«J'ai tué mon amour de mère»: les enfants albanais exilés par leurs parents

Hadije Uruci, mère de quatre enfants vivant actuellement chez des proches dans un pays de l'UE, en train de faire le ménage chez elle, le 13 octobre 2021 dans le village de Domen. (Photo, AFP)
Hadije Uruci, mère de quatre enfants vivant actuellement chez des proches dans un pays de l'UE, en train de faire le ménage chez elle, le 13 octobre 2021 dans le village de Domen. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 05 janvier 2022

«J'ai tué mon amour de mère»: les enfants albanais exilés par leurs parents

  • Peu de données existent sur ces parents albanais qui organisent l'exil de leurs enfants, souvent en Italie, en Allemagne ou en France
  • Il y a aussi ces jeunes qui prennent seuls l'initiative de fuir à l'étranger l'incertitude ou les difficultés familiales

TIRANA : Alma est au désespoir. Elle a poussé son fils adolescent à partir chercher en Europe une vie meilleure mais cette mère albanaise n'a plus de nouvelles depuis et est rongée par le remords.

"L'inquiétude m'écorche l'âme, c'est moi la coupable, c'est moi qui l'ait incité à partir. Il est où, il fait quoi?" demande cette veuve de 38 ans, les larmes coulant sur son visage.

Elle fait des ménages à la mairie de Tirana pour survivre mais n'a pas hésité à mettre toutes ses économies pour permettre à Arben, 16 ans, de partir en voiture début décembre vers l'Allemagne avec trois autres jeunes. 

"Il a du talent, il chante très bien, il pourrait suivre des études et avoir la vie que moi, je n'ai jamais eue", dit-elle sous couvert de l'anonymat.

Peu de données existent sur ces parents albanais qui organisent l'exil de leurs enfants, souvent en Italie, en Allemagne ou en France malgré les dangers et difficultés qui guettent les mineurs isolés dans des pays où ils ne parlent pas la langue. 

Il y a aussi ces jeunes qui prennent seuls l'initiative de fuir à l'étranger l'incertitude ou les difficultés familiales. 

Selon Eurostat, les Albanais figuraient en 2020 dans le top 20 des mineurs non accompagnés dans l'Union européenne, loin derrière, cependant, des jeunes afghans, syriens ou pakistanais. 

Mais selon les spécialistes, les arrivées d'Albanais dans l'UE se sont nettement ralenties avec le coronavirus. La police albanaise explique aussi à l'AFP avoir mis le turbo pour empêcher les départs des jeunes non munis des multiples documents nécessaires, parmi lesquels une autorisation parentale notariée. Ainsi, entre janvier et novembre cette année, 309 mineurs ont été empêchés de partir contre 239 sur la même période en 2020.

«La grande illusion»

Lorsque le pays pauvre des Balkans s'est ouvert au monde en 1990 après avoir été hermétiquement fermé par une dictature paranoïaque, l'Occident incarnait l'échappée vers une vie meilleure. Ces 30 dernières années, 1,7 million de personnes, soit 37% de la population, ont fui un pays où un jeune sur trois est au chômage, selon les statistiques officielles.

"Aujourd'hui encore pour de nombreux Albanais, l'Ouest est un paradis qui résoudra toutes les difficultés économiques et sociales de leur famille", observe Drita Teta, sociologue à Tirana. Mais "c'est la grande illusion".

A 16 ans, Florim - un prénom d'emprunt - l'a appris à ses dépens. Parti en France à la mi-octobre à l'insu de ses parents, il est rentré au bercail un mois après.

"Tout était loin du paradis, des films, des photos sur les réseaux sociaux, c'est bien loin de ce que j'avais pensé", dit l'adolescent, très ému, à sa mère, sa grand-mère et son père, venus l'accueillir à son retour à l'aéroport de Tirana.

Quand sa mère Manjola, 36 ans, a fini par apprendre où il se trouvait, elle s'est démenée pour le faire revenir, y compris signer les documents indispensables aux autorités françaises pour permettre le retour d'un mineur non accompagné. "Je me disais qu'il pouvait se retrouver en mauvaise compagnie, prendre un mauvais chemin", confie-t-elle à l'AFP.

Alain Bouchon, dont l'association a accueilli sur les 12 derniers mois dans l'est de la France environ 300 mineurs, dont 13 Albanais, confirme que leur vie n'est pas simple.

Proies

Ils sont hébergés dans des centres avec "des gens de diverses provenances" et cela peut constituer "un vrai choc pour un jeune Albanais qui arrive avec un fort attachement à son pays, à sa famille", explique-t-il à l'AFP.

Aussi, certains ne sont là que parce que leurs parents les y ont poussés, et refusent tout projet d'insertion. "Une partie rentre dans la petite délinquance et devient une proie facile pour les différents dispositifs mafieux".

A Domen, dans le nord montagneux de l'Albanie, Hadije Uruçi pleure en racontant avoir "tué (son) amour de mère" en laissant ses quatre enfants en Belgique. "Je l'ai tué pour mes enfants, c'est un grand sacrifice mais je n'avais pas le choix".

En 2015, elle avait fui Domen avec ses quatre enfants alors âgés de deux à neuf ans en raison, dit-elle, de menaces reçues pour avoir dénoncé l'ouverture d'une carrière de pierres. 

Après six mois dans un camp en Belgique, les parents se sont vus refuser l'asile et se sont résignés à laisser leurs enfants à des proches.

