«Ca nous a soudés»: comment la guerre a uni la communauté ukrainienne de France

Un jeune Ukrainien tient une bougie alors qu'il assiste avec sa famille à une messe pour la paix en Ukraine, au 30e jour de l'invasion russe de l'Ukraine, à la basilique du Sacré-Coeur à Paris, le 25 mars 2022. (AFP)
Un jeune Ukrainien tient une bougie alors qu'il assiste avec sa famille à une messe pour la paix en Ukraine, au 30e jour de l'invasion russe de l'Ukraine, à la basilique du Sacré-Coeur à Paris, le 25 mars 2022. (AFP)
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Publié le Samedi 26 mars 2022

«Ca nous a soudés»: comment la guerre a uni la communauté ukrainienne de France

  • Le conflit, expliquent l'ancienne danseuse du ballet national, a transformé en «communauté» unie une petite diaspora jusqu'ici en ordre dispersé
  • Pour certains jeunes, le regain patriotique va jusqu'au retour au pays «pour combattre», se désole la présidente de l'association des étudiants ukrainiens, qui évoque des «générations sacrifiées»

PARIS: A peine arrive-t-elle Place de la Sorbonne, où elle a donné rendez-vous, que son téléphone crache le son des sirènes retentissant au même moment à Kiev. "On vit au rythme de la guerre", soupire Anastasia Loskot, résumant le sentiment des Ukrainiens de France.

A chaque fois que son application retentit, le même rituel pour la mère de famille de 36 ans: appeler ses grand-parents, pour s'assurer qu'ils sont bien descendus aux abris anti-bombardements. D'autant que dans quelques heures, après un mois de conflit en Ukraine, ils doivent enfin prendre un train pour la Pologne.

Le conflit, expliquent l'ancienne danseuse du ballet national Virsky et tous les Ukrainiens interrogés par l'AFP, a transformé en "communauté" unie une petite diaspora jusqu'ici en ordre dispersé.

Elle qui fuyait ses compatriotes pour "mieux s'intégrer" a ressenti "une solidarité énorme, inimaginable même, entre Ukrainiens". "Je n'avais jamais vu ça. Aujourd'hui, même quand on ne se connaît pas, on s'embrasse", raconte la jeune femme arrivée en France en 2014, sur fond de révolution pro-européenne du Maïdan. 

"Il y a eu un regain patriotique énorme. Ici, la communauté s'est mise en ordre de bataille, tout le monde remplit une fonction: manifester, contrer la propagande en ligne, accueillir les réfugiés, collecter les dons...", énumère-t-elle, ruban jaune et bleu noué au sac à dos.

La sienne est d'orchestrer le groupe "jeunesse ukrainienne", sur une messagerie cryptée.

Ceux qui oeuvrent toute l'année pour la communauté ont offert leur logistique: l'association AMC (aide médicale et caritative) Ukraine-France envoie du matériel médical dans les régions séparatistes depuis 2014; les "marchroutki", du nom de ces camionnettes qui font habituellement la navette entre l'Ukraine et la France pour acheminer des produits locaux, n'embarquent plus désormais que de l'aide humanitaire.

A la cathédrale Saint-Volodymyr-le-Grand, centre névralgique de la communauté à Paris, l'église catholique a reçu tellement de dons que "les curés n'avaient plus la place de circuler", raconte Nadia Myhal, pilier de la diaspora.  

Une usine du nord de la France accueille ses ouvrières ukrainiennes à domicile

Elles ont dû quitter leur pays, mais pas leur travail: des ouvrières ukrainiennes fuyant la guerre ont été accueillies dans le nord de la France par leur employeur français, une entreprise de textile, où elles continuent à fabriquer des manteaux.

Devant son ordinateur dans un vaste atelier éclairé par des verrières au sein de l'usine Lener-Cordier à Hazebrouck, Nadia Kotova juxtapose adroitement les pièces de drap à couper pour faire un manteau taille 38 avec le minimum de chutes.

