L'Assemblée nationale dénonce le «génocide» des Ouïghours par la Chine

La proposition stipule que l'Assemblée « reconnaît officiellement les violences perpétrées par les autorités de la République populaire de Chine à l'encontre des Ouïghours comme constitutives de crimes contre l'humanité et d'un génocide », et les «condamne». (Photo d'illustration, AFP)
La proposition stipule que l'Assemblée « reconnaît officiellement les violences perpétrées par les autorités de la République populaire de Chine à l'encontre des Ouïghours comme constitutives de crimes contre l'humanité et d'un génocide », et les «condamne». (Photo d'illustration, AFP)
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Publié le Jeudi 20 janvier 2022

L'Assemblée nationale dénonce le «génocide» des Ouïghours par la Chine

  • Sans portée contraignante, le texte a reçu le soutien des députés du parti présidentiel LREM et a été adopté à la quasi-unanimité (169 votes pour, un contre et cinq abstentions)
  • Il a été défendu à la tribune par le Premier secrétaire du PS Olivier Faure dans le cadre d'une journée réservée au groupe socialiste

PARIS : A quelques jours de l'ouverture des JO d'hiver de Pékin, l'Assemblée nationale a adopté jeudi une résolution dénonçant le "génocide" des Ouïghours par la Chine, et demandant au gouvernement d'en faire de même.

Sans portée contraignante, le texte a reçu le soutien des députés du parti présidentiel LREM et a été adopté à la quasi-unanimité (169 votes pour, un contre et cinq abstentions).

Il a été défendu à la tribune par le Premier secrétaire du PS Olivier Faure dans le cadre d'une journée réservée au groupe socialiste. 

La proposition stipule que l'Assemblée "reconnaît officiellement les violences perpétrées par les autorités de la République populaire de Chine à l'encontre des Ouïghours comme constitutives de crimes contre l'humanité et d'un génocide", et les "condamne". 

Elle "invite le gouvernement français" à faire de même et à adopter "les mesures nécessaires auprès de la communauté internationale et dans sa politique étrangère à l’égard de la République populaire de Chine" pour faire cesser cette situation.

Au nom du gouvernement, le ministre délégué au Commerce extérieur Franck Riester a évoqué des "violences systématiques" et des "témoignages accablants", mais fait valoir que la qualification formelle de génocide relevait d'instances internationales, pas du gouvernement.

Il a assuré que le sort de cette communauté était "évoqué au plus haut niveau" lors des entretiens avec les officiels chinois.

Dolkun Isa, président du Congrès mondial ouïghour (CMO), a salué "une étape indispensable vers une reconnaissance internationale plus large du génocide ouïghour".

A la tribune de l'Assemblée, M. Faure a dénoncé "la machine implacable qui vise à l'éradication culturelle et biologique d'un peuple", et aussi fustigé les grandes entreprises et marques occidentales "qui continuent à utiliser le travail forcé" de cette communauté turcophone musulmane de la province chinoise du Xinjiang (nord-ouest).

Stérilisations et avortements forcés, viols, tortures, enfants arrachés à leurs parents, prélèvement d'organes, camps d'internement et de rééducation, exécutions, destruction de mosquées et du patrimoine culturel, surveillance de masse... le texte fait un long énoncé des crimes reprochés au régime chinois.

La résolution s'inquiète aussi du sort réservé à d'autres "minorités turciques" (Kazakhs, Kirghizes, Ouzbeks et Tatars) par Pékin.

Alain David (PS) a fait applaudir par les députés des réfugiés ouïghours présents dans les tribunes.

"Nous ne pouvons pas dire que nous ne savions pas", a renchéri Constance Le Grip (LR).

«Logique concentrationnaire»

Clémentine Autain (LFI) a dénoncé la "logique concentrationnaire à l'échelle industrielle" mise en oeuvre par Pékin, mais les députés de son groupe se sont abstenus au motif que le texte ne proposait pas "d'actes forts". Le communiste Jean-Paul Lecoq s'est lui aussi abstenu.

