À réécouter : Les albums arabes alternatifs de 2021 qui ont marqué les esprits

DUBAΪ : Arab News met en avant les disques arabes indépendants que vous deviez écouter en 2021.(AFP)
DUBAΪ : Arab News met en avant les disques arabes indépendants que vous deviez écouter en 2021.(AFP)
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Publié le Jeudi 30 décembre 2021

À réécouter : Les albums arabes alternatifs de 2021 qui ont marqué les esprits

  • Le premier album de l'auteure-compositrice-interprète et multi-instrumentiste palestinienne Rasha Nahas est un coup de génie
  • 2021 fut une année de transformation pour le rappeur, chanteur et parolier palestino-jordanien Laith al-Husseini, alias The Synaptik

DUBAΪ : Arab News met en avant les disques arabes indépendants que vous deviez écouter en 2021.

Rasha Nahas, Desert
Rasha Nahas, Desert

Le premier album de l'auteure-compositrice-interprète et multi-instrumentiste palestinienneRasha Nahas est un coup de génie. Cette musicienne berlinoise née à Haïfa a un talent impressionnant. Guitariste de formation classique, elle possède une voix douce, mais exprimeà travers ses performances électrisantes une véritable tempête d'émotions. Desert montre comment Nahas parvient à sculpter ce son texturé et méticuleusement pensé depuis des années. Cet album oscille entre des ambiances éthérées évoquées par des arrangements de cordes diaphanes et des prestations envoûtantes de Nahas à la guitare. On y trouve des versdélicieusement évocateurs, comme «As my Heart is Bleeding Quarter Tones», et des influences de cabaret théâtrales et festives. Ce premier album est décidément réussi et révèle une artiste prometteuse, profonde et intense.

Poscards, After the Fire, Before the End.
Poscards, After the Fire, Before the End.

Si l’on fait exception de l'irrésistible riff de guitare qui traverse Mother Tongue, son premier titre, effervescent, le trio de Beyrouth passe une grande partie de son troisième album à affiner la délicate alchimie dream pop de leur instrumentation à combustion lente, associée autimbre cristallin de chanteuse Julia Sabra. Il s'agit d'une exploration saisissante d'une nuit noire de l'âme. Cette toile de fond sonore évoque l'événement qui a inspiré l'écriture de la chanson: Sabra était avec son partenaire, le batteur Pascal Semerdjian, lorsqu'il a failli être emporté par l'explosion dramatique survenue dans la capitale libanaise au mois d’août 2020. Les cicatrices profondes de leur traumatisme collectif glissent à travers l'album comme un vent glacial, ponctué par la résilience sans compromis de survivants déterminés à continuer. Postcards signe un album puissant et dérangeant.

Tamara Qaddoumi, Soft Glitch.
Tamara Qaddoumi, Soft Glitch.

Alors que son premier EP, Dust Bathing, sorti en 2018, était une simple aventure pop qui a toutefois réussi son pari en réalisant un accord parfait, avec ses passages lyriques mélodiques et ses harmonies opulentes, Qaddoumi semble s’être affirmée cette année. L'histoire fascinante de cette chanteuse née au Koweït – elle a reçu une éducation palestinienne, libanaise et écossaise, et a étudié le théâtre – est une caractéristique indélébile de l’approche multiforme de son art. Soft Glitch brille d'un courant spectral de trip-hop, de paysages électroniques luxuriants et se trouve transcendé par la voix hypnotique de Qaddoumi. Les vidéos qui ont accompagné la sortie de l’album révèlent un traitement élaboré et imaginatifdes idées qui bouillonnent dans son esprit créatif. Qaddoumi sait s'aventurer bien au-delà des conventions.

 

The Synaptik, Al Qamar Wal Moheet.
  The Synaptik, Al Qamar Wal Moheet.

