Tunisie: des « soupçons de terrorisme » à l'origine de l'arrestation de Bhiri

Le ministre tunisien de l'Intérieur Taoufik Charfeddine donne une conférence de presse le 3 janvier 2022 à Tunis pour expliquer les causes de l'arrestation de l'ex-ministre de la Justice Noureddine Bhiri du parti d'inspiration islamiste Ennahdha. (AFP)
Le ministre tunisien de l'Intérieur Taoufik Charfeddine donne une conférence de presse le 3 janvier 2022 à Tunis pour expliquer les causes de l'arrestation de l'ex-ministre de la Justice Noureddine Bhiri du parti d'inspiration islamiste Ennahdha. (AFP)
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Publié le Mardi 04 janvier 2022

Tunisie: des « soupçons de terrorisme » à l'origine de l'arrestation de Bhiri

  • M. Bhiri avait été arrêté vendredi matin par des agents en civil devant son domicile, et conduit dans un lieu inconnu, selon des membres d'Ennahdha qui avaient dénoncé un « enlèvement »
  • Le parti Ennahdha a annoncé lundi que M. Bhiri était en grève de la faim

TUNIS : Le ministre tunisien de l'Intérieur a justifié lundi l'arrestation de l'homme fort du parti d'inspiration islamiste Ennahdha, Noureddine Bhiri, par "des soupçons de terrorisme dans le dossier", assurant que ce dernier, hospitalisé parce qu'il refuse toute alimentation et médicaments, est "bien traité".

"Il y avait des craintes d'acte terroriste (...) touchant à la sécurité du pays, il fallait réagir", a expliqué devant la presse Taoufik Charfeddine, précisant avoir transmis des "procès verbaux" au ministère de la Justice et au parquet qui "ont tardé" à prendre des mesures.

Le ministre a dit avoir alors décidé d'"appliquer rapidement" la "mise sous contrôle judiciaire" de M. Bhiri, un ancien ministre de la Justice de 63 ans, assurant avoir respecté la législation tunisienne.

M. Bhiri avait été arrêté vendredi matin par des agents en civil devant son domicile, et conduit dans un lieu inconnu, selon des membres d'Ennahdha qui avaient dénoncé un "enlèvement".

Ennahdha est au coeur d'un bras de fer avec le président Kais Saied depuis son coup de force du 25 juillet et sa décision de suspendre le Parlement que ce parti contrôlait depuis une dizaine d'années. 

Les décisions de M. Saied ont été qualifiées de "coup d'Etat" par Ennahdha et plusieurs opposants, tandis que des ONG nationales et internationales ont dit redouter une dérive autoritaire.

Le dossier est caractérisé par des "soupçons graves", selon M. Charfeddine, et porte notamment sur "la fabrication et remise" de faux papiers d'identité et certificats de nationalité, au profit entre autres d'une Syrienne.

Le ministre a dit avoir "veillé personnellement à ce que (M. Bhiri) soit bien traité". "Nous avons fait notre devoir sécuritaire, légal et humain", a-t-il dit.

Selon une délégation de l'Instance de prévention de la torture (INPT, autorité indépendante) et du Haut commissariat de l'ONU aux droits de l'Homme qui lui a rendu visite, M. Bhiri est hospitalisé depuis dimanche "sous surveillance rapprochée en cardiologie" à Bizerte (nord), car il est atteint de plusieurs maladies chroniques (diabète, hypertension, notamment).

Il a "refusé d'être transféré à l'hôpital militaire" où il aurait pu être mieux pris en charge, a indiqué le ministre, ajoutant aussi avoir proposé à l'épouse de M. Bhiri de lui rendre visite, accompagnée de son médecin traitant, ce que celle-ci a refusé, selon lui.

Le parti Ennahdha a annoncé lundi que M. Bhiri était en grève de la faim.