L'unique vote contre est venu du député LREM de Paris Buon Tan, très engagé dans les relations franco-asiatiques et notamment chinoises.

Des organisations de défense des droits de l'Homme accusent la Chine d'avoir notamment enfermé plus d'un million de musulmans dans des camps de rééducation politique. Les Ouïghours sont particulièrement visés après une série d'attentats attribués à des islamistes et des séparatistes. 

Pékin affirme que les camps sont des centres de formation professionnelle destinés à les éloigner de la radicalisation.

Un argument qui constitue une "lugubre analogie avec la propagande nazie à Dachau", l'un des principaux camps de concentration de l'Allemagne hitlérienne, s'est insurgé Vincent Ledoux (groupe Agir, majorité).

Le patron des députés LREM Christophe Castaner a dénoncé le sort de "millions" de personnes "réduites à une condition d'esclavagisme".

La résolution relève que plusieurs États ont déjà "officialisé leur reconnaissance du génocide des Ouïghours" par Chine.

Le gouvernement américain, les parlements britannique, néerlandais et canadien, ont condamné des "crimes contre l’humanité" ainsi qu’un "génocide", et des procédures identiques sont engagées dans d'autres pays occidentaux, souligne le texte.

Amnesty International a appelé mercredi la communauté internationale à ne pas laisser la Chine utiliser ses Jeux d'hiver (4-20 fév) pour détourner l'attention de ses violations des droits humains, au Xinjiang.

Les Etats-Unis, l'Australie, le Canada et la Grande-Bretagne ont annoncé qu'ils n'enverront pas de représentants officiels à Pékin, évoquant notamment "le génocide en cours et des crimes contre l'humanité" dans cette province.

Le "génocide" des ouïghours dénoncé dans plusieurs Parlements

Avant l'Assemblée nationale française, les députés de plusieurs pays occidentaux ont dénoncé le "génocide" des Ouïghours par la Chine. 

Des organisations de défense des droits de l'Homme accusent la Chine d'avoir notamment enfermé plus d'un million de musulmans dans des camps de rééducation politique. Les Ouïghours sont particulièrement visés après une série d'attentats attribués à des islamistes et des séparatistes. 

Pékin affirme que les camps sont en fait des centres de formation professionnelle destinés à les éloigner de la radicalisation.

Voici un tour d'horizon des dénonciations de "génocide" envers les Ouïghours dans d'autres pays occidentaux:

Belgique
Les députés belges votent le 15 juin 2021 une résolution avertissant d'un "risque sérieux de génocide" contre la minorité musulmane des Ouïghours en Chine. Ce vote, intervenu en commission parlementaire, est confirmé en séance plénière à la Chambre des représentants le 8 juillet.

Royaume-Uni
La Chambre des communes, chambre basse du Parlement britannique, adopte le 22 avril 2021 une motion non contraignante qualifiant de "génocide" le traitement infligé par Pékin aux Ouïghours et à d'autres minorités dans le Xinjiang.

Pays-Bas
Premiers dans l'Union européenne, les députés néerlandais votent le 25 février 2021 une motion non contraignante, reconnaissant qu'un "génocide est en cours en Chine contre la minorité ouïghoure".

Canada
Les députés canadiens adoptent le 22 février 2021 une motion non-contraignante assimilant le traitement réservé par la Chine à sa minorité ouïghoure à "un génocide" et appelant le gouvernement de Justin Trudeau à en faire de même. 

Etats-Unis
Les Etats-Unis considèrent que la Chine "commet un génocide" contre les musulmans ouïghours dans la région du Xinjiang, déclare le 19 janvier 2021 le secrétaire d'Etat américain sortant Mike Pompeo, à la veille de l'arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche. "C'est aussi mon opinion", répond le même jour Antony Blinken, futur secrétaire d'Etat de Joe Biden, lors d'une audition parlementaire à un sénateur qui lui demandait s'il était d'accord pour évoquer un "génocide".

