Ukraine: nouvelle tentative d'instaurer des couloirs humanitaires pour évacuer les civils

Une femme se repose après avoir traversé un pont détruit alors qu'elle évacue la ville d'Irpin, au nord-ouest de Kiev, le 7 mars 2022. (AFP)
Une femme se repose après avoir traversé un pont détruit alors qu'elle évacue la ville d'Irpin, au nord-ouest de Kiev, le 7 mars 2022. (AFP)
Une vue générale d'un pont détruit dans la ville d'Irpin, au nord-ouest de Kiev, le 8 mars 2022. SERGEI SUPINSKY / AFP
Une vue générale d'un pont détruit dans la ville d'Irpin, au nord-ouest de Kiev, le 8 mars 2022. SERGEI SUPINSKY / AFP
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Publié le Mardi 08 mars 2022

Ukraine: nouvelle tentative d'instaurer des couloirs humanitaires pour évacuer les civils

  • Les premières évacuations ont commencé dans la matinée, des dizaines de bus avaient déjà quitté Soumy en direction de la ville de Lokhvytsia, à 150km au sud-ouest
  • Des frappes aériennes sur Soumy à quelque 350 km au nord-est de Kiev, théâtre de violents combats depuis plusieurs jours, ont tué neuf personnes dont deux enfants lundi soir

KIEV: Des civils ont commencé à être évacués mardi matin de la ville de Soumy, près de la frontière russo-ukrainienne, dans une nouvelle tentative d'instauration de couloirs humanitaires pour évacuer les habitants pris au piège des bombardements russes sur les villes ukrainiennes.


Des frappes aériennes sur cette ville à quelque 350 km au nord-est de Kiev, théâtre de violents combats depuis plusieurs jours, ont tué neuf personnes dont deux enfants lundi soir, selon les services de secours ukrainiens.
            
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a dénoncé mardi les "promesses" non tenues des Occidentaux pour protéger l'Ukraine des bombardements russes.


"Cela fait treize jours qu'on entend des promesses. Treize jours qu'on nous dit qu'on nous aidera dans le ciel, qu'il y aura des avions, qu'on nous les livrera", a-t-il déclaré dans une vidéo publiée sur Telegram. 


"Mais la responsabilité pour cela repose aussi sur ceux qui n'ont pas été capables de prendre une décision en Occident depuis 13 jours (...). Sur ceux qui n'ont pas sécurisé le ciel ukrainien des assassins russes", a-t-il ajouté.


"L'humanité, qui doit prévaloir dans les capitales mondiales, doit prévaloir sur la peur", a-t-il plaidé.


M. Zelensky réclame à cor et à cri la mise en place d'une zone d'exclusion aérienne  au-dessus de l'Ukraine, mais cette option a  été catégoriquement exclue par les Etats-Unis comme l'Otan.


Samedi, le maître du Kremlin Vladimir Poutine a prévenu qu'il considérerait une telle zone "comme une participation au conflit armé".

Les autorités ukrainiennes, qui avaient refusé lundi les évacuations vers la Russie proposées par Moscou, ont confirmé qu'un couloir humanitaire avait bien été mis en place à Soumy. Les premières évacuations ont commencé dans la matinée, selon un responsable de l'administration présidentielle.

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Peu après 10h00 locales (08H00 GMT), des dizaines de bus avaient déjà quitté Soumy en direction de la ville de Lokhvytsia, à 150km au sud-ouest, a indiqué le chef par intérim de l'administration régionale de Poltava Dmitry Lunin.


Mais selon la vice-Première ministre ukrainienne Iryna Verechtchouk, "le côté russe prévoit de perturber ce corridor", et les civils risquent d'être obligés de "prendre un autre itinéraire, qui n'est pas coordonné (avec les Ukrainiens) et dangereux".


"Laissez-nous tranquillement évacuer les gens. Le monde entier regarde !", a-t-elle lancé au 13e jour du conflit, en invitant les troupes russes à "stopper leur avance" durant l'opération humanitaire.