« Pas en état critique »

M. Bhiri refuse "toute alimentation et ses médicaments" depuis vendredi, et les médecins craignent une détérioration de sa santé, avait indiqué lundi matin à l'AFP un membre de la délégation qui l'a visité dimanche. 

Cette source avait assuré que l'ex-ministre était "lucide et "pas en état critique".

Des militants et députés du parti Ennahdha et son épouse avaient affirmé dimanche soir que M. Bhiri était en "état critique", en "réanimation" et qu'il y avait "des menaces pour sa vie".

Samir Dilou, avocat et député d'Ennahdha, a affirmé devant la presse lundi que l'arrestation de M. Bhiri était "une affaire politique et une instrumentalisation de la justice", annonçant une plainte pour "kidnapping" contre le président Saied et le ministre Charfeddine.

Dès samedi, l'INPT et le comité de défense de M. Bhiri avaient dénoncé son placement en détention dans un lieu secret et l'absence de motivations claires à son arrestation et un "silence complet" du ministère de l'Intérieur sur le dossier.

Le ministère avait uniquement annoncé deux assignations à résidence, sans donner de noms, vendredi soir, faisant état d'une "mesure préventive dictée par la nécessité de préserver la sûreté nationale". 

Une source informée de l'INPT a indiqué lundi à l'AFP n'avoir "aucune nouvelle" de l'autre interpellé, Fethi Baldi, membre aussi d'Ennahdha.

Le ministre Charfeddine a assuré avoir donné les autorisations nécessaires à l'INPT pour intervenir dans le cadre de son mandat qui consiste à vérifier la santé et les conditions de détention de personnes privées de liberté.


WhatsApp est utilisé pour cibler les Palestiniens par le biais du système d'IA Lavender d'Israël

Cette révélation n'est que la dernière en date des tentatives de Meta pour réduire au silence les voix pro-palestiniennes. (AFP/File)
Cette révélation n'est que la dernière en date des tentatives de Meta pour réduire au silence les voix pro-palestiniennes. (AFP/File)
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  • La sélection des cibles est basée sur l'appartenance à certains groupes WhatsApp, selon un nouveau rapport
  • L'accusation soulève des questions sur les revendications de l'application en matière de confidentialité et de cryptage

LONDRES : WhatsApp serait utilisé pour cibler les Palestiniens par le biais du système d'intelligence artificielle israélien controversé, Lavender, qui a été associé à la mort de civils palestiniens à Gaza, ont révélé des rapports récents.

Au début du mois, la publication israélo-palestinienne +972 Magazine et le journal en hébreu Local Call ont publié un rapport du journaliste Yuval Abraham, exposant l'utilisation par l'armée israélienne d'un système d'intelligence artificielle capable d'identifier des cibles associées au Hamas ou au Jihad islamique palestinien.

Cette révélation, corroborée par six officiers des services de renseignement israéliens impliqués dans le projet, a suscité l'indignation de la communauté internationale, car elle suggère que Lavender a été utilisé par l'armée pour cibler et éliminer des militants présumés, entraînant souvent des pertes civiles.

Dans un récent billet de blog, l'ingénieur logiciel et activiste Paul Biggar a souligné la dépendance de Lavender à l'égard de WhatsApp.

Il a indiqué comment l'appartenance à un groupe WhatsApp contenant un militant présumé peut influencer le processus d'identification de Lavender, soulignant le rôle essentiel que jouent les plateformes de messagerie dans le soutien des systèmes de ciblage d'IA tels que Lavender.

« Un détail peu discuté dans l'article sur l'IA Lavender est qu'Israël tue des personnes sur la base de leur appartenance au même groupe WhatsApp qu'un militant présumé », a écrit Bigger. « Il y a beaucoup de choses qui ne vont pas ».

Il explique que les utilisateurs se retrouvent souvent dans des groupes avec des inconnus ou des connaissances.

Paul Biggar a également suggéré que la société mère de WhatsApp, Meta, pourrait être complice, sciemment ou non, de ces opérations.

