Tunisie: des « soupçons de terrorisme » à l'origine de l'arrestation de Bhiri

Le ministre tunisien de l'Intérieur Taoufik Charfeddine donne une conférence de presse le 3 janvier 2022 à Tunis pour expliquer les causes de l'arrestation de l'ex-ministre de la Justice Noureddine Bhiri du parti d'inspiration islamiste Ennahdha. (AFP)
Le ministre tunisien de l'Intérieur Taoufik Charfeddine donne une conférence de presse le 3 janvier 2022 à Tunis pour expliquer les causes de l'arrestation de l'ex-ministre de la Justice Noureddine Bhiri du parti d'inspiration islamiste Ennahdha. (AFP)
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Publié le Mardi 04 janvier 2022

Tunisie: des « soupçons de terrorisme » à l'origine de l'arrestation de Bhiri

  • M. Bhiri avait été arrêté vendredi matin par des agents en civil devant son domicile, et conduit dans un lieu inconnu, selon des membres d'Ennahdha qui avaient dénoncé un « enlèvement »
  • Le parti Ennahdha a annoncé lundi que M. Bhiri était en grève de la faim

TUNIS : Le ministre tunisien de l'Intérieur a justifié lundi l'arrestation de l'homme fort du parti d'inspiration islamiste Ennahdha, Noureddine Bhiri, par "des soupçons de terrorisme dans le dossier", assurant que ce dernier, hospitalisé parce qu'il refuse toute alimentation et médicaments, est "bien traité".

"Il y avait des craintes d'acte terroriste (...) touchant à la sécurité du pays, il fallait réagir", a expliqué devant la presse Taoufik Charfeddine, précisant avoir transmis des "procès verbaux" au ministère de la Justice et au parquet qui "ont tardé" à prendre des mesures.

Le ministre a dit avoir alors décidé d'"appliquer rapidement" la "mise sous contrôle judiciaire" de M. Bhiri, un ancien ministre de la Justice de 63 ans, assurant avoir respecté la législation tunisienne.

M. Bhiri avait été arrêté vendredi matin par des agents en civil devant son domicile, et conduit dans un lieu inconnu, selon des membres d'Ennahdha qui avaient dénoncé un "enlèvement".

Ennahdha est au coeur d'un bras de fer avec le président Kais Saied depuis son coup de force du 25 juillet et sa décision de suspendre le Parlement que ce parti contrôlait depuis une dizaine d'années. 

Les décisions de M. Saied ont été qualifiées de "coup d'Etat" par Ennahdha et plusieurs opposants, tandis que des ONG nationales et internationales ont dit redouter une dérive autoritaire.

Le dossier est caractérisé par des "soupçons graves", selon M. Charfeddine, et porte notamment sur "la fabrication et remise" de faux papiers d'identité et certificats de nationalité, au profit entre autres d'une Syrienne.

Le ministre a dit avoir "veillé personnellement à ce que (M. Bhiri) soit bien traité". "Nous avons fait notre devoir sécuritaire, légal et humain", a-t-il dit.

Selon une délégation de l'Instance de prévention de la torture (INPT, autorité indépendante) et du Haut commissariat de l'ONU aux droits de l'Homme qui lui a rendu visite, M. Bhiri est hospitalisé depuis dimanche "sous surveillance rapprochée en cardiologie" à Bizerte (nord), car il est atteint de plusieurs maladies chroniques (diabète, hypertension, notamment).

Il a "refusé d'être transféré à l'hôpital militaire" où il aurait pu être mieux pris en charge, a indiqué le ministre, ajoutant aussi avoir proposé à l'épouse de M. Bhiri de lui rendre visite, accompagnée de son médecin traitant, ce que celle-ci a refusé, selon lui.

Le parti Ennahdha a annoncé lundi que M. Bhiri était en grève de la faim.

« Pas en état critique »

M. Bhiri refuse "toute alimentation et ses médicaments" depuis vendredi, et les médecins craignent une détérioration de sa santé, avait indiqué lundi matin à l'AFP un membre de la délégation qui l'a visité dimanche. 

Cette source avait assuré que l'ex-ministre était "lucide et "pas en état critique".

Des militants et députés du parti Ennahdha et son épouse avaient affirmé dimanche soir que M. Bhiri était en "état critique", en "réanimation" et qu'il y avait "des menaces pour sa vie".

Samir Dilou, avocat et député d'Ennahdha, a affirmé devant la presse lundi que l'arrestation de M. Bhiri était "une affaire politique et une instrumentalisation de la justice", annonçant une plainte pour "kidnapping" contre le président Saied et le ministre Charfeddine.

