Accueil des Ukrainiens: une rare unanimité de l'UE sur les réfugiés

Des personnes se tiennent avec leurs bagages en attendant d'être relogées de l'abri temporaire pour réfugiés dans un ancien centre commercial entre la frontière ukrainienne et la ville polonaise de Przemysl, en Pologne, le 8 mars 2022. (Photo, AFP)
Des personnes se tiennent avec leurs bagages en attendant d'être relogées de l'abri temporaire pour réfugiés dans un ancien centre commercial entre la frontière ukrainienne et la ville polonaise de Przemysl, en Pologne, le 8 mars 2022. (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 08 mars 2022

Accueil des Ukrainiens: une rare unanimité de l'UE sur les réfugiés

  • Les Vingt-Sept ont décidé de façon unanime et en un temps record, une semaine après le début de l'attaque russe, d'accorder aux Ukrainiens un régime de protection temporaire, en recourant à une directive de 2001 jamais utilisée jusque là
  • Premier pays d'accueil, la Pologne a ouvert ses portes à 1,2 million d'Ukrainiens ayant fui l'invasion russe, soit plus de la moitié du total, selon l'ONU mardi

BRUXELLES : L'afflux sans précédent d'exilés ukrainiens dans l'UE a suscité une réponse de solidarité unanime et rapide des Vingt-Sept, qui tranche avec leurs divisions sur l'accueil des réfugiés syriens en 2015 et les blocages persistants autour de la question hypersensible de la migration.

Premier pays d'accueil, la Pologne a ouvert ses portes à 1,2 million d'Ukrainiens ayant fui l'invasion russe, soit plus de la moitié du total, selon l'ONU mardi. 

A sa frontière avec le Bélarus en revanche, ce pays construit un mur pour bloquer migrants et demandeurs d'asile. Des milliers d'entre eux, majoritairement originaires du Moyen-Orient, avaient tenté le passage l'année dernière, Minsk étant accusé de les avoir acheminés aux frontières de l'UE.

La Hongrie, autre pays frontalier à accueillir des Ukrainiens, avait comme la Pologne rejeté les quotas de répartition de réfugiés instaurés après 2015, année au cours de laquelle plus d'un million de demandeurs d'asile (en majorité syriens, mais aussi afghans et irakiens) étaient arrivés par la mer en Europe.

Les Vingt-Sept ont décidé de façon unanime et en un temps record, une semaine après le début de l'attaque russe, d'accorder aux Ukrainiens un régime de protection temporaire, en recourant à une directive de 2001 jamais utilisée jusque là. Un "exploit" s'agissant du sujet de la migration, "souvent considéré comme toxique ou difficile", avait commenté la commissaire européenne aux Affaires intérieures, Ylva Johansson.

Même si la vague de réfugiés de 2015, souvent qualifiée de "crise migratoire", avait suscité des réactions de solidarité au sein de la population européenne et de la part d'Etats comme l'Allemagne, la question du partage des responsabilités entre Etats membres avait profondément divisé le bloc.

L'unanimité actuelle s'explique par la proximité géographique de ce pays voisin de l'UE, et le fait que la guerre qui s'y déroule est liée à des "questions de sécurité qui dépassent le cadre de l'Ukraine et concernent tout le continent européen", souligne Marie De Somer, spécialiste de la migration au think tank European Policy Centre.

 

La barre des 2 millions de réfugiés d'Ukraine franchie en seulement 12 jours

La barre des 2 millions de personnes fuyant les combats en Ukraine pour trouver refuge à l'étranger a été dépassée mardi, seulement 12 jours après le début de l'invasion ordonnée par le président russe Vladimir Poutine, selon les derniers décomptes de l'ONU.

Le Haut Commissariat aux réfugiés (HCR) recensait exactement 2 011 312 réfugiés sur son site internet dédié vers 10H30 GMT. Ce sont plus de 276 000 de plus que lors du précédent pointage lundi.

Les autorités et l'ONU s'attendent à ce que le flot s'intensifie encore, notamment en cas d'ouverture de corridors humanitaires qui doivent permettre en théorie aux civils encerclés dans des grandes villes ukrainiennes de sortir.

Plusieurs tentatives dans ce sens ont pour l'instant échoué.

"Aujourd'hui, le flot de réfugiés venus d'Ukraine atteint 2 millions. 2 millions", a tweeté le Haut Commissaire aux réfugiés, Filippo Grandi. Selon lui, c'est l'exode le plus rapide qu'a connu l'Europe depuis la Deuxième guerre mondiale.