C'est le même travail qu'elle faisait à Kiev jusqu'au 24 février, dans le bureau d'études ukrainien de ce groupe familial français qui fabrique des manteaux, vestes et autres trenchs pour de nombreuses marques.

Le quartier a été bombardé, et l'atelier de Kiev est fermé depuis un mois.

"On s'est enfuis à Lviv, dans l'ouest de l'Ukraine, et M. Lener nous a proposé de venir en France", explique Mme Kotova. "On ne voulait pas partir: il y a mon mari, le mari de ma fille, mon frère là-bas... mais il y avait le travail, et il fallait mettre les enfants en sécurité".

Continuer à produire 
La modéliste est arrivée avec ses deux filles de 17 et 27 ans, et sa petite-fille de un an. Elle est logée temporairement dans une maison prêtée par une collègue française, puis devrait rejoindre un gîte prêté par des habitants de Hazebrouck, où la mairie a également mis des logements à disposition.

Comme elle, sept collègues ou ex-collègues sont arrivées avec des proches - soit 16 Ukrainiens depuis le 9 mars. Cinq de ces employés ont rapidement repris leurs fonctions au sein de l'entreprise.

Comme en témoignent les couleurs bleue et jaune très présentes dans ses locaux, Lener-Cordier entretient des liens de longue date avec l'Ukraine. Le groupe y est implanté depuis 1994 et y produit la majorité de ses manteaux, employant 250 salariés dans une usine installée dans l'ouest du pays depuis 2004.

Cette usine, épargnée par les combats, fonctionne toujours, et Lener-Cordier s'efforce de continuer à produire en Ukraine. "Mais il faut réfléchir au temps d'après", souligne le PDG, Frédéric Lener, évoquant relocalisation ou recherche d'autres sites à l'étranger.

Le groupe s'est appuyé sur ses équipes locales pour expédier de l'aide humanitaire par camions, rejoint par des producteurs de textile français réunis dans l'association Façon de faire, des sociétés de grande distribution ou de simples particuliers, venus déposer une palette de pommes de terre ou des médicaments.

«A la maison c'est mieux»
Une fois les salariées du bureau d'études en sécurité hors de Kiev, "s'est posée la question: comment fait-on si notre bureau d'études est fermé en Ukraine?", explique M. Lener. "Certaines avaient déjà décidé d'aller en Pologne. Je leur ai proposé de venir en France et d'organiser leur accueil".

"Ce sont des gens qu'on connaît depuis plus de 20 ans, des salariés, des collaborateurs, certains sont devenus des amis, c'était évident comme démarche, ça s'est passé très spontanément", souligne-t-il.

Une salariée franco-ukrainienne, Olga, ex-employée en Ukraine qui a rejoint il y a des années les ateliers de Hazebrouck après avoir rencontré son époux dans cette ville lors d'un voyage professionnel, sert d'interprète.

Les autres communiquent via des applications de traduction.

"On a l'habitude, on travaillait ensemble à distance", explique Valérie Loquet, responsable des modélistes. "On se connaissait déjà un peu, et quelque part, pour nous c'est plus simple de travailler côte à côte".

Pour le moment, les cinq salariées sont considérées comme étant en mission. Et tous les membres du groupe sont en train de s'enregistrer en France, tout en gardant l'espoir de rentrer bientôt en Ukraine.

En attendant, la fille de Nadia devrait rejoindre sous peu un lycée français.

"La peur et la joie, toutes mes émotions sont mélangées. Mes enfants sont protégés ici mais mon cœur est là-bas", souligne Nadia, dont l'immeuble voisin du sien a été bombardé. "Je veux rentrer chez moi", conclut-elle, citant un proverbe ukrainien: "chez les amis c'est bien. Mais à la maison c'est mieux". 

