En Aveyron, des formations de dressage de chiens de troupeau pour aider les éleveurs

Marie dresse son border collie à diriger un troupeau de mouton. (Photo, Anne Ilcinkas)
Marie dresse son border collie à diriger un troupeau de mouton. (Photo, Anne Ilcinkas)
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Publié le Vendredi 18 février 2022

En Aveyron, des formations de dressage de chiens de troupeau pour aider les éleveurs

  • «Si je m’installe avec un chien qui est déjà prêt, ce sera autant de temps de gagner pour la suite»
  • «Savoir diriger son troupeau en sécurité est un besoin de base pour les agriculteurs»

SAINT-IZAIRE, France: «Stop! C’est bien, c’est bien.» Dans un enclos, Marie récompense Ridime, son border collie, qui a obéi à sa maîtresse et a su diriger les quatre brebis. «Là, le chien a compris que s’il avance, il fait reculer les brebis», explique Didier Fischer, le formateur, derrière la barrière métallique de l’enclos. 
Il est 10 h 30 ce mardi pluvieux d’automne. Bien emmitouflés dans leurs vestes, une dizaine d’éleveurs attendent leur tour dans un pré pentu qui surplombe le Tarn qui coule en contrebas, sauvage et majestueux. Ils sont venus assister à un stage de perfectionnement de dressage de chiens de troupeau. 

Marie Collin cherche des terres pour son projet d’installation agricole en élevage ovin depuis quatre ans. Ce qu’elle veut, c’est élever des brebis en plein air et donc avoir un chien capable d’aller chercher les brebis. En attendant de trouver son terrain, elle s’entraîne depuis un an avec Ridime, sa chienne. «Pour connaître des personnes qui travaillent beaucoup avec les chiens, je sais que c’est un outil de travail sur une ferme qui est assez extraordinaire. Si je m’installe avec un chien qui est déjà prêt, ce sera autant de temps de gagner pour la suite», explique-t-elle. En effet, pour Didier Fischer, lui-même éleveur de brebis: «Dans le milieu agricole, le principal obstacle, c’est le temps. On est toujours en train de courir après la montre et c’est difficile de dégager du temps pour s’occuper de son chien et faire du dressage. C’est d’ailleurs souvent pour ça qu’on est en situation d’échec.»


Alors Marie ne rate aucune séance de la formation de dressage de chiens de troupeau. «Le plus compliqué, c’est de réussir à s’entraîner seule à la maison, sans personne pour orienter les exercices. On se sent parfois un peu démuni, on ne sait pas comment réagir pour ne pas faire de bêtise vis-à-vis du chien, ne pas lui donner de mauvaises habitudes.» Ce jour-là, la jeune future éleveuse est contente: «J’avais perdu mon stop, je l’ai retrouvé!»

Dans les fermes de l’Aveyron et d’ailleurs, le chien fait partie du paysage, mais il est peu utilisé comme outil de travail. «Il y a de nombreux éleveurs qui ont des chiens pour manipuler les brebis, mais il y en existe très peu qui sachent s’en servir», estime ainsi Daniel Saint-Geniez, ancien président de l’Association départementale pour le développement de l’emploi agricole et rural de l’Aveyron(Addear), lui-même éleveur de brebis, qu’il met d’ailleurs à disposition ainsi que son terrain pour la formation. «Souvent, s’ils ont la chance d’avoir un chien qui travaille correctement, ils le laissent faire et c’est lui qui naturellement fait le job, va chercher les brebis, les ramène, sans trop d’ordres ni de contraintes. Mais la plupart des éleveurs ont des chiens qui ne travaillent pas bien. Ils sont très démunis et incapables de bouger les brebis rien qu’avec leur chien, alors ils travaillent avec le quad, avec des membres de la famille qu’ils mettent à contribution; ils installent des ficelles pour guider le troupeau. Il y a beaucoup de petites astuces, mais ça prend énormément de temps, alors qu’avec un chien c’est très rapide.»


C’est pour réduire la pénibilité d’un travail qui n’en manque pas que l’Addear met en œuvre ces formations depuis une dizaine d’années maintenant. «Savoir diriger son troupeau en sécurité est un besoin de base pour les agriculteurs», estime ainsi Élisa Michel, coordinatrice de l’Addear 12. «C’est une vraie facilité dans le travail. On a des éleveurs qui ont un chien de troupeau et qui nous disent qu’ils ne peuvent plus s’en passer.» Une cinquantaine d’éleveurs suivent à l’année cette formation, financée par Vivea, le fonds de formation pour les agriculteurs. 