Il vient d'effectuer une visite en Roumanie, Moldavie et Pologne, trois des pays frontaliers de l'Ukraine, qui accueillent le plus de gens qui ont fui leur pays après l'invasion. M. Grandi a salué leur accueil "exemplaire". 

Selon l'ONU, quatre millions de personnes pourraient vouloir quitter le pays pour échapper à la guerre.

Avant ce conflit, l'Ukraine était peuplée de plus de 37 millions de personnes dans les territoires contrôlés par Kiev - qui n'incluent donc pas la Crimée annexée par la Russie, ni les zones sous contrôle des séparatistes pro-russes.

«Préjugés»

"La moindre expression de désunion ou de panique de la part de l'UE serait exploitée par Vladimir Poutine", explique aussi Catherine Woollard, directrice du Conseil Européen pour les réfugiés et exilés (ECRE), un réseau européen d'ONG, qui avait milité en vain pour l'activation de la protection temporaire pour les réfugiés en 2015.

Mais il existe aussi "des facteurs d'ordre ethnique et religieux. Il serait naïf de ne pas voir qu'une partie de la différence est due à ces considérations, et que malheureusement certains Etats en Europe font parfois preuve de racisme et de préjugés à l'égard des réfugiés et demandeurs d'asile", relève-t-elle.

"Nous aimerions voir des réponses similaires dans d'autres situations, pour que toute personne ayant besoin de protection puisse recevoir une protection", commente Catherine Woollard.

La Commission, comme la présidence française du Conseil de l'UE, espèrent que la crise actuelle aidera à faire progresser la réforme européenne de l'asile et de la migration, qui bute sur l'épineuse question de la répartition des demandeurs d'asile.

"Il faut que nous soyons prêts pour les prochaines crises", a exhorté le ministre français de l'Intérieur Gérald Darmanin.

Mais rien n'est moins sûr. "On peut craindre que dans le moyen terme les Etats européens (....) disent à un moment donné : on a fait un effort considérable vis-à-vis des réfugiés ukrainiens, et on ne peut plus accueillir personne", pointe l'expert Yves Pascouau, chercheur associé à l'institut Jacques Delors. "Tout va être déterminé par l'ampleur du phénomène et la longueur du conflit", ajoute-t-il toutefois.

A l'heure actuelle, beaucoup de réfugiés ukrainiens sont hébergés par des proches dans les pays qui accueillent déjà des communautés ukrainiennes, comme la Pologne. Mais "à long terme il pourrait être nécessaire de mettre en place des mécanismes de répartition plus formels, en particulier si arrive un grand nombre de personnes sans liens familiaux" dans l'UE, souligne Catherine Woollard.


Israël devant la CIJ pour se défendre d'accusations de « génocide »

Dans un arrêt en janvier, la CIJ a ordonné à Israël de faire tout ce qui est en son pouvoir pour prévenir tout acte de génocide et permettre l'entrée de l'aide humanitaire dans la bande de Gaza. (AFP)
Dans un arrêt en janvier, la CIJ a ordonné à Israël de faire tout ce qui est en son pouvoir pour prévenir tout acte de génocide et permettre l'entrée de l'aide humanitaire dans la bande de Gaza. (AFP)
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  • Pretoria a demandé à la Cour internationale de justice (CIJ), qui siège à La Haye, d'enjoindre à Israël de cesser son incursion à Rafah
  • Israël a précédemment souligné son engagement "inébranlable" envers le droit international et qualifié l'affaire de l'Afrique du Sud de "totalement infondée" et "moralement répugnante"

LA HAYE: Israël va répondre vendredi devant la plus haute juridiction de l'ONU aux allégations de l'Afrique du Sud selon lesquelles il aurait intensifié une campagne "génocidaire" avec son opération militaire à Rafah.

Pretoria a demandé à la Cour internationale de justice (CIJ), qui siège à La Haye, d'enjoindre à Israël de cesser son incursion à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, essentielle selon Israël pour éliminer les militants du mouvement islamiste palestinien Hamas.

Israël a précédemment souligné son engagement "inébranlable" envers le droit international et qualifié l'affaire de l'Afrique du Sud de "totalement infondée" et "moralement répugnante".

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, qui a juré d'anéantir le Hamas, est déterminé à lancer une offensive terrestre d'envergure à Rafah, où sont retranchés selon lui les derniers bataillons du mouvement islamiste palestinien.

Israël a annoncé jeudi que son armée allait "intensifier" ses opérations au sol à Rafah, malgré les mises en garde internationales contre une offensive d'envergure dans cette ville surpeuplée du territoire palestinien.