Il a accusé Meta d'avoir potentiellement violé le droit humanitaire international et ses propres engagements en matière de droits de l'homme, soulevant des questions sur les revendications de confidentialité et de cryptage du service de messagerie de WhatsApp.

Cette révélation n'est que la dernière en date des tentatives de Meta pour réduire au silence les voix pro-palestiniennes.

Avant même le début du conflit, le géant de Menlo Park a été accusé de faire deux poids deux mesures en faveur d'Israël.

En février, le Guardian a révélé que Meta envisageait d'étendre sa politique d'incitation à la haine au terme « sioniste ».

Plus récemment, Meta a discrètement introduit une nouvelle fonctionnalité sur Instagram qui limite automatiquement l'exposition des utilisateurs à ce qu'elle considère comme un contenu « politique », une décision critiquée par les experts comme un moyen de censurer systématiquement le contenu pro-palestinien.

Répondant aux demandes de commentaires, un porte-parole de WhatsApp a déclaré que l'entreprise ne pouvait pas vérifier l'exactitude du rapport, mais a assuré que « WhatsApp n'a pas de portes arrière et ne fournit pas d'informations en vrac à un gouvernement. »

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com


Irak: un «bombardement» sur une base militaire fait plusieurs victimes

Le Premier ministre irakien, Mohamed Shia al-Sudani, préside une réunion avec des hauts responsables des forces armées irakiennes et de la coalition dirigée par les États-Unis lors du premier cycle de négociations sur l'avenir des troupes américaines et autres troupes étrangères dans le pays, à Bagdad, le 27 janvier 2024. (Photo Hadi Mizban Pool AFP)
Le Premier ministre irakien, Mohamed Shia al-Sudani, préside une réunion avec des hauts responsables des forces armées irakiennes et de la coalition dirigée par les États-Unis lors du premier cycle de négociations sur l'avenir des troupes américaines et autres troupes étrangères dans le pays, à Bagdad, le 27 janvier 2024. (Photo Hadi Mizban Pool AFP)
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  • «Les Etats-Unis n'ont pas mené de frappes aériennes en Irak aujourd'hui», a réagi le Commandement militaire américain pour le Moyen-Orient (Centcom) sur X, peu après cette annonce
  • Le Hachd al-Chaabi, coalition de groupes armés pro-Iran a confirmé dans un communiqué des «blessés», sans en préciser le nombre, et des «pertes matérielles» dans une «explosion»

BAGDAD, Irak : Un «bombardement» a fait des victimes dans la nuit de vendredi à samedi sur une base militaire en Irak abritant des troupes de l'armée et d'anciens paramilitaires pro-Iran du Hachd al-Chaabi, ont rapporté des sources de sécurité dans un contexte régional déjà explosif.

Interrogés par l'AFP, un responsable militaire et un responsable du ministère de l'Intérieur n'étaient pas en mesure d'identifier les responsables de ce bombardement aérien ayant visé la base de Calso, dans la province de Babylone (centre), ni de dire s'il s'agissait d'une frappe de drone.

«Les Etats-Unis n'ont pas mené de frappes aériennes en Irak aujourd'hui», a réagi le Commandement militaire américain pour le Moyen-Orient (Centcom) sur X, peu après cette annonce.

Interrogée par l'AFP, l'armée israélienne a assuré «ne pas commenter les informations parues dans les médias étrangers.»

Un responsable au ministère de l'Intérieur avait initialement fait état d'un bilan «d'un mort et de huit blessés» dans un «bombardement aérien». Mais le Hachd al-Chaabi, coalition de groupes armés pro-Iran a confirmé dans un communiqué des «blessés», sans en préciser le nombre, et des «pertes matérielles» dans une «explosion».

Celle-ci a touché ses locaux sur la base, précise l'organisation, en ajoutant qu'une «enquête préliminaire» avait été ouverte et des enquêteurs dépêchés sur le site.

