Belgique: Sammy Mahdi, ministre et fils de réfugié, ferme sur l'immigration

Le secrétaire d'État belge à la politique d'asile et de migration Sammy Mahdi, la ministre des Affaires étrangères Sophie Wilmes et la ministre de la Défense Ludivine Dedonder assistent à une conférence de presse concernant l'opération d'évacuation militaire en Afghanistan, à Bruxelles, le 20 août 2021 (AFP)
Le secrétaire d'État belge à la politique d'asile et de migration Sammy Mahdi, la ministre des Affaires étrangères Sophie Wilmes et la ministre de la Défense Ludivine Dedonder assistent à une conférence de presse concernant l'opération d'évacuation militaire en Afghanistan, à Bruxelles, le 20 août 2021 (AFP)
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Publié le Vendredi 11 février 2022

Belgique: Sammy Mahdi, ministre et fils de réfugié, ferme sur l'immigration

  • Gérer le portefeuille ministériel de l'immigration lui a valu d'être caricaturé en nazi sur les réseaux pourtant ce ce Bruxellois d'origine irakienne a fait ses armes en politique dans les banlieues populaires de Molenbeek et Vilvorde
  • Sammy Mahdi a été critiqué l'été dernier pour sa gestion intransigeante d'une grève de la faim de sans papiers, qui a irrité la gauche et fait tanguer la coalition de sept partis au pouvoir

BRUXELLES: Gérer le portefeuille ministériel de l'immigration lui a valu d'être caricaturé en nazi sur les réseaux sociaux. En Belgique, Sammy Mahdi, fils d'un réfugié politique irakien, affronte la critique depuis dix-huit mois sur ce dossier brûlant.

"Ce n'est pas le boulot le plus simple ni le plus chouette", reconnaît dans un entretien à l'AFP le secrétaire d'Etat à l'Asile et à la Migration dans le gouvernement dirigé par Alexander De Croo.

"Délivrer des ordres de quitter le territoire, dire à quelqu'un +tu es venu mais tu ne peux pas rester, tu dois repartir+, ce n'est pas le message le plus sympa. Mais pourtant c'est nécessaire", ajoute ce centriste de 33 ans, barbe fine et costume soigné. 

Il a été critiqué l'été dernier pour sa gestion intransigeante d'une grève de la faim de sans papiers, qui a irrité la gauche et fait tanguer la coalition de sept partis au pouvoir. En janvier, Sammy Mahdi s'est retrouvé au coeur d'une mini-tempête après avoir révélé l'expulsion fin 2021 d'un imam marocain, accusé d'"extrémisme" et d'"ingérence" en Belgique.

L'imam Mohamed Toujgani n'est pas n'importe qui en Belgique. Figure de la communauté marocaine, établi là depuis 40 ans, il officiait jusqu'à 2021 dans un des plus grands lieux de culte du pays, la mosquée Al-Khalil, dans la commune bruxelloise de Molenbeek.

« Des racines à Bagdad »

S'il a ensuite regretté ses propos et s'est excusé, l'imam avait appelé dans une vidéo à "brûler les sionistes", en 2009, sur fond de conflit israélo-palestinien.

Sammy Mahdi a dit appuyer sa décision d'expulsion sur un rapport des services de renseignement le décrivant comme un prêcheur radical "dangereux pour la sécurité nationale".

Mais la mesure a été jugée arbitraire. L'intéressé, en séjour au Maroc et de fait privé de retour dans sa famille en Belgique, n'a "jamais" été interrogé, a dénoncé son avocat. Sur internet le secrétaire d'Etat s'est fait incendier, jusqu'à être qualifié de "traître" à sa communauté en référence à ses origines arabo-musulmanes.

Piqué au vif, Sammy Mahdi a pris la plume pour se livrer comme il ne l'avait jamais fait, dans le quotidien Le Soir, sur ses racines "qui vont jusqu'à Bagdad" et l'éducation reçue de son père, qui a fui à la fin des années 1970 la dictature de Saddam Hussein. 

"Il m'a toujours appris à ne pas juger un homme à partir de sa confession ou de sa couleur de peau, mais sur la base de ses actes", a écrit M. Mahdi, se déclarant opposé à toute forme de "communautarisme". Son père, confie-t-il à l'AFP, a même refusé de lui apprendre l'arabe, qu'il ne parle donc pas.