Les avocats de Pretoria ont déclaré jeudi devant la CIJ que "le génocide" commis par Israël "a atteint un niveau horrible", évoquant notamment des fosses communes, des actes de torture et un blocage de l'aide humanitaire.

"L’Afrique du Sud avait espéré, lors de notre dernière comparution devant cette cour, mettre un terme à ce processus génocidaire afin de préserver la Palestine et son peuple", a déclaré Vusimuzi Madonsela, le représentant de Pretoria.

"Au lieu de cela, le génocide d'Israël s’est poursuivi à un rythme soutenu et vient d’atteindre un nouveau et horrible niveau", a-t-il ajouté.

Nouvelles mesures 

Dans un arrêt en janvier, la CIJ a ordonné à Israël de faire tout ce qui est en son pouvoir pour prévenir tout acte de génocide et permettre l'entrée de l'aide humanitaire dans la bande de Gaza.

Mais la cour n'est pas allée jusqu'à ordonner un cessez-le-feu. Or pour Pretoria, l'évolution de la situation sur le terrain – notamment l'opération à Rafah – nécessite une nouvelle ordonnance de la CIJ.

L'opération israélienne à Rafah "est la dernière étape de la destruction de Gaza et de son peuple palestinien", a déclaré Vaughan Lowe, un avocat de l'Afrique du Sud.

"C'est Rafah qui a amené l'Afrique du Sud devant la cour. Mais ce sont tous les Palestiniens en tant que groupe national, ethnique et racial qui ont besoin de la protection contre le génocide que la cour peut ordonner", a-t-il ajouté.

Les ordonnances de la CIJ, qui tranche les différends entre Etats, sont juridiquement contraignantes mais elle n'a aucun moyen de les faire respecter.

Pretoria demande à la CIJ trois nouvelles mesures d'urgence en attendant qu'elle se prononce sur le fond de l'affaire, l'accusation selon laquelle Israël viole la Convention des Nations unies sur le génocide de 1948.

L'Afrique du Sud souhaite que la cour ordonne à Israël de cesser "immédiatement" toutes les opérations militaires à Gaza, y compris à Rafah, de permettre l'accès humanitaire et de rendre compte des mesures prises dans l'exécution de ces ordonnances.


Plus d'un tiers des zones humides de Méditerranée menacées par la montée des eaux

Plus d'un tiers des zones humides du bassin méditerranéen sont menacées par les risques de submersion marine causés par le réchauffement climatique, qui risque de détruire un habitat précieux pour les oiseaux côtiers, alerte vendredi une étude scientifique. (AFP).
Plus d'un tiers des zones humides du bassin méditerranéen sont menacées par les risques de submersion marine causés par le réchauffement climatique, qui risque de détruire un habitat précieux pour les oiseaux côtiers, alerte vendredi une étude scientifique. (AFP).
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  • Les zones humides côtières figurent parmi les zones les plus menacées par le réchauffement climatique: en raison de la montée des eaux,
  • Le parc naturel régional de Camargue, plus grande zone humide française, "pourrait par exemple subir la submersion d'une surface de terre équivalente à quatre fois la superficie de Paris"

PARIS: Plus d'un tiers des zones humides du bassin méditerranéen sont menacées par les risques de submersion marine causés par le réchauffement climatique, qui risque de détruire un habitat précieux pour les oiseaux côtiers, alerte vendredi une étude scientifique.

Les zones humides côtières figurent parmi les zones les plus menacées par le réchauffement climatique: en raison de la montée des eaux, plus de la moitié d'entre elles dans le monde pourraient disparaître sous les eaux d'ici 2100, ont déjà montré de précédentes études.

Cette nouvelle étude, parue dans la revue Conservation Biology, a modélisé les futurs risques de submersion en fonction des différents scénarios du Giec (le groupe d'experts du climat mandatés par l'ONU) sur 938 sites côtiers du pourtour méditerranéen.

Elle révèle que 34,4% de ces sites, soit 320 zones humides côtières, sont menacées de disparition d'ici à 2100 par la hausse du niveau de la mer, même dans les scénarios climatiques les plus optimistes (avec un réchauffement de +1,8 degré).

Dans les scénarios pessimistes (jusqu'à +4,4 degrés), ce chiffre pourrait monter à 495, soit plus de la moitié.

Le parc naturel régional de Camargue, plus grande zone humide française, "pourrait par exemple subir la submersion d'une surface de terre équivalente à quatre fois la superficie de Paris", indique un communiqué du Museum national d'histoire naturelle, qui a participé à l'étude avec l'Institut de recherche pour la conservation des zones humides méditerranéennes de la Tour du Valat.

