Mexique: malgré les menaces, le combat coûte que coûte des défenseurs de la nature

Des membres d'une brigade de vigilance au sanctuaire de Rosario, la maison d'hiver des papillons monarques, dans la municipalité d'Ocampo, dans l'État de Michoacan, au Mexique, le 11 février 2022. (Photo, AFP)
Des membres d'une brigade de vigilance au sanctuaire de Rosario, la maison d'hiver des papillons monarques, dans la municipalité d'Ocampo, dans l'État de Michoacan, au Mexique, le 11 février 2022. (Photo, AFP)
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Publié le Vendredi 18 février 2022

Mexique: malgré les menaces, le combat coûte que coûte des défenseurs de la nature

  • L'enquête est toujours en cours sur la mort de l'agronome de 50 ans, dont le corps a été retrouvé en janvier 2020 au fond d'un puits
  • Cette année-là, trente militants environnementaux ont été tués dans le pays, selon l'ONG britannique Global Witness, soit une augmentation de 67% par rapport à 2019

OCAMPO, Mexique : "Je te tuerai!": malgré les menaces, les défenseurs mexicains de l'environnement poursuivent coûte que coûte leur combat, inspirés par l'engagement du militant écologiste Homero Gomez, vraisemblablement assassiné pour avoir consacré sa vie à la préservation des papillons monarques.

L'enquête est toujours en cours sur la mort de l'agronome de 50 ans, dont le corps a été retrouvé en janvier 2020 au fond d'un puits.

Cette année-là, trente militants environnementaux ont été tués dans le pays, selon l'ONG britannique Global Witness, soit une augmentation de 67% par rapport à 2019.

Ces chiffres font du Mexique le deuxième pays le plus dangereux pour les défenseurs de l'environnement derrière la Colombie, selon l'ONG.

"L'héritage que nous a laissé Homero et l'initiative qu'il avait lancée vit en chacun de nous", confie à l'AFP Olegario Sanchez, un ami de l'agronome qui participe à une ronde de surveillance du sanctuaire des papillons monarques (Danaus plexippus) d'El Rosario.

Situé dans les montagnes, sur un terrain de la municipalité d'Ocampo, dans l'Etat de Michoacan (ouest), le sanctuaire s'étend sur 2 500 hectares. Il est géré par les habitants organisés en divers comités dédiés à la surveillance, à l'administratif, au tourisme...

Homero Gomez a dédié sa vie à la protection de l'habitat des monarques, papillons noir et orange qui parcourent chaque année un trajet de 5 000 km depuis le Canada pour hiverner au Mexique de novembre à mars.

Dénonçant régulièrement les bûcherons illégaux qui mettent en péril l'habitat des papillons, il avait disparu le 13 janvier. Son corps a été découvert deux semaines plus tard au fond d'un puits.

Le parquet de Michoacan, qui n'a pas répondu aux sollicitations de l'AFP, s'est jusque-là borné à indiquer que la mort était due à une "asphyxie mécanique par submersion (...) avec un traumatisme crânien". Pour sa famille, il ne fait aucun doute qu'il s'agit d'un meurtre.

"Ce n'est pas un accident. Il a été assassiné. Je ne sais pas qui ils veulent couvrir ni ce qu'il se passe", a déclaré à l'AFP Rebeca Valencia, la veuve d'Homero Gomez, qui craint que l'affaire ne soit classée.

Près d'une des innombrables grappes de papillons accrochés aux arbres, les compagnons d'Homero se souviennent avec nostalgie de leur collègue et ami.

"Nous sommes 260 et (...) nous continuons sur le même chemin: poursuivre son travail" de surveillance et de reforestation, raconte Olegario Sanchez.

Chaque jour, une dizaine d'hommes patrouillent dans le sanctuaire et font des signalements aux autorités lorsqu'ils repèrent des forestiers illégaux.

Armés de machettes, ils parcourent quotidiennement jusqu'à vingt kilomètres, de jour comme de nuit. Outre les bûcherons clandestins, souvent liés à des groupes criminels, ils veillent à ce que le bétail ne mange pas les replantations de pins et d'oyamels, des conifères endémiques de la région, et ils guettent les départs d'incendies.