Pour les aider davantage, l’Addear vient de publier un guide, avec pour ambition de «mettre toute l’information par écrit, sur papier, pour le plus grand nombre», rédigé par un groupe de paysans, dont Daniel Saint-Geniez. «Avec Yves, originaire du Lot; Didier, du Sud-Est et Guy de Bretagne, nous avons travaillé deux ans sur ce guide, pendant le confinement, sur Zoom, pour faire quelque chose d’utile pour les paysans. En Angleterre, il existe énormément de livres sur le sujet, mais aucun en France.» Finalement, ce sont cinq chapitres et une trentaine de fiches pour accompagner les éleveurs dans leur dressage. 

Le meilleur dressage commence avec le choix d’un chien. «Les borders collies ont pris le dessus sur toutes les races bergères françaises», explique Daniel Saint-Geniez, «car il a de bonnes aptitudes au travail, et l’envie de travailler, qui s’acquiert et se perpétue au fil des générations». Pour l’éleveur, ce qui est important, ce ne sont pas les caractéristiques physiques du chien, mais sa capacité et son envie de travailler, ainsi que son agressivité. Il faut que le chien soit sociable aussi.

En effet, pour Didier Fisher, il faut installer une relation triangulaire entre l’homme ou la femme, le chien et le troupeau. «L’éleveur doit connaître la réaction des animaux et connaître le chien pour arriver à faire quelque chose d’harmonieux. Tout doit être fluide», explique-t-il. «Chacun a son rôle: les chiens, quand ils sont bien menés, apaisent les animaux. Sinon, c’est l’humain qui fait le travail du chien et il ne le fait pas aussi bien. Car il n’a pas cet instinct, cette rapidité à gérer les situations.» Les techniques de dressage ont évolué. «Quand j’ai commencé, il y avait beaucoup d’effet de meutes, donc le jeune chien faisait comme le plus vieux. Tout cela a changé désormais; il faut que ce soit nous le référent, et pas un autre chien.»

«Le travail de dressage peut durer d’un à deux ans», estime Daniel Saint-Geniez, «mais il va nous rendre service pendant dix ans, donc c’est un investissement sur l’avenir.» Pour l’éleveur, qui s’apprête à partir à la retraite, cela permet également de sortir davantage les brebis de la bergerie, et donc de consommer moins de foin, tout en entretenant les pâturages. 

Dans le champ en pente, un rayon de soleil perce à travers les nuages. C’est au tour de Rico et de sa maîtresse Perrine d’entrer dans l’enclos. Le jeune chien est vif, fougueux. L’objectif est de l’amener à travailler dans le calme, à contrôler les brebis au lieu de les chasser.
 


France: le cimentier Lafarge jugé à partir de mardi pour financement du terrorisme

Une multinationale en procès, dans une affaire inédite: le groupe français Lafarge et d'anciens hauts responsables comparaissent à partir de mardi à Paris, soupçonnés d'avoir payé des groupes jihadistes, dont l'État islamique (EI), en Syrie jusqu'en 2014 dans le but d'y maintenir l'activité d'une cimenterie. (AFP)
Une multinationale en procès, dans une affaire inédite: le groupe français Lafarge et d'anciens hauts responsables comparaissent à partir de mardi à Paris, soupçonnés d'avoir payé des groupes jihadistes, dont l'État islamique (EI), en Syrie jusqu'en 2014 dans le but d'y maintenir l'activité d'une cimenterie. (AFP)
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  • Aux côtés de Lafarge, avalé en 2015 par le groupe suisse Holcim, seront jugés au tribunal correctionnel de Paris l'ancien PDG du cimentier, Bruno Lafont, cinq ex-responsables de la chaîne opérationnelle ou de la chaîne de sûreté et deux intermédiaires
  • Dans ce dossier, ils devront répondre de financement d'entreprise terroriste et, pour certains, de non-respect de sanctions financières internationales

PARIS: Une multinationale en procès, dans une affaire inédite: le groupe français Lafarge et d'anciens hauts responsables comparaissent à partir de mardi à Paris, soupçonnés d'avoir payé des groupes jihadistes, dont l'État islamique (EI), en Syrie jusqu'en 2014 dans le but d'y maintenir l'activité d'une cimenterie.

Aux côtés de Lafarge, avalé en 2015 par le groupe suisse Holcim, seront jugés au tribunal correctionnel de Paris l'ancien PDG du cimentier, Bruno Lafont, cinq ex-responsables de la chaîne opérationnelle ou de la chaîne de sûreté et deux intermédiaires syriens, dont l'un est visé par un mandat d'arrêt international et devrait donc être absent au procès.