Parmi ces zones menacées, figurent entre 54,1% et 60,7% de sites d'importance internationale pour les oiseaux d'eau, comme les flamants roses, les avocettes élégantes ou le canard chipeau, notamment lors de la période d'hivernage ou de nidification. Ces oiseaux ne disposant pas d'habitat alternatif, ces menaces pourraient "affecter négativement" leur nombre et les écosystèmes qui y sont associés.

"Ces chiffres sont sans doute sous-estimés", notent les auteurs de l'étude, soulignant que de nombreuses zones côtières, notamment en Espagne, n'ont pas été incluses et que d'autres menaces (érosion côtière, salinisation, surtourisme...) n'ont pas été prises en compte.

Pour toutes ces raisons, ils recommandent "la mise en place urgente de mesures d'adaptation" dans ces sites, comme la construction de digues mais surtout, plus efficaces à long terme, la mise en place de solutions fondées sur la nature (fixation de dunes avec de la végétation) ou encore une extension des aires protégées pour lutter notamment contre une urbanisation non maitrisée.


Inde: l'opposition fustige Modi et ses propos anti-musulmans

Le Premier ministre indien et chef du parti au pouvoir Bharatiya Janata (BJP), Narendra Modi (Photo, AFP).
Le Premier ministre indien et chef du parti au pouvoir Bharatiya Janata (BJP), Narendra Modi (Photo, AFP).
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  • M. Modi a offert au parti nationaliste hindou Bharatiya Janata (BJP) deux victoires écrasantes en 2014 et 2019
  • Les analystes politiques l'ont donné vainqueur avant même les élections générales qui ont débuté le 19 avril

NEW DELHI: L'opposition indienne a accusé jeudi le Premier ministre Narendra Modi de tenir des propos stigmatisant les musulmans et alimentant, en plein processus électoral, les tensions sectaires dans la plus grande démocratie du monde, constitutionnellement laïque.

M. Modi déploie "son jeu habituel consistant à diviser les hindous et les musulmans", a déclaré jeudi P. Chidambaram, ancien ministre des Finances et membre influent du Congrès, principal parti d'opposition,

"Le monde observe et analyse les déclarations du Premier ministre indien, qui ne sont pas à la gloire de l'Inde", a-t-il ajouté.

M. Modi a offert au parti nationaliste hindou Bharatiya Janata (BJP) deux victoires écrasantes en 2014 et 2019 en jouant sur la fibre religieuse de l'électorat hindou.

Agé de 73 ans et encore très populaire dans l'ensemble du pays, le Premier ministre brigue un troisième mandat à la tête du pays.

Les analystes politiques l'ont donné vainqueur avant même les élections générales qui ont débuté le 19 avril et se déroulent en sept phases jusqu'au 1er juin.

M. Modi a présenté mardi sa candidature au siège de député de Varanasi (Bénarès), cité sacrée de l'hindouisme, dans l'Etat de l'Uttar Pradesh (nord), qu'il occupe depuis une décennie.

L'opposition et les défenseurs des droits accusent M. Modi de favoriser les hindous, majoritaires dans le pays, au détriment d'importantes minorités, dont 210 millions d'Indiens musulmans, inquiètes pour leur avenir.

M. Modi a récemment suscité l'indignation dans les rangs de l'opposition en accusant le Congrès de vouloir distribuer la "richesse nationale" aux "infiltrés", "à ceux qui ont le plus d'enfants", désignant ainsi la communauté musulmane.

L'opposition a saisi les autorités électorales qui n'ont pas sanctionné le Premier ministre. L'Inde est constitutionnellement laïque et son code électoral interdit toute campagne fondée sur des "sentiments communautaires".

Dans un entretien mardi sur la chaîne d'information continue News18, le chef du gouvernement s'est défendu d'alimenter et d'exploiter tout clivage entre hindous et musulmans.

Discrimination 

"Le jour où je commencerai à parler des hindous-musulmans sera celui où je perdrai ma capacité à mener une vie publique", a-t-il affirmé en hindi.

Le lendemain, en plein rassemblement électoral, Narendra Modi accusait le Congrès d'orchestrer un "jihad par le vote" pour que les musulmans se prononcent contre lui.

Au début de la semaine, Madhavi Latha, actrice et candidate du BJP à Hyderabad (sud), s'est autorisée, dans un bureau de vote, à vérifier que la carte électorale de musulmanes correspondait à leur identité, exigeant qu'elles ôtent leur voile.

La police de la ville a ouvert une enquête sur l'incident.

Au total, 968 millions d'Indiens sont appelés à élire les 543 membres de la chambre basse, soit plus que la population totale des Etats-Unis, de l'Union européenne et de la Russie réunis.