Ce développement en Irak intervient à un moment où les efforts diplomatiques se poursuivent pour éviter un embrasement du Moyen-Orient, sur fond de guerre à Gaza et de tensions ravivées entre Israël et l'Iran.

Tôt vendredi, des frappes de drones ont ainsi visé les environs d'une base militaire dans la région d'Ispahan dans le centre de l'Iran. L'attaque a été imputée à Israël qui, toutefois, ne l'a pas revendiquée.

- «Risques d'escalade militaire» -

En Irak, sur la base de Calso, un responsable militaire a fait état de trois blessés parmi les effectifs de l'armée irakienne.

«Il y a des explosions dans les entrepôts abritant les équipements en raison du bombardement», a précisé ce responsable s'exprimant sous couvert de l'anonymat en raison de la sensibilité du sujet. Il a fait état d'un incendie qui a ravagé certains secteurs de la base.

De son côté, le responsable au sein du ministère de l'Intérieur a assuré que le bombardement avait ciblé la Direction des véhicules blindés du Hachd al-Chaabi. «L'explosion a touché le matériel, l'armement, les véhicules», a-t-il précisé.

Le Hachd al-Chaabi fait partie intégrante de l'appareil sécuritaire officiel irakien placé sous l'autorité du Premier ministre.

Mais cette institution rassemble plusieurs factions armées pro-Iran, qui ont par ailleurs mené pour certaines des dizaines d'attaques, en Irak et en Syrie, contre les soldats américains déployés dans le cadre d'une coalition internationale antijihadistes.

Le bombardement en Irak, qui n'a pas été revendiqué dans l'immédiat, intervient dans un contexte régional explosif.

Avant les frappes de vendredi en Iran dans les environs d'Ispahan, Téhéran avait mené le 13 avril une attaque inédite aux drones et aux missiles contre Israël. Il s'agissait d'une riposte à une précédente attaque qui avait détruit le consulat iranien à Damas et coûté la vie à sept militaires, dont deux hauts gradés.

La diplomatie irakienne a exprimé vendredi soir sa «forte inquiétude» concernant l'attaque à Ispahan et «mis en garde contre les risques de l'escalade militaire qui menace la sécurité et la stabilité dans la région».

«Cette escalade ne doit pas détourner l'attention de ce qui se passe dans la bande de Gaza, les destructions et les pertes de vie innocentes», a-t-elle fait valoir.

Le Premier ministre irakien, Mohamed Chia al-Soudani, se trouve toujours aux Etats-Unis, où il a rencontré en début de semaine le président Joe Biden.

 


Arabie saoudite - Arménie: Pour un renforcement des relations diplomatiques, affirme Ararat Mirzoyan

Le ministre arménien des Affaires étrangères, Ararat Mirzoyan, affirme qu'il n'y a «aucune limite» aux opportunités de coopération entre l'Arabie saoudite et l'Arménie. (Photo, AN)
Le ministre arménien des Affaires étrangères, Ararat Mirzoyan, affirme qu'il n'y a «aucune limite» aux opportunités de coopération entre l'Arabie saoudite et l'Arménie. (Photo, AN)
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  • «Aucune limite» aux opportunités de coopération entre l’Arabie saoudite et l’Arménie, déclare le ministre des Affaires étrangères, Ararat Mirzoyan, lors de sa visite «historique» à Riyad
  • Il affirme que le gouvernement arménien soutient un cessez-le-feu à Gaza et la solution des deux États pour Israël-Palestine

RIYAD: L'Arménie s'engage à établir une «feuille de route» pour renforcer ses relations diplomatiques avec l'Arabie saoudite, a déclaré Ararat Mirzoyan, ministre arménien des Affaires étrangères, lors d'une interview exclusive accordée à Arab News jeudi en marge d'une visite dans le Royaume.

Lors d'une discussion approfondie qui a couvert divers aspects, notamment le développement des liens bilatéraux, le processus de paix dans le Caucase du Sud et la guerre à Gaza, Mirzoyan a souligné que l'établissement de relations diplomatiques officielles en novembre dernier marquait le début d’une nouvelle ère de coopération entre les deux pays.