Joe Biden avait lui estimé avant son élection en novembre 2020, selon un communiqué de son équipe de campagne publié en août, que la répression contre cette minorité musulmane constituait un "génocide perpétré par le gouvernement autoritaire de la Chine".

Par ailleurs, le Parlement européen a massivement adopté le 17 décembre 2020 une résolution condamnant le système chinois de travail forcé mis en place contre les minorités ouïghoure, kazakhe et kirghize, victimes de violations des droits humains "assimilables à des crimes contre l'humanité".


Macron a reçu Larcher, Braun-Pivet et Lecornu en pleine recherche de compromis sur le budget

Emmanuel Macron a reçu jeudi les présidents du Sénat et de l'Assemblée nationale, Gérard Larcher et Yaël Braun-Pivet, en présence de Sébastien Lecornu, au moment où le gouvernement pousse les deux chambres à trouver un compromis sur le budget de l'Etat.
Emmanuel Macron a reçu jeudi les présidents du Sénat et de l'Assemblée nationale, Gérard Larcher et Yaël Braun-Pivet, en présence de Sébastien Lecornu, au moment où le gouvernement pousse les deux chambres à trouver un compromis sur le budget de l'Etat.
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  • Sébastien Lecornu a dit mercredi en Conseil des ministres que son "objectif" était "de doter la France d'un budget" de l'Etat "d'ici au 31 décembre", jugeant que c'était "possible" si la droite sénatoriale faisait un pas vers la gauche
  • "Aujourd'hui, vous avez une forme de décalage horaire entre l'Assemblée nationale et le Sénat", avait-elle estimé, en reprenant une expression du Premier ministre

PARIS: Emmanuel Macron a reçu jeudi les présidents du Sénat et de l'Assemblée nationale, Gérard Larcher et Yaël Braun-Pivet, en présence de Sébastien Lecornu, au moment où le gouvernement pousse les deux chambres à trouver un compromis sur le budget de l'Etat.

Le chef de l'Etat a raccompagné les deux présidents sur le perron de l'Elysée vers 15H00, et s'est attardé pour poursuivre la discussion, notamment avec Yaël Braun-Pivet et le Premier ministre, ont constaté des journalistes de l'AFP.

Le chef du gouvernement est ensuite resté encore une vingtaine de minutes au palais présidentiel avec Emmanuel Macron.

Sébastien Lecornu a dit mercredi en Conseil des ministres que son "objectif" était "de doter la France d'un budget" de l'Etat "d'ici au 31 décembre", jugeant que c'était "possible" si la droite sénatoriale faisait un pas vers la gauche, avait rapporté la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon.

"Aujourd'hui, vous avez une forme de décalage horaire entre l'Assemblée nationale et le Sénat", avait-elle estimé, en reprenant une expression du Premier ministre.

Maud Bregon avait de son côté affirmé que la balle était "dans le camp du Parlement et significativement de la droite sénatoriale qui occupe une grande place dans la commission mixte paritaire" qui réunira la semaine prochaine sept sénateurs et sept députés pour trouver un compromis sur le projet de loi de finances.

Sur le budget de l'Etat, l'Assemblée avait en effet rejeté à la quasi-unanimité le volet recettes en première lecture, envoyant ainsi la copie initiale du gouvernement au Sénat.

"Nous avons confiance dans le président du Sénat, dans les présidents des différents groupes qui composent le Sénat, pour être encore une fois force de compromis", avait encore dit Maud Bregeon mercredi.

Or, la droite sénatoriale semble peu disposée à bouger vers le Parti socialiste qui a obtenu très peu de concessions dans ce texte, contrairement au budget de la Sécurité sociale où figure la suspension de la réforme des retraites.