Les petits se sont "très bien intégrés, ils ont d'excellents résultats à l'école", dit leur mère. "L'Occident n'est pas le paradis mais c'est quand même un petit paradis par rapport aux problèmes en Albanie". 

Les parents espèrent qu'ils reviendront au pays avec de bons diplômes mais en attendant, ils ont le coeur brisé.


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.


Ouragan Melissa: près de 50 morts dans les Caraïbes, l'aide afflue

Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
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  • L’ouragan Melissa, le plus puissant à frapper la Jamaïque en près de 90 ans, a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque, laissant derrière lui des destructions massives et des centaines de milliers de sinistrés
  • L’aide internationale afflue vers les Caraïbes, avec des secours venus des États-Unis, du Venezuela, de la France et du Royaume-Uni, alors que les experts rappellent le rôle du réchauffement climatique dans l’intensification de ces catastrophes

CUBA: L'aide internationale afflue vendredi vers les Caraïbes dévastées par le passage de l'ouragan Melissa qui a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque.

Habitations en ruines, quartiers inondés et communications coupées... L'heure est à l'évaluation des dégâts causés par Melissa qui devrait désormais faiblir au dessus dans l'Atlantique nord après avoir passé les Bermudes.

Selon le Centre national américain des ouragans (NHC), les inondations devraient s'atténuer aux Bahamas, mais les crues pourraient demeurer à un niveau élevé à Cuba, en Jamaïque, en Haïti et en République dominicaine voisine.

Rendu plus destructeur par le réchauffement climatique, l'ouragan a été le plus puissant à toucher terre en 90 ans lorsqu'il a frappé la Jamaïque mardi en catégorie 5, la plus élevée sur l'échelle Saffir-Simpson, avec des vents d'environ 300 km/h.

"Le bilan confirmé est désormais de 19 morts" dont neuf à l'extrémité ouest de l'île, a déclaré jeudi soir la ministre jamaïcaine de l'Information Dana Morris Dixon, citée par les médias locaux.

De nombreux habitants n'ont toujours pas pu contacter leurs proches, ont expliqué les autorités. L'armée jamaïcaine s'emploie à dégager les routes bloquées, selon le gouvernement.

"Il y a eu une destruction immense, sans précédent, des infrastructures, des propriétés, des routes, des réseaux de communication et d'énergie", a déclaré depuis Kingston Dennis Zulu, coordinateur pour l'ONU dans plusieurs pays des Caraïbes. "Nos évaluations préliminaires montrent que le pays a été dévasté à des niveaux jamais vus auparavant".

- Melissa "nous a tués" -

A Haïti, pas directement touché par l'ouragan mais victime de fortes pluies, au moins 30 personnes, dont dix enfants, sont mortes, et 20 portées disparues, selon le dernier bilan des autorités communiqué jeudi. Vingt-trois de ces décès sont dus à la crue d'une rivière dans le sud-ouest du pays.

A Cuba, les communications téléphoniques et routières restent largement erratiques.

A El Cobre, dans le sud-ouest de l'île communiste, le son des marteaux résonne sous le soleil revenu: ceux dont le toit s'est envolé s'efforcent de réparer avec l'aide d'amis et de voisins, a constaté l'AFP.

Melissa "nous a tués, en nous laissant ainsi dévastés", a déclaré à l'AFP Felicia Correa, qui vit dans le sud de Cuba, près d'El Cobre. "Nous traversions déjà d'énormes difficultés. Maintenant, évidement, notre situation est bien pire."

Quelques 735.000 personnes avaient été évacuées, selon les autorités cubaines.

- Secouristes -

L'aide promise à l'internationale s'achemine dans la zone dévastée.

Les États-Unis ont mobilisé des équipes de secours en République dominicaine, en Jamaïque et aux Bahamas, selon un responsable du département d'État. Des équipes étaient également en route vers Haïti.

Le secrétaire d'État Marco Rubio a également indiqué que Cuba, ennemi idéologique, est inclus dans le dispositif américain.

Le Venezuela a envoyé 26.000 tonnes d'aide humanitaire à son allié cubain.

Le président du Salvador Nayib Bukele a annoncé sur X envoyer vendredi "trois avions d'aide humanitaire en Jamaïque" avec "plus de 300 secouristes" et "50 tonnes" de produits vitaux.

Kits de première nécessité, unités de traitement de l'eau: la France prévoit de livrer "dans les prochains jours" par voie maritime une cargaison d'aide humanitaire d'urgence en Jamaïque, selon le ministère des Affaires étrangères.

Le Royaume-Uni a débloqué une aide financière d'urgence de 2,5 millions de livres (2,8 millions d'euros) pour les pays touchés.

Le changement climatique causé par les activités humaines a rendu l'ouragan plus puissant et destructeur, selon une étude publiée mardi par des climatologues de l'Imperial College de Londres.

"Chaque désastre climatique est un rappel tragique de l'urgence de limiter chaque fraction de degré de réchauffement, principalement causé par la combustion de quantités excessives de charbon, de pétrole et de gaz", a déclaré Simon Stiell, secrétaire exécutif de l'ONU chargé du changement climatique, alors que la grande conférence climatique des Nations unies COP30 s'ouvre dans quelques jours au Brésil.

Avec le réchauffement de la surface des océans, la fréquence des cyclones (ou ouragans ou typhons), les plus intenses augmente, mais pas leur nombre total, selon le groupe d'experts du climat mandatés par l'ONU, le Giec.