Moscou a annoncé de son côté l'instauration de cessez-le-feu mardi pour faciliter l'évacuation des civils de plusieurs grandes métropoles ukrainiennes, dont la capitale Kiev, menacées par l'avancée des troupes russes, après plusieurs tentatives similaires sans lendemain depuis vendredi.


Le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait accusé lundi soir l'armée russe d'avoir fait échouer à plusieurs reprises l'évacuation des civils via des couloirs humanitaires.


Le maître du Kremlin Vladimir Poutine accuse de son côté les "bataillons nationalistes ukrainiens d'entraver (les évacuations) en recourant aux violences et à diverses provocations".


Ces tentatives d'instaurer des couloirs humanitaires, discutés lors d'un nouveau round de pourparlers russo-ukrainiens lundi, interviennent alors que sur le terrain, les forces russes continuent à se déployer autour des villes, ou à les bombarder, au treizième jour de l'invasion russe - qualifiée d'"opération militaire spéciale" par Moscou - selon des responsables ukrainiens.

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«Beaucoup d'enfants»
L'armée russe se concentre notamment sur les fronts de Kiev, Marioupol, cité portuaire stratégique du sud, et Kharkiv, deuxième ville du pays dans le nord-est, cible d'intenses bombardements et tirs de missiles russes.


A Bucha, aux portes de Kiev, les habitants essaient aussi désespérément de quitter la ville.


"Il y a des gens dans chaque appartement, chaque maison. Le plus important c'est de faire partir les enfants. Il y a beaucoup d'enfants et de femmes", a confié Anna à un journaliste de l'AFP.


"La ville est au bord de la catastrophe humanitaire. Il n'y pas plus de gaz, d'eau, d'électricité et la nourriture commence aussi à manquer", a-t-elle raconté.


De violents combats ont aussi eu lieu dans la ville d'Izioum (est), mais les troupes russes ont battu en retraite, selon l'état-major ukrainien. Les forces russes "ont fait régner la terreur dans la ville, en bombardant les locaux et les infrastructures civils", a-t-il ajouté.


Le ministère ukrainien de la Défense a affirmé de son côté que le général russe Vitali Guerassimov avait trouvé la mort près de Kharkiv, une information non confirmée à Moscou et invérifiable dans l'immédiat de source indépendante.


Selon l'Agence internationale de l'énergie atomique (AEIA), des obus d'artillerie ont par ailleurs endommagé dimanche une installation de recherche nucléaire pour des applications médicales et industrielles à Kharkiv, sans "conséquences radiologiques".


L'attaque de la centrale nucléaire de Zaporojie, la plus grande en Europe, dont les forces russes se sont emparées vendredi, a fait craindre une catastrophe et provoqué une vague d'indignation internationale.

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Ukraine: le seuil des deux millions de réfugiés franchi «aujourd'hui ou demain», selon l'ONU

Le cap des deux millions de réfugiés provoqués par l'offensive militaire russe en Ukraine devrait être franchi "aujourd'hui" ou "demain", a estimé mardi le Haut Commissaire de l'ONU aux réfugiés, Filippo Grandi.


"Je pense que nous allons passer la barre des deux millions aujourd'hui ou peut-être, au plus tard, demain" mercredi, a déclaré M. Grandi lors d'une conférence de presse à Oslo. "Ca n'arrête donc pas".


Lundi, plus de 1,7 million de réfugiés ukrainiens avaient déjà été dénombrés, selon le Haut Commissariat aux réfugiés (HCR).


Le responsable onusien a tenu ces propos après avoir effectué une visite en Roumanie, Moldavie et Pologne, trois pays frontaliers de l'Ukraine, où la Russie a lancé une offensive militaire le 24 février.


"Pour l'instant, je pense qu'ils arrivent à gérer (...) la répartition naturelle spontanée" de ces réfugiés qui, a-t-il souligné, sont pour l'instant ceux qui ont "quelques ressources": "bon nombre arrivent en voiture et, surtout, ils ont des connexions, ils peuvent aller où ils ont de la famille, des amis, une communauté".


