Les filles afghanes subitement privées d'école par les talibans

En classe, après la réouverture d’une école de filles à Kaboul le 23 mars 2022. (Ahmad Sahel Arman/AFP)
En classe, après la réouverture d’une école de filles à Kaboul le 23 mars 2022. (Ahmad Sahel Arman/AFP)
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Publié le Jeudi 24 mars 2022

Les filles afghanes subitement privées d'école par les talibans

  • L'annonce a eu lieu alors que de nombreuses élèves étaient déjà revenues en cours dans le secondaire, pour la première fois depuis août dernier
  • «J'ai vu mes élèves pleurer et hésiter à quitter le cours. C'est très douloureux de voir vos élèves pleurer», se désolait une enseignante à l'école de filles

KABOUL, Afghanistan : Le cœur brisé, les larmes aux yeux après avoir tant espéré, des milliers de filles en Afghanistan sont rentrées chez elles mercredi, après avoir passé seulement quelques heures dans leurs collèges et lycées enfin rouverts, puis subitement refermés par les talibans.

L'annonce a eu lieu alors que de nombreuses élèves étaient déjà revenues en cours dans le secondaire, pour la première fois depuis août dernier quand les fondamentalistes islamistes ont pris le pouvoir et fortement restreint les droits des femmes à l'éducation et au travail.

Le ministère de l'Éducation n'a fourni aucune explication claire, alors même que les responsables avaient organisé une cérémonie dans la capitale pour marquer le début de la nouvelle année scolaire.

«En Afghanistan, surtout dans les villages, les mentalités ne sont pas prêtes», a déclaré à la presse le porte-parole Aziz Ahmad Rayan. «Nous avons certaines restrictions culturelles (...) mais les principaux porte-paroles de l'Émirat islamique offriront de meilleures clarifications», a-t-il ajouté.

Selon une source talibane, la décision serait intervenue après une réunion mardi soir de hauts responsables à Kandahar (Sud), berceau et centre de pouvoir de fait du mouvement islamiste fondamentaliste.

La date de mercredi pour le retour des filles dans le secondaire avait été annoncée des semaines plus tôt par le ministère de l'Éducation, son porte-parole soulignant alors que les talibans avaient la «responsabilité de fournir une éducation et des structures éducatives» aux élèves.

Les talibans avaient insisté sur le fait de vouloir prendre le temps afin de s'assurer que les filles âgées de 12 à 19 ans seraient bien séparées des garçons -- même si cette séparation existe déjà dans la plupart des écoles -- et que les établissements fonctionneraient selon les principes islamiques.

Elèves dépitées

A Kaboul, au lycée Zarghona, des filles dépitées ont refermé leurs livres et repris leurs sacs, en larmes, après l'interruption des cours par les enseignantes.

«J'ai vu mes élèves pleurer et hésiter à quitter le cours. C'est très douloureux de voir vos élèves pleurer», se désolait Palwasha, enseignante à l'école de filles Omara Khan, également dans la capitale.

La Haute-Commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme, Michelle Bachelet, a dit dans un communiqué «partager la profonde frustration et la déception des lycéennes et des étudiantes afghanes».

Arguant que «l'éducation est un droit fondamental», la directrice générale de l'Unesco Audrey Azoulay a quant à elle dénoncé un «revers majeur» et exhorté les talibans à autoriser «sans délai» les jeunes filles à retourner à l'école.

Les Etats-Unis ont condamné la décision. «C'est une trahison des engagements publics donnés par les dirigeants talibans au peuple afghan et à la communauté internationale», a affirmé le porte-parole de la diplomatie américaine, Ned Price.

Malala Yousafzai, lauréate pakistanaise du prix Nobel de la Paix, qui a survécu à une tentative d'assassinat des talibans pakistanais à l'âge de 15 ans et milite de longue date pour l'éducation des filles, a également exprimé sa consternation.

Les talibans «continueront à trouver des excuses pour empêcher les filles d'apprendre -- parce qu'ils ont peur des filles éduquées et des femmes autonomes», a-t-elle tweeté.

Avec cette décision, les talibans renforcent les inquiétudes des observateurs qui craignaient que les nouveaux maîtres du pays n'interdisent à nouveau l'école pour les filles, comme ils l'avaient fait lors de leur premier règne, de 1996 à 2001.

«Ce changement de dernière minute semble être motivé par des différences idéologiques au sein du mouvement (...) sur la façon dont les filles retournant à l'école seront perçues par leurs partisans», analyse  Andrew Watkins, spécialiste de l'Afghanistan au sein de l'Institut américain pour la paix.