Dans ce dossier, ils devront répondre de financement d'entreprise terroriste et, pour certains, de non-respect de sanctions financières internationales.

Le groupe français est soupçonné d'avoir versé en 2013 et 2014, via sa filiale syrienne Lafarge Cement Syria (LCS), plusieurs millions d'euros à des groupes rebelles jihadistes dont certains, comme l'EI et Jabhat al-Nosra, ont été classés comme "terroristes", afin de maintenir l'activité d'une cimenterie à Jalabiya, dans le nord du pays.

La société avait investi 680 millions d'euros dans ce site, dont la construction a été achevée en 2010.

Plaintes 

Alors que les autres multinationales avaient quitté le pays en 2012, Lafarge n'a évacué cette année-là que ses employés de nationalité étrangère, et maintenu l'activité de ses salariés syriens jusqu'en septembre 2014, date à laquelle l'EI a pris le contrôle de l'usine.

Dans ce laps de temps, LCS aurait rémunéré des intermédiaires pour s'approvisionner en matières premières auprès de l'EI et d'autres groupes, et pour que ces derniers facilitent la circulation des employés et des marchandises.

L'information judiciaire avait été ouverte à Paris en 2017 après plusieurs révélations médiatiques et deux plaintes en 2016, une du ministère de l'Économie pour violation d'embargo, et l'autre de plusieurs associations et de onze anciens salariés de LCS pour financement du terrorisme.

Le nouveau groupe, issu de la fusion de 2015, qui a toujours pris soin de dire qu'il n'avait rien à voir avec les faits antérieurs à cette opération, avait entretemps lancé une enquête interne.

Confiée aux cabinets d'avocats américain Baker McKenzie et français Darrois, elle avait conclu en 2017 à des "violations du code de conduite des affaires de Lafarge".

Et en octobre 2022, Lafarge SA avait plaidé coupable aux États-Unis d'avoir versé à l'EI et Jabhat Al-Nosra près de 6 millions de dollars, et accepté d'y payer une sanction financière de 778 millions de dollars.

Une décision dénoncée par plusieurs prévenus du dossier français, à commencer par Bruno Lafont, qui conteste avoir été informé des paiements aux groupes terroristes.

Plus de 200 parties civiles 

Selon ses avocats, ce plaider-coupable, sur lequel s'appuient en partie les juges d'instruction français dans leur ordonnance, "est une atteinte criante à la présomption d'innocence, qui jette en pâture les anciens cadres de Lafarge" et avait "pour objectif de préserver les intérêts économiques d'un grand groupe".

Pour la défense de l'ex-PDG, le procès qui s'ouvre permettra d'"éclaircir" plusieurs "zones d'ombre du dossier", comme le rôle des services de renseignement français.

Les magistrats instructeurs ont estimé que si des remontées d'informations avaient eu lieu entre les responsables sûreté de Lafarge et les services secrets sur la situation autour du site, cela ne démontrait "absolument pas la validation par l'Etat français des pratiques de financement d'entités terroristes mises en place par Lafarge en Syrie".

Au total, 241 parties civiles se sont à ce jour constituées dans ce dossier. "Plus de dix ans après les faits, les anciens salariés syriens pourront enfin témoigner de ce qu'ils ont enduré: les passages de check-points, les enlèvements et la menace permanente planant sur leurs vies", souligne Anna Kiefer, de l'ONG Sherpa.

Lafarge encourt jusqu'à 1,125 million d'euros d'amende pour le financement du terrorisme. Pour la violation d'embargo, l'amende encourue est nettement plus lourde, allant jusqu'à 10 fois le montant de l'infraction qui sera retenu in fine par la justice.

Un autre volet de ce dossier est toujours à l'instruction, le groupe ayant aussi été inculpé pour complicité de crimes contre l'humanité en Syrie et en Irak.


Gérald Darmanin visé par une plainte d'avocats pour son soutien implicite à Sarkozy

Ce collectif d'une trentaine d'avocats se dit dans sa plainte, portée par Me Jérôme Karsenti, "particulièrement indigné par les déclarations du garde des Sceaux" faisant part "publiquement de sa compassion à l'égard de M. Sarkozy en soulignant les liens personnels qu'ils entretiennent". (AFP)
Ce collectif d'une trentaine d'avocats se dit dans sa plainte, portée par Me Jérôme Karsenti, "particulièrement indigné par les déclarations du garde des Sceaux" faisant part "publiquement de sa compassion à l'égard de M. Sarkozy en soulignant les liens personnels qu'ils entretiennent". (AFP)
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  • Le garde des Sceaux a rencontré mercredi à la prison de la Santé à Paris l'ancien président de la République, un de ses mentors en politique
  • Mais la plainte des avocats est née bien avant, juste après des déclarations de M. Darmanin sur France Inter le 20 octobre, à la veille de l'incarcération de M. Sarkozy

PARIS: Ils accusent Gérald Darmanin de "prendre position": un collectif d'avocats a porté plainte auprès de la Cour de justice de la République (CJR) contre le ministre de la Justice pour son soutien implicite à Nicolas Sarkozy, à qui il a rendu visite en prison.