«On a oublié nos divisions»
"En ce moment, ici, ça ressemble plus à une ville ukrainienne qu'à Paris", apprécie la retraitée, présidente de l'association des femmes ukrainiennes de France et directrice de l'école ukrainienne du samedi.

"Ca nous a soudés. Dans les manifestations, je vois des têtes que je n'avais jamais vues. Mais pour l'instant, on a tellement de nouveaux Ukrainiens qui arrivent qu'on essaie encore de s'organiser. L'école reçoit déjà 100 enfants de réfugiés en plus, on va ouvrir des classes supplémentaires pour que ces enfants de la guerre ne se sentent pas abandonnés".

Pour certains jeunes, le regain patriotique va jusqu'au retour au pays "pour combattre", se désole Zoriana Haniak, présidente de l'association des étudiants ukrainiens, qui évoque des "générations sacrifiées". 

La veille du conflit, la France comptait 17 655 Ukrainiens titulaires d'un titre de séjour. Une petite communauté, si on la compare aux voisins européens: près de 100 000 en Espagne, 225 000 en Italie. 

Avec l'afflux de réfugiés, la France, jusqu'ici un pays de "transit", pourrait devenir "un pays de fixation" pour les Ukrainiens, anticipait début mars le coordinateur de la cellule interministérielle de crise sur l'Ukraine, Joseph Zimet.

La crise aura du moins transformé la communauté: "On a oublié nos divisions pour aider", convient Evgenia Besançon, retraitée et traductrice bénévole dans le centre d'accueil parisien pour ces réfugiés.

Arrivée en France à la chute de l'URSS en 1991, après avoir grandi dans l'est ukrainien russophone, elle s'était toujours coupée de cette diaspora "de l'ouest": "A l'époque, on a fui la russification forcée de l'Ukraine. Ensuite on a vécu l'+ukrainisation+ forcée des régions russophones. Mais dans le centre, on aide des femmes, des vieillards, des enfants. Et mon coeur saigne quand je vois ce qui se passe", dit la septuagénaire dont la belle-fille et la petite fille viennent de débarquer de Kharkiv.

Après avoir accueilli les réfugiés, Anastasia Loskot, l'ex-ballerine, aimerait elle rentrer dans son pays pour la première fois: "Je sais que ce ne sera plus le pays que j'ai connu. Mais on va le reconstruire".


Des rapports internes concluent à un climat antisémite et anti-musulman à Harvard

Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël". (AFP)
Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël". (AFP)
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  • Harvard, comme d'autres universités américaines de renom, Columbia en particulier, est accusée par le président républicain d'avoir laissé prospérer l'antisémitisme sur son campus pendant les mouvements étudiants contre la guerre à Gaza menée par Israël
  • Un premier groupe de travail sur l'antisémitisme et les positions anti-Israël, composé principalement de membres du corps enseignant mais aussi d'étudiants

NEW YORK: Deux rapports distincts sur Harvard publiés mardi par l'université ont établi qu'un climat antisémite et anti-musulman s'était installé sur le campus de la prestigieuse université américaine, dans le viseur de Donald Trump, et la pressent d'agir pour y remédier.

Ces deux rapports de plusieurs centaines de pages, construits notamment à partir de questionnaires et de centaines de témoignages d'étudiants et d'encadrants menés depuis janvier 2024, sont rendus au moment où l'université implantée près de Boston (nord-est) s'est attiré les foudres de Donald Trump, qui l'a dernièrement dépeinte en "institution antisémite d'extrême gauche", "foutoir progressiste" et "menace pour la démocratie".

Harvard, comme d'autres universités américaines de renom, Columbia en particulier, est accusée par le président républicain d'avoir laissé prospérer l'antisémitisme sur son campus pendant les mouvements étudiants contre la guerre à Gaza menée par Israël après l'attaque du Hamas le 7 octobre 2023.