Dès samedi, l'INPT et le comité de défense de M. Bhiri avaient dénoncé son placement en détention dans un lieu secret et l'absence de motivations claires à son arrestation et un "silence complet" du ministère de l'Intérieur sur le dossier.

Le ministère avait uniquement annoncé deux assignations à résidence, sans donner de noms, vendredi soir, faisant état d'une "mesure préventive dictée par la nécessité de préserver la sûreté nationale". 

Une source informée de l'INPT a indiqué lundi à l'AFP n'avoir "aucune nouvelle" de l'autre interpellé, Fethi Baldi, membre aussi d'Ennahdha.

Le ministre Charfeddine a assuré avoir donné les autorisations nécessaires à l'INPT pour intervenir dans le cadre de son mandat qui consiste à vérifier la santé et les conditions de détention de personnes privées de liberté.


L'Arabie saoudite condamne les actions d'Israël à Gaza devant la CIJ

 Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
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  • Tel-Aviv "continue d'ignorer" les décisions de la Cour internationale de justice, déclare le représentant du Royaume
  • M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

DUBAI : L'Arabie saoudite a condamné mardi devant la Cour internationale de justice la campagne militaire israélienne en cours à Gaza, l'accusant de défier les décisions internationales et de commettre de graves violations des droits de l'homme.

S'exprimant devant la Cour, le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, a déclaré qu'Israël "continue d'ignorer les ordres de la Cour" et a insisté sur le fait que "rien ne justifie les violations commises par Israël à Gaza".

M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

Ses remarques ont été formulées au deuxième jour des audiences de la CIJ sur les obligations humanitaires d'Israël à l'égard des Palestiniens, qui se déroulent dans le cadre d'un blocus israélien total de l'aide à la bande de Gaza, qui dure depuis plus de 50 jours.

Ces audiences s'inscrivent dans le cadre d'efforts plus larges visant à déterminer si Israël a respecté les responsabilités juridiques internationales dans sa conduite lors de la guerre contre Gaza.

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com


Syrie: neuf morts dans des affrontements entre forces de sécurité et combattants druzes près de Damas

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
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  • Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité "
  • "La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué

DAMAS: Neuf personnes ont été tuées dans des affrontements entre les forces de sécurité syriennes et des combattants de la minorité druze à Jaramana, dans la banlieue de Damas, sur fond de tension confessionnelle, selon un nouveau bilan mardi d'une ONG.

Ces violences interviennent un mois après des massacres qui ont visé la minorité alaouite, faisant des centaines de morts, dans le pays où la coalition islamiste qui a pris le pouvoir en décembre est scrutée par la communauté internationale.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), "les forces de sécurité ont lancé un assaut" contre la banlieue à majorité druze de Jaramana, après la publication sur les réseaux sociaux d'un message vocal attribué à un druze et jugé blasphématoire envers l'islam.

L'OSDH, basée au Royaume-Uni mais qui dispose d'un solide réseau de sources en Syrie, a précisé que six combattants locaux de Jaramana et trois "assaillants" avaient été tués.

Plusieurs habitants de Jaramana joints au téléphone par l'AFP ont indiqué avoir entendu des échanges de tirs dans la nuit.

"Nous ne savons pas ce qui se passe, nous avons peur que Jaramana devienne un théâtre de guerre", a affirmé Riham Waqaf, une employée d'une ONG terrée à la maison avec son mari et ses enfants.

"On devait emmener ma mère à l'hôpital pour un traitement, mais nous n'avons pas pu" sortir, a ajouté cette femme de 33 ans.

Des combattants locaux se sont déployés dans les rues et aux entrées de la localité, demandant aux habitants de rester chez eux, a dit à l'AFP l'un de ces hommes armés, Jamal, qui n'a pas donné son nom de famille.

"Jaramana n'a rien connu de tel depuis des années". La ville est d'habitude bondée, mais elle est morte aujourd'hui, tout le monde est à la maison", a-t-il ajouté.

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants.

 "Respecter l'ordre public" 

Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité de ce qui s'est produit et de toute aggravation de la situation".

"La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué.

Il a dénoncé dans le même temps "toute atteinte au prophète Mahomet" et assuré que le message vocal était fabriqué "pour provoquer la sédition".

Le ministère de l'Intérieur a souligné mardi "l'importance de respecter l'ordre public et de ne pas se laisser entraîner dans des actions qui perturberaient l'ordre public".

Il a ajouté qu'il enquêtait sur le message "blasphématoire à l'égard du prophète" Mahomet pour identifier l'auteur et le traduire en justice.

Les druzes, une minorité ésotérique issue de l'islam, sont répartis notamment entre le Liban, la Syrie et Israël.

Dès la chute du pouvoir de Bachar al-Assad le 8 décembre en Syrie, après plus de 13 ans de guerre civile, Israël multiplié les gestes d'ouverture envers cette communauté.