"Il est possible que si la guerre continue (...), nous commencerons à voir des gens sans ressources ni connexions et ce sera un problème plus difficile à gérer pour les pays européens, il y aura besoin de plus de solidarité par tout le monde en Europe et au-delà" pour leur accueil, a-t-il souligné. 


Les guerres des Balkans, en Bosnie et au Kosovo, dans les années 1990 avaient aussi provoqué d'énormes flux de réfugiés, "peut-être deux ou trois millions, mais sur une période de huit ans", a par ailleurs relevé M. Grandi. "Là, c'est huit jours"."D'autres régions du monde ont vu cela, mais en Europe, c'est la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale" a-t-il affirmé.

Exode 
L'invasion de l'Ukraine, plus grave conflit militaire en Europe depuis la fin de la Seconde guerre mondiale, a aussi provoqué l'une de ses plus graves crises humanitaires.


La situation s'aggrave de jour en jour, avec plusieurs villes assiégées où les vivres commencent à manquer.


L'ONU a "besoin de couloirs sûrs pour fournir de l'aide humanitaire dans les zones d'hostilités" en Ukraine, a dans ce contexte martelé lundi au Conseil de sécurité de l'ONU le secrétaire général adjoint des Nations unies pour les Affaires humanitaires, Martin Griffiths.


A Irpin, dernière ville-verrou avant Kiev en arrivant de l'ouest, 10.000 personnes ont défilé ces derniers jours, sur une improbable planche de bois, à moitié enfoncée dans l'eau, pour fuir les bombardements. 


Le pont de béton, béant au-dessus de la rivière, a été détruit par les forces ukrainiennes pour empêcher le passage des blindés russes.


Les Ukrainiens continuent aussi à prendre massivement la route de l'exode. La guerre a déjà poussé plus de 1,7 million de personnes à se réfugier dans les pays voisins, selon l'ONU. Le seuil des deux millions devrait être atteint "aujourd'hui ou demain", a indiqué mardi le Haut-Commissariat aux réfugiés.


L'Europe peut s'attendre à recevoir cinq millions d'exilés si le bombardement des villes se poursuit, a estimé le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell.


Depuis le début de la guerre, au moins 406 civils ont été tués et 801 blessés, selon le Haut-Commissariat aux Droits de l'Homme de l'ONU. Le HCR souligne cependant que ces bilans sont probablement très inférieurs à la réalité.


Devant les répercussions du conflit et des sanctions adoptées par le camp occidental contre la Russie sur l'économie mondiale, la bourse de Tokyo s'est encore repliée de 1,71% mardi après avoir perdu 3% la veille. Les Bourses européennes sont en revanche repassées dans le vert mardi à l'ouverture.


Le prix du nickel, comme d'autres matières premières dont la Russie est grande exportatrice, continuait aussi sa course folle vers de nouveaux records. Le nickel a même brièvement dépassé les 100 000 dollars la tonne en séance, les investisseurs craignant que la Russie ne puisse plus exporter sa production.


Sahel: Washington va retirer des soldats du Tchad, après le Niger

Des milliers de Tchadiens assistent au meeting de Mahamat Idriss Deby Itno, président de la transition et candidat à l'élection présidentielle au Tchad, dans le stade en construction au quartier Dombao, à Moundou, le 25 avril 2024. (AFP)
Des milliers de Tchadiens assistent au meeting de Mahamat Idriss Deby Itno, président de la transition et candidat à l'élection présidentielle au Tchad, dans le stade en construction au quartier Dombao, à Moundou, le 25 avril 2024. (AFP)
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  • Washington a entamé cette semaine des discussions avec Niamey sur le retrait du Niger des plus de 1 000 soldats américains présents dans le pays
  • Dans un courrier au ministre des Armées, le chef d'état-major de l'armée de l'air tchadienne avait réclamé début avril le départ des soldats américains

WASHINGTON: Les Etats-Unis vont retirer temporairement des soldats du Tchad, a annoncé le Pentagone quelques jours après leur accord pour retirer leurs forces du Niger voisin.

Au Tchad, les Etats-Unis disposent d'une centaine de soldats dans le cadre de la lutte antijihadiste au Sahel.