«C'est illégal»

Même si la défense de l'environnement fait peser une menace sur sa vie, Filiberta Nevado est déterminée à poursuivre son combat pour la protection de la forêt de Zacacuautla, dans l'Etat d'Hidalgo (centre).

En octobre 2020, dans cette forêt d'eucalyptus, pins, pins américains et chênes verts, un bûcheron clandestin l'a abordée et lui a lancé: "S'il m'arrive quelque chose, je te tuerai!"

La femme de 66 ans guide un groupe de journalistes pour leur montrer les zones les plus touchées par les coupes illégales. Sur le chemin, l'AFP remarque la présence d'hommes munis de tronçonneuses, qui quittent les lieux dès qu'ils aperçoivent le groupe.

"C'est illégal", s'exclame Filiberta en montrant des dizaines de troncs d'arbres éparpillés le long du chemin de terre.

Plus loin, devant des dizaines de souches, la militante explique que son combat consiste à dénoncer les exploitants forestiers. Mais elle se plaint que les autorités prennent rarement en compte ses dénonciations.

"Maintenant, je peux me tenir ici sans pleurer mais cela me rend infiniment triste. Non pas pour ma génération (...) mais pour les générations à venir qui souffriront du manque d'eau" aggravé par la déforestation, dit-elle.

"Je ne peux pas me laisser dominer par la peur", assure Filiberta. "Non, je préfère être dominée par la tristesse et la tristesse me pousse" à agir.


A l'ONU, l'enquêtrice en chef sur Gaza a encore espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés

Navi Pillay, la présidente de la commission d'enquête indépendante de l'ONU qui a accusé cette semaine Israël de commettre un génocide à Gaza, ne perd pas espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés. (AFP)
Navi Pillay, la présidente de la commission d'enquête indépendante de l'ONU qui a accusé cette semaine Israël de commettre un génocide à Gaza, ne perd pas espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés. (AFP)
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  • Selon les enquêteurs, le président israélien, Isaac Herzog, le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, et l'ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, ont "incité à commettre un génocide"
  • Israël a "rejeté catégoriquement" ce "rapport biaisé et mensonger"

GENEVE: Navi Pillay, la présidente de la commission d'enquête indépendante de l'ONU qui a accusé cette semaine Israël de commettre un génocide à Gaza, ne perd pas espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés.

"La justice est lente", a affirmé l'ancienne juge sud-africaine, dans un entretien à l'AFP.

Mais "comme l'a dit (Nelson) Mandela, cela semble toujours impossible, jusqu'à ce qu'on le fasse. Je considère qu'il n'est donc pas impossible qu'il y ait des arrestations et des procès" à l'avenir, a-t-elle ajouté.

La commission d'enquête, qui ne s'exprime pas au nom de l'ONU, a établi qu'Israël commet un génocide à Gaza depuis le début de la guerre déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas du 7-Octobre.

Selon les enquêteurs, le président israélien, Isaac Herzog, le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, et l'ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, ont "incité à commettre un génocide".

Israël a "rejeté catégoriquement" ce "rapport biaisé et mensonger".

La Cour pénale internationale (CPI) avait déjà émis des mandats d'arrêt contre MM. Netanyahu et Gallant.

Mme Pillay reconnaît que la CPI dépend des Etats pour la mise en œuvre des mandats d'arrêt car elle n'a "ni shérif, ni forces de police".

Mais elle veut y croire, faisant une comparaison : "Je n'aurais jamais pensé que l'apartheid prendrait fin de mon vivant".

"Tellement douloureux" 

Jeune avocate d'origine indienne dans l'Afrique du Sud de l'apartheid, devenue juge et Haute-Commissaire aux droits de l'homme à l'ONU (2008-2014), Mme Pillay, 83 ans, a l'art de traiter des dossiers difficiles.

Sa carrière l'a menée des cours sud-africaines, où elle a défendu les activistes anti-apartheid et obtenu des droits cruciaux pour les prisonniers politiques, au Tribunal pénal international pour le Rwanda, en passant par la CPI.

Sa mission est des plus ardues depuis qu'elle préside, depuis sa création en 2021, la commission chargée par le Conseil des droits de l'homme de l'ONU d'enquêter sur les atteintes aux droits dans les territoires palestiniens et en Israël.

