Un demi-siècle après, Derry commémore le «Bloody Sunday»

Cinquante ans après la mort de 13 manifestants abattus par des soldats britanniques, la mémoire des victimes du «Bloody Sunday» est honorée dimanche dans une Irlande du Nord meurtrie par les années noires des "Troubles" et les espoirs de justice déçus. (Photo, AFP)
Cinquante ans après la mort de 13 manifestants abattus par des soldats britanniques, la mémoire des victimes du «Bloody Sunday» est honorée dimanche dans une Irlande du Nord meurtrie par les années noires des "Troubles" et les espoirs de justice déçus. (Photo, AFP)
Short Url
Publié le Dimanche 30 janvier 2022

Un demi-siècle après, Derry commémore le «Bloody Sunday»

  • A l'époque, le Bloody Sunday a eu pour effet de précipiter de nombreux jeunes catholiques républicains dans les bras de l'IRA
  • Il faudra attendre 1998 pour que l'accord de paix du Vendredi saint mette un terme à trois décennies de conflit qui ont fait 3 500 morts

LONDONDERRY, Irlande du Nord: Cinquante ans après la mort de 13 manifestants abattus par des soldats britanniques, la mémoire des victimes du "Bloody Sunday" est honorée dimanche dans une Irlande du Nord meurtrie par les années noires des "Troubles" et les espoirs de justice déçus.

"C'est important que le reste du monde voie ce qu'ils nous ont fait ce jour-là", souligne auprès de l'AFP Charlie Nash, 73 ans. Son cousin William a été tué ce 30 janvier 1972, à l'âge de 19 ans. "Mais verra-t-on un jour la justice ? Jamais", estime-t-il, "certainement pas de Boris Johnson".

Dans la matinée puis l'après-midi, les proches des victimes vont marcher dans les rues de Derry - appellation qu'ils préfèrent au nom officiel de Londonderry, synonyme de domination britannique - où les parachutistes du premier bataillon avaient ouvert le feu lors d'une manifestation pour les droits civiques des catholiques.

A l'époque, le Bloody Sunday a eu pour effet de précipiter de nombreux jeunes catholiques républicains dans les bras de l'IRA (Armée républicaine irlandaise), groupe paramilitaire opposé à toute présence britannique sur l'île d'Irlande. Il faudra attendre 1998 pour que l'accord de paix du Vendredi saint mette un terme à trois décennies de conflit qui ont fait 3 500 morts.

L'armée britannique avait affirmé que les parachutistes avaient répondu aux tirs des "terroristes" de l'IRA, version confortée par un rapport réalisé à la hâte dans les semaines suivantes.

Malgré tous les témoignages contredisant cette version, il faudra attendre 2010 pour que soit officiellement reconnue l'innocence des victimes, atteintes pour certaines dans le dos ou même à terre, agitant un mouchoir blanc.

«Amnistie»

A l'issue de l'enquête la plus longue - 12 ans - et la plus coûteuse qu'ait connue le Royaume-Uni (près de 200 millions de livres sterling, soit 240 millions d'euros au taux actuel), le Premier ministre de l'époque, David Cameron, présente des excuses officielles pour ces actes "injustifiés et injustifiables".

"Ca fait un demi-siècle, mais on dirait que c'était seulement hier pour nous à Derry", explique George Ryan, 61 ans, historien et guide dans la deuxième ville d'Irlande du Nord. Pour lui, la perspective de voir des militaires jugés le Bloody Sunday "semble plus improbable que jamais, mais c'est plus important que jamais".

Aucun soldat n'a été jugé pour le Bloody Sunday. Les poursuites pour meurtres engagées contre l'un d'eux ont été abandonnées pour des questions juridiques et le gouvernement britannique a présenté un projet de loi pour mettre un terme à toutes les poursuites liées au "Troubles", dénoncé de toutes part comme une "amnistie".

Le juge Mark Saville, qui a mené l'enquête publiée en 2010, a dit samedi sur les ondes de la BBC "comprendre" le sentiment que "la justice n'a pas été encore rendue".