"L'Usafricom envisage actuellement de repositionner certaines forces militaires américaines depuis le Tchad, dont le départ d'une partie était déjà prévu", a déclaré lors d'une conférence de presse jeudi le porte-parole du Pentagone, Pat Ryder, se référant au commandement militaire américain en Afrique.

"Il s'agit d'une étape temporaire dans le cadre d'une révision en cours de notre coopération de sécurité, qui reprendra après l'élection présidentielle du 6 mai au Tchad", a-t-il ajouté.

Dans un courrier au ministre des Armées lu par l'AFP, le chef d'état-major de l'armée de l'air tchadienne avait réclamé début avril le départ des soldats américains, incriminant un défaut de documents sur un accord permettant leur présence.

Selon ce courrier, "l'armée de l'air a demandé à l'attaché de défense américain d'arrêter immédiatement les activités militaires sur la BAK", la base aérienne d'Adji Kossei où les soldats américains entraînent des forces spéciales tchadiennes à lutter contre le groupe jihadiste Boko Haram.

"Nous vous demandons d'intercéder auprès de qui de droit afin de prévenir les Américains que nous avons pris la décision d'arrêter leur activité", ajoute la lettre.

"La présence des forces américaines au Tchad était initialement motivée par l'engagement commun dans la lutte contre le terrorisme, un objectif partagé par les deux nations", a déclaré vendredi à l'AFP le porte-parole du gouvernement tchadien.

Discussions supplémentaires 

"Cependant, des préoccupations ont été exprimées par l'état-major tchadien quant à cette présence" et "en reconnaissance des préoccupations exprimées, le gouvernement américain a décidé de retirer temporairement ses forces du Tchad", a ajouté M. Abderaman Koulamallah.

"Il est important de souligner que ce retrait ne signifie en aucun cas une rupture de la coopération entre les deux pays dans la lutte contre le terrorisme", a-t-il dit.

"Des discussions supplémentaires auront lieu pour explorer la possibilité d'un retour des forces américaines dans le cadre d'un accord bilatéral précis et convenu entre les deux pays", a encore indiqué le porte-parole.

Au Niger, autre pivot de la stratégie des Etats-Unis et de la France pour combattre les jihadistes dans la région, la junte militaire au pouvoir depuis juillet a dénoncé en mars l'accord de coopération militaire en vigueur avec les Etats-Unis, estimant que la présence américaine était désormais "illégale".

Washington a entamé cette semaine des discussions avec Niamey sur le retrait du Niger des plus de 1.000 soldats américains présents dans le pays.

Les Etats-Unis disposent notamment au Niger d'une base de drones importante près d'Agadez, construite pour environ 100 millions de dollars.

Washington va "continuer à explorer les options possibles afin d'assurer que nous soyons toujours en mesure de faire face aux potentielles menaces terroristes", avait déclaré lundi Pat Ryder après l'annonce la semaine dernière du retrait américain du Niger.

Au Tchad, le général Mahamat Idriss Deby Itno a annoncé en mars sa candidature à la présidentielle, qu'il est quasi-assuré de remporter après que son régime a violemment réprimé dans la rue et muselé toute opposition et éliminé toute concurrence.

Il avait été proclamé par l'armée président de transition le 20 avril 2021, à la tête d'une junte de 15 généraux, à la mort de son père Idriss Déby Itno, lequel régnait d'une main de fer sur le Tchad depuis 30 ans.

Son principal adversaire, Yaya Dillo, a été tué fin février par des militaires dans l'assaut de son parti, d'une "balle dans la tête à bout portant" selon l'opposition, puis les candidatures de dix autres potentiels rivaux ont été invalidées.