Elle déplore d'avoir été qualifiée d'"antisémite" depuis et dénonce les appels sur les réseaux sociaux de ceux qui réclament que les Etats-Unis la sanctionnent, comme Washington l'a fait pour une rapporteure de l'ONU, des juges de la CPI et des ONG palestiniennes.

Mais le plus dur, pour elle et son équipe, est de visionner les vidéos provenant de Gaza.

"Nous nous inquiétons pour notre personnel. Nous les surmenons et c'est traumatisant ces vidéos", dit-elle, citant "des violences sexuelles contre les femmes" et "les médecins qui sont dénudés par l'armée".

"C'est tellement douloureux" à regarder même si "on ne peut pas comparer notre souffrance à celle de ceux qui l'ont vécue", poursuit-elle.

Alors qu'elle présidait le Tribunal pénal international pour le Rwanda, des vidéos de civils abattus ou torturés l'ont aussi "marqué à vie".

Selon elle, la comparaison entre le Rwanda et Gaza ne s'arrête pas là : "Je vois des similitudes. Ce sont les mêmes méthodes".

Du Rwanda à Gaza 

"Dans le cas du Rwanda, c'était le groupe des Tutsi qui était visé. Ici, tous les éléments de preuve montrent que c'est le groupe palestinien qui est visé", dit-elle.

Elle mentionne aussi les propos de dirigeants israéliens qui "déshumanisent" les Palestiniens en les comparant à des "animaux". Comme lors du génocide rwandais, lorsque les Tutsi étaient "traités de cafards", ce qui revient à dire qu'"il est acceptable de les tuer", dénonce-t-elle.

Mme Pillay a indiqué qu'à l'avenir la commission entendait se pencher aussi sur des crimes supposés commis par d'autres "individus", expliquant qu'une grande partie des preuves a été publiée par les soldats israéliens eux-mêmes sur les réseaux sociaux.

Elle déplore toutefois que, faute de financements, la commission n'ait pas pu encore examiner si certains Etats qui fournissent de l'armement à Israël pouvaient être considérés complices.

Un travail qu'elle laisse à son successeur. Elle quitte la commission le 3 novembre en raison de son âge et de problèmes de santé.

Avant cela, elle doit présenter un dernier rapport devant l'Assemblée générale de l'ONU à New York. "J'ai déjà un visa", confie-t-elle.


Gaza: Bruxelles propose de taxer des biens importés d'Israël dans l'UE et de sanctionner deux ministres

La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu.  "Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas. (AFP)
La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu. "Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas. (AFP)
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  • L'exécutif européen avait déjà proposé en août 2024 de sanctionner ces deux ministres. Une tentative vaine, faute d'accord au sein des 27 Etats membres
  • Ces sanctions pour être adoptées requièrent l'unanimité des pays de l'UE

BRUXELLES: La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu.

"Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas.

Les mesures commerciales devraient, si elles étaient adoptées par les pays de l'UE, renchérir de quelque 227 millions d'euros le coût de certaines importations israéliennes, principalement d'origine agricole.

La Commission européenne a également proposé de sanctionner deux ministres israéliens d'extrême droite, Itamar Ben-Gvir, chargé de la Sécurité nationale, et Bezalel Smotrich chargé des Finances, selon un responsable de l'UE.

L'exécutif européen avait déjà proposé en août 2024 de sanctionner ces deux ministres. Une tentative vaine, faute d'accord au sein des 27 Etats membres. Ces sanctions pour être adoptées requièrent l'unanimité des pays de l'UE.

"Tous les États membres conviennent que la situation à Gaza est intenable. La guerre doit cesser", a toutefois plaidé mercredi Mme Kallas. Ces propositions seront sur la table des représentants des 27 Etats membres dès mercredi.

Les sanctions dans le domaine commercial ne nécessitent que la majorité qualifiée des Etats membres. Mais là encore, un accord sera difficile à obtenir, jugent des diplomates à Bruxelles.

Des mesures beaucoup moins ambitieuses, également présentées par la Commission européenne il y a quelques semaines, n'avaient pas trouvé de majorité suffisante pour être adoptées. Avait notamment fait défaut le soutien de pays comme l’Allemagne ou l'Italie.

Les exportations israéliennes vers l'UE, son premier partenaire commercial, ont atteint l'an dernier 15,9 milliards d'euros.