 

2021 fut une année de transformation pour le rappeur, chanteur et parolier palestino-jordanien Laith al-Husseini, alias The Synaptik. Al Qamar Wal Moheet («La Lune et l’Océan») est un formidable journal artistique d'introspection et marque un énorme changement personnel. Après avoir terminé ses études de médecine, déménagé à Ramallah et abandonné son utilisation à vie de Ritaline, un médicament contre le TDAH (trouble déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité, NDLR), le maître de la rime a utilisé ce disque pour réconcilier la personne qu’il était et celle qu'il est devenu. Le résultat est un disque hip-hop et trap cérébral et non conformiste qui se nourrit ingénieusement d'éléments de R’N’B’, de pop et de musique palestinienne traditionnelle, tout en portant la marque indélébile du lyrisme de The Synaptik.

JadaL, La Tlou’ El Daw.
JadaL, La Tlou’ El Daw.

Les vétérans du rock progressif arabe de Jordanie ont comblé un écart d'une demi-décennie grâce à ce disque réfléchi et élégamment produit qui présente à la fois l'expérimentation dont ils sont les pionniers (depuis 2003) et le goût qu’ils manifestent pour les sujets peu orthodoxes. La Tlou' El Daw passe ainsi de vers graveleux animés par la prestation sincère du leader, Mahmoud Radaideh, à des pièces instrumentales complexes et avant-gardistes parsemées d'accordéon, de synthétiseur, de refrains, d'harmonies majestueuses et riches...L'un des groupes les plus créatifs du monde arabe signe là un retour triomphal.

 

Bu Kolthoum, Talib.
Bu Kolthoum, Talib.

La scène rap régionale a connu un changement radical lorsque Mounir Bu Kolthoum a sorti son premier LP, Inderal, en 2015. Elle chante depuis les louanges du producteur de musique, rappeur et chanteur d'origine syrienne, qu’elle considère comme l'un de ses piliers. Influencé par le tarab, la soul et le funk, Bu Kolthoum vit désormais à Amsterdam, où il a orchestré la sortie de Talib cette année. Cet auteur-compositeur surdoué se livre à travers douze pistes dynamiques propulsées par son rythme inimitable et son chant. Il nous raconte des histoires mémorables qui évoquent la jeunesse, la rébellion et l'aliénation.

El Far3i, Lazim Tisa.
El Far3i, Lazim Tisa.

Depuis qu'il a quitté le groupe de rock arabe précurseur, El Morabba3, Tareq Abu Kwaik,alias El Far3i, s’est montré pour le moins prolifique. Ce rappeur, chanteur, auteur-compositeur et percussionniste jordano-palestinien, qui est également un membre phare du célèbre ensemble Shamstep 47Soul, propose un cinquième opus en solo avec Lazim Tisa. Cet album regorge d'ambiances sombres, de synthétiseurs dissonants, de notes de drones fantomatiques et de rythmes visqueux, le tout poussé par les raps rythmés et le style vocal typique de l'artiste. El Far3i maintient sa position d’artiste remarquable sur la scène duMoyen-Orient.

Prefaces, Hippodrome.
Prefaces, Hippodrome.

Avec une sélection de stars composées de Pascal Semerdjian (de Postcards), Salim Naffah, alias Alko B (de Wanton Bishops) et Charif Megarbane (de Cosmic Analog Ensemble, Heroes & Villains, Twyn Towers et Monumental Detail), pour n'en citer que quelques-uns, Prefaces est une bête créative et singulière dans le meilleur sens du mot. Hippodrome est l'un des quatre albums de Megarbane sortis en 2021, et l'un des quatre-vingts que ce musicien inépuisable a élaborés depuis 2005. Son travail est une gracieuse excursion à travers l'acoustique folk, le surf rock, le jazz, le blues saharien, la soul, le funk et la pop des années 1960. Les débuts principalement instrumentaux de Prefaces appartiennent à cette dernière catégorie, avec une production minimale et granuleuse qui fait penser aux bandesoriginales des films de Quentin Tarantino.

Various Artists, Beyrouth 20/21.

