Thilleli Rahmoun, ancrée dans la Méditerranée et la couleur

«J'ai toujours peint et dessiné depuis ma prime enfance.» Photo fournie.
«J'ai toujours peint et dessiné depuis ma prime enfance.» Photo fournie.
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Publié le Lundi 24 janvier 2022

Thilleli Rahmoun, ancrée dans la Méditerranée et la couleur

  • «J'ai toujours peint et dessiné depuis ma prime enfance»
  • «Je n'ai pas de règles ou de recettes lorsque j'aborde une série, un projet ou une œuvre quelconque»

CASABLANCA: Ancrée autour de la Méditerranée, du mouvement et de la couleur, Thilleli Rahmoun est une artiste reconnue pour ses dessins hors pair. Inspirée par le déracinement, le déplacement, elle vit et travaille à Barcelone, expose tour à tour à Marrakech, Kinshasa, Paris et Alger où elle instille son art incarné. Imprégnée par l’Histoire et la culture de la Catalogne, elle a présenté l’exposition intitulée «Barna 2020», à la galerie La La Lande à Paris. Cette exposition individuelle consacrée à une série de dessins captivants ravive la mémoire d’un quartier populaire et emblématique de Barcelone, muse-monde au confluent des codes graphiques et des symboles architecturaux. Entretien avec l’artiste plasticienne Thilleli Rahmoun.


Comment êtes-vous venue à l’art?

J'ai toujours peint et dessiné depuis ma prime enfance. J'ai de tout temps adoré les histoires, et pas uniquement celles qu'on me racontait, mais aussi celles que je m'inventais. Enfant, mes parents m'avaient inscrite à un centre culturel à Alger. Plus tard, j'ai suivi le cursus de l’École supérieure des beaux-arts d'Alger puis celui de Paris.

Vous évoluez entre Barcelone et Paris, comment ces deux villes influencent-elles votre pratique artistique?

Après mon diplôme de l’École nationale supérieure des beaux-arts (Ensba) de Paris, il m'a paru naturel de rester dans la capitale française pour toutes les opportunités artistiques et l'offre culturelle ambiantes. Depuis, j'ai eu l'occasion de participer à des programmes de résidences d'artistes hors de France, notamment à Barcelone. La ville et ses attributs uniques ont été un élément déterminant qui m'a fait prendre conscience de l’importance de la Méditerranée dans mon parcours personnel, et de son influence sur mon travail en tant que territoire. À Alger, je me disais toujours que la mer était un «élément modérateur». À Barcelone, elle est le «point de retour».

art

Parlez-nous de Barna 2020, l'exposition que vous avez présentée à la galerie parisienne La La Lande.

Ce projet de solo show à la galerie La La Lande m'a été proposé par François Rublon, qui a en a été le commissaire. Le titre fait référence à Barcelone et à l'année 2020, car l'ensemble des œuvres présentées ont été conçues cette année-là, à Barcelone. L’exposition regroupe un ensemble que nous avons souhaité cohérent. Chacune des pièces a un lien plus ou moins évident avec la ville et ses alentours.

Que retenez-vous de la série de dessins emblématiques que vous avez créée exclusivement pour ce solo show et de vos rencontres avec les Barcelonais à la suite de ce projet?

Pour l'exposition Barna 2020, nous avons fait le choix avec le curateur et les galeristes, Sofien Trabelsi et Ilyes Messaoudi, de présenter, entre autres, une grande partie du projet intitulé «Auca al Revès», spécifiquement conçu pour la «Nuit des musées» qui s’est tenue à Barcelone en mai 2021. Ce projet marque un tournant important dans mon parcours, car même s'il est né de la volonté de créer une possible mémoire collective de l'un des quartiers les plus emblématiques de Barcelone, le résultat final a généré des dialogues transversaux et universels.

auca

Votre imprégnation est-elle la même lorsque vous abordez des croquis, des dessins ou encore des fresques murales?

