À Londres, l'artiste Kaws lance la première exposition disponible sur Fortnite

L'artiste américain Kaws, de son vrai nom Brian Donnelly, lors d'un aperçu de la presse pour l'exposition  «Kaws: New fiction» à la Serpentine North Gallery de Londres, le 18 janvier 2022. (Photo, AFP)
L'artiste américain Kaws, de son vrai nom Brian Donnelly, lors d'un aperçu de la presse pour l'exposition  «Kaws: New fiction» à la Serpentine North Gallery de Londres, le 18 janvier 2022. (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 18 janvier 2022

À Londres, l'artiste Kaws lance la première exposition disponible sur Fortnite

L'artiste américain Kaws, de son vrai nom Brian Donnelly, lors d'un aperçu de la presse pour l'exposition  «Kaws: New fiction» à la Serpentine North Gallery de Londres, le 18 janvier 2022. (Photo, AFP)
  • Dès l'entrée, la sculpture du new-yorkais Kaws donne le ton: ici virtuel et réalité s'entremêlent tout au long de l'exposition «Kaws: New fiction»
  • «Pour nous, il s'agit de toucher des publics très différents», de créer «un dialogue transgénérationnel», ajoute le directeur artistique

LONDRES: C'est la première exposition sur Fortnite: l'artiste américain Kaws a installé mardi ses toiles pop et ses sculptures colorées à la Serpentine Gallery, mais aussi dans la réplique virtuelle du musée londonien au sein du jeu vidéo aux centaines de millions d'adeptes. 

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Pour l'artiste aussi, Brian Donnelly de son vrai nom, l'intérêt réside dans le fait de rendre ses œuvres plus accessibles. (Photo, AFP)

Au milieu des pelouses givrées de Hyde Park, dans le centre de Londres, des badauds visent avec leur téléphone le toit de la Serpentine Gallery. 

Prennent-ils en photo l'édifice aux briques rouges et colonnes blanches ?  Pas du tout ! Grâce à leur portable, ils font apparaitre en réalité augmentée une large sculpture d'un bonhomme bleu assis sur le toit, invisible à l’œil nu. 

Dès l'entrée, la sculpture du new-yorkais Kaws donne le ton: ici virtuel et réalité s'entremêlent tout au long de l'exposition « Kaws: New fiction ».  

Celle-ci est en effet composée de « trois couches », explique le directeur artistique Hans Ulrich Obrist. « Il y a l'exposition physique à la Serpentine Gallery avec des peintures et sculptures, il y a les éléments en réalité augmentée et il y a la Serpentine Gallery sur Fortnite », l'un des jeux vidéos les plus populaires au monde.   

Pour une semaine, les 400 millions d'adeptes du phénomène d'Epic Games ont accès à une réplique totalement fidèle du musée dans le jeu, s'y balader avec leur avatar et contempler les œuvres.   

Epic Game a déjà collaboré de façon similaire avec des chanteurs à la renommée internationale venus donner des concerts dans le jeu. « Mais c'est la première fois que Fortnite collabore avec les arts visuels, avec une galerie publique », se félicite M. Obrist.  

Il juge « très différent » de voir une exposition dans un jeu ou physiquement, mais estime ces expériences « complémentaires »: de nombreux visiteurs ne sont pas familiers avec l'univers du jeu vidéo et pourraient par ce biais s'y intéresser, et vice-versa pour les gamers.  

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Pour une semaine, les 400 millions d'adeptes du phénomène d'Epic Games ont accès à une réplique totalement fidèle du musée dans le jeu, s'y balader avec leur avatar et contempler les œuvres. (Photo, AFP)

« Zone de confort »  

« Pour nous, il s'agit de toucher des publics très différents », de créer « un dialogue transgénérationnel », ajoute le directeur artistique.  

En effet, « l'âge moyen des joueurs de Fortnite », très populaire chez les adolescents, « est beaucoup plus jeune que celui d'un visiteur moyen d'un musée », souligne Hans Ulrich Obrist, qui « espère qu'une toute nouvelle génération viendra ainsi à la galerie ».  

D'autant plus que ce projet va « toucher un public qui est probablement dix fois plus large que la Biennale de Venise », affirme le conservateur de l'exposition Daniel Birnbaum. 

Pour l'artiste aussi, Brian Donnelly de son vrai nom, l'intérêt réside dans le fait de rendre ses œuvres plus accessibles. « Ce qui m'intéresse, c'est de savoir que mon travail peut être vu par un enfant en Inde comme à Londres », explique le peintre et sculpteur de 47 ans. « c'est fascinant ». 

« Une si grande communauté va soudainement pouvoir aller au musée, voir ces peintures et sculptures », se félicite l'ex-graffeur devenu plasticien, « Je pense que pour certains enfants, ça sera la première fois qu'ils se sentiront à l'aise, dans leur zone de confort, à l'intérieur d'une exposition ». 