Organisé par Beirut&Beyond’s Musicians Support Program, fondé pour soutenir la scène musicale indépendante du pays à la lumière des crises systémiques qu'elle a endurées au cours des deux dernières années, Beirut 20/21 rassemble une liste éblouissante d’artistes confirmés et émergents. Cette compilation comprend des morceaux de Dani Shukri de Tanjaret Daghet, Tarek Khuluki et Khaled Omran, ainsi que les expérimentateurs de musique électronique Kid Fourteen, alias Khodor Ellaik, et Liliane Chlela, entre autres. L'anthologie constitue un puissant rappel de l'innovation et de l'énergie qui animent toujours cettecommunauté qui crée envers et contre tout.

 


La bibliothèque Jadal est une oasis culturelle dans la province orientale de l'Arabie saoudite

Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
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  • Ali Al-Herz a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres, offrant aux visiteurs un espace où la mémoire, la philosophie et la culture prennent vie.
  • adal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

DHAHRAN : Dans le village tranquille d'Umm Al-Hamam, situé dans la province orientale de l'Arabie saoudite, une passion de longue date pour les livres s'est transformée en un havre culturel.

Ali Al-Herz, bibliophile et archiviste littéraire, a transformé sa maison en une bibliothèque d'exception nommée Jadal, un véritable trésor contenant plus de 37 000 livres, plus de 100 000 journaux et magazines, ainsi que des antiquités, dont certaines datent de plus d'un siècle.

Mais Jadal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

Al-Herz a déclaré à Arab News : « Depuis ma naissance, j'ai été entouré des livres de ma mère. J'ai grandi immergé dans cette passion, à tel point qu'elle m'a complètement envahi ; je suis devenu un rat de bibliothèque. »

L'étincelle qui a tout déclenché a été la rencontre d'Al-Herz avec l'épopée Sirat Antar à l'âge de 13 ans. « À partir de cette épopée, et à travers elle, j'ai commencé à explorer d'autres mondes », a-t-il déclaré. 

C'est cette curiosité et cette fascination qui ont finalement conduit Al-Herz à créer l'une des initiatives les plus originales du royaume d'Arabie saoudite.

Le nom « Jadal » signifie « débat » ou « discussion » en arabe, reflétant l'esprit curieux de la bibliothèque. Pour Al-Herz, l'objectif n'est pas seulement de préserver les textes, mais aussi l'idée de questionner et d'explorer les idées.

Al-Herz a déclaré : « J'ai choisi ce nom pour la bibliothèque, car il est profondément ancré dans l'histoire philosophique de la Grèce antique, ainsi que dans notre propre tradition culturelle arabo-islamique, en particulier dans notre héritage religieux. »

L'atmosphère philosophique imprègne les trois salles principales, nommées d'après Socrate, Platon et Aristote, qui accueillent les visiteurs dans un univers dédié à la lecture et à la réflexion. 

Des manuscrits rares, des textes anciens, des journaux et des antiquités ont été soigneusement archivés. Chaque pièce est un murmure du passé qui s'adresse à l'avenir. 

Al-Herz explique : « Même mon intérêt récent pour l'achat de livres s'est principalement orienté vers les éditions rares et les imprimés anciens, afin de créer une harmonie entre patrimoine et modernité. »

Mais Jadal ne se laisse pas envahir par la nostalgie, car Al-Herz organise toutes les deux semaines une réunion littéraire. Cet événement fait revivre une tradition qui était autrefois importante dans la vie intellectuelle des Arabes.

C'est un environnement où écrivains, universitaires et penseurs se réunissent autour d'un café arabe pour échanger des idées dans une atmosphère animée. 

À une époque où les gens recherchent des informations instantanées en ligne, Al-Herz continue d'utiliser des méthodes traditionnelles. « Il y a une lutte permanente entre deux générations », observe-t-il. « La victoire reviendra finalement à cette dernière génération, une fois que ma génération aura disparu. Les bibliothèques papier seront alors transformées en musées. »

Il a peut-être raison, mais pour l'instant, au cœur de la campagne de Qatif, la bibliothèque Jadal continue d'exister, et c'est un lieu où l'encre, la mémoire, le débat et le patrimoine continuent de façonner l'âme culturelle du Royaume. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com 


Amin Maalouf apporte un soutien inattendu aux langues régionales

Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
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  • Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs,
  • Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale.

