauts responsables soupçonnés de s'être enrichis illégalement pendant l'offensive russe en Ukraine. Et selon des analystes, si les scandales de corruption on toujours existé en Russie, la campagne militaire a changé les règles du jeu politique.

"Il existait des règles auparavant, selon lesquelles les gens savaient: une fois qu'ils montaient suffisamment haut, on ne les embêtait plus", estime M. Pertsev. "Mais elles ne fonctionnent plus."

"On ne vole pas" 

Alors que Vladimir Poutine promettait régulièrement de s'attaquer à la corruption - étant lui même accusé de s'être enrichi illégalement par ses détracteurs -, les rares arrestations médiatisées ont été davantage utilisées pour cibler des opposants ou résultaient de luttes internes entre les échelons inférieurs du pouvoir en Russie.

Depuis l'offensive en Ukraine lancée en février 2022, "quelque chose dans le système a commencé à fonctionner de manière complètement différente", souligne la politologue Tatiana Stanovaïa du Centre Carnegie Russie Eurasie, interdit en Russie en tant qu'organisation "indésirable".

"Toute action ou inaction qui, aux yeux des autorités, accroît la vulnérabilité de l'État face aux actions hostiles de l'ennemi doit être punie sans pitié et sans compromis", estime Mme Stanovaïa en définissant la nouvelle approche du pouvoir.

Pour le Kremlin, la campagne en Ukraine est une "guerre sainte" qui a réécrit les règles, confirme Nina Khrouchtcheva, professeure à The New School, une université de New York, et arrière-petite-fille du dirigeant soviétique Nikita Khrouchtchev.

"Pendant une guerre sainte, on ne vole pas (...) on se serre la ceinture et on travaille 24 heures sur 24", résume-t-elle.

Signe des temps, plusieurs généraux et responsables de la Défense ont été arrêtés pour des affaires de détournement de fonds ces dernières années. Début juillet, l'ancien vice-ministre de la Défense Timour Ivanov a été condamné à 13 ans de prison.

Cette ambiance, selon Mme Stanovaïa, a créé un "sentiment de désespoir" au sein de l'élite politique à Moscou, qui est peu susceptible de s'atténuer.

"À l'avenir, le système sera prêt à sacrifier des figures de plus en plus en vue," avertit-elle.

 


Un trafic de stupéfiants démantelé entre Espagne et France, 13 arrestations

reize personnes, dont le "donneur d'ordres" présumé, ont été arrêtées par des policiers qui ont démantelé un "important" trafic de drogues importées d'Espagne pour alimenter la région Auvergne-Rhône-Alpes, au terme d'une enquête de près de deux ans, a annoncé vendredi la police. (AFP)
reize personnes, dont le "donneur d'ordres" présumé, ont été arrêtées par des policiers qui ont démantelé un "important" trafic de drogues importées d'Espagne pour alimenter la région Auvergne-Rhône-Alpes, au terme d'une enquête de près de deux ans, a annoncé vendredi la police. (AFP)
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  • 2,4 tonnes de résine de cannabis ont été saisies par les enquêteurs de Office anti-stupéfiants (OFAST) de la police judiciaire de Lyon, qui ont mené ces opérations
  • Dans cette première phase, les 11 suspects ont été mis en examen et sont, depuis, en détention provisoire, selon la DIPN

LYON: Treize personnes, dont le "donneur d'ordres" présumé, ont été arrêtées par des policiers qui ont démantelé un "important" trafic de drogues importées d'Espagne pour alimenter la région Auvergne-Rhône-Alpes, au terme d'une enquête de près de deux ans, a annoncé vendredi la police.

Onze suspects ont été interpellés entre décembre 2023 et juillet 2024, notamment grâce à l'interception par les policiers de deux poids-lourds et d'un convoi de voitures "entre la région lyonnaise et le Gard", "au moment où les stupéfiants étaient remis à des équipes locales", explique la Direction interdépartementale de la police (DIPN) du Rhône dans un communiqué.

Dans le même laps de temps, 2,4 tonnes de résine de cannabis ont été saisies par les enquêteurs de Office anti-stupéfiants (OFAST) de la police judiciaire de Lyon, qui ont mené ces opérations.

Dans cette première phase, les 11 suspects ont été mis en examen et sont, depuis, en détention provisoire, selon la DIPN.

Puis l'enquête a permis l'interpellation, le 30 juin dernier, d'un homme "soupçonné d'être le donneur d'ordres" et, le lendemain, d'un autre suspect, "fugitif condamné en 2016" à sept ans de prison pour trafic de stupéfiants. A son domicile dans l'Ain, "54 kg de cocaïne et plusieurs dizaines de milliers d'euros" ont été saisis, précise le communiqué qui n'en dit pas plus sur le profil de ces hommes. Ils ont été mis en examen le 4 juillet et placés en détention provisoire.

La police considère ainsi avoir réussi le "démantèlement de ce groupe criminel organisé (...) réalisant des importations de stupéfiants depuis l'Espagne vers la région Auvergne-Rhône-Alpes" pour des "quantités importantes".