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Ses personnages à tête de mort stylisée, qui ont déjà fait le tour du monde à coup d'installations géantes ou produits dérivés, seront aptes à séduire la jeune audience de Fortnite par leur côté pop, accessible et coloré. (Photo, AFP)

« Pas de fusillade » 

Ses personnages à tête de mort stylisée, qui ont déjà fait le tour du monde à coup d'installations géantes ou produits dérivés, seront aptes à séduire la jeune audience de Fortnite par leur côté pop, accessible et coloré.  

Kaws, dont c'est la deuxième collaboration avec Fortnite, explique que ses œuvres seront exposées dans le « creative hub », un mode spécifique du jeu bien loin des parties où les joueurs s'affrontent pour être le dernier survivant.  

« Il n'y aura pas de fusillade dans l'exposition », plaisante-t-il, vantant une communauté « différente de ce qu'on pense ».   

Quant à savoir si les joueurs adeptes d'adrénaline vont vraiment s'arrêter contempler ses œuvres dans le jeu, « c'est difficile à dire », concède l'artiste, sans être défaitiste: « Si vous amenez un enfant de onze ans dans un musée traditionnel, vous ne savez pas s'il va regarder les œuvres. Ce n'est pas différent ». 

 


Loin de Cannes, Bollywood récompense ses artistes à Abou Dhabi

L'acteur de Bollywood Ritesh Deshmukh et sa femme l'actrice Genelia Deshmukh arrivent pour la 23e édition des International Indian Film Academy (IIFA) Awards à Abu Dhabi (Photo, AFP).
L'acteur de Bollywood Ritesh Deshmukh et sa femme l'actrice Genelia Deshmukh arrivent pour la 23e édition des International Indian Film Academy (IIFA) Awards à Abu Dhabi (Photo, AFP).
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  • Comme chaque année, la cérémonie a été ponctuée de plusieurs tableaux spectaculaires
  • Mais ce succès tranche avec la crise que traverse Bollywood depuis la pandémie de Covid-19

ABOU DHABI: Au moment du clap de fin du 76e Festival de Cannes, la cérémonie des Oscars indiens s'est tenue samedi à Abou Dhabi pour récompenser les meilleurs films de Bollywood, mastodonte du cinéma indien, le plus prolifique au monde.

La 23e édition du Indian Film Academy and Awards (IIFA), l'une des cérémonies les plus prestigieuses de Bollywood, se tient généralement à l'étranger et depuis 2022 dans la capitale des Emirats arabes unis.

La vedette Salman Khan a côtoyé d'autres stars comme Hrithik Roshan, Nora Fatehi, Abhishek Bachchan, Vicky Kaushal, Sara Ali Khan, Kriti Sanon et Jacqueline Fernandez sur le tapis vert, clin d'oeil écologique de Bollywood.

"L'IIFA représente une ouverture sur la scène mondiale", s'est réjouit l'actrice Jacqueline Fernandez, l'une des plus célèbres à Bollywood.

"C'est important pour moi d'être ici pour représenter la communauté (de Bollywood)", a abondé l'acteur indien de 63 ans Boman Irani.

En tête du palmarès figure le film d'aventure fantastique "Brahmastra : Part One - Shiva" mais le prix du meilleur film a été décerné au policier Drishyam de Nishikant Kamat.

Comme chaque année, la cérémonie a été ponctuée de plusieurs tableaux spectaculaires avec des dizaines de danseurs sur scène, dont l'une des plus célèbres, la canado-marocaine Nora Fatehi, star montante de Bollywood qui s'est dite "honorée" de participer à l'événement.

L'Inde produit en moyenne 1.600 films par an, soit plus que n'importe quel autre pays au monde, une industrie largement dominée par le cinéma de Bollywood en langue hindi.

Le géant asiatique aux plus de 1,4 milliard d'habitants exporte ses productions à travers le monde, notamment en Asie, en Afrique, au Moyen-Orient, mais aussi en Europe et en Amérique du Nord.

Le film "Pathaan", avec la superstar Shah Rukh Khan, a battu tous les records au box-office indien à sa sortie en janvier, avec environ 30 millions de dollars de recettes au cours de ses cinq premiers jours à l'affiche.

«Ere post-Covid»

Mais ce succès tranche avec la crise que traverse Bollywood depuis la pandémie de Covid-19, le marché indien n'échappant pas à la tendance de baisse de fréquentation des salles obscures à travers le monde.

Avec environ la moitié de la population indienne ayant accès à internet, les plateformes de streaming ont porté un coup dur à Bollywood, la crise s'étant encore accentuée avec les périodes de confinement.