Un premier groupe de travail sur l'antisémitisme et les positions anti-Israël, composé principalement de membres du corps enseignant mais aussi d'étudiants, a établi que les deux phénomènes "ont été alimentés, pratiqués et tolérés, non seulement à Harvard, mais aussi plus largement dans le monde universitaire".

Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël".

Un autre groupe de travail distinct, lui consacré aux positions anti-musulmans, anti-arabes et anti-Palestiniens, a conclu à "un sentiment profondément ancré de peur parmi les étudiants, les enseignants et le personnel". Les personnes interrogées décrivent "un sentiment de précarité, d'abandon, de menace et d'isolement, ainsi qu'un climat d'intolérance omniprésent", écrivent ses auteurs.

"Harvard ne peut pas - et ne va pas - tolérer l'intolérance. Nous continuerons à protéger tous les membres de notre communauté et à les préserver du harcèlement", s'engage dans une lettre accompagnant les deux rapports le président de Harvard, Alan Garber, à l'initiative des deux rapports, en promettant de "superviser la mise en oeuvre des recommandations" préconisées.

Harvard, l'université la plus ancienne des Etats-Unis et une des mieux classées au monde, s'est distinguée en étant la première à attaquer en justice l'administration Trump contre un gel de plus de deux milliards de dollars de subventions fédérales, décidé après que la célèbre institution a refusé de se plier à une série d'exigences du président.

Donald Trump, qui reproche aux universités d'être des foyers de contestation progressiste, veut avoir un droit de regard sur les procédures d'admission des étudiants, les embauches d'enseignants ou encore les programmes.

L'accusation d'antisémitisme est fréquemment employée par son administration pour justifier ses mesures contre les établissements d'enseignement supérieur, ainsi que contre certains étudiants étrangers liés aux manifestations contre la guerre à Gaza.


Canada: le libéral Mark Carney donné vainqueur après une campagne centrée sur Trump

Le Premier ministre canadien et chef du Parti libéral, Mark Carney, salue ses partisans lors d'une fête de victoire à Ottawa (Ontario), le 29 avril 2025. (AFP)
Le Premier ministre canadien et chef du Parti libéral, Mark Carney, salue ses partisans lors d'une fête de victoire à Ottawa (Ontario), le 29 avril 2025. (AFP)
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  • Le Parti libéral de Mark Carney a remporté lundi les législatives canadiennes, selon les projections des médias locaux, après une campagne centrée sur les menaces du président américain Donald Trump contre le pays
  • Toutefois, selon des résultats encore préliminaires, les libéraux pourraient rester minoritaires au Parlement et seraient donc contraints de gouverner avec l'appui d'un autre parti

OTTAWA: Le Parti libéral de Mark Carney a remporté lundi les législatives canadiennes, selon les projections des médias locaux, après une campagne centrée sur les menaces du président américain Donald Trump contre le pays.

Toutefois, selon des résultats encore préliminaires, les libéraux pourraient rester minoritaires au Parlement et seraient donc contraints de gouverner avec l'appui d'un autre parti.

Il y a quelques mois encore, la voie semblait toute tracée pour permettre aux conservateurs canadiens emmenés par Pierre Poilievre de revenir aux affaires, après dix ans de pouvoir de Justin Trudeau.

Mais le retour de Donald Trump à la Maison Blanche et son offensive inédite contre le Canada, à coups de droits de douane et de menaces d'annexion, ont changé la donne.

A Ottawa, où les libéraux sont réunis pour la soirée électorale dans une aréna de hockey, l'annonce des résultats a provoqué une salve d'applaudissements et des cris enthousiastes.

"Je suis si heureuse", lâche sur place Dorothy Goubault, originaire de la région des Mille Iles en Ontario. "Je suis contente car nous avons quelqu'un qui peut parler à M. Trump à son niveau. M. Trump est un homme d'affaires. M. Carney est un homme d'affaires, et je pense qu'ils peuvent tous les deux se comprendre".