Je n'ai pas de règles ou de recettes lorsque j'aborde une série, un projet ou une œuvre quelconque. Au fur et à mesure de mes pérégrinations visuelles, je récupère des «morceaux de monde» que je photographie et garde en mémoire. Si je suis frappée par un élément, une scène ou une phrase, je l'enregistre ou je l'immortalise. Cela réapparaîtra toujours à un moment ou à un autre. J'évite généralement la monotonie et l'unité de langage. L'objectif tient à trouver la forme suffisamment juste pour faire résonner un concept complexe. L'étonnement, la surprise, l'étrangeté et la prise de distance font partie de ce processus de recherche, notamment à travers un aspect technique comme le collage ou les assemblages hétéroclites et les techniques mixtes.

art

Quelles sont les formes d’art et les artistes qui vous intéressent et vous inspirent?

Plus que les formes d'expression, je m'intéresse davantage à un propos et à une démarche. Je suis sensible aux intérieurs métaphysiques et aux paysages ouverts de Giorgio De Chirico, l'alchimie intime et universelle de Robert Rauschenberg, les finalités incertaines du souvenir chez William Kentridge, les départs constants de Nan Goldin, les mises en fiction potentielles de Mickaël Klieir, la justesse et la puissance des œuvres de Joan Miró, Louise Bourgeois, Anselm Kiefer, Juan Muñoz, Pieter Brueghel l'Ancien, Julien Prévieux, Robbie Cornelissen et Larissa Fassler. Sur le plan littéraire, je reste fascinée par les univers de David Toscana, Claude Confortès, Rachid Mimouni, Mario Vargas Llosa, Jacques Prévert, Eugène Ionesco, Milan Kundera, Raymond Queneau, Luis Sepúlveda et Kateb Yacine. Et si je devais choisir un film, ce serait Des oiseaux petits et gros de Pasolini.

Quel lien entretenez-vous avec l’Algérie, pays natal dont vous êtes diplômée de l’École des beaux-arts d’Alger?

J'ai des échanges constants avec mon pays, sur tous les plans et à tous les niveaux et je continue à y exposer régulièrement.

Quels illustres plasticiens et dessinateurs algériens vous inspirent?

Parmi les artistes que j'affectionne tout particulièrement, je citerai Massinissa Selmani, Nourreddine Ferroukhi, Souad Douibi, Yahia Abdelmalek et Slim, entre autres.

Avez-vous des projets entre Paris, Barcelone ou encore Alger?

J'ai des projets de résidences et d'expositions prévus dans le courant de l’année 2022, mais il est encore trop tôt pour en parler. Je me concentre pour le moment sur les nouvelles œuvres en devenir au cœur de mon nouvel atelier.


Le savoir-faire des artisans du Qassim mis à l’honneur

La région de Qassim est réputée pour son artisanat traditionnel, notamment dans l'industrie de l'osier de palme. (SPA)
La région de Qassim est réputée pour son artisanat traditionnel, notamment dans l'industrie de l'osier de palme. (SPA)
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  • Un art transmis de génération en génération continue de prospérer, alors que les artisans mêlent patrimoine culturel et créativité au Festival des dattes de Buraidah
  • Le tressage de palmes remonte à l’Antiquité, servant à l’origine aux besoins essentiels du foyer

RIYAD : La région de Qassim est réputée pour son artisanat traditionnel, en particulier dans le domaine du tressage de palmes. Cet art ancestral, transmis de génération en génération, continue de prospérer grâce aux artisans qui allient patrimoine culturel et créativité lors du Festival des dattes de Buraidah.

L'artisane Umm Abdullah a démontré le processus minutieux du tressage de palmes : les feuilles sont d’abord trempées et séchées, puis habilement transformées en divers objets comme des paniers, des nattes ou des sets de table.

Elle a expliqué que l’abondance de palmiers dans la région a fait de cet artisanat une source de revenus essentielle pour de nombreuses familles travaillant dans l’industrie artisanale locale, selon l’Agence de presse saoudienne.

Umm Abdullah a ajouté que les objets en feuilles de palmier sont très recherchés pour leur valeur culturelle et leur lien précieux avec le patrimoine.