A l'entrée du Bogside, le slogan "Il n'y a pas de justice britannique" ("There is no British Justice") a pris place pour l'occasion sur célèbre pan de mur historique marquant jadis l'entrée du "Derry libre".

Bouleversements à l'horizon

Il y a quelques jours, un drapeau des parachutistes hissé dans un quartier loyaliste de la ville a créé l'émoi, au point d'être évoqué lors d'une séance au Parlement à Londres.

Le Premier ministre britannique Boris Johnson, lui, a qualifié le Bloody Sunday de "jour tragique dans notre histoire", l'un "des plus sombres" des Troubles.

Ces derniers mois, les effets du Brexit ont souligné la fragilité de l'équilibre de l'accord de paix de 1998.

Les décriées dispositions douanières destinées à éviter toute frontière terrestre avec l'Irlande -mais en établissant une maritime de facto avec la Grande-Bretagne- font actuellement l'objet d'intenses négociations entre Londres et Bruxelles.

Elles ont aussi  ravivé les tensions communautaires: lors d'émeutes à Belfast au printemps, les "murs de la paix" séparant quartiers catholiques et protestants ont été enflammés.

Les élections locales en mai s'annoncent déterminantes pour le fragile équilibre politique en place. Avec un recul des unionistes, une victoire des républicains est jugée crédible. Le Sinn Fein, autrefois branche politique de l'IRA, souhaite d'ici cinq ans un référendum sur la réunification de l'île.

Irlande du Nord: trois décennies sanglantes

LONDRES : Des premiers troubles en 1968 à la signature de l'accord de paix du Vendredi Saint, le 10 avril 1998, l'Irlande du Nord a été déchirée par trois décennies de conflit opposant républicains en majorité catholiques et unionistes protestants.

L'Ulster s'embrase

Le 5 octobre 1968, une manifestation pacifique de catholiques en faveur des droits civiques est brutalement réprimée par la police à Londonderry, seule ville à majorité catholique de la province britannique.

Cette journée préfigure trois décennies de "Troubles". Les républicains nationalistes, principalement des catholiques partisans de la réunification de l'Irlande, s'affrontent avec les unionistes protestants, défenseurs du maintien de la province sous la Couronne britannique.

Tout bascule en quelques mois. Des rassemblements et des marches de catholiques dégénèrent en affrontements avec la police et les protestants. En août 1969, les violences embrasent Londonderry et Belfast. L'armée britannique est déployée dans les rues.

L'année 1970 voit l'émergence de l'IRA "provisoire", née des cendres de l'ancienne Armée républicaine irlandaise, dont la guérilla avait mené en 1921 à la partition de l'île en une république indépendante au sud et une province du Royaume-Uni au nord.

Alors que l'organisation clandestine lance ses actions sanglantes, des milices d'extrémistes protestants se forment.

Tragédies

Le 30 janvier 1972, des parachutistes britanniques tirent sur une manifestation pacifique contre les discriminations à l'encontre de la minorité catholique d'Irlande du Nord à Londonderry. Treize civils, dont plusieurs mineurs, tombent sous les balles des soldats. Trois jours après ce "Bloody Sunday", l'ambassade britannique à Dublin est réduite en cendres par une foule en rage.

Le 24 mars, le gouvernement britannique suspend les institutions d'Ulster et y impose son administration directe.

En 1974, l'IRA étend ses attaques meurtrières à la Grande-Bretagne. Des attentats dans des pubs de Guilford, Woolwich et Birmingham font une trentaine de morts.

Le 27 août 1979, l'organisation frappe pour la première fois la famille royale: Lord Mountbatten, cousin de la reine Elizabeth II et dernier vice-roi des Indes, est tué par une bombe placée sur son bateau de pêche dans le nord-ouest de l'Irlande. Le même jour, 18 soldats britanniques sont tués en Ulster.