Tim Lenderking à Arab News: «Aidons le Yémen à tracer sa propre voie»

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  • Tim Lenderking souligne que ce serait une «terrible tragédie» de gâcher les progrès réalisés en faveur de la paix au cours des deux années précédentes
  • Une trêve, négociée en avril 2022 entre les parties en présence au Yémen, avait, dans un premier temps, conduit un léger apaisement de la situation humanitaire désastreuse dans le pays

NEW YORK: Les attaques des Houthis contre la navigation internationale en mer Rouge et dans le golfe d’Aden en réponse à l’offensive militaire israélienne contre le Hamas à Gaza ne doivent pas faire dérailler le processus de paix au Yémen, déclare Tim Lenderking, l’envoyé spécial américain pour le Yémen.

Depuis le début de la guerre à Gaza en octobre de l’année dernière, les attaques des Houthis contre des navires commerciaux et militaires dans les voies navigables stratégiques ont fortement perturbé le commerce mondial.

Le groupe politique et religieux armé soutenu par l’Iran, officiellement connu sous le nom «Ansar Allah», se considère comme faisant partie de «l’axe de la résistance» dirigé par l’Iran contre Israël, les États-Unis et l’Occident dans son ensemble.

Il a menacé de poursuivre ses attaques contre les navires jusqu’à ce qu’Israël mette fin à son attaque sur Gaza. Depuis le mois de janvier, le Royaume-Uni et les États-Unis, en coalition avec cinq autres pays, ont répondu par des frappes de représailles contre des cibles houthies au Yémen.

Les États-Unis mettront fin à ces frappes de représailles lorsque la milice houthie cessera ses attaques contre les navires, déclare M. Lenderking dans un entretien accordé à Arab News, plaçant la responsabilité de la désescalade de la situation entre les mains de la milice.

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Les Yéménites organisent une marche propalestinienne à Sanaa, la capitale dirigée par les Houthis. (AFP)

«Il incombe aux Houthis de mettre fin aux attaques en mer Rouge. Cela peut nous inciter à commencer à ralentir, à désamorcer la situation au Yémen, à la ramener à ce qu’elle était au 6 octobre – soit au stade où elle était beaucoup plus prometteuse que ce à quoi nous assistons actuellement. C’est sur cela que nous voulons mettre l’accent.»

Tim Lenderking appelle l’Iran à «cesser d’alimenter le conflit et de faire entrer clandestinement des armes et du matériel de guerre au Yémen, en violation des résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU».

Le Yémen n’avait jamais été aussi proche de la paix avant que le processus ne soit interrompu par les derniers troubles régionaux, précise M. Lenderking. La guerre civile yéménite dure depuis trop longtemps. «Elle doit cesser», ajoute-t-il.

«Les Yéménites souffrent de cette guerre depuis maintenant huit ans. Ils veulent récupérer leur pays. Ils veulent qu’il soit en paix. Ils ne veulent pas de combattants étrangers au Yémen. Ils ne veulent pas des Iraniens à Sanaa. Ils ne veulent pas que le Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI) erre dans Sanaa.»

«Aidons les Yéménites à reconquérir leur pays et à tracer leur propre voie. Tel est le vœu le plus cher des États-Unis.»

Il poursuit: «Nous nous efforçons de déployer des efforts internationaux pour que l’accent soit mis sur le processus de paix au Yémen et la situation humanitaire très critique.»

«Mais il y a la terrible tragédie qui se déroule à Gaza. La guerre de la Russie en Ukraine. L’Afghanistan. Le Soudan. Il existe de nombreuses crises concurrentes qui détournent l’attention des États-Unis et de la communauté internationale.»

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Le cargo Rubymar a été partiellement submergé au large des côtes du Yémen après avoir été touché par un missile houthi. (AFP)

Alors que la guerre au Yémen est liée à d’autres conflits qui font rage dans la région, l’ONU a récemment déclaré que le monde avait une obligation envers les Yéménites: celle de veiller à ce que la résolution de la guerre au Yémen ne soit pas subordonnée à la résolution d’autres problèmes et que les espoirs de paix du Yémen ne deviennent pas un «dommage collatéral».

«Nous ne pouvons échapper à ce qui se passe à Gaza», renchérit Tim Lenderking. «Pas un jour ne passe sans que les gens à qui je parle du Yémen n’évoquent également Gaza. Nous savons donc qu’il s’agit d’une situation tragique à laquelle il faut absolument remédier.»