Mercredi, des élèves d'un lycée de Kaboul ont brièvement manifesté après avoir dû quitter leur établissement, selon des témoins et des militantes féministes. «Elles sont parties quand les talibans sont arrivés et leur ont dit de rentrer chez elles. C'était une manifestation pacifique», a déclaré un commerçant.

Avant le revirement, des filles interrogées à l'ouverture des écoles se disaient «heureuses» de revenir en classe et remerciaient même les fondamentalistes.

En sept mois de gouvernance, les talibans ont imposé une multitude de restrictions aux femmes. Elles sont exclues de nombreux emplois publics, contrôlées sur la façon de s'habiller et interdites de voyager seules en dehors de leur ville.

Les islamistes ont aussi arrêté et détenu plusieurs militantes qui avaient manifesté pour les droits des femmes.


L'Arabie saoudite condamne les actions d'Israël à Gaza devant la CIJ

 Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
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  • Tel-Aviv "continue d'ignorer" les décisions de la Cour internationale de justice, déclare le représentant du Royaume
  • M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

DUBAI : L'Arabie saoudite a condamné mardi devant la Cour internationale de justice la campagne militaire israélienne en cours à Gaza, l'accusant de défier les décisions internationales et de commettre de graves violations des droits de l'homme.

S'exprimant devant la Cour, le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, a déclaré qu'Israël "continue d'ignorer les ordres de la Cour" et a insisté sur le fait que "rien ne justifie les violations commises par Israël à Gaza".

M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

Ses remarques ont été formulées au deuxième jour des audiences de la CIJ sur les obligations humanitaires d'Israël à l'égard des Palestiniens, qui se déroulent dans le cadre d'un blocus israélien total de l'aide à la bande de Gaza, qui dure depuis plus de 50 jours.

Ces audiences s'inscrivent dans le cadre d'efforts plus larges visant à déterminer si Israël a respecté les responsabilités juridiques internationales dans sa conduite lors de la guerre contre Gaza.

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com


Syrie: neuf morts dans des affrontements entre forces de sécurité et combattants druzes près de Damas

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
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  • Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité "
  • "La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué

DAMAS: Neuf personnes ont été tuées dans des affrontements entre les forces de sécurité syriennes et des combattants de la minorité druze à Jaramana, dans la banlieue de Damas, sur fond de tension confessionnelle, selon un nouveau bilan mardi d'une ONG.

Ces violences interviennent un mois après des massacres qui ont visé la minorité alaouite, faisant des centaines de morts, dans le pays où la coalition islamiste qui a pris le pouvoir en décembre est scrutée par la communauté internationale.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), "les forces de sécurité ont lancé un assaut" contre la banlieue à majorité druze de Jaramana, après la publication sur les réseaux sociaux d'un message vocal attribué à un druze et jugé blasphématoire envers l'islam.

L'OSDH, basée au Royaume-Uni mais qui dispose d'un solide réseau de sources en Syrie, a précisé que six combattants locaux de Jaramana et trois "assaillants" avaient été tués.

Plusieurs habitants de Jaramana joints au téléphone par l'AFP ont indiqué avoir entendu des échanges de tirs dans la nuit.

"Nous ne savons pas ce qui se passe, nous avons peur que Jaramana devienne un théâtre de guerre", a affirmé Riham Waqaf, une employée d'une ONG terrée à la maison avec son mari et ses enfants.

"On devait emmener ma mère à l'hôpital pour un traitement, mais nous n'avons pas pu" sortir, a ajouté cette femme de 33 ans.

Des combattants locaux se sont déployés dans les rues et aux entrées de la localité, demandant aux habitants de rester chez eux, a dit à l'AFP l'un de ces hommes armés, Jamal, qui n'a pas donné son nom de famille.

"Jaramana n'a rien connu de tel depuis des années". La ville est d'habitude bondée, mais elle est morte aujourd'hui, tout le monde est à la maison", a-t-il ajouté.

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants.

 "Respecter l'ordre public" 

Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité de ce qui s'est produit et de toute aggravation de la situation".

"La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué.

Il a dénoncé dans le même temps "toute atteinte au prophète Mahomet" et assuré que le message vocal était fabriqué "pour provoquer la sédition".

Le ministère de l'Intérieur a souligné mardi "l'importance de respecter l'ordre public et de ne pas se laisser entraîner dans des actions qui perturberaient l'ordre public".

Il a ajouté qu'il enquêtait sur le message "blasphématoire à l'égard du prophète" Mahomet pour identifier l'auteur et le traduire en justice.

Les druzes, une minorité ésotérique issue de l'islam, sont répartis notamment entre le Liban, la Syrie et Israël.

Dès la chute du pouvoir de Bachar al-Assad le 8 décembre en Syrie, après plus de 13 ans de guerre civile, Israël multiplié les gestes d'ouverture envers cette communauté.