Grèves de la faim

En 1981, le militant républicain Bobby Sands, imité par neuf de ses compagnons détenus à la prison de Maze près de Belfast, entame une grève de la faim pour réclamer le statut de prisonniers politiques. La Première ministre Margaret Thatcher reste inflexible. La mort des dix grévistes de la faim marque un tournant.

Les nationalistes irlandais connaissent un regain de popularité. En 1982, le Sinn Fein, branche politique de l'IRA, remporte ses premiers sièges au parlement d'Irlande du Nord. L'année suivante, Gerry Adams est élu à la tête du parti.

A l'automne 1984, l'IRA cible le sommet du pouvoir britannique. Une bombe visant Mme Thatcher tue cinq personnes au Grand Hotel de Brighton (sud), où se tient le congrès du Parti conservateur.

Tentatives de paix

Après une première tentative lors de la Conférence de Sunningdale en 1973, Mme Thatcher reprend le flambeau des discussions en 1985. Mais l'accord posant le principe d'un droit de regard de Dublin sur les affaires intérieures d'Ulster est rejeté par les deux camps.

En 1992 et 1993, deux spectaculaires attentats de l'IRA font quatre morts et causent des centaines de millions de livres de dégâts dans la City.

Les négociations prennent un nouvel élan avec le successeur de la Dame de fer, John Major, qui invite tous les partis, y compris le Sinn Fein, à la table des négociations. L'IRA décide d'un cessez-le-feu en 1994, mais les discussions achoppent sur la question du désarmement des groupes paramilitaires.

Accord du «Vendredi Saint»

En février 1996, l'IRA reprend ses actions meurtrières avant de rétablir une trêve en juillet 1997, peu après l'arrivée au pouvoir du travailliste Tony Blair.

Le 10 avril 1998, après de longues tractations, Londres, Dublin et les dirigeants loyalistes et séparatistes nord-irlandais signent à Belfast un accord de paix soutenu par l'IRA. L'accord du Vendredi saint instaure un partage du pouvoir entre élus catholiques et protestants au sein d'institutions semi-autonomes.

Quatre mois plus tard, l'explosion d'une voiture piégée tue 29 personnes dans une petite rue commerçante d'Omagh, en Irlande du Nord. Cet attentat d'un groupuscule dissident de l'IRA est le plus meurtrier de l'histoire du conflit. Le carnage cimentera les accords de paix.

Au total, les "Troubles" ont tué plus de 3 500 personnes en 30 ans.


Des rapports internes concluent à un climat antisémite et anti-musulman à Harvard

Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël". (AFP)
Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël". (AFP)
Short Url
  • Harvard, comme d'autres universités américaines de renom, Columbia en particulier, est accusée par le président républicain d'avoir laissé prospérer l'antisémitisme sur son campus pendant les mouvements étudiants contre la guerre à Gaza menée par Israël
  • Un premier groupe de travail sur l'antisémitisme et les positions anti-Israël, composé principalement de membres du corps enseignant mais aussi d'étudiants

NEW YORK: Deux rapports distincts sur Harvard publiés mardi par l'université ont établi qu'un climat antisémite et anti-musulman s'était installé sur le campus de la prestigieuse université américaine, dans le viseur de Donald Trump, et la pressent d'agir pour y remédier.

Ces deux rapports de plusieurs centaines de pages, construits notamment à partir de questionnaires et de centaines de témoignages d'étudiants et d'encadrants menés depuis janvier 2024, sont rendus au moment où l'université implantée près de Boston (nord-est) s'est attiré les foudres de Donald Trump, qui l'a dernièrement dépeinte en "institution antisémite d'extrême gauche", "foutoir progressiste" et "menace pour la démocratie".

Harvard, comme d'autres universités américaines de renom, Columbia en particulier, est accusée par le président républicain d'avoir laissé prospérer l'antisémitisme sur son campus pendant les mouvements étudiants contre la guerre à Gaza menée par Israël après l'attaque du Hamas le 7 octobre 2023.

