Le désarroi des travailleuses sociales qui accompagnent les femmes victimes de violences

La médaillée d'or olympique française de judo Margaux Pinot tient une conférence de presse à Paris, le 2 décembre 2021, alors qu'elle accuse son partenaire et ex-entraîneur de violences et d'étranglement (AFP)
La médaillée d'or olympique française de judo Margaux Pinot tient une conférence de presse à Paris, le 2 décembre 2021, alors qu'elle accuse son partenaire et ex-entraîneur de violences et d'étranglement (AFP)
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Publié le Dimanche 13 février 2022

Le désarroi des travailleuses sociales qui accompagnent les femmes victimes de violences

  • «J'aime ce que je fais, je suis une militante des droits des femmes depuis des années. Mais à 51 ans je gagne 1.700 euros net par mois, et je me sens si mal considérée!» déplore une travailleuse sociale
  • Elles s'efforcent de trouver des hébergements provisoires à des femmes qui ont tout laissé derrière elles en fuyant le domicile conjugal, et veillent à chaque détail, jusqu'à laver elles-mêmes les draps des chambres entre deux occupantes

BONDY, France: "Les gens nous disent +c'est super ce que vous faites+. Mais cette admiration, ce n'est pas ça qui nous nourrit!". Dans une association d'aide aux femmes victimes de violences conjugales, près de Paris, des travailleuses sociales évoquent leur lassitude face à un métier qu'elles aiment, mais peu considéré et mal rémunéré.

"On nous relate des choses tellement horribles, ça finit par avoir un impact sur nos vies personnelles. C'est usant, émotionnellement", témoigne Sarah, qui depuis dix ans épaule au quotidien des femmes victimes au sein de l'association "SOS femmes 93", à Bondy (Seine-Saint-Denis).

"J'aime ce que je fais, je suis une militante des droits des femmes depuis des années. Mais à 51 ans je gagne 1.700 euros net par mois, et je me sens si mal considérée!", ajoute la travailleuse sociale. Comme des milliers de ses collègues du secteur médico-social, elle a fait grève début février pour dénoncer les salaires insuffisants, les conditions de travail difficiles et le manque d'attractivité de ces métiers.

Chez "SOS femmes 93" - association membre de la fédération FNSF qui gère la ligne d'appel 3919 -, une quarantaine de salariés se consacrent à l'accompagnement global, la mise en sécurité et l'hébergement de femmes victimes de violences conjugales.

Marjorie, Juliette, Marlène ou Myriam, qui comme Sarah refusent de donner leur nom de famille, animent des groupes de parole - où les femmes sont amenées à "déconstruire les mécanismes de l'emprise" - ou accompagnent les victimes dans leurs démarches au commissariat ou à la Caisse d'allocations familiales.

« Métier de cœur »

Elles s'efforcent de trouver des hébergements provisoires à des femmes qui ont tout laissé derrière elles en fuyant le domicile conjugal, et veillent à chaque détail, jusqu'à laver elles-mêmes les draps des chambres entre deux occupantes.

L'une dit son effroi quand un petit garçon, témoin d'une tentative de féminicide, lui a dit que "papa a fait pique-pique à maman", tout en mimant des coups de couteau. Une autre raconte avoir dû fournir un faux "alibi" à une femme pour lui permettre d'échapper à la surveillance de son conjoint violent et pouvoir ainsi venir dans les locaux de l'association.

Toutes soulignent "manquer de temps pour souffler", et être contraintes de "prioriser" pour parer au plus pressé. Les places d'hébergement, estiment ces salariées militantes, doivent nécessairement aller de pair avec un vrai accompagnement humain. Or, à cause des trop nombreux postes vacants, "chacun bricole dans son coin, et tout le monde craque", résume Sarah.

"C'est un métier de cœur et de passion. On sait pourquoi on va bosser le matin", souligne Marjorie. "Mais jusqu'à quel prix? On a tous les jours des demandes qu'on ne peut pas satisfaire, faute de places d'hébergement. Et on est si mal payées!"

