Mali: amélioration de la situation sécuritaire mais recul de la liberté d'expression, selon un expert de l'ONU

Le président du Conseil national de transition (CNT), Malick Diaw, s'adresse aux membres du conseil lors d'une réunion pour voter une charte révisée à Bamako le 21 février 2022.(AFP)
Le président du Conseil national de transition (CNT), Malick Diaw, s'adresse aux membres du conseil lors d'une réunion pour voter une charte révisée à Bamako le 21 février 2022.(AFP)
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Publié le Mardi 22 février 2022

Mali: amélioration de la situation sécuritaire mais recul de la liberté d'expression, selon un expert de l'ONU

  • « Pour la première fois » depuis 2018, « j'ai noté une amélioration tangible de la situation sécuritaire », a déclaré mardi Alioune Tine, expert indépendant de l'ONU
  • Annonçant faire de la lutte contre la corruption une priorité, les militaires ont arrêté plusieurs hommes et femmes politiques, dont l'ex-Premier ministre Soumeylou Boubeye Maïga

BAMAKO : Le Mali connaît une "amélioration tangible dans le domaine sécuritaire" mais il y règne un "climat délétère" de recul de la liberté d'expression, a estimé mardi un expert indépendant de l'ONU après une visite dans le pays.

"Pour la première fois" depuis 2018, "j'ai noté une amélioration tangible de la situation sécuritaire", a déclaré mardi Alioune Tine, expert indépendant de l'ONU sur la question des droits humains au Mali, lors d'une visioconférence depuis Dakar.

Il a étayé ses propos en arguant d'une baisse du nombre de personnes déplacées (d'environ 400.000 en septembre à 350.000 en décembre, selon l'ONU) et d'une baisse des violations recensées par l'ONU des droits humains sur le dernier semestre 2021.

Ces "améliorations tangibles" ne doivent "pas occulter les défis sérieux", a-t-il relevé, notamment avec une présence de groupes djihadistes "qui continuent d'attaquer, de tuer et d'enlever des civils".

Selon des sources locales, une quarantaine de civils ont été tués mi-février par le groupe Etat islamique au Grand Sahara (EIGS, affilié à l'organisation Etat islamique) dans la région de Tessit, dans la partie malienne de la zone dite des trois frontières, aux confins du Mali, du Burkina Faso et du Niger.

Huit militaires maliens et "une soixantaine" de djihadistes sont décédés lors de combats dans la même zone vendredi, selon Bamako.

Bombe sociale

Alioune Tine a également mis en garde contre une "bombe sociale" qui "se profile à l'horizon" avec la fermeture par les mêmes groupes radicaux d'écoles. Le nombre d'élèves affectés a augmenté en 2021, a-t-il rappelé: de 400.000 à 500.000 entre janvier et décembre, selon l'ONU.

M. Tine a expliqué s'être rendu du 7 au 18 février à Mopti et Tombouctou et avoir rencontré une large part des acteurs socio-politiques maliens à Bamako.

"Tous sont unanimes qu'il est de plus en plus difficile d'exprimer une opinion dissidente sans courir le risque d'être emprisonné ou lynché sur les réseaux sociaux", a-t-il estimé mardi, en exprimant sa "profonde préoccupation par rapport au rétrécissement de l'espace civique".

Annonçant faire de la lutte contre la corruption une priorité, les militaires ont arrêté plusieurs hommes et femmes politiques, dont l'ex-Premier ministre Soumeylou Boubeye Maïga. Evacué en décembre de la prison vers une clinique bamakoise en raison de son état de santé, il a perdu 20 kilos et nécessite une évacuation, selon M. Tine.

Ce "climat délétère a mené plusieurs acteurs à l'autocensure par crainte de représailles des autorités maliennes de transition et/ou de leurs sympathisants", a-t-il encore déclaré, estimant que des "menaces réelles pèsent (notamment) sur l'activité des défenseurs des droits de l'homme".

Les enquêtes sur les présumées violations des droits humains par des acteurs du conflit au Mali, notamment l'armée malienne, sont de plus en plus rares. "Quand vous sortez quelque chose (une enquête, ndlr) vous êtes assaillis puis lynchés par les médias, surtout les médias sociaux", a dénoncé M. Tine.

Les partenaires européens, dont la France, ont annoncé jeudi se retirer du Mali, où l'armée affirme engranger victoire sur victoire depuis plusieurs mois.

Le Mali est dirigé par des militaires depuis qu'ils ont renversé en août 2020 le président Ibrahim Boubacar Keïta. Sous embargo de ses voisins ouest-africains pour ne pas avoir respecté son engagement d'organiser des élections fin février, le Mali est en négociations avec la Communauté des Etats d'Afrique de l'ouest sur la durée de la "transition".

Lundi, le Parlement nommé par les militaires a entériné que la période de transition pourrait durer jusqu'à cinq ans. Un délai jugé "inacceptable" par la Cédéao.


La flottille pour Gaza quitte la Tunisie, direction le territoire palestinien

Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
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  • Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place
  • Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser"

BIZERTE: Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire.

"Nous essayons d'envoyer un message à la population de Gaza, (de lui dire) que le monde ne l'a pas oubliée", a dit à l'AFP la militante écologiste suédoise Greta Thunberg avant d'embarquer dans le port de Bizerte, dans le nord de la Tunisie.

"Lorsque nos gouvernements ne prennent pas leurs responsabilités, nous n'avons pas d'autre choix que de prendre les choses en main", a-t-elle ajouté.

Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place.

Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser", "nous partons par solidarité, dignité et pour la justice".

Les embarcations arrivées d'Espagne s'étaient transférées à Bizerte après un séjour mouvementé à Sidi Bou Saïd, près de Tunis.