Pour le ministre Steven Guilbeault, "les nombreuses attaques du président Trump sur l'économie canadienne, mais aussi sur notre souveraineté et notre identité même, ont vraiment mobilisé les Canadiens", a-t-il déclaré sur la chaine publique CBC.

Et les électeurs "ont vu que le Premier ministre Carney avait de l'expérience sur la scène mondiale".

Mark Carney n'avait pas encore pris la parole à minuit locales (04H00 GMT), tandis que se poursuivait le dépouillement.

Dans les longues files devant les bureaux de vote toute la journée, les électeurs ont souligné l'importance de ce scrutin, parlant d'élections historiques et déterminantes pour l'avenir de ce pays de 41 millions d'habitants.

- "Chaos" -

À 60 ans, Mark Carney, novice en politique mais économiste reconnu, a su convaincre une population inquiète pour l'avenir économique et souverain du pays qu'il était la bonne personne pour piloter le pays en ces temps troublés.

Cet ancien gouverneur de la banque du Canada et de Grande-Bretagne n'a cessé de rappeler pendant la campagne que la menace américaine est réelle pour le Canada.

"Ils veulent nos ressources, notre eau. Les Américains veulent notre pays", a-t-il prévenu.

"Le chaos est entré dans nos vies. C'est une tragédie, mais c'est aussi une réalité. La question clé de cette élection est de savoir qui est le mieux placé pour s'opposer au président Trump?", a-t-il expliqué pendant la campagne.

Pour faire face, il a promis de maintenir des droits de douane sur les produits américains tant que les mesures de Washington seront en place.

Mais aussi de développer le commerce au sein de son pays en levant les barrières douanières entre provinces et de chercher de nouveaux débouchés, notamment en Europe.

En face, le chef conservateur, qui avait promis des baisses d'impôts et des coupes dans les dépenses publiques, n'a pas réussi à convaincre les électeurs de ce pays du G7, 9e puissance mondiale, de tourner le dos aux libéraux.

Pierre Poilievre aura aussi souffert jusqu'au bout de la proximité, de par son style et certaines de ses idées, avec le président américain, ce qui lui a aliéné une partie de l'électorat, selon les analystes.

Au QG des conservateurs à Ottawa, Jason Piche se dit toutefois "surpris" des résultats, "je pensais que ce serait plus serré que ça".

Un peu plus loin, Jean-Guy Bourguignon, homme d'affaires de 59 ans, se dit carrément "très triste". "Est-ce que c'est vraiment ça le pays dans lequel nous voulons vivre?", demande-t-il alors qu'il énumère les politiques des libéraux, qu'il juge liberticides.

Près de 29 millions d'électeurs étaient appelés aux urnes dans ce vaste pays du G7 qui s'étend sur six fuseaux horaires. Et plus de 7,3 millions de personnes avaient voté par anticipation, un record.


Ukraine: Poutine annonce une trêve du 8 au 10 mai, «tentative de «manipulation»» répond Zelensky

Le président russe Vladimir Poutine prononce un discours lors d'une réunion du Conseil des législateurs à Saint-Pétersbourg, le 28 avril 2025. (AFP)
Le président russe Vladimir Poutine prononce un discours lors d'une réunion du Conseil des législateurs à Saint-Pétersbourg, le 28 avril 2025. (AFP)
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  • Le président russe Vladimir Poutine a annoncé lundi une trêve sur le front en Ukraine durant trois jours du 8 au 10 mai
  • Son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky denonçant une "tentative de manipulation"

MOSCOU: Le président russe Vladimir Poutine a annoncé lundi une trêve sur le front en Ukraine durant trois jours du 8 au 10 mai, à l'occasion de la commémoration de la victoire sur l'Allemagne nazie, son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky denonçant une "tentative de manipulation".

Le président américain Donald Trump exhorte Kiev et Moscou à conclure un cessez-le-feu et un accord de paix, trois ans après le début de l'offensive russe ayant déjà fait des dizaines de milliers de morts civils et militaires.