Le garde des Sceaux a rencontré mercredi à la prison de la Santé à Paris l'ancien président de la République, un de ses mentors en politique.

Mais la plainte des avocats est née bien avant, juste après des déclarations de M. Darmanin sur France Inter le 20 octobre, à la veille de l'incarcération de M. Sarkozy.

En confiant ce jour-là sa "tristesse" après la condamnation de M. Sarkozy et en annonçant lui rendre prochainement visite en prison, ce qu'il a fait depuis, M. Darmanin a "nécessairement pris position dans une entreprise dont il a un pouvoir d'administration", stipule la plainte que l'AFP a pu consulter.

M. Darmanin indiquait qu'il irait "voir en prison" M. Sarkozy pour s'inquiéter "de ses conditions de sécurité". Et d'ajouter: "J'ai beaucoup de tristesse pour le président Sarkozy", "l'homme que je suis, j'ai été son collaborateur, ne peut pas être insensible à la détresse d'un homme".

Ce collectif d'une trentaine d'avocats se dit dans sa plainte, portée par Me Jérôme Karsenti, "particulièrement indigné par les déclarations du garde des Sceaux" faisant part "publiquement de sa compassion à l'égard de M. Sarkozy en soulignant les liens personnels qu'ils entretiennent".

En "s'exprimant publiquement quant à sa volonté de rendre visite à M. Sarkozy en détention" ainsi "qu'en lui apportant implicitement son soutien", M. Darmanin a "nécessairement pris position" dans une entreprise dont il a aussi "un pouvoir de surveillance en tant que supérieur hiérarchique du parquet", déroulent les plaignants.

Juridiquement, ce collectif d'avocats porte plainte contre M. Darmanin pour "prise illégale d'intérêts", via une jurisprudence considérant que "l'intérêt" peut "être moral et plus précisément amical".

"Préjudice" 

"Il ne fait pas de doute que cet intérêt est de nature à compromettre l'impartialité et l'objectivité de M. Darmanin qui, en tant que ministre de la Justice, ne peut prendre position de cette manière dans une affaire pendante", argumentent les avocats.

Condamné le 25 septembre à cinq ans d'emprisonnement dans le dossier libyen pour association de malfaiteurs, l'ancien président a depuis déposé une demande de remise en liberté, que la justice doit examiner dans les prochaines semaines, avant son procès en appel en 2026.

Les propos de M. Darmanin sur France Inter avaient déjà ému la magistrature. Le plus haut procureur de France, Rémy Heitz, y avait vu un "risque d'obstacle à la sérénité" et donc "d'atteinte à l'indépendance des magistrats".

"S'assurer de la sécurité d'un ancien président de la République en prison, fait sans précédent, n'atteint en rien à l'indépendance des magistrats mais relève du devoir de vigilance du chef d'administration que je suis", s'était déjà défendu M. Darmanin sur X.

Pour le collectif d'avocats, "les déclarations" du ministre de la Justice, "suivies" de sa "visite rendue à la prison de la Santé", sont "susceptibles de mettre à mal la confiance que les justiciables ont dans la justice et leurs auxiliaires", que sont notamment les avocats.

Les "agissements" de M. Darmanin leur causent "ainsi un préjudice d'exercice et d'image qui rend nécessaire le dépôt de cette plainte auprès de la commission des requêtes" de la CJR, peut-on encore lire dans la plainte.

La CJR est la seule juridiction habilitée à poursuivre et juger les membres du gouvernement pour les crimes et délits commis dans l'exercice de leurs fonctions.