Pour le spécialiste des médias Karan Taurani, le public a de plus en plus accès à des contenus divers et devient plus exigeant, refusant de se contenter d'oeuvres sans originalité au scénario léger, souvent des "remakes", comme c'était le cas par le passé.

"Dans l'ère post-Covid, on a vu un grand changement : même si un film a une grande star à l'affiche, mais que le scénario est mauvais, le public va s'en détourner", explique cet analyste à Elara Capital, une société d'investissement.

Et des films indiens non produits à Bollywood connaissent ainsi de plus en plus de succès, souligne-t-il, comme "RRR" qui "s'est distingué" car le marché attend plus que les "deux ou trois stars" qui dominent les affiches.

Produit par l'industrie cinématographique en langue telugu - appelée Tollywood - du sud de l'Inde, "RRR" a connu un succès jusqu'à Hollywood, remportant, en début d'année, un Golden Globe et un Oscar de la meilleure bande originale.

Bollywood subit aussi les assauts des radicaux hindous, de plus en plus actifs sous le pouvoir du Premier ministre nationaliste Narendra Modi, appelant au boycott de films mettant en scène des acteurs de confession musulmane.


Cannes: Merve Dizdar, première Turque prix d'interprétation féminine

L'actrice turque Merve Dizdar (Photo, AFP).
L'actrice turque Merve Dizdar (Photo, AFP).
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  • Deniz Celiloglu y incarne Samet, un enseignant venu de la ville, oscillant entre désespoir et misanthropie
  • Le film dépeint également le difficile combat quotidien que doivent mener les habitants de cette région

CANNES: A 36 ans, Merve Dizdar est la première actrice turque à décrocher le prix d'interprétation féminine à Cannes pour son rôle de Nuray dans "Les herbes sèches" de Nuri Bilge Ceylan.

Palme d'or sur la Croisette en 2014, le réalisateur turc lui a confié le rôle d'une militante blessée dans un attentat et portant une prothèse, qui tente de se reconstruire.

Deniz Celiloglu y incarne Samet, un enseignant venu de la ville, oscillant entre désespoir et misanthropie et plongé dans cette région rurale d'Anatolie, minée par le renoncement.

À travers l'histoire de Samet, qui pense en être à la fin de son service obligatoire dans cette région et qui espère depuis longtemps une mutation prochaine à Istanbul, l'auteur aborde les répercussions psychologiques de l'éloignement ressenti, le sentiment d'isolement, d'aliénation et d'exclusion.

Le film dépeint également le difficile combat quotidien que doivent mener les habitants de cette région, ainsi que les dynamiques de la trame géographique, ethnique ou sociale qui les entoure.

Merve Dizdar, qui a suivi des études d'art dramatique et débuté au théâtre, a tourné dans son premier film, "Bir Ses Böler Geceyi" ("A Noise in the Night"), en 2011 avant de poursuivre dans des séries télévisées.

En 2020, elle est très remarquée dans la comédie "War of the Eltis", l'un des plus gros succès en salles en Turquie.

Avant elle, deux acteurs turcs avaient reçu en 2003 le prix d'interprétation masculine, Muzaffer Özdemir et Mehmet Emin Toprak, pour leur rôle dans "Uzak" du même Nuri Bilge Ceylan.

Le personnage qu'elle joue dans "Les herbes sèches" "mène un combat pour son existence et a surmonté beaucoup de difficultés", a réagi Merve Dizdar après l'annonce de son prix.

Tourner avec Ceylan, "pour moi, c'était une sublime expérience. Mon personnage n'était pas très détaillé dans le scénario, il fallait l'interpréter", avait-elle expliqué devant la presse après la projection du film lors de la compétition.

Travailler avec Nuri Bilge Ceylan "est quelque chose de très valorisant", avait ajouté l'actrice, qui n'a découvert le long-métrage terminé que la veille de sa présentation.

"On était comme dans un laboratoire au début du tournage, sur les sentiments, les personnages. Ce réalisateur est exceptionnel. Tourner, c'était comme une danse où les sentiments se mélangent".


Justine Triet remporte la Palme et croise le fer avec le gouvernement français

La réalisatrice Justine Triet, lauréate de la Palme d'or pour le film "Anatomie d'une chute", pose lors du photocall après la cérémonie de clôture du 76e Festival de Cannes à Cannes, France, le 27 mai 2023. (Photo, Reuters)
La réalisatrice Justine Triet, lauréate de la Palme d'or pour le film "Anatomie d'une chute", pose lors du photocall après la cérémonie de clôture du 76e Festival de Cannes à Cannes, France, le 27 mai 2023. (Photo, Reuters)
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  • La réalisatrice française Justine Triet a remporté le premier prix du festival pour le drame tendu et glaçant « Anatomie d'une chute», porté par la puissante performance de l'actrice allemande Sandra Hueller
  • Dans son discours de remerciement, Justine Triet a critiqué le gouvernement du président Emmanuel Macron pour sa « répression» des manifestations en faveur des retraites et ses politiques culturelles

CANNES: Justine Triet a remporté samedi la Palme d'or pour "Anatomie d'une chute", la troisième jamais décernée à une réalisatrice, et a profité de la tribune pour lancer une attaque contre la politique du gouvernement français sur la culture et les retraites.