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Le ministre arménien des Affaires étrangères, Ararat Mirzoyan, affirme qu'il n'y a «aucune limite» aux opportunités de coopération entre l'Arabie saoudite et l'Arménie. (Photo, AN)

«Il est essentiel de souligner que nos liens historiques avec le monde arabe, avec tous les pays arabes, reposent sur des relations amicales ancrées dans la tradition entre nos peuples respectifs,», a-t-il déclaré. «Nous devons garder à l’esprit que de nombreux pays arabes ont accueilli des réfugiés survivants du génocide arménien. Mais bien sûr, nos liens culturels et nos relations existaient même avant cela.»

Mirzoyan a rencontré son homologue saoudien, le prince Faisal ben Farhane, à Riyad mercredi, et il a également été reçu aux ministères saoudiens de l'Éducation et de l'Économie.

«Nous ne voulons pas nous arrêter là. Il existe de nombreux domaines où nous pouvons approfondir notre coopération et explorer de nouvelles opportunités. Nous espérons qu’après cette visite une feuille de route pour le développement des relations émergera», a-t-il ajouté.

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Le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Faisal ben Farhane (à droite), reçoit le ministre arménien des Affaires étrangères, Ararat Mirzoyan, avant leur rencontre à Riyad, le 17 avril 2024. (Photo, SPA)

Ces dernières années ont été marqués par un réchauffement progressif des relations entre les deux pays. En octobre 2021, le président arménien de l'époque, Armen Sarkissian, s'était rendu en Arabie saoudite, marquant ainsi le début d'un nouvel avenir diplomatique pour l'Arménie.

Bien que les relations diplomatiques formelles soient récentes, M. Mirzoyan est très optimiste quant aux avantages mutuels de développer ces liens.

«Franchement, il n'y a pas de limite», a-t-il déclaré. «L'éducation, les sciences, les technologies de pointe, le développement urbain, l'agriculture, le tourisme, les contacts entre les peuples, le commerce, les investissements et les infrastructures. Il se passe tellement de choses ici en Arabie saoudite, mais aussi en Arménie».

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Le ministre arménien des Affaires étrangères, Ararat Mirzoyan, s'est également entretenu avec le ministre saoudien de l'Économie et de la Planification, Faisal F. Al-Ibrahim, à Riyad le 17 avril 2024. (Photo SPA)

Mirzoyan a salué le lancement des vols commerciaux entre Riyad et la capitale arménienne, Erevan, par la compagnie aérienne saoudienne Flynas, en juin de l'année dernière, affirmant qu'il s'attend à ce que cette initiative stimule le tourisme entre les deux nations.

Le ministre des Affaires étrangères a également félicité l'Arabie saoudite pour avoir remporté sa candidature pour l'Expo 2030, candidature que l'Arménie a soutenue en 2022.

«Notre vision est que nous devrions établir une coopération très étroite et solide avec l'Arabie saoudite, y compris en ce qui concerne les affaires régionales, mais aussi les forums internationaux», a-t-il déclaré.

«J’entrevois également la possibilité d’une coopération étroite dans les forums internationaux. Encore une fois, je tiens à mentionner que lorsque l'Arabie saoudite a présenté sa candidature pour l'Expo 2030, l'Arménie figurait parmi les pays qui l'ont soutenue.»

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Les ministres des Affaires étrangères saoudien et arménien, accompagnés de leurs délégations respectives, réunis à Riyad le 17 avril 2024. (Photo SPA)

Mirzoyan a également exprimé son soutien à une solution à deux États et à un cessez-le-feu en Palestine. En décembre de l'année dernière, l'Arménie s'est jointe à l'Arabie saoudite et à plus de 150 autres pays à l'Assemblée générale des Nations unies pour voter en faveur d'un cessez-le-feu immédiat à Gaza. En outre, l'Arménie serait prête à agir en tant que facilitateur potentiel entre les deux parties, si nécessaire et sur demande.