Un premier groupe de travail sur l'antisémitisme et les positions anti-Israël, composé principalement de membres du corps enseignant mais aussi d'étudiants, a établi que les deux phénomènes "ont été alimentés, pratiqués et tolérés, non seulement à Harvard, mais aussi plus largement dans le monde universitaire".

Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël".

Un autre groupe de travail distinct, lui consacré aux positions anti-musulmans, anti-arabes et anti-Palestiniens, a conclu à "un sentiment profondément ancré de peur parmi les étudiants, les enseignants et le personnel". Les personnes interrogées décrivent "un sentiment de précarité, d'abandon, de menace et d'isolement, ainsi qu'un climat d'intolérance omniprésent", écrivent ses auteurs.

"Harvard ne peut pas - et ne va pas - tolérer l'intolérance. Nous continuerons à protéger tous les membres de notre communauté et à les préserver du harcèlement", s'engage dans une lettre accompagnant les deux rapports le président de Harvard, Alan Garber, à l'initiative des deux rapports, en promettant de "superviser la mise en oeuvre des recommandations" préconisées.

Harvard, l'université la plus ancienne des Etats-Unis et une des mieux classées au monde, s'est distinguée en étant la première à attaquer en justice l'administration Trump contre un gel de plus de deux milliards de dollars de subventions fédérales, décidé après que la célèbre institution a refusé de se plier à une série d'exigences du président.

Donald Trump, qui reproche aux universités d'être des foyers de contestation progressiste, veut avoir un droit de regard sur les procédures d'admission des étudiants, les embauches d'enseignants ou encore les programmes.

L'accusation d'antisémitisme est fréquemment employée par son administration pour justifier ses mesures contre les établissements d'enseignement supérieur, ainsi que contre certains étudiants étrangers liés aux manifestations contre la guerre à Gaza.


Canada: le libéral Mark Carney donné vainqueur après une campagne centrée sur Trump

Le Premier ministre canadien et chef du Parti libéral, Mark Carney, salue ses partisans lors d'une fête de victoire à Ottawa (Ontario), le 29 avril 2025. (AFP)
Le Premier ministre canadien et chef du Parti libéral, Mark Carney, salue ses partisans lors d'une fête de victoire à Ottawa (Ontario), le 29 avril 2025. (AFP)
Short Url
  • Le Parti libéral de Mark Carney a remporté lundi les législatives canadiennes, selon les projections des médias locaux, après une campagne centrée sur les menaces du président américain Donald Trump contre le pays
  • Toutefois, selon des résultats encore préliminaires, les libéraux pourraient rester minoritaires au Parlement et seraient donc contraints de gouverner avec l'appui d'un autre parti

OTTAWA: Le Parti libéral de Mark Carney a remporté lundi les législatives canadiennes, selon les projections des médias locaux, après une campagne centrée sur les menaces du président américain Donald Trump contre le pays.

Toutefois, selon des résultats encore préliminaires, les libéraux pourraient rester minoritaires au Parlement et seraient donc contraints de gouverner avec l'appui d'un autre parti.

Il y a quelques mois encore, la voie semblait toute tracée pour permettre aux conservateurs canadiens emmenés par Pierre Poilievre de revenir aux affaires, après dix ans de pouvoir de Justin Trudeau.

Mais le retour de Donald Trump à la Maison Blanche et son offensive inédite contre le Canada, à coups de droits de douane et de menaces d'annexion, ont changé la donne.

A Ottawa, où les libéraux sont réunis pour la soirée électorale dans une aréna de hockey, l'annonce des résultats a provoqué une salve d'applaudissements et des cris enthousiastes.

"Je suis si heureuse", lâche sur place Dorothy Goubault, originaire de la région des Mille Iles en Ontario. "Je suis contente car nous avons quelqu'un qui peut parler à M. Trump à son niveau. M. Trump est un homme d'affaires. M. Carney est un homme d'affaires, et je pense qu'ils peuvent tous les deux se comprendre".