Début mars, à la suite d'escarmouches à Jaramana, Israël avait menacé d'une intervention militaire si les nouvelles autorités syriennes s'en prenaient aux druzes.

Ces propos ont été immédiatement rejetés par les dignitaires druzes, qui ont réaffirmé leur attachement à l'unité de la Syrie. Leurs représentants sont en négociation avec le pouvoir central à Damas pour parvenir à un accord qui permettrait l'intégration de leurs groupes armés dans la future armée nationale.

Depuis que la coalition islamiste dirigée par Ahmad al-Chareh, qui a été proclamé président intérimaire, a pris le pouvoir, la communauté internationale multiplie les appels à protéger les minorités.

Début mars, les régions du littoral dans l'ouest de la Syrie ont été le théâtre de massacres qui ont fait plus de 1.700 tués civils, en grande majorité des alaouites, selon l'OSDH.


Gaza 2025: 15 journalistes tués, selon le Syndicat des journalistes palestiniens

 Les violences contre les journalistes interviennent dans le cadre d'une nouvelle campagne militaire israélienne à Gaza, à la suite de l'échec d'un accord de cessez-le-feu avec le Hamas. (AFP)
Les violences contre les journalistes interviennent dans le cadre d'une nouvelle campagne militaire israélienne à Gaza, à la suite de l'échec d'un accord de cessez-le-feu avec le Hamas. (AFP)
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  • Le dernier rapport du syndicat fait état d'une augmentation des arrestations, des menaces et du harcèlement des journalistes par les Israéliens
  • Le syndicat a également enregistré 49 menaces de mort proférées à l'encontre de journalistes

LONDRES: Au moins 15 professionnels des médias ont été tués à Gaza depuis le début de l'année 2025, selon un nouveau rapport publié par le Syndicat des journalistes palestiniens.

Le rapport, publié ce week-end par le comité des libertés du syndicat chargé de surveiller les violations commises par Israël à l’encontre des journalistes, souligne la persistance du ciblage direct des professionnels des médias.

Sept journalistes ont été tués en janvier et huit en mars, selon le rapport.

Par ailleurs, les familles de 17 journalistes ont été endeuillées, tandis que les habitations de 12 autres ont été détruites par des tirs de roquettes et d’obus. De plus, 11 personnes ont été blessées au cours de ces attaques.

Le rapport note que la violence à l'encontre des équipes de journalistes ne se limite pas aux attaques mortelles. Il fait état de l'arrestation de 15 journalistes, à leur domicile ou alors qu'ils étaient en mission. Certains ont été libérés quelques heures ou quelques jours plus tard, tandis que d'autres sont toujours en détention.

Le syndicat a également enregistré 49 menaces de mort proférées à l'encontre de journalistes, dont beaucoup ont été avertis d'évacuer les zones qu'ils couvraient.

Le rapport relève également une intensification du harcèlement judiciaire, avec plus d’une dizaine de cas où des journalistes – en majorité issus du quotidien Al-Quds, basé en Cisjordanie – ont été convoqués pour interrogatoire et se sont vu interdire de couvrir des événements aux abords de la mosquée Al-Aqsa et dans la vieille ville de Jérusalem.

En Cisjordanie occupée, environ 117 journalistes ont été victimes d'agressions physiques, de répression ou d'interdictions de reportage, en particulier à Jénine et à Jérusalem. La commission a également recensé 16 cas de confiscation ou de destruction de matériel de travail.

Les violences à l'encontre des journalistes surviennent dans le cadre d'une nouvelle campagne militaire israélienne à Gaza, à la suite de l'échec d'un accord de cessez-le-feu avec le Hamas. Les forces israéliennes ont intensifié leur offensive, coupant les approvisionnements vitaux des 2,3 millions d'habitants de Gaza, laissant l'enclave au bord de la famine.

Les actions d'Israël font désormais l'objet d'audiences à la Cour internationale de justice de La Haye, où Tel-Aviv est accusé de violer le droit international en restreignant l'aide humanitaire à Gaza.

Le bilan humanitaire est catastrophique.

Selon le ministère de la santé de Gaza, plus de 61 700 personnes ont été tuées à Gaza depuis qu'Israël a lancé son offensive le 7 octobre 2023. Plus de 14 000 autres sont portées disparues et présumées mortes, les civils constituant la grande majorité des victimes.

Le Comité pour la protection des journalistes, organisme de surveillance de la liberté de la presse basé à Washington, a également lancé un signal d’alarme face au nombre élevé de journalistes tués, indiquant qu’au moins 176 d’entre eux – en grande majorité des Palestiniens – ont perdu la vie depuis le début de l’offensive israélienne sur les territoires occupés.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com