Aéroports parisiens: des milliards d'euros pour répondre à la hausse prévue du trafic

Un passager consulte le tableau des départs au terminal 2 de l'aéroport international Roissy Charles de Gaulle (CDG), dans la banlieue parisienne, le 12 mai 2025. (AFP)
Un passager consulte le tableau des départs au terminal 2 de l'aéroport international Roissy Charles de Gaulle (CDG), dans la banlieue parisienne, le 12 mai 2025. (AFP)
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  • ADP prévoit un plan d’investissements de 8,4 milliards d’euros entre 2027 et 2034 pour moderniser et agrandir les aéroports parisiens
  • Malgré une hausse envisagée des redevances pour les compagnies, le projet vise à renforcer la compétitivité de CDG et Orly, améliorer la fluidité des parcours passagers et développer les connexions ferroviaires

PARIS: Démolition de terminaux, construction ou transformation d'autres bâtiments, gare agrandie: les aéroports parisiens pourraient bientôt entrer dans une période de grands travaux pour s'adapter à la croissance prévue du trafic aérien, selon un plan à 8,4 milliards d'euros divulgué mercredi.

Le gestionnaire de ces installations, le Groupe ADP (ex-Aéroports de Paris) défend des "investissements historiques", nécessaires afin de préserver la compétitivité de Paris-Charles-de-Gaulle (CDG) et Orly face à la concurrence étrangère et la qualité des services rendus aux compagnies aériennes et à leurs clients.

La proposition de contrat de régulation économique (CRE) pour la période 2027-2034 présentée par ADP est un document qui fixe la trajectoire budgétaire des aéroports pour le fonctionnement des activités aéronautiques, et donc le niveau des redevances acquittées par les compagnies.

Si le projet aboutit, celles-ci pourraient tiquer face à l'augmentation proposée des tarifs: en moyenne, 2,6 points de plus que l'inflation chaque année sur huit ans. ADP assure qu'ils resteront dans la fourchette "basse" de ceux des aéroports européens comparables.

Le contrat, qui de par la loi, doit être "tout juste rentable", devra être agréé par l'Autorité de régulation des transports (ART). Il ne concerne pas la partie non régulée des aéroports, par exemple l'exploitation des commerces ou des parkings, ou encore les florissantes activités d'ADP à l'international.

En mai 2020, en plein Covid-19 qui avait torpillé le transport aérien mondial, ADP avait demandé la résiliation du CRE de l'époque, constatant l'impossibilité d'atteindre ses engagements.

Presque six ans après, les installations aéroportuaires franciliennes n'ont toujours pas retrouvé leur fréquentation prépandémie, évoluant sur les dix premiers mois de 2025 à 98,5% du nombre de voyageurs de la même période de 2019. Une tendance lestée par CDG, premier aéroport français.

- Le Terminal 2G démoli -

Passée la crise sanitaire, la trajectoire de croissance des aéroports parisiens s'est aplatie, ADP l'estimant désormais à 1,6% de passagers en plus par an d'ici à 2034 contre 2,3% entre 2005 et 2019, la conséquence aussi d'une montée en puissance de plateformes de correspondance concurrentes, en Turquie ou dans le Golfe.

Mais selon leur gestionnaire, les installations, qui ont vu passer 103,4 millions de voyageurs au total en 2024, doivent tout de même "continuer de se développer pour accompagner" cette progression. Le CRE mentionne une augmentation de capacité totale de 18 millions de passagers pour CDG et Orly.

ADP assure avoir entendu les remontées des riverains inquiets des nuisances et parle d'un projet industriel "sobre et progressif", avec des "aménagements proposés (qui) s'inscrivent en grande partie dans l'existant", loin de la philosophie du projet controversé du Terminal 4 à CDG, abandonné en 2021.

Concrètement, l'un des premiers chantiers serait la transformation du Terminal 1, bâtiment circulaire de béton brut inauguré en 1974, et où de nouvelles zones de passage de la frontière seraient aménagées. Le 2E, point de départ de nombreux longs-courriers d'Air France, verrait également une fluidification des parcours des passagers.