Remontant à l’Antiquité, le tressage de palmes répondait aux besoins domestiques du quotidien. Avec le temps, l’innovation a permis de diversifier les produits et les designs, affirmant cet artisanat comme un véritable pilier du patrimoine.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


De Cannes au Casino du Liban, le flûtiste Daniel Alhaiby revient au Liban

Ce spectacle fait suite à ses années d'expérience dans des lieux et événements prestigieux, notamment le Festival de Cannes, où il a partagé sa musique avec un public international. (Fichier/ Fourni)
Ce spectacle fait suite à ses années d'expérience dans des lieux et événements prestigieux, notamment le Festival de Cannes, où il a partagé sa musique avec un public international. (Fichier/ Fourni)
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  • "Se produire au Liban, c'est comme boucler la boucle pour moi. C'est là que tout a commencé, et c'est tellement important", a-t-il déclaré
  • "Partager ma musique dans mon pays d'origine est comme une célébration de mon voyage, de Paris à la scène mondiale et de retour à la maison

DUBAI : Flûte en main, Daniel Alhaiby, profondément attaché à l'Orient et à l'Occident, se prépare à donner son premier concert solo au Casino du Liban le 10 septembre.

Ce concert fait suite à ses années d'expérience dans des lieux et événements prestigieux, notamment le Festival de Cannes, où il a partagé sa musique avec un public international.
"Cannes, c'est de la magie à l'état pur. Chaque fois que je joue, j'ai l'impression de représenter non seulement moi-même, mais aussi toute une culture, toute une histoire", a déclaré M. Alhaiby à Arab News.

Le retour au Liban pour son concert solo est un moment profondément personnel pour Alhaiby.

"Se produire au Liban, c'est comme boucler la boucle pour moi. C'est là que tout a commencé, et c'est tellement important", a-t-il déclaré.


"Partager ma musique dans mon pays d'origine est comme une célébration de mon voyage, de Paris à la scène mondiale et de retour à la maison.

"Le Casino du Liban a toujours été un lieu de rêve pour moi... Le public peut s'attendre à une expérience vraiment spéciale. J'ai soigneusement élaboré la liste des morceaux pour les emmener dans un voyage musical qui mêle mes compositions originales à des classiques revisités."

Les influences musicales d'Alhaiby sont diverses, allant de Piazzolla et Rimsky-Korsakov à Fairuz, Hans Zimmer, Pink Floyd et Bach.

"Je suis plus influencé par l'émotion que par le genre. Tout ce qui me touche, qu'il s'agisse d'une partita de Bach ou d'une improvisation orientale, se retrouve dans ma musique", a-t-il déclaré.

Le musicien a expliqué qu'il avait été attiré par la flûte dès son "plus jeune âge" : "Sa sonorité a toujours été proche de mon âme, il y a quelque chose dans son souffle, dans sa tonalité expressive, qui se connecte profondément à mes émotions. Au fil du temps, elle est devenue plus qu'un simple instrument ; elle est devenue ma voix, ma façon d'exprimer tout ce que les mots ne peuvent pas exprimer".


Essence de grands parfums, le jasmin égyptien se fane sous le réchauffement

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  • Dans cette région fertile, le jasmin fait vivre des milliers de familles depuis des générations
  • De juin à octobre, elles se rendent dans les champs entre minuit et l'aube, quand les fleurs exhalent leur parfum le plus intense

CHOBRA BELOULA: Depuis des années, Wael al-Sayed sillonne les champs du delta du Nil pour récolter les fleurs de jasmin qui finiront dans les flacons des grandes maisons de parfum. Mais ces derniers étés, les pétales se raréfient et leur parfum s'évanouit.

"C'est la chaleur", soupire M. al-Sayed, 45 ans, qui cultive depuis près de dix ans le jasmin à Chobra Beloula, village du delta du Nil à une centaine de kilomètres au nord du Caire et haut lieu de cette production en Egypte.

A mesure que les températures grimpent, explique-t-il, les floraisons se raréfient. En deux ans, sa récolte quotidienne est passée de six kilos à seulement deux ou trois.

Dans cette région fertile, le jasmin fait vivre des milliers de familles depuis des générations. De juin à octobre, elles se rendent dans les champs entre minuit et l'aube, quand les fleurs exhalent leur parfum le plus intense.