La cinéaste de 44 ans succède à Jane Campion ("La leçon de piano", 1993) et Julia Ducournau ("Titane", 2021), confirmant le lent mouvement vers l'égalité dans une industrie du cinéma historiquement dominée par les hommes.

Le Festival s'était ouvert il y a douze jours sous la menace d'une coupure de courant de la CGT mais c'est finalement par la lauréate que le mouvement social en France s'est invité à Cannes.

En recevant son prix des mains de Jane Fonda,la cinéaste a vivement dénoncé la manière dont le gouvernement français avait "nié de façon choquante" la protestation contre la réforme des retraites.

"Ce schéma de pouvoir dominateur, de plus en plus décomplexé, éclate dans plusieurs domaines", a-t-elle ajouté, estimant que le pouvoir cherchait aussi à "casser l'exception culturelle sans laquelle (elle) ne serai(t) pas là aujourd'hui".

Réplique immédiate de la ministre française de la Culture, Rima Abdul Malak. Elle s'est dite "estomaquée par son discours si injuste": "Ce film n'aurait pu voir le jour sans notre modèle français de financement du cinéma qui permet une diversité unique au monde. Ne l'oublions pas", a-t-elle écrit sur les réseaux sociaux.

En conférence de presse, Justine Triet persiste et signe, critiquant une "tendance qui va vers la rentabilité" des aides publiques au cinéma, et pointant le danger que ces aides aillent aux "plus gros films" au détriment du cinéma de création indépendant.

L'exception culturelle "est née sur l'idée de non-rentabilité du cinéma. Ca nous est envié dans le monde entier et ce n'est pas pour rien", a-t-elle poursuivi en réponse à une question de l'AFP.

Le cinéma français à l'honneur

Sur le plan artistique, ce nouveau couronnement d'une jeune réalisatrice française témoigne du succès des réalisations tricolores dans les festivals internationaux, avec le Lion d'or remis à Audrey Diwan en 2021 à Venise pour "L'événement" et l'Ours d'or en février à Nicolas Philibert pour "Sur l'Adamant".

Le jury, présidé par Ruben Östlund et où siégeait également Julia Ducournau, a choisi un film (dans les salles françaises le 23 août) qui raconte le procès d'une veuve (Sandra Hüller) accusée aux assises d'avoir tué son mari. L'occasion de disséquer les dynamiques de pouvoir au sein d'un couple d'artistes aisés et d'exposer les préjugés sociaux auxquels se heurtent les femmes indépendantes.

Il a également envoyé un message contemporain sur l'effroyable banalité du mal, en donnant le Grand Prix à Jonathan Glazer pour "The Zone of Interest", sur la vie quotidienne du commandant nazi d'Auschwitz, une oeuvre radicale.

L'actrice turque Merve Dizdar a dédié son prix d'interprétation dans "Les herbes sèches" de Nuri Bilge Ceylan "à toutes les femmes qui mènent une lutte pour surmonter les difficultés existantes dans ce monde". Le Japonais Koji Yakusho a reçu le prix du meilleur acteur pour "Perfect Days" de Wim Wenders.

Ce palmarès met un terme à la 76e édition, présidée pour la première fois par Iris Knobloch, ancienne de Warner.

Elle fut marquée par des polémiques sur le come-back de Johnny Depp, après ses procès pour diffamation autour d'accusations de violences conjugales, par une présence en force du cinéma du continent africain et des réalisatrices, au-delà de Justine Triet.

Cette édition a aussi été une nouvelle démonstration de la lune de miel entre Cannes et Hollywood: en 12 jours, le tapis rouge aura accueilli Martin Scorsese, Leonardo DiCaprio et Robert De Niro (pour "Killers of the Flower Moon") ou encore Harrison Ford, venu faire ses adieux à "Indiana Jones". Quentin Tarantino et Roger Corman, 97 ans, l'un des doyens du cinéma américain, étaient également sur scène samedi soir.

Quant au long-métrage de clôture, le Festival renoue avec la tradition de programmer la dernière création des studios Pixar, rachetés par Disney: le film d'animation "Élémentaire", qui sortira en juin, a été présenté en avant-première mondiale après la cérémonie.