Zucman, patrimoine et retraites, "journée majeure" vendredi à l'Assemblée

Des députés assistent à l'examen des textes par la "niche parlementaire" du groupe d'extrême droite Rassemblement national, à l'Assemblée nationale, la chambre basse du parlement français, à Paris, le 30 octobre 2025. (AFP)
Des députés assistent à l'examen des textes par la "niche parlementaire" du groupe d'extrême droite Rassemblement national, à l'Assemblée nationale, la chambre basse du parlement français, à Paris, le 30 octobre 2025. (AFP)
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  • L’Assemblée nationale débat d’une taxation du patrimoine, au cœur d’un bras de fer entre le gouvernement et le PS, qui menace de censure en cas de refus d’imposer les très hauts patrimoines
  • En parallèle, la suspension de la réforme des retraites est examinée en commission, condition posée par le PS pour éviter une crise politique majeure, mais son adoption reste incertaine

PARIS: Deux gros morceaux pour le prix d'un: les députés débattent vendredi dans l'hémicycle de taxation du patrimoine, sur fond d'ultimatum du PS pour davantage de "justice fiscale", et une partie des parlementaires doivent se prononcer en commission sur la suspension de la réforme des retraites, autre clé d'une non-censure.

Dès 9H00, les députés rouvriront les débats sur le projet de budget de l'Etat, avec la question sensible de la fiscalité du patrimoine et la désormais fameuse taxe Zucman, après avoir approuvé ces derniers jours plusieurs taxes sur les grandes entreprises ou les géants des technologies.

Signe de l'importance du moment, le Premier ministre Sébastien Lecornu devrait se rendre à l'Assemblée dans la journée pour participer aux débats, selon son entourage, alors que le PS menace de censurer en cas de refus du gouvernement d'imposer les hauts patrimoines.

"La journée est majeure", souligne un ministre.

Au menu notamment, une taxe proposée par le gouvernement sur certaines holdings, des sociétés qui détiennent des participations dans d'autres entreprises, et qui fait débat dans son propre camp.

Puis viendront des propositions de tous bords. Le Rassemblement national et le MoDem proposeront par exemple leurs versions d'un impôt sur la fortune. La gauche défendra entre autres l'instauration de la taxe de l'économiste Gabriel Zucman, impôt minimum de 2% sur les patrimoines de plus de 100 millions d'euros.

- "Troisième voie" -

Les socialistes proposeront en sus leur version de compromis au camp gouvernemental: 3% à partir de 10 millions d'euros, mais en excluant les entreprises innovantes et familiales.

Philippe Brun (PS), négociateur pour son groupe sur le budget, estime son rendement à "15 milliards", une estimation nettement rehaussée pour cette Zucman bis par rapport à de précédents calculs.

Mais elle peine à convaincre le reste de la gauche. "On n'a jamais été contre voter des amendements de repli" mais "c'est une taxe passoire", estime Eric Coquerel, président LFI de la commission des Finances.

Et l'horizon paraît bouché face à une levée de boucliers au centre et au RN.

"On est contre toutes les versions", assume Sylvain Maillard (Renaissance). Zucman, c'est "non, ni light ni hard ni rien du tout", a martelé Marine Le Pen, patronne du RN. Quant à Sébastien Lecornu, il a estimé jeudi qu'"il ne faudrait pas que des impôts improvisés créent des faillites certaines" d'entreprises.

De quoi susciter le pessimisme : "Zucman ça passe pas, l'amendement (de repli) non plus", pensent séparément deux députés PS.

Pour autant, certains imaginent en cas d'échec un autre chemin, comme un amendement du gouvernement lors de la séance qui viendrait réconcilier plusieurs camps.

"Si cela rapporte autant que la taxe Zucman, nous le regardons", a affirmé jeudi le patron des députés PS Boris Vallaud. S'il y a une "troisième voie, au gouvernement de la proposer".

- Suspense sur les retraites ? -

Dans l'ombre de l'hémicycle, la commission des Affaires sociales examinera toute la journée le budget de la Sécurité sociale. Les enjeux sont moindres puisque les députés repartiront dans l'hémicycle, la semaine prochaine, de la copie initiale du gouvernement.

Plusieurs points chauds seront abordés: gel des prestations sociales, montant prévu des dépenses de l'Assurance maladie, etc... Mais le vote attendu sera celui sur la suspension de la réforme des retraites, autre condition de la non-censure du PS à laquelle le Premier ministre a consenti.

S'il existe une majorité à l'Assemblée pour abroger purement et simplement la réforme, le sort de cet article en commission est incertain.

LR et Horizons (le parti d'Edouard Philippe) proposeront sa suppression, et pourraient être soutenus par des macronistes. Le RN devrait voter pour selon une source au groupe, tout comme les socialistes.

Mais les Insoumis ne voteront pas l'article en commission, simple "report de la hausse de l'âge légal de départ", argue Hadrien Clouet. Les écologistes l'envisagent aussi et décideront vendredi: "Hélas Macron a raison, c'est un décalage et non pas une suspension, qui quelque part entérine les 64 ans", souligne Danielle Simonnet.