Mais les vagues de chaleur, les sécheresses prolongées et la prolifération de parasites liés au dérèglement climatique menacent cet héritage. Confrontés à des récoltes de plus en plus maigres, certains finissent par renoncer.

D'autres, comme M. al-Sayed, s'accrochent. Cette année, il a dû faire appel à sa femme et deux de ses enfants – âgés de neuf et dix ans – pour l'aider sur leur parcelle de 350 m². "On n’a pas le choix", explique-t-il, résigné.

Trop chaud pour fleurir 

Selon A. Fakhry & Co, principal transformateur du pays, l'Egypte fournit près de la moitié de la concrète de jasmin produite dans le monde, cette pâte cireuse qui entre dans la composition des plus grands parfums de luxe.

Dans les années 1970, le pays en produisait 11 tonnes par an, selon la Fédération Internationale des Huiles Essentielles. Aujourd’hui, la production plafonne à 6,5 tonnes, affirme A. Fakhry & Co.

Ali Emara, 78 ans, cueille le jasmin depuis l’âge de 12 ans. "Les étés étaient chauds, mais pas comme maintenant", dit-il.

Mohamed Bassiouny, 56 ans, et ses quatre fils ont vu leur récolte fondre de 15 à 7 kilos, malgré des journées de plus de huit heures.

Le jasmin de la région est particulièrement sensible à la chaleur et à l’humidité, explique Karim Elgendy, du Carboun Institute, un think tank néerlandais spécialisé dans le climat et l’énergie. "Les températures élevées peuvent perturber la floraison, altérer la concentration en huile essentielle  (...) et diminuer le rendement", explique-t-il.

Un rapport de l’Agence Internationale de l’Énergie, publié en 2023, révèle que la température moyenne en Égypte a augmenté de 0,38°C par décennie entre 2000 et 2020 – soit plus vite que la moyenne mondiale.

La chaleur émousse la puissance olfactive du jasmin, dépréciant l'huile précieuse qui en est extraite, explique Badr Atef, directeur chez A. Fakhry & Co. Dans le même temps, les nuisibles – acariens et vers des feuilles – prolifèrent sous ces températures extrêmes, aggravant encore la situation.

A Grasse (France), capitale mondiale du parfum, Alexandre Levet, PDG de la French Fragrance House, constate lui aussi l'ampleur des dégâts: "Des dizaines d'ingrédients naturels souffrent déjà du dérèglement climatique", explique-t-il à l'AFP, ajoutant que de nouveaux terroirs émergent à mesure que les anciens deviennent incertains.

Revenus dérisoires 

Le delta du Nil se révèle particulièrement exposé: la montée de la Méditerranée modifie la salinité des sols, plaçant les cultivateurs de jasmin en première ligne.

Ces derniers sont "complètement livrés à eux-mêmes", dénonce le sociologue Saker El Nour. Ils n’ont "aucun pouvoir" dans une industrie qui dépend pourtant entièrement de leur travail.

Alors que les grandes maisons de parfum écoulent le kilo d’absolue de jasmin – une huile essentielle pure – à plus de 5.000 euros, les cueilleurs égyptiens, eux, ne reçoivent que 105 livres égyptiennes, soit à peine deux euros, pour chaque kilo de fleurs récoltées. Or il faut près d’une tonne de pétales pour extraire seulement 2 à 3 kilos de concrète, et une quantité plus infime encore d’huile essentielle.

"Que valent 100 livres aujourd’hui ? Rien", tranche M. al-Sayed.

Depuis 2022, la livre égyptienne a perdu plus des deux tiers de sa valeur, entraînant une flambée des prix et plongeant plusieurs familles dans une précarité extrême.

En juin, les cueilleurs ont mené une grève inédite pour exiger que leur rémunération soit portée à 150 livres égyptiennes par kilo. Mais face à des prix verrouillés par une poignée de transformateurs privés, ils n’ont arraché qu'une maigre augmentation de 10 livres.

D'année en année, les revenus s'érodent, tandis que le réchauffement climatique menace l'existence même de cette communauté. "Des villages entiers pourraient devenir invivables", prévient M. Elgendy.