Budgets très contraints

"J'ai un Bac+3, cinq ans d'ancienneté et je gagne environ 1.500 euros net", détaille Juliette. "A Paris ou en banlieue, avec un salaire pareil, c'est difficile de se loger décemment, en tout cas sans le salaire d'un conjoint".

"Comment bien accompagner des femmes plongées dans la précarité si nous sommes précaires, nous aussi?" renchérit Myriam.

Avec des rémunérations si peu attractives, les difficultés de recrutement sont énormes, soupire Brigitte Broux, la directrice de "SOS Femmes": sur 40 postes, 7,5 sont non pourvus, certains depuis plus de deux ans.

"On parle davantage de violences conjugales et de féminicides, et c'est tant mieux. Mais les moyens n'ont pas suivi. Les pouvoirs publics nous confient une mission sociale essentielle et la financent, mais insuffisamment: nos budgets sont très contraints", déplore-t-elle.  

Dans l'ensemble des secteurs social et médico-social, quelque 1,9 million de salariés travaillent ainsi au service de personnes fragilisées ou handicapées, ou de mineurs en danger. "Actuellement, 65.000 postes sont non pourvus mais ça risque d'empirer car nous aurons 150.000 départs en retraite d'ici trois ans", s'alarme Paul de Marnix, directeur de communication de Nexem, l'une des principales organisations professionnelles du secteur.

Pour remédier à ces difficultés persistantes, le Premier ministre Jean Castex a promis en novembre d'organiser une "conférence des métiers de l'accompagnement social et médico-social". Initialement prévue avant l5 janvier, puis repoussée, elle doit finalement avoir lieu le 18 février.


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».


Selon ManPowerGroup, l'IA pourrait réduire l'importance des « compétences » dans le recrutement

Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
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  • L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences ».
  • « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

PARIS : L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences », selon un dirigeant de ManPowerGroup.

En effet, « les compétences pourraient s'avérer obsolètes dans six mois », explique Tomas Chamorro-Premuzic, directeur de l'innovation du géant américain du travail temporaire, rencontré par l'AFP au salon Vivatech, à Paris, qui ferme ses portes samedi.  Selon lui, « il vaut mieux savoir que vous travaillez dur, que vous êtes curieux, que vous avez de bonnes aptitudes relationnelles et ça, l'IA peut vous aider à l'évaluer ».

Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

Cependant, les tâches informatiques (utilisation d'Internet, messagerie, etc.) pouvant être accomplies de manière autonome par des agents d'IA connaissent une « rapide expansion ». 

Dans ce contexte, les employeurs pourraient rechercher de plus en plus de salariés dotés de compétences hors de portée de l'IA, telles que le jugement éthique, le service client, le management ou la stratégie, comme l'indique une enquête de ManpowerGroup menée auprès de plus de 40 000 employeurs dans 42 pays et publiée cette semaine.

M. Chamorro-Premuzic déplore toutefois que ces compétences ne soient pas encore davantage mises en avant dans la formation. « Pour chaque dollar que vous investissez dans la technologie, vous devez investir huit ou neuf dollars dans les ressources humaines, la transformation culturelle, la gestion du changement », dit-il.

Les craintes d'un chômage de masse provoqué par l'IA restent par ailleurs exagérées à ce stade, estime le dirigeant, malgré certaines prédictions alarmistes.

D'après Dario Amodei, patron de la société d'intelligence artificielle Anthropic, cette technologie pourrait faire disparaître la moitié des emplois de bureau les moins qualifiés d'ici cinq ans. 

« Si l'histoire nous enseigne une chose, c'est que la plupart des prévisions sont fausses », répond M. Chamorro-Premuzic.

Concernant le recrutement, activité principale de ManPowerGroup, le dirigeant ajoute que « les agents d'intelligence artificielle ne deviendront certainement pas le cœur de notre métier dans un futur proche ». Il constate également que l'IA est utilisée par les demandeurs d'emploi.

« Des candidats sont capables d'envoyer 500 candidatures parfaites en une journée, de passer des entretiens avec leurs bots et de déjouer certains éléments des évaluations », énumère-t-il.