La "Global Sumud Flotilla", accueillie par des rassemblements de soutien, a indiqué que deux de ses bateaux avaient été visés par des attaques de drones deux nuits de suite la semaine passée, publiant des vidéos à l'appui. Après la deuxième annonce, les autorités tunisiennes ont dénoncé "une agression préméditée" et dit mener une enquête.

L'eurodéputée franco-palestinienne Rima Hassan qui, comme Greta Thunberg, avait été détenue à bord du "Madleen" lors d'une précédente traversée vers Gaza, a dit à l'AFP redouter "bien entendu" de nouvelles attaques, ajoutant: "on se prépare aux différents scénarios".

Selon elle, les personnalités les plus en vue - dont l'actrice française Adèle Haenel - ont été réparties entre les deux plus gros bateaux de coordination "de manière à équilibrer et (ne) pas concentrer toutes les personnalités visibles dans un seul et même bateau".

Le départ de Tunisie a été repoussé à plusieurs reprises en raison de motifs de sécurité, de retard dans les préparatifs pour certains bateaux et de la météo.

La Global Sumud Flotilla ("sumud" signifie "résilience" en arabe), qui comprend aussi des embarcations parties ces derniers jours de Corse (France), Sicile (Italie) et Grèce, avait initialement prévu d'atteindre le territoire palestinien à la mi-septembre, après deux tentatives bloquées par Israël en juin et juillet.

 


Les ministres du Groupe E3 condamnent les frappes israéliennes à Doha

Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
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  • Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza
  • Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas

PARIS: Les ministres des Affaires étrangères de l’Allemagne, de la France et du Royaume-Uni ont condamné, dans une déclaration conjointe, les frappes israéliennes ayant visé Doha le 9 septembre. Ils estiment que ces attaques constituent une violation de la souveraineté du Qatar et représentent un risque d’escalade supplémentaire dans la région.

Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza. « Nous appelons toutes les parties à intensifier leurs efforts pour parvenir à un cessez-le-feu immédiat », ont-ils insisté.

Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas. Ils appellent les parties à « faire preuve de retenue » et à saisir l’opportunité de rétablir la paix.

Les ministres ont réaffirmé que la priorité devait rester la mise en place d’un cessez-le-feu permanent, la libération des otages et l’acheminement massif d’aide humanitaire à Gaza pour enrayer la famine. Ils demandent l’arrêt immédiat des opérations militaires israéliennes dans la ville de Gaza, dénonçant les déplacements massifs de civils, les pertes humaines et la destruction d’infrastructures vitales.

Ils exhortent par ailleurs à garantir aux Nations unies et aux ONG humanitaires un accès sûr et sans entrave à l’ensemble de la bande de Gaza, y compris dans le Nord.

Enfin, le Groupe E3 a rappelé sa condamnation « sans équivoque » des crimes commis par le Hamas, qualifié de mouvement terroriste, qui doit, selon eux, « libérer immédiatement et sans condition les otages, être désarmé et écarté définitivement de la gouvernance de la bande de Gaza ».


L’ONU adopte une résolution franco-saoudienne pour la paix israélo-palestinienne sans le Hamas

L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
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  • Résolution adoptée par 142 voix pour, 10 contre — dont Israël et les États-Unis
  • Le vote précède un sommet de haut niveau co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre

​​​​​​NEW YORK : L’Assemblée générale des Nations unies a voté massivement vendredi en faveur de l’adoption de la « Déclaration de New York », une résolution visant à relancer la solution à deux États entre Israël et la Palestine, sans impliquer le Hamas.

Le texte a été approuvé par 142 pays, contre 10 votes négatifs — dont Israël et les États-Unis — et 12 abstentions. Il condamne fermement les attaques du Hamas du 7 octobre 2023, exige le désarmement du groupe, la libération de tous les otages, et appelle à une action internationale collective pour mettre fin à la guerre à Gaza.

Intitulée officiellement « Déclaration de New York sur le règlement pacifique de la question de Palestine et la mise en œuvre de la solution à deux États », la résolution a été présentée conjointement par l’Arabie saoudite et la France, avec le soutien préalable de la Ligue arabe et de 17 États membres de l’ONU.

Le texte souligne la nécessité de mettre fin à l’autorité du Hamas à Gaza, avec un transfert des armes à l’Autorité palestinienne, sous supervision internationale, dans le cadre d’une feuille de route vers une paix durable. Celle-ci inclut un cessez-le-feu, la création d’un État palestinien, le désarmement du Hamas, et une normalisation des relations entre Israël et les pays arabes.

L’ambassadeur de France, Jérôme Bonnafont, qui a présenté la résolution, l’a qualifiée de « feuille de route unique pour concrétiser la solution à deux États », soulignant l’engagement de l’Autorité palestinienne et des pays arabes en faveur de la paix et de la sécurité. Il a aussi insisté sur l’urgence d’un cessez-le-feu immédiat et de la libération des otages.

Ce vote intervient à quelques jours d’un sommet de haut niveau de l’ONU, co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre, où le président Emmanuel Macron s’est engagé à reconnaître officiellement un État palestinien.

La représentante américaine, Morgan Ortagus, s’est vivement opposée à la résolution, la qualifiant de « coup de communication malvenu et malavisé » qui récompenserait le Hamas et nuirait aux efforts diplomatiques authentiques.

Elle a dénoncé la mention du « droit au retour » dans le texte, estimant qu’il menace le caractère juif de l’État d’Israël.

« Cette résolution est un cadeau au Hamas,» a déclaré Mme Ortagus, ajoutant que le désarmement du Hamas et la libération des otages étaient la clé de la fin de la guerre. Elle a exhorté les autres nations à se joindre aux États-Unis pour s'opposer à la déclaration.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com