PARIS : Une initiative d'un collectif visant à enseigner le patrimoine littéraire dans les langues régionales de France a reçu lundi  un soutien inattendu : celui du secrétaire perpétuel de l'Académie française, Amin Maalouf.

M. Maalouf, écrivain franco-libanais, a été élu en 2023 à la tête d'une institution dont la mission est de veiller au rayonnement et à l'intégrité de la langue française.

Toutefois, il soutient la démarche du Collectif pour les littératures en langues régionales, qui suggère un enseignement de ce type au collège ou au lycée, a indiqué ce collectif à l'AFP.

Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs, afin de sensibiliser à la « richesse de la production littéraire » dans d'autres langues que le français. 

« M. Maalouf, comme nous, est convaincu qu'il est nécessaire que les élèves français découvrent ces trésors culturels », écrit ce collectif à M. Bayrou, qui parle lui-même le béarnais.

Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale (de l'alsacien au tahitien, en passant par le basque ou le corse), traduits en français.

On y trouve entre autres un poème en provençal de Frédéric Mistral (prix Nobel de littérature en 1904) intitulé Mirèio, une chronique en breton de Pierre-Jakez Hélias intitulée Bugale ar Republik, un court récit en créole martiniquais de Raphaël Confiant intitulé Bitako-a, ainsi qu'une chanson en picard d'Alexandre Desrousseaux intitulée Canchon dormoire (plus connue sous le nom de P'tit Quinquin).

« Il ne s'agit pas de donner des cours de langues régionales, mais de présenter des œuvres issues des littératures en langues régionales, que ce soit en français ou en version bilingue », précise le collectif.

Idéalement, selon lui, les élèves aborderaient des langues issues d'autres régions que la leur. « Pourquoi seuls les élèves antillais apprendraient-ils qu'il existe une littérature en créole ? », demande ce collectif, qui présente son initiative à la presse lors d'une visioconférence lundi après-midi. 


L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle

L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle. (Photo Fournie)
L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle. (Photo Fournie)
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  • Fraîchement conçue, cette installation baignée de jaune, ancrée dans les œuvres passées de l'artiste, offre une expérience sensorielle riche et complexe ainsi qu'un commentaire culturel incisif.
  • « The Social Health Club » s'articule autour d'objets trouvés au marché Haraj de Djeddah en 2018.

RIYAD : Ce mois-ci, l'artiste saoudienne Ahaad Alamoudi fait monter la température au Basel Social Club qui se tient jusqu'au 21 juin dans la ville suisse avec sa dernière installation, « The Social Health Club ». 

Fraîchement conçue, cette installation baignée de jaune, ancrée dans les œuvres passées de l'artiste, offre une expérience sensorielle riche et complexe ainsi qu'un commentaire culturel incisif. Elle marque également une première pour l'artiste avec un élément de performance en direct.

Basée à Djeddah, Alamoudi est connue pour créer des installations multimédias immersives s'inspirant de la dynamique complexe de son pays natal en pleine évolution. « The Social Health Club » s'articule autour d'objets trouvés au marché Haraj de Djeddah en 2018, notamment divers équipements de sport, dont un rameur.

« Ce sont des pièces que j'ai chinées dans des brocantes. J'aime le fait qu'aucune instruction n'accompagne ces machines : je ne connais ni leur nom, ni leur provenance, ni leur fabricant. Mais elles font désormais partie du paysage urbain dans lequel j'évolue. J'ai essayé de créer un espace ludique », a-t-elle déclaré à Arab News. 