Seuls 37% de ces importations seraient concernés par ces sanctions, si les 27 devaient donner leur feu vert, essentiellement dans le secteur agro-alimentaire.


Trump s'en prend à des magistrats après l'assassinat de Charlie Kirk

Cette capture d'écran provenant de la diffusion en direct du tribunal de l'Utah montre Tyler Robinson, suspect dans le meurtre du militant politique Charlie Kirk, assistant à une audience à distance depuis sa cellule de prison à Provo, dans l'Utah, le 16 septembre 2025. (AFP)
Cette capture d'écran provenant de la diffusion en direct du tribunal de l'Utah montre Tyler Robinson, suspect dans le meurtre du militant politique Charlie Kirk, assistant à une audience à distance depuis sa cellule de prison à Provo, dans l'Utah, le 16 septembre 2025. (AFP)
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  • Dans le viseur du locataire de la Maison Blanche, sur son réseau Truth, se trouvent deux de ses cibles privilégiées : l'ex-procureur spécial Jack Smith, et le juge Juan Merchan qui avait présidé son procès pour des paiements cachés à une star du X
  • Donald Trump reproche à Jack Smith d'avoir ouvert il y a quelques années une enquête sur Turning Point, le mouvement créé par l'influenceur ultraconservateur américain Charlie Kirk, assassiné le 10 septembre

WASHINGTON: Le président américain Donald Trump a de nouveau stigmatisé mercredi des magistrats qui l'avaient poursuivi et jugé durant le mandat de Joe Biden, prenant prétexte du récent assassinat de l'influenceur ultraconservateur Charlie Kirk.

Dans le viseur du locataire de la Maison Blanche, sur son réseau Truth, se trouvent deux de ses cibles privilégiées : l'ex-procureur spécial Jack Smith, et le juge Juan Merchan qui avait présidé son procès pour des paiements cachés à une star du X.

Donald Trump reproche à Jack Smith d'avoir ouvert il y a quelques années une enquête sur Turning Point, le mouvement créé par l'influenceur ultraconservateur américain Charlie Kirk, assassiné le 10 septembre.

"Pourquoi le merveilleux Turning Point a-t-il été mis sous ENQUÊTE par le +Dérangé+ Jack Smith et l'administration Biden Corrompue et Incompétente ?", s'interroge Donald Trump dans un message sur Truth.

"Ils ont essayé de forcer Charlie, ainsi que de nombreuses autres personnes et mouvements, à cesser leurs activités. Ils ont instrumentalisé le ministère de la Justice contre les opposants politiques de Joe Biden, y compris MOI!", s'offusque-t-il encore.

Jack Smith, lui-même visé par une enquête administrative depuis le retour au pouvoir de Donald Trump, avait été nommé procureur spécial en 2022.

Il avait lancé des poursuites fédérales contre Donald Trump, pour tentatives illégales d'inverser les résultats de l'élection de 2020 et rétention de documents classifiés après son départ de la Maison Blanche.

Les poursuites avaient été abandonnées après la réélection de Trump, en vertu de la tradition consistant à ne pas poursuivre un président en exercice. Jack Smith avait ensuite démissionné du ministère de la Justice.

Sans jamais le citer nommément, le président Trump s'en prend également sur le réseau Truth à Juan Merchan, qui a présidé le procès Stormy Daniels. Le président avait été reconnu coupable de 34 chefs d'accusation, pour des paiements cachés de 130.000 dollars à l'ex-star du X.

Donald Trump exprime le souhait que le juge "corrompu" paie "un jour un prix très élevé pour ses actions illégales".

Depuis l'assassinat de Charlie Kirk, le camp républicain redouble de véhémence contre les démocrates et organisations progressistes, accusés de promouvoir la violence politique.

"La gauche radicale a causé des dégâts énormes au pays", a affirmé le président républicain mardi, avant son départ au Royaume-Uni. "Mais nous y remédions".

Selon le Washington Post, un élu républicain du Wisconsin a déposé une proposition de loi visant à bloquer les fonds fédéraux aux organisations employant des personnes "qui tolèrent et célèbrent la violence politique".

Le New York Times précise pour sa part que sont notamment dans le viseur l'Open Society Foundation du milliardaire George Soros ainsi que la Ford Foundation, qui toutes deux financent des organisations de gauche.