«L'Arménie a toujours soutenu la solution à deux États pour la Palestine et Israël, et condamne fermement la violence et le ciblage des populations civiles», a déclaré Mirzoyan, soulignant que l'Arménie avait très récemment été victime de cette violence.

«Nous condamnons fermement toute violence à l'encontre des populations civiles», a-t-insisté.

Outre les mots de soutien, l'Arménie a pris des mesures concrètes pour aider les populations civiles touchées par le conflit. Le mois dernier, elle a envoyé 30 tonnes de nourriture et de médicaments aux civils palestiniens déplacés et réfugiés à Rafah.

«L'Arménie déplore des dizaines de milliers de victimes innocentes de l'escalade des hostilités à Gaza. Nous-mêmes avons vécu l'horreur des attaques contre les civils et les infrastructures civiles, et nous nous joignons aux appels de la communauté internationale en faveur d'un cessez-le-feu immédiat à Gaza», a déclaré le Premier ministre arménien Nikol Pashinyan lors d'une conférence de presse donnée à l’occasion de sa visite en Égypte pour discuter de la livraison d'aide.

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Des Palestiniens inspectent une maison détruite par une frappe israélienne à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 17 avril 2024. (Reuters)

Mirzoyan a exprimé son espoir que l’assistance «puisse aider un tant soit peu à alléger la situation et soulager la souffrance de ces personnes».

Concernant les relations plus proches, Mirzoyan a exprimé son désir d’aboutir à la paix entre l'Arménie et les autres nations du Caucase du Sud, tout en admettant que la paix durable nécessitera des efforts pour surmonter les obstacles.

«Il y a vraiment une opportunité, un élan tout à fait réaliste, pour construire une paix et une stabilité durables dans le Caucase du Sud. Mon gouvernement est pleinement engagé dans la voie de la paix, et nous sommes engagés dans des négociations de bonne foi et constructives. Cependant, pour être honnête, il reste encore quelques problèmes cruciaux où les positions des parties divergent. Le premier problème étant, bien entendu, la question des frontières et de la reconnaissance mutuelle de l'intégrité territoriale.» 

Dans le Caucase du Sud, les tensions territoriales sont fréquentes entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan depuis la chute de l'Union soviétique en 1991.

Pour normaliser les relations, Mirzoyan a souligné l’importance du respect des principes de souveraineté, de juridiction, d'égalité et de réciprocité par toutes les parties concernées.

«Nous sommes convaincus que tout peut être débloqué, y compris les voies ferrées, et nous pensons que tout ce qui sera débloqué doit rester sous la souveraineté des pays respectifs.»

«L'infrastructure sur le territoire arménien doit demeurer sous la souveraineté de l’Arménie tout comme l'infrastructure azérie sous la souveraineté de l'Azerbaïdjan. De plus, toutes ces infrastructures doivent fonctionner conformément à nos législations nationales, dans le respect des principes d'égalité et de réciprocité.»

Mirzoyan a ajouté que l'Arménie était en mesure de garantir la sécurité des personnes et des marchandises traversant son territoire sans nécessiter la présence d'un pays tiers.

Il a également expliqué que son pays avait lancé une initiative visant à améliorer les perspectives de stabilité et de paix en débloquant les infrastructures de transport dans la région.

«Nous avons proposé une initiative que nous avons baptisée “Carrefour de la paix” parce que nous croyons fermement que le déblocage complet des infrastructures de transport dans le Caucase du Sud, notamment les routes et les chemins de fer arméniens, azéris et turcs, aura non seulement des retombées économiques positives, mais constituera également un facteur majeur de paix et de stabilité dans notre région.»

Carte illustrée montrant les «carrefours de la paix» proposés par l'Arménie.

Même en dehors de l'Arménie et du Caucase du Sud, l'initiative pourrait avoir un impact mondial significatif, selon Mirzoyan.