Scolarisé en néerlandais, la langue de sa mère, ce Bruxellois a fait ses armes en politique dans les banlieues populaires de Molenbeek et Vilvorde.

Il estime que le clientélisme pratiqué par "quasiment tous les partis" a été un frein à l'intégration, générant même "un repli identitaire" dans les communautés immigrées.

« L'Ali de service »

Aujourd'hui, dit-il, "beaucoup de personnes issues de l'immigration en ont marre d'être traitées comme un bulletin de vote facile à récolter" et ne veulent plus d'un "+Ali de service+ pour les représenter".

En tout cas, "l'Ali de service ce n'est pas moi", clame cet ancien étudiant en sciences politiques qui fut chef des Jeunes CD&V, le parti chrétien-démocrate flamand.

"La seule communauté que je veux représenter c'est la communauté belge et tous ses habitants dans leur diversité. Une diversité magnifique dès lors qu'elle est basée sur un fond culturel partagé".

Face une extrême droite qui a fortement progressé en Flandre aux élections de 2019, toujours à l'offensive sur l'identité et l'immigration, Sammy Mahdi n'a de cesse de prôner "une migration contrôlée" passant par une meilleure collaboration avec les pays d'origine dans l'aide au retour.

Une fermeté qui lui vaut de vives critiques de la part des associations d'aide aux exilés, alors que la Belgique est confrontée à un afflux de demandeurs d'asile et peine à adapter ses structures d'hébergement.

"Le système est complètement saturé et cette crise de l'accueil était prévisible. Avec Sammy Mahdi il y a de la communication mais peu de pragmatisme et d'anticipation", grince Mehdi Kassou, de la Plateforme citoyenne d'hébergement des réfugiés.


Cyberattaques : Berlin a rappelé «pour consultations» son ambassadeur en Russie

L'ambassadeur allemand en Russie, Alexander Graf Lambsdorff  (Photo, AFP).
L'ambassadeur allemand en Russie, Alexander Graf Lambsdorff (Photo, AFP).
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  • Une cyberattaque a notamment ciblé des adresses email de responsables du SPD, le parti social-démocrate du chancelier Olaf Scholz
  • Les pays occidentaux sont depuis le début de l'invasion russe en Ukraine, en février 2022, en alerte maximum contre le risque d'attaques informatiques massives

BERLIN: Berlin a indiqué lundi avoir rappelé pour consultations son ambassadeur en Russie, Alexander Graf Lambsdorff, après avoir accusé vendredi un groupe de hackeurs russes contrôlé par Moscou d'une récente campagne de cyberattaques.

L'ambassadeur "restera une semaine à Berlin puis retournera à Moscou", a indiqué lors d'un point presse régulier la porte-parole du ministère allemand des Affaires étrangères, Kathrin Deschauer, ajoutant que le gouvernement prenait "très au sérieux" cet "acte contre (notre) démocratie".

Les gouvernements allemand et tchèque ont accusé vendredi le groupe APT28, dirigé par les services de renseignement de la Russie, d'une récente campagne de cyberattaques dans leur pays respectif. Des accusations jugées "infondées" par la Russie.

Attaques ciblées 

Une cyberattaque a notamment ciblé des adresses email de responsables du SPD, le parti social-démocrate du chancelier Olaf Scholz, selon le gouvernement.

Berlin a annoncé vendredi la convocation du chargé d'affaires de l'ambassade de Russie, "pour faire comprendre au gouvernement russe que nous n'acceptons pas ces actions".

Les pays occidentaux sont depuis le début de l'invasion russe en Ukraine, en février 2022, en alerte maximum contre le risque d'attaques informatiques massives et d'opérations de désinformation orchestrées par la Russie.


Exercice américano-philippin contre une «invasion» en mer de Chine

Le président philippin Ferdinand Marcos Jr. a quant à lui assuré lundi que son pays n'entendait pas "faire monter la tension" en mer de Chine méridionale (Photo, Fournie).
Le président philippin Ferdinand Marcos Jr. a quant à lui assuré lundi que son pays n'entendait pas "faire monter la tension" en mer de Chine méridionale (Photo, Fournie).
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  • Ces incidents font craindre un conflit plus large qui pourrait impliquer les Etats-Unis, allié des Philippines
  • La semaine dernière, les forces américaines participant à Balikatan avaient tiré des roquettes de précision Himars depuis l'île occidentale de Palawan

LAOAG: Les troupes américaines et philippines ont tiré lundi des obus et des missiles sur une force d'"invasion" imaginaire pendant des exercices en mer de Chine méridionale, dans le nord des Philippines où les deux pays ont récemment accusé la Chine de "conduite dangereuse et déstabilisante".