«Cette situation freine notre capacité à recentrer l’attention sur le processus de paix au Yémen, à tirer parti d’une feuille de route élaborée par le gouvernement yéménite et les Houthis en décembre et à inciter les Houthis à recentrer leurs priorités non sur les attaques en mer Rouge – qui nuisent d’ailleurs aux Yéménites et au Yémen – mais sur les efforts de paix dans le pays.»

S’exprimant lors d’un point de presse du Conseil de sécurité de l’ONU la semaine dernière, Hans Grundberg, l’envoyé de l’ONU pour le Yémen, soutient que la menace de nouvelles attaques des Houthis contre les navires persiste en l’absence d’un cessez-le-feu à Gaza – dont l’urgente nécessité a été soulignée par la récente escalade des hostilités entre Israël et l’Iran.

M. Lenderking affirme: «Les Houthis continuent de nous dire que ces deux questions sont liées et que les Houthis ne mettront pas fin aux attaques contre les navires de la mer Rouge tant qu’il n’y aura pas de cessez-le-feu à Gaza.»

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Tim Lenderking appelle l’Iran à «cesser d’alimenter le conflit et de faire entrer clandestinement des armes et du matériel de guerre au Yémen, en violation des résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU». (AFP)

«Nous pensons que des progrès significatifs peuvent être réalisés dès maintenant. Vingt-cinq membres de l’équipage du Galaxy Leader, le navire qui a été pris par les Houthis le 19 novembre de l’année dernière, sont toujours détenus.»

«Ils sont originaires de cinq pays différents. Il n’y a aucune raison pour que ces individus, qui sont des marins innocents, soient détenus à Hodeïda par les Houthis. Relâchez-les. Libérez le navire. Il y a des mesures qui pourraient être prises. Nous pourrions continuer à œuvrer pour la libération de prisonniers.»

«Ce type d’action démontrera au peuple yéménite qu’il y a encore de l’espoir et que la communauté internationale se préoccupe toujours de sa situation.»

Tim Lenderking souligne que ce serait une «terrible tragédie» de gâcher les progrès réalisés en faveur de la paix au cours des deux années précédentes.

Une trêve, négociée en avril 2022 entre les parties en présence au Yémen, avait, dans un premier temps, conduit à une réduction des violences et à un léger apaisement de la situation humanitaire désastreuse dans le pays. Deux ans plus tard, l’ONU déplore qu’il n’y ait plus grand-chose à célébrer.

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Des enfants yéménites se rassemblent pour recevoir de l’aide humanitaire à la périphérie de Marib. (AFP)

«Les détenus dont nous avions espéré la libération à temps pour passer la fête de l’Aïd avec leurs proches restent en détention», déclare l’envoyé de l’ONU Grundberg. «Les routes que nous espérions voir ouvertes demeurent fermées.»

«Nous avons également été témoins de la mort tragique et des blessures infligées à seize civils, dont des femmes et des enfants, lorsqu’une résidence a été démolie par des Houthis dans le gouvernorat d’Al-Bayda.»

La situation humanitaire au Yémen s’est également nettement aggravée, ces derniers mois, en raison de l’insécurité alimentaire croissante et de la propagation du choléra.

Edem Wosornu, directrice des opérations et du plaidoyer au Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires (BCAH), a déclaré au Conseil de sécurité lors du même point de presse que la situation s’était encore détériorée après que le Programme alimentaire mondial (PAM) avait suspendu la distribution de l’aide alimentaire dans les zones contrôlées par les Houthis en décembre 2023.

Cette pause fait suite à des désaccords avec les autorités locales sur la question de savoir qui devrait recevoir une assistance prioritaire et elle a été amplifiée par les effets d’une grave crise de financement concernant les efforts humanitaires du PAM au Yémen.

«Les personnes les plus vulnérables – notamment les femmes et les filles, les groupes marginalisés comme les Mouhamachines, les personnes déplacées à l'intérieur du pays, les migrants, les demandeurs d’asile et les réfugiés, ainsi que les personnes handicapées – dépendent toujours de l’aide humanitaire pour survivre», affirme Mme Wosornu.