Début mars, à la suite d'escarmouches à Jaramana, Israël avait menacé d'une intervention militaire si les nouvelles autorités syriennes s'en prenaient aux druzes.

Ces propos ont été immédiatement rejetés par les dignitaires druzes, qui ont réaffirmé leur attachement à l'unité de la Syrie. Leurs représentants sont en négociation avec le pouvoir central à Damas pour parvenir à un accord qui permettrait l'intégration de leurs groupes armés dans la future armée nationale.

Depuis que la coalition islamiste dirigée par Ahmad al-Chareh, qui a été proclamé président intérimaire, a pris le pouvoir, la communauté internationale multiplie les appels à protéger les minorités.

Début mars, les régions du littoral dans l'ouest de la Syrie ont été le théâtre de massacres qui ont fait plus de 1.700 tués civils, en grande majorité des alaouites, selon l'OSDH.


Gaza 2025: 15 journalistes tués, selon le Syndicat des journalistes palestiniens

 Les violences contre les journalistes interviennent dans le cadre d'une nouvelle campagne militaire israélienne à Gaza, à la suite de l'échec d'un accord de cessez-le-feu avec le Hamas. (AFP)
Les violences contre les journalistes interviennent dans le cadre d'une nouvelle campagne militaire israélienne à Gaza, à la suite de l'échec d'un accord de cessez-le-feu avec le Hamas. (AFP)
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  • Le dernier rapport du syndicat fait état d'une augmentation des arrestations, des menaces et du harcèlement des journalistes par les Israéliens
  • Le syndicat a également enregistré 49 menaces de mort proférées à l'encontre de journalistes

LONDRES: Au moins 15 professionnels des médias ont été tués à Gaza depuis le début de l'année 2025, selon un nouveau rapport publié par le Syndicat des journalistes palestiniens.

Le rapport, publié ce week-end par le comité des libertés du syndicat chargé de surveiller les violations commises par Israël à l’encontre des journalistes, souligne la persistance du ciblage direct des professionnels des médias.

Sept journalistes ont été tués en janvier et huit en mars, selon le rapport.

Par ailleurs, les familles de 17 journalistes ont été endeuillées, tandis que les habitations de 12 autres ont été détruites par des tirs de roquettes et d’obus. De plus, 11 personnes ont été blessées au cours de ces attaques.

Le rapport note que la violence à l'encontre des équipes de journalistes ne se limite pas aux attaques mortelles. Il fait état de l'arrestation de 15 journalistes, à leur domicile ou alors qu'ils étaient en mission. Certains ont été libérés quelques heures ou quelques jours plus tard, tandis que d'autres sont toujours en détention.

Le syndicat a également enregistré 49 menaces de mort proférées à l'encontre de journalistes, dont beaucoup ont été avertis d'évacuer les zones qu'ils couvraient.

Le rapport relève également une intensification du harcèlement judiciaire, avec plus d’une dizaine de cas où des journalistes – en majorité issus du quotidien Al-Quds, basé en Cisjordanie – ont été convoqués pour interrogatoire et se sont vu interdire de couvrir des événements aux abords de la mosquée Al-Aqsa et dans la vieille ville de Jérusalem.

En Cisjordanie occupée, environ 117 journalistes ont été victimes d'agressions physiques, de répression ou d'interdictions de reportage, en particulier à Jénine et à Jérusalem. La commission a également recensé 16 cas de confiscation ou de destruction de matériel de travail.

Les violences à l'encontre des journalistes surviennent dans le cadre d'une nouvelle campagne militaire israélienne à Gaza, à la suite de l'échec d'un accord de cessez-le-feu avec le Hamas. Les forces israéliennes ont intensifié leur offensive, coupant les approvisionnements vitaux des 2,3 millions d'habitants de Gaza, laissant l'enclave au bord de la famine.

Les actions d'Israël font désormais l'objet d'audiences à la Cour internationale de justice de La Haye, où Tel-Aviv est accusé de violer le droit international en restreignant l'aide humanitaire à Gaza.

Le bilan humanitaire est catastrophique.

Selon le ministère de la santé de Gaza, plus de 61 700 personnes ont été tuées à Gaza depuis qu'Israël a lancé son offensive le 7 octobre 2023. Plus de 14 000 autres sont portées disparues et présumées mortes, les civils constituant la grande majorité des victimes.

Le Comité pour la protection des journalistes, organisme de surveillance de la liberté de la presse basé à Washington, a également lancé un signal d’alarme face au nombre élevé de journalistes tués, indiquant qu’au moins 176 d’entre eux – en grande majorité des Palestiniens – ont perdu la vie depuis le début de l’offensive israélienne sur les territoires occupés.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com