Pour le ministre Steven Guilbeault, "les nombreuses attaques du président Trump sur l'économie canadienne, mais aussi sur notre souveraineté et notre identité même, ont vraiment mobilisé les Canadiens", a-t-il déclaré sur la chaine publique CBC.

Et les électeurs "ont vu que le Premier ministre Carney avait de l'expérience sur la scène mondiale".

Mark Carney n'avait pas encore pris la parole à minuit locales (04H00 GMT), tandis que se poursuivait le dépouillement.

Dans les longues files devant les bureaux de vote toute la journée, les électeurs ont souligné l'importance de ce scrutin, parlant d'élections historiques et déterminantes pour l'avenir de ce pays de 41 millions d'habitants.

- "Chaos" -

À 60 ans, Mark Carney, novice en politique mais économiste reconnu, a su convaincre une population inquiète pour l'avenir économique et souverain du pays qu'il était la bonne personne pour piloter le pays en ces temps troublés.

Cet ancien gouverneur de la banque du Canada et de Grande-Bretagne n'a cessé de rappeler pendant la campagne que la menace américaine est réelle pour le Canada.

"Ils veulent nos ressources, notre eau. Les Américains veulent notre pays", a-t-il prévenu.

"Le chaos est entré dans nos vies. C'est une tragédie, mais c'est aussi une réalité. La question clé de cette élection est de savoir qui est le mieux placé pour s'opposer au président Trump?", a-t-il expliqué pendant la campagne.

Pour faire face, il a promis de maintenir des droits de douane sur les produits américains tant que les mesures de Washington seront en place.

Mais aussi de développer le commerce au sein de son pays en levant les barrières douanières entre provinces et de chercher de nouveaux débouchés, notamment en Europe.

En face, le chef conservateur, qui avait promis des baisses d'impôts et des coupes dans les dépenses publiques, n'a pas réussi à convaincre les électeurs de ce pays du G7, 9e puissance mondiale, de tourner le dos aux libéraux.

Pierre Poilievre aura aussi souffert jusqu'au bout de la proximité, de par son style et certaines de ses idées, avec le président américain, ce qui lui a aliéné une partie de l'électorat, selon les analystes.

Au QG des conservateurs à Ottawa, Jason Piche se dit toutefois "surpris" des résultats, "je pensais que ce serait plus serré que ça".

Un peu plus loin, Jean-Guy Bourguignon, homme d'affaires de 59 ans, se dit carrément "très triste". "Est-ce que c'est vraiment ça le pays dans lequel nous voulons vivre?", demande-t-il alors qu'il énumère les politiques des libéraux, qu'il juge liberticides.

Près de 29 millions d'électeurs étaient appelés aux urnes dans ce vaste pays du G7 qui s'étend sur six fuseaux horaires. Et plus de 7,3 millions de personnes avaient voté par anticipation, un record.


Ukraine: Poutine annonce une trêve du 8 au 10 mai, «tentative de «manipulation»» répond Zelensky

Le président russe Vladimir Poutine prononce un discours lors d'une réunion du Conseil des législateurs à Saint-Pétersbourg, le 28 avril 2025. (AFP)
Le président russe Vladimir Poutine prononce un discours lors d'une réunion du Conseil des législateurs à Saint-Pétersbourg, le 28 avril 2025. (AFP)
Short Url
  • Le président russe Vladimir Poutine a annoncé lundi une trêve sur le front en Ukraine durant trois jours du 8 au 10 mai
  • Son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky denonçant une "tentative de manipulation"

MOSCOU: Le président russe Vladimir Poutine a annoncé lundi une trêve sur le front en Ukraine durant trois jours du 8 au 10 mai, à l'occasion de la commémoration de la victoire sur l'Allemagne nazie, son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky denonçant une "tentative de manipulation".

Le président américain Donald Trump exhorte Kiev et Moscou à conclure un cessez-le-feu et un accord de paix, trois ans après le début de l'offensive russe ayant déjà fait des dizaines de milliers de morts civils et militaires.