Edem Wosornu exprime également son inquiétude face à l’augmentation des cas de choléra au Yémen dans un contexte de détérioration des institutions et des services publics.

«La réémergence du choléra et les niveaux croissants de malnutrition sévère sont des indicateurs révélateurs de la capacité affaiblie des services sociaux», soutient-elle.

«Près d’un enfant de moins de cinq ans sur deux souffre d’un retard de croissance, soit plus du double de la moyenne mondiale: 49% contre 21,3%.»

«Les stocks de fournitures essentielles sont presque épuisés. Et les systèmes de soutien à l’eau, à l’assainissement et à l’hygiène doivent être renforcés de toute urgence.»

Le plan de réponse humanitaire pour le Yémen n’est financé qu’à hauteur de 10%, le financement des programmes de sécurité alimentaire et de nutrition n’atteignant respectivement que 5% et 3%, selon une mise à jour informelle présentée au Conseil de sécurité par le BCAH cette semaine.

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Des partisans de la milice houthie du Yémen participent à un rassemblement pour marquer la commémoration annuelle de la Journée Al-Qods (Jérusalem) à Sanaa. (AFP)

Mme Wosornu appelle la communauté internationale à prendre des mesures urgentes pour contribuer à combler les déficits de financement.

Commentant le manque de financement, M. Lenderking explique: «Lorsqu’il y aura une réelle possibilité d’un processus de paix au Yémen, les donateurs se mobiliseront. Mais le fait que nous soyons dans ce flou, où le processus de paix est suspendu pendant que les Houthis poursuivent leurs attaques en mer Rouge, doit être imputé aux Houthis parce qu’ils font dérailler ce qui était un processus de paix légitime.»

«Mais une fois que nous pourrons y revenir, je pense que nous pourrions appeler la communauté internationale à nous indiquer qu’il y a une lueur d’espoir. Il y a un processus. Il y a un engagement. Les États-Unis soutiennent un effort international. Nous pouvons convaincre les donateurs de revenir au Yémen, malgré toute la concurrence pour ces ressources très limitées.»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Mouvement de soutien à Gaza: l'université américaine Columbia ajourne l'évacuation du campus

Des dizaines d'arrestations y ont été effectuées la semaine dernière après le recours à la police effectué par les responsables de l'université pour mettre fin à une occupation accusée par plusieurs personnalités d'attiser l'antisémitisme. (AFP).
Des dizaines d'arrestations y ont été effectuées la semaine dernière après le recours à la police effectué par les responsables de l'université pour mettre fin à une occupation accusée par plusieurs personnalités d'attiser l'antisémitisme. (AFP).
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  • "Ils nous traitent de terroristes, ils nous traitent de violents. Mais le seul outil dont nous disposons ce sont nos voix", a déclaré une des étudiantes présente au rassemblement pro-palestinien
  • Le mouvement d'étudiants américains pro-palestiniens, qui s'est généralisé sur les campus américains, est parti de l'université Columbia à New York

NEW YORK: L'université américaine Columbia a ajourné la date limite de vendredi fixée aux étudiants pro-palestiniens pour évacuer le campus, occupé pour protester contre la guerre à Gaza, un mouvement qui s'est généralisé sur les campus américains.

Le bureau de la présidence de l'université new-yorkaise, d'où est parti le mouvement de soutien à Gaza il y a plus d'une semaine, est revenu sur l'échéance de minuit heure locale (04H00 GMT vendredi), fixée pour démanteler un village de tentes où quelque 200 étudiants pro-palestiniens se sont rassemblés.

"Les négociations ont progressé et se poursuivent comme prévu", a affirmé le bureau de la présidente de l'université, Minouche Shafik, dans un communiqué diffusé à 23H07 (03H07 GMT vendredi).

"Nous avons nos demandes, ils ont les leurs", poursuit le bureau de la présidence, en démentant qu'une intervention de la police ait été réclamée.