Plus de 16.700 soldats américains et philippins participent à ces manoeuvres annuelles navales, terrestres et aériennes organisées jusqu'au 10 mai dans une zone où les incidents à répétition entre embarcations chinoises et philippines font craindre un conflit plus large.

Les soldats américains massés sur les dunes de la côte nord-ouest des Philippines, près de la ville de Laoag, à 400 kilomètres au sud de Taïwan, ont tiré plus de 50 obus de 155 millimètres sur des cibles flottantes à environ cinq kilomètres de la côte, ont constaté des journalistes de l'AFP.

Les troupes philippines ont enchaîné avec des tirs de roquettes vers les attaquants factices, avant que les deux forces ne finissent l'exercice avec des mitrailleuses, des missiles Javelin et d'autres salves d'artillerie.

Cet exercice à munitions réelles, baptisé "Balikatan" ("Epaule contre épaule" en tagalog, la langue philippine), vise à "se préparer au pire", a déclaré aux journalistes le commandant de la Première force expéditionnaire des Marines des Etats-Unis, Michael Cederholm.

"Il est conçu pour repousser une invasion", a-t-il ajouté sur le site de l'exercice, débuté le 22 avril dans plusieurs endroits des Philippines. "Notre flan nord-ouest est plus exposé", a détaillé à l'AFP le général philippin Marvin Licudine, dirigeant l'exercice pour la partie philippine. "A cause des problèmes régionaux, nous devons dès maintenant nous entraîner sur notre propre sol".

Pékin revendique la quasi-totalité de la mer de Chine méridionale, une importante route commerciale. Elle ignore un arbitrage international qui lui a donné tort en 2016, et y fait patrouiller des centaines de navires des garde-côtes et de la marine.

La semaine dernière, Manille a accusé les garde-côtes chinois d'avoir endommagé un bateau des garde-côtes philippins et un autre du bureau des pêches en tirant dessus au canon à eau près du récif de Scarborough, contrôlé par la Chine mais revendiqué par les Philippines.

Des exercices en forme de dissuasion 

Ces incidents font craindre un conflit plus large qui pourrait impliquer les Etats-Unis, allié des Philippines, et d'autres pays de la région, dans une période où la Chine renforce sa pression diplomatique et militaire autour de Taïwan.

La semaine dernière, les ministres de la Défense des Philippines, des Etats-Unis, du Japon et de l'Australie ont, à l'issue d'une réunion dans l'archipel américain d'Hawaï, publié un communiqué conjoint dénonçant la "conduite dangereuse et déstabilisante" de Pékin en mer de Chine méridionale.

"Les actions de la Chine dans les mers de Chine orientale et méridionale sont légitimes, légales et irréprochables", avait auparavant affirmé le 12 avril le ministère chinois des Affaires étrangères.

La semaine dernière, les forces américaines participant à Balikatan avaient tiré des roquettes de précision Himars depuis l'île occidentale de Palawan, face aux îles Spratleys également disputées.

Selon l'armée américaine, il s'agissait d'une répétition du déploiement rapide du système Himars sur les côtes philippines bordées par la mer de Chine méridionale afin de "sécuriser et de protéger le territoire, les eaux territoriales et les intérêts de la zone économique exclusive des Philippines".

"Les exercices militaires sont une forme de dissuasion", a déclaré le ministre philippin des Affaires étrangères, Enrique Manalo, dans un discours prononcé en son nom par un assistant lors d'un atelier public vendredi. "Plus nous simulons, moins nous agissons."

Le président philippin Ferdinand Marcos Jr. a quant à lui assuré lundi que son pays n'entendait pas "faire monter la tension" en mer de Chine méridionale.

"Nous ne suivrons pas les garde-côtes chinois et les navires chinois dans cette voie", a-t-il dit. "Nous n'avons pas l'intention d'attaquer qui que ce soit avec des canons à eau ou tout autre équipement offensif", a-t-il poursuivi, ajoutant que Manille continuera à utiliser exclusivement la voie diplomatique pour régler les différends avec Pékin.