"A partir de minuit entre le 7 et le 8 mai, et jusqu'à minuit entre le 10 et le 11 mai, la partie russe annonce un cessez-le-feu", a indiqué le Kremlin dans un communiqué. "Pendant cette période, toutes les opérations de combat seront arrêtées".

D'après la présidence russe, Vladimir Poutine a pris cette décision unilatérale "pour des raisons humanitaires" et à l'occasion des célébrations du 80e anniversaire de la victoire sur l'Allemagne nazie.

Pour M. Zelensky, au contraire, "il y a désormais une nouvelle tentative de manipulation". "Pour une raison, a-t-il dit dans son adresse quotidienne, tout le monde doit attendre le 8 mai et ne cesser le feu qu'ensuite pour garantir le silence" lors de la parade du 9 mai sur la place Rouge à Moscou.

La Russie commémore le 9 mai cet événement dont Vladimir Poutine a fait un marqueur essentiel de la puissance retrouvée du pays. Les dirigeants d'une vingtaine de pays sont attendus pour un défilé militaire en grande pompe sur la place Rouge à Moscou.

Le Kremlin a dit considérer que l'Ukraine "devrait suivre cet exemple", tout en prévenant que les forces russes "fourniront une réponse adéquate et efficace" en cas de violation de la trêve.

Vladimir Poutine avait déjà déclaré un bref cessez-le-feu de 30 heures les 19 et 20 avril à l'occasion de Pâques. Les deux camps s'étaient ensuite accusés de l'avoir violé, même si une baisse de l'intensité des combats avait été ressentie dans plusieurs secteurs du front.

"Accroître la pression sur la Russie"

La Maison Blanche a soutenu lundi que Donald Trump souhaitait un cessez-le-feu "permanent" en Ukraine et pas seulement une trêve temporaire.

Les Etats-Unis, jusque-là le premier soutien de l'Ukraine, veulent tourner la page aussi vite que possible quitte, craint Kiev, à accepter des dispositions très favorables à Moscou.

Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a dit dimanche à son homologue russe, Sergueï Lavrov, qu'il était temps de mettre fin à une "guerre insensée" en Ukraine, selon un communiqué lundi.

De son côté, le président français Emmanuel Macron a affirmé que "dans les huit à dix jours prochains, nous allons accroître la pression sur la Russie", dans un entretien publié par le magazine Paris Match.

Il a estimé avoir "convaincu les Américains de la possibilité d’une escalade des menaces, et potentiellement de sanctions" contre Moscou.

Conditions maximalistes de Poutine 

La Russie maintient des conditions maximalistes concernant l'Ukraine, dont elle veut la reddition et le renoncement à rejoindre l'Otan, tout en s'assurant de pouvoir garder les territoires ukrainiens annexés.

La reconnaissance internationale de l'annexion russe de la Crimée et de quatre autres régions ukrainiennes est une condition "impérative" à la paix, a encore martelé lundi le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov.

La Russie a annexé la péninsule ukrainienne de Crimée en mars 2014, ce que la communauté internationale, Etats-Unis compris, n'a jamais reconnu.

En septembre 2022, quelques mois après le déclenchement de son assaut à grande échelle, elle a aussi revendiqué l'annexion de quatre régions ukrainiennes qu'elle occupe partiellement, celles de Donetsk, Lougansk, Kherson et Zaporijjia.

La Russie, qui a l'avantage sur le front, a revendiqué lundi la prise de Kamyanka, un village de la région de Kharkiv, dans le nord-est de l'Ukraine.

La Corée du Nord a pour la première fois reconnu lundi avoir envoyé des troupes en Russie et qu'elles avaient aidé Moscou à reprendre aux Ukrainiens les zones de la région de Koursk dont ils s'étaient emparés.

Trois personnes ont par ailleurs été tuées lundi dans une attaque russe contre un village de la région de Donetsk (est), selon les services du procureur régional.