Dans « The Social Health Club », les équipements, peints principalement dans un jaune vif et saturé, restent intacts, symbolisant une culture obsédée par l'auto-optimisation. Au cœur de l'installation se trouve un caméo représentant un fer à repasser peint en jaune, déjà présent dans son œuvre vidéo de 2020 intitulée « Makwah Man » (Makwah signifie « fer à repasser » en arabe).

« Beaucoup de mes œuvres sont issues d'un récit que je crée dans une vidéo. Dans « Makwah Man », cet homme vêtu d'une thobe jaune repasse un long morceau de tissu jaune au milieu du désert. Et pendant qu'il repasse, il nous dit comment vivre notre vie. Mais en nous disant comment vivre notre vie, il commence aussi à remettre en question la sienne, à comprendre le rôle du pouvoir, à prendre conscience de la pression du changement et de l'adaptation », explique Alamoudi. 

« Le jaune est présent dans la vidéo, mais l'artiste porte également une thobe jaune. Il y a aussi, dans cette version présentée à Art Basel, un portant de thobes jaunes qui tournent dans l'exposition. Pour moi, la thobe jaune est un symbole unificateur. J'essaie de dire que nous vivons tous cela différemment. Ainsi, dans la performance (pour « The Social Health Club »), un culturiste local vêtu d'une thobe jaune fera des exercices sur ces machines. Il n'a pas de règles à suivre. Il ne connaît rien, ne sait pas comment utiliser « correctement » l'équipement. Il entrera dans l'espace et utilisera les machines comme il le pourra.

« La performance sera enregistrée. Mais je pense que c'est plutôt une activation », a-t-elle poursuivi. « Ce n'est pas l'œuvre elle-même. L'œuvre existe sous la forme des machines. 

« Le Social Health Club » a été créé en étroite collaboration avec la conservatrice Amal Khalaf. Ensemble, ils se sont rendus à Djeddah où Alamoudi a pu découvrir avec elle des « machines un peu inhabituelles, différentes des machines classiques que l'on trouve dans les salles de sport et dont tout le monde connaît immédiatement l'utilité », explique Alamoudi.

« Elle est vraiment incroyable », a-t-elle poursuivi. « Nous avons vraiment construit cet espace ensemble. En gros, j'ai principalement créé la vidéo ; tout le reste a été construit à partir de là. Elle m'a beaucoup aidée. Elle s'est vraiment intéressée aux changements sociaux et à la manière dont nous les abordons. Notre collaboration a été parfaite. »

Le jaune domine chaque centimètre carré de l'œuvre, de manière délibérée et intense. 

« Je suis obsédé par les symboles dans certaines de mes œuvres. Et cela s'accompagne également d'une couleur », explique Alamoudi. « Je voulais mettre en valeur quelque chose de luxueux, de coloré, presque comme de l'or, mais qui n'est pas de l'or. Son apparence est assez austère. » 

Le jaune est à la fois une invitation et un avertissement. « Je pense que le jaune est également assez trompeur. J'aime cette couleur qui incite les gens à s'approcher pour voir ce qui se passe, mais qui les amène en même temps à se demander ce que c'est  elle est si agressive qu'elle en devient un peu inconfortable. »

L'interaction du spectateur est essentielle à la signification de l'œuvre. 

« Je pense que les machines représentent quelque chose et qu'elles véhiculent quelque chose, mais elles sont en réalité activées par les gens, par ce que les gens font avec elles », explique Alamoudi. « C'est pourquoi j'encourage beaucoup de spectateurs à interagir avec les œuvres, à les utiliser ou à essayer de les utiliser sans aucune instruction. Beaucoup de personnes qui entrent dans l'espace peuvent avoir peur de les toucher ou d'interagir avec elles. La présence de l'artiste qui active les structures ajoute une autre dimension à l'œuvre elle-même. »

Elle espère que les visiteurs se sentiront libres d'explorer les œuvres, sans être encombrés par des attentes.

« Les gens sont censés les utiliser à leur guise. Ils peuvent s'asseoir dessus, se tenir debout dessus, les toucher — ils peuvent aussi les laisser tranquilles », conclut-elle en riant. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com