A plus long terme, ADP veut notamment créer une "nouvelle salle d'embarquement international de 28.000 m2" dans l'est de CDG, proche de l'actuel Terminal 2G qui sera à terme détruit, tout comme le 3, au nord-ouest.

Avec l'évolution des comportements des voyageurs, de plus en plus nombreux à opter pour le train en France et en Europe, ADP estime que sa clientèle internationale va représenter 56% du total en 2034 contre 51% en 2019, et veut mettre l'accent sur la fluidité, sans que les passagers aient à passer une nouvelle fois les postes de police et d'inspection.

La solution viendrait d'un "nouveau train de correspondance" qui permettrait de relier l'ensemble des salles d'embarquement de la plateforme. Toujours côté ferroviaire, ADP veut créer "un nouveau hall intermodal" à la gare SNCF de CDG2, amenée à voir sa fréquentation doubler à 30 millions de passagers en 2030.

Lundi, ADP avait déjà annoncé un "choc de simplification" à venir dans les noms de ses terminaux de CDG, rebaptisés d'un seul chiffre, de 1 à 7, au lieu de la nomenclature actuelle de chiffres et de lettres qui désorientait certains passagers.

Cette évolution aura lieu en mars 2027, échéance prévue de l'inauguration de la nouvelle ligne "CDG Express" qui va permettre de relier l'aéroport au centre de Paris en 20 minutes sans arrêt.


L’eau et l’environnement au cœur d’un partenariat renouvelé entre la France et les pays arabes

Placée cette année sous le thème « L’eau, l’environnement : au cœur des besoins, des crises et des opportunités dans le monde arabe », cette édition a confirmé la place centrale qu’occupe désormais la transition écologique dans les relations économiques entre la France et le monde arabe. (AFP)
Placée cette année sous le thème « L’eau, l’environnement : au cœur des besoins, des crises et des opportunités dans le monde arabe », cette édition a confirmé la place centrale qu’occupe désormais la transition écologique dans les relations économiques entre la France et le monde arabe. (AFP)
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  • Inauguré par le président de la CCFA, Vincent Reina, dont le retour a été chaleureusement salué par les participants, le sommet a donné lieu à trois grandes tables rondes
  • L’un des moments les plus marquants du sommet a été l’intervention de Wissam Fattouh, secrétaire général de l’Union des banques arabes

PARIS: Le sixième Sommet économique France–Pays arabes, organisé par la Chambre de commerce franco-arabe, s’est ouvert à Paris pour deux journées de débats, de rencontres et d’échanges stratégiques.
Placée cette année sous le thème « L’eau, l’environnement : au cœur des besoins, des crises et des opportunités dans le monde arabe », cette édition a confirmé la place centrale qu’occupe désormais la transition écologique dans les relations économiques entre la France et le monde arabe.

Inauguré par le président de la CCFA, Vincent Reina, dont le retour a été chaleureusement salué par les participants, le sommet a donné lieu à trois grandes tables rondes réunissant responsables gouvernementaux, diplomates, experts économiques, dirigeants d’entreprises et représentants du secteur financier arabe.

Doyen du corps diplomatique arabe en France, l’ambassadeur de Djibouti, Ayeid Yahya, a dressé un panorama lucide des tensions géopolitiques qui traversent encore la région : guerre au Soudan, trêve fragile au Yémen, bombardements persistants au Liban, effets prolongés de la crise syrienne, sans oublier la question centrale du conflit israélo-palestinien, qui continue de mobiliser les efforts diplomatiques et humanitaires.

Pourtant, malgré « un monde arabe ralenti par les conflits », l’ambassadeur a insisté sur la résilience et la capacité d’action collective des pays arabes. Il a salué les progrès diplomatiques des années 2024 et 2025, notamment la reconnaissance accrue de l’État palestinien et le rôle déterminant joué par la France, l’Arabie saoudite, l’Égypte et la Jordanie dans les initiatives de médiation.