"Ils nous traitent de terroristes, ils nous traitent de violents. Mais le seul outil dont nous disposons ce sont nos voix", a déclaré une des étudiantes présente au rassemblement pro-palestinien, se présentant sous le nom de Mimi.

Le mouvement d'étudiants américains pro-palestiniens, qui s'est généralisé sur les campus américains, est parti de l'université Columbia à New York.

Des dizaines d'arrestations y ont été effectuées la semaine dernière après le recours à la police effectué par les responsables de l'université pour mettre fin à une occupation accusée par plusieurs personnalités d'attiser l'antisémitisme. Les manifestations pro-palestiniennes se sont ensuite poursuivies mercredi sur le campus.

Certaines des universités les plus prestigieuses au monde sont concernées par ce mouvement d'étudiants américains, telles Harvard, Yale ou encore Princeton.

Centaines d'arrestations

Plus de 200 manifestants ont été arrêtés mercredi et jeudi dans des universités de Los Angeles, de Boston et d'Austin, au Texas, où quelque 2.000 personnes se sont à nouveau rassemblées jeudi.

Les scènes à travers le pays se suivent et se ressemblent: des élèves installent des tentes sur leurs campus, pour dénoncer le soutien militaire des Etats-Unis à Israël et la catastrophe humanitaire dans la bande de Gaza.

Puis ils sont délogés, souvent de façon musclée, par des policiers en tenue anti-émeute, à la demande de la direction des universités.

Sur le campus de l'université Emory d'Atlanta, dans le sud-est des Etats-Unis, des manifestants ont été évacués manu militari par la police, certains projetés au sol pour être arrêtés, selon des images d'un photojournaliste de l'AFP.

La police d'Atlanta a reconnu avoir utilisé des agents "chimiques irritants" sur les manifestants, face à la "violence" de certains.

Tôt jeudi, un nouveau campement a été installé sur le campus de l'université George Washington dans la capitale.

Sur celui de l'université UCLA, à Los Angeles, plus de 200 étudiants ont installé un mini-village d'une trentaine de tentes, barricadés par des palettes et des pancartes.

Kaia Shah, une étudiante en sciences politiques de 23 ans, s'enthousiasme de l'élargissement du mouvement. "C'est formidable ce que nous voyons dans d'autres campus", estime-t-elle, "cela montre combien de personnes soutiennent cette cause".

Pour Kit Belgium, une professeure de l'université d'Austin, le campus a besoin de voir "la libre expression et le libre échange des idées". Et si l'université ne peut pas tolérer cela, alors elle n'est pas digne de ce nom", ajoute-t-elle à l'AFP.

Près du rassemblement pro-palestinien, une trentaine d'étudiants ont organisé une contre-manifestation. Jasmine Rad, une étudiante juive à l'université du Texas, estime que les manifestations de soutien à Gaza sont "dangereuses pour les étudiants juifs".

"Cela nuit aux étudiants juifs et aux étudiants qui ne se sentent pas en sécurité à cause de la violence sur notre campus", explique cette étudiante en journalisme de 19 ans.

L'université USC à Los Angeles, où 93 personnes ont été interpellées mercredi, a annoncé jeudi l'annulation de sa principale cérémonie de diplôme cette année, officiellement en raison de "nouvelles mesures de sécurité".

Jason Miller, un conseiller de Donald Trump, s'est emparé de l'annonce, affirmant sur X, que "sous Joe Biden, votre cérémonie de diplôme ne sera pas assurée" de se dérouler.

La Maison Blanche assure de son côté que Joe Biden, qui espère être réélu en novembre, "soutient la liberté d'expression, le débat et la non discrimination" dans les universités.

La guerre a été déclenchée le 7 octobre par une attaque sans précédent menée depuis Gaza contre Israël par des commandos du Hamas, et qui a entraîné la mort de 1.170 personnes, essentiellement des civils, selon un bilan de l'AFP établi à partir de données officielles israéliennes.

En représailles, Israël a promis de détruire le mouvement islamiste, et sa vaste opération militaire dans la bande de Gaza a fait jusqu'à présent 34.305 morts, majoritairement des civils, selon le Hamas.