"A partir de minuit entre le 7 et le 8 mai, et jusqu'à minuit entre le 10 et le 11 mai, la partie russe annonce un cessez-le-feu", a indiqué le Kremlin dans un communiqué. "Pendant cette période, toutes les opérations de combat seront arrêtées".

D'après la présidence russe, Vladimir Poutine a pris cette décision unilatérale "pour des raisons humanitaires" et à l'occasion des célébrations du 80e anniversaire de la victoire sur l'Allemagne nazie.

Pour M. Zelensky, au contraire, "il y a désormais une nouvelle tentative de manipulation". "Pour une raison, a-t-il dit dans son adresse quotidienne, tout le monde doit attendre le 8 mai et ne cesser le feu qu'ensuite pour garantir le silence" lors de la parade du 9 mai sur la place Rouge à Moscou.

La Russie commémore le 9 mai cet événement dont Vladimir Poutine a fait un marqueur essentiel de la puissance retrouvée du pays. Les dirigeants d'une vingtaine de pays sont attendus pour un défilé militaire en grande pompe sur la place Rouge à Moscou.

Le Kremlin a dit considérer que l'Ukraine "devrait suivre cet exemple", tout en prévenant que les forces russes "fourniront une réponse adéquate et efficace" en cas de violation de la trêve.

Vladimir Poutine avait déjà déclaré un bref cessez-le-feu de 30 heures les 19 et 20 avril à l'occasion de Pâques. Les deux camps s'étaient ensuite accusés de l'avoir violé, même si une baisse de l'intensité des combats avait été ressentie dans plusieurs secteurs du front.

"Accroître la pression sur la Russie"

La Maison Blanche a soutenu lundi que Donald Trump souhaitait un cessez-le-feu "permanent" en Ukraine et pas seulement une trêve temporaire.

Les Etats-Unis, jusque-là le premier soutien de l'Ukraine, veulent tourner la page aussi vite que possible quitte, craint Kiev, à accepter des dispositions très favorables à Moscou.

Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a dit dimanche à son homologue russe, Sergueï Lavrov, qu'il était temps de mettre fin à une "guerre insensée" en Ukraine, selon un communiqué lundi.

De son côté, le président français Emmanuel Macron a affirmé que "dans les huit à dix jours prochains, nous allons accroître la pression sur la Russie", dans un entretien publié par le magazine Paris Match.

Il a estimé avoir "convaincu les Américains de la possibilité d’une escalade des menaces, et potentiellement de sanctions" contre Moscou.

Conditions maximalistes de Poutine 

La Russie maintient des conditions maximalistes concernant l'Ukraine, dont elle veut la reddition et le renoncement à rejoindre l'Otan, tout en s'assurant de pouvoir garder les territoires ukrainiens annexés.

La reconnaissance internationale de l'annexion russe de la Crimée et de quatre autres régions ukrainiennes est une condition "impérative" à la paix, a encore martelé lundi le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov.

La Russie a annexé la péninsule ukrainienne de Crimée en mars 2014, ce que la communauté internationale, Etats-Unis compris, n'a jamais reconnu.

En septembre 2022, quelques mois après le déclenchement de son assaut à grande échelle, elle a aussi revendiqué l'annexion de quatre régions ukrainiennes qu'elle occupe partiellement, celles de Donetsk, Lougansk, Kherson et Zaporijjia.

La Russie, qui a l'avantage sur le front, a revendiqué lundi la prise de Kamyanka, un village de la région de Kharkiv, dans le nord-est de l'Ukraine.

La Corée du Nord a pour la première fois reconnu lundi avoir envoyé des troupes en Russie et qu'elles avaient aidé Moscou à reprendre aux Ukrainiens les zones de la région de Koursk dont ils s'étaient emparés.

Trois personnes ont par ailleurs été tuées lundi dans une attaque russe contre un village de la région de Donetsk (est), selon les services du procureur régional.