L'émergence d’une vision partagée

Son discours a également marqué le retour de la Syrie dans ce cadre multilatéral, un signal politique fort, selon lui, pour l’avenir du partenariat économique.

L’un des moments les plus marquants du sommet a été l’intervention de Wissam Fattouh, secrétaire général de l’Union des banques arabes, qui a rappelé l’ampleur inédite des défis hydriques auxquels fait face le monde arabe.
Selon Fattouh, 60 % de la population arabe souffre déjà d’un stress hydrique sévère et, d’ici à 2030, l’écart entre l’offre et la demande en eau dépassera les 40 %.

Pour faire face à cette situation critique, l’Union des banques arabes s’est engagée auprès de la CESAO à mobiliser 1 000 milliards de dollars de financements dédiés aux Objectifs de développement durable (ODD) d’ici à 2030, une première dans l’histoire bancaire de la région.
Mais les chiffres actuels montrent que les financements réellement orientés vers l’eau, l’agriculture durable, la lutte contre la pauvreté ou le climat restent « encore très faibles ». Fattouh a pourtant rappelé que la région dispose de tous les ingrédients pour se transformer en un acteur clé de la transition, citant notamment les énergies renouvelables, les capitaux, la position géographique stratégique et des ressources humaines jeunes et qualifiées.

Il a appelé à repenser le modèle économique arabe, non plus fondé sur l’exportation brute de ressources, mais sur une intégration active dans la nouvelle économie mondiale, notamment dans l’hydrogène, l’agriculture intelligente et la diversification énergétique.

Pour Khaled Hanafy, secrétaire général de l’Union des chambres arabes, le monde arabe est prêt : « Le secteur privé est pleinement préparé à relever les défis. » Il a exhorté à « faire les choses différemment », afin de construire non seulement des marchés, mais aussi des relations porteuses de valeurs communes entre l’Europe et le monde arabe.
Dans un monde en mutation rapide, il a invité à dépasser les logiques traditionnelles d’échange pour entrer dans une ère de co-construction, fondée sur l’innovation, la compréhension mutuelle et la durabilité.

Intervenant avec force, Samira Sitail, ambassadrice du Maroc en France, a détaillé le rôle clé que joue son pays dans ces dynamiques. Elle a tout d’abord rappelé le soutien « stratégique et essentiel » de la France à la souveraineté marocaine sur ses provinces du Sud, un geste politique qu’elle a qualifié de « justice rendue ».

Mais c’est surtout la dimension économique qu’elle a mise en avant, saluant l’engagement du MEDEF International et des entreprises françaises dans les projets structurants des provinces du Sud, notamment le port de Dakhla, déjà construit à 50 %. Ce futur hub atlantique offrira aux pays enclavés d’Afrique de vastes débouchés, pouvant accroître de 30 à 35 % leurs exportations comme leurs importations.

Elle a plaidé pour un renforcement de la coopération France–Maroc–Afrique, citant l’exemple très concret de la coopération triangulaire Maroc–France–Burkina Faso dans la gestion de l’eau, présentée lors du dernier Sommet mondial de l’eau à Marrakech.

Face à l’impact du changement climatique, particulièrement sévère dans le monde arabe, où les températures augmentent 50 % plus vite qu’ailleurs, elle s’est montrée résolument optimiste.
Elle a salué les « visions à long terme » de pays comme l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et le Qatar, qui ont engagé des stratégies ambitieuses de transition hydrique et énergétique.

Cette sixième édition du Sommet économique France–Pays arabes a démontré l’émergence d’une vision partagée : la gestion de l’eau sera le défi stratégique de la région pour les prochaines décennies, et la transition écologique une opportunité majeure de développement.

Le partenariat France–monde arabe doit désormais se construire dans une logique d’intégration, de co-développement et de long terme, à l’heure où la région se prépare à une croissance de 0,7 % en 2026 dans un contexte international incertain.