La mésaventure d'un proviseur américain, cas d'école des dangers de l'IA

Les mots « Intelligence artificielle IA », miniature d’un robot et d’une main jouet sont représentés sur cette illustration prise le 14 décembre 2023 (Photo, Reuters).
Les mots « Intelligence artificielle IA », miniature d’un robot et d’une main jouet sont représentés sur cette illustration prise le 14 décembre 2023 (Photo, Reuters).
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  • Eric Eiswert, proviseur à Pikesville dans le Maryland, près de Washington, s'est retrouvé au coeur d'une violente polémique avec un enregistrement vocal
  • L'affaire, qui survient en pleine année électorale aux Etats-Unis, met en lumière la facilité avec laquelle les outils d'IA générative peuvent être employés pour nuire à tout un chacun

WASHINGTON: Après l'indignation provoquée dans un lycée américain par la diffusion de propos racistes attribués au proviseur, le vertige de découvrir que la bande sonore a été montée de toutes pièces. Cet épisode illustre les dangers d'une intelligence artificielle devenue accessible à tous.

Eric Eiswert, proviseur à Pikesville dans le Maryland, près de Washington, s'est retrouvé au coeur d'une violente polémique avec un enregistrement vocal -- qui se révélera un faux -- lui faisant prononcer des commentaires choquants contre des élèves juifs et des "enfants noirs ingrats".

L'affaire, qui survient en pleine année électorale aux Etats-Unis, met en lumière la facilité avec laquelle les outils d'IA générative peuvent être employés pour nuire à tout un chacun, et les difficultés auxquelles font face les autorités pour lutter contre de telles pratiques.

"Désormais, tout le monde est vulnérable", et non plus seulement les célébrités, alerte Hany Farid, professeur à l'Université de Californie à Berkeley (ouest).

"Il suffit d'une image pour ajouter une personne dans une vidéo, et 30 secondes d'audio pour cloner la voix de quelqu'un", poursuit le spécialiste en détection d'images et d'enregistrements manipulés numériquement, consulté par la police dans cette affaire.

Quand l'enregistrement fuite sur les réseaux sociaux en janvier, il devient rapidement viral. Une publication recueille des milliers de commentaires sur Instagram, et propulse l'école au coeur d'une polémique nationale.

Le militant des droits civiques DeRay McKesson réclame la démission du proviseur sur son compte X, suivi par près d'un million d'internautes. Il admettra s'être fait abuser.

Les messages haineux pleuvent sur les réseaux sociaux et les coups de fil menaçants se multiplient dans l'établissement. Le "monde serait meilleur si vous étiez sous terre", écrit ainsi un internaute au proviseur.

Ce dernier est placé en congés, son domicile mis sous protection. Contacté par l'AFP, il n'a pas répondu.

Vengeance 

"Je continue de m'inquiéter des dégâts provoqués par cette affaire", confie Billy Burke, directeur du syndicat représentant le proviseur.

Fin avril, Dazhon Darien, 31 ans, responsable sportif du lycée, a été arrêté par les autorités, accusé d'être à l'origine du faux. Les enquêteurs sont remontés jusqu'à lui grâce à l'adresse électronique qui a initialement partagé le fichier.

Il aurait agi pour se venger d'une enquête ouverte à son encontre par le proviseur sur des paiements suspects.

Le prévenu a mené des recherches sur des outils d'IA depuis le réseau informatique du lycée, selon l'acte d'accusation.

La bande sonore, selon l'analyse d'un expert consulté par la police, "contient des traces de contenu généré par l'IA, avec un montage humain a posteriori".

Cette affaire démontre la nécessité "d'adapter la loi aux avancées technologiques", a estimé le procureur local, Scott Shellenberger.

Les montages audio sont particulièrement difficiles à déceler. En janvier, un message diffusé par appels téléphoniques automatisés usurpant la voix du président Joe Biden incitait les électeurs démocrates de l'Etat du New Hampshire (nord-est) à s'abstenir lors des primaires pour du parti.

A Pikeville, l'affaire a secoué les habitants, "très proches les uns des autres", raconte Parker Bratton, l'entraîneur de golf du lycée.

"Il y a un seul président, mais il y a un million de proviseurs!", s'inquiète-t-il, "les gens se demandent +Que va-t-il m'arriver si quelqu'un décide tout simplement de détruire ma carrière?+".