«Il y a un intérêt croissant de la part de plusieurs pays pour la mise en œuvre de ce projet, le Carrefour de la Paix, en raison de ses avantages évidents. Je parle notamment des connexions est-ouest, mais nous devons également envisager les liens sud-nord ou nord-sud. C'est pourquoi nous le qualifions de “carrefour”», a-t-il expliqué.

Il a également souligné: «Ce projet pourrait s'avérer très bénéfique pour relier, par exemple, le monde arabe, y compris l'Arabie saoudite, avec la région de la mer Noire, et même au-delà.»

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La ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock (C), accueille les ministres des Affaires étrangères de l'Arménie, Ararat Mirzoyan (G), et de l'Azerbaïdjan, Jeyhun Bayramov (D), pour des pourparlers de paix à Berlin, le 28 février 2024. (AFP/Dossier)

La ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock (C), accueille les ministres des Affaires étrangères de l'Arménie, Ararat Mirzoyan (G), et de l'Azerbaïdjan, Jeyhun Bayramov (D), pour des pourparlers de paix à Berlin, le 28 février 2024. (AFP/Dossier)

L'Arménie s'apprête à établir des relations diplomatiques avec plusieurs pays et organisations multilatérales, dont l'Union européenne, s'éloignant ainsi de son allié historique le plus puissant, la Russie.

«Il convient de noter que les relations entre l'Arménie et la Fédération de Russie ne sont pas au beau fixe, dirais-je», a déclaré M. Mirzoyan. «Bien sûr, des difficultés subsistent, et nous n’en faisons pas mystère». 

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Cette photo prise le 17 novembre 2020 montre des véhicules de soldats de la paix russes stationnés à un poste de contrôle sur la route de Shusha, dans le Haut-Karabakh. Le porte-parole du président Vladimir Poutine a déclaré le 17 avril 2024 que les forces russes se retiraient de la région du Karabakh, où elles étaient stationnées en tant que forces de maintien de la paix depuis la fin d'une guerre en 2020. (Photo AP /Dossier)

«Il y a des problèmes ainsi que des interrogations au sein de la société arménienne, notamment en ce qui concerne le comportement des soldats de la paix russes au Nagorno-Karabakh, mais aussi celui de nos alliés russes lors des attaques sur nos territoires souverains en 2022, 2023 et bien avant. Il est vrai que des questions subsistent à ce sujet. Cependant, nous y travaillons.»

Les relations de l’Arménie avec l'Organisation du traité de sécurité collective (OTSC) sont gelées depuis l'automne dernier. Fondée en 2002, l'OTSC est une alliance militaire regroupant six États post-soviétiques: Arménie, Biélorussie, Kazakhstan, Kirghizistan, Russie et Tadjikistan. Mirzoyan a déclaré dans une interview en mars avec TRT World de Turquie que la candidature de l'Arménie à l'UE était en discussion.

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Le ministre arménien des Affaires étrangères, Ararat Mirzoyan, en visite dans le Royaume cette semaine, s'est entretenu en exclusivité avec la rédactrice en chef adjointe d'Arab News, Noor Nugali. (Photo AN)

Abordant la question avec Arab News, Mirzoyan a déclaré: «Les aspirations européennes du peuple de la république d'Arménie se renforcent de plus en plus, surtout face à la frustration ressentie par les Arméniens à l’égard des relations avec la Russie, bien que cela ne soit pas le seul élément en jeu.

«L'Arménie approfondit véritablement et de manière significative ses liens avec les États-Unis et l'UE. Ce sont nos principaux partenaires dans notre programme de réformes démocratiques. Ces derniers montrent désormais un engagement fort à soutenir l'Arménie et à renforcer sa résilience économique.

Nous entamons avec l'UE une nouvelle voie de partenariat étroit et, jusqu'à présent, personne ne peut prédire avec certitude où cela nous mènera.»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com