Pakistan: Imran Khan proche de la sortie avec le vote d'une motion de censure

La Cour suprême a jugé jeudi qu'Imran Khan avait agi illégalement en dissolvant le Parlement et en appelant à de nouvelles élections après que le vice-président de l'Assemblée nationale ait refusé d'autoriser un vote de censure plus tôt. (Photo, AFP)
La Cour suprême a jugé jeudi qu'Imran Khan avait agi illégalement en dissolvant le Parlement et en appelant à de nouvelles élections après que le vice-président de l'Assemblée nationale ait refusé d'autoriser un vote de censure plus tôt. (Photo, AFP)
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Publié le Samedi 09 avril 2022

Pakistan: Imran Khan proche de la sortie avec le vote d'une motion de censure

  • Vendredi soir, M. Khan avait assuré dans une adresse à la Nation avoir «accepté le jugement de la Cour suprême», qui a mené à la tenue de ce vote sur la motion de censure
  • L'ancienne star du cricket a appelé ses partisans à manifester dans le calme dimanche et affirmé qu'il «n'accepterait pas» le nouveau gouvernement

ISLAMABAD, Pakistan : Les parlementaires pakistanais se sont violemment interpellés samedi à l'ouverture de la session qui devrait voir le Premier ministre Imran Khan être renversé par une motion de censure.

Le président de l'Assemblée nationale a ajourné au début d'après-midi la séance, après 30 minutes d'échanges orageux.

Les députés devraient voter la défiance à l'égard de M. Khan, qui n'était pas présent. Certains de ses alliés dans la coalition au pouvoir ont fait défection et des membres de son propre parti, le Pakistan Tehreek-e-Insaf (PTI, Mouvement du Pakistan pour la justice), ont annoncé qu'ils soutiendraient la motion.

L'opposition disposerait au minimum de 177 voix, quand 172 sont requises pour obtenir la majorité et renverser le gouvernement.

Aucun vote de confiance pour confirmer le nom d'un nouveau Premier ministre n'est encore au programme de la session de samedi, mais cela pourrait changer à la dernière minute.

Shehbaz Sharif, le leader de la Ligue musulmane du Pakistan (PML-N) et frère cadet de Nawaz Sharif, qui fut trois fois Premier ministre, est pressenti pour occuper le poste.

La tension a monté dans la matinée quand Shehbaz Sharif a demandé à ce que le vote ait lieu sans attendre. «Vous mènerez la procédure à l'Assemblée en conformité avec le jugement de la Cour suprême», a-t-il exigé, furieux.

«C'est mon devoir» de défendre la position du gouvernement, a répliqué le ministre des affaires étrangères, Shah Mehmood Qureshi, en affirmant que le gouvernement faisait face à la motion de censure «dans le respect de la loi et la Constitution».

«Ingérence étrangère»

Vendredi soir, M. Khan avait assuré dans une adresse à la Nation avoir «accepté le jugement de la Cour suprême», qui a mené à la tenue de ce vote sur la motion de censure. Mais il a répété ses accusations des derniers jours selon lesquelles il aurait été la victime d'une conspiration ourdie par les États-Unis.

L'ancienne star du cricket a appelé ses partisans à manifester dans le calme dimanche et affirmé qu'il «n'accepterait pas» le nouveau gouvernement.

La capitale Islamabad était placée samedi sous très forte sécurité, des milliers de policiers patrouillant les rues et des conteneurs empêchant l'accès à la zone où sont situés les principaux bâtiments administratifs.

La Cour a considéré que M. Khan et ses soutiens avaient agi illégalement en refusant dimanche dernier de soumettre la motion de censure au vote, au motif qu'elle résultait d'une «ingérence étrangère», et en décidant de dissoudre l'Assemblée, ce qui ouvrait la voie à des élections anticipées sous trois mois.

La plus haute instance judiciaire du pays a ordonné que l'Assemblée soit restaurée et que le vote sur la motion de censure ait lieu.

Imran Khan, 69 ans, qui s'était fait élire en 2018 en profitant de la lassitude des électeurs à l'égard de la PML-N et du Parti du peuple pakistanais (PPP), les deux partis qui ont dominé avec l'armée la vie politique nationale pendant des décennies, s'en est violemment pris à eux ces derniers jours.

Il les a accusés de trahison, pour avoir selon lui intrigué avec les Etats-Unis afin d'obtenir son départ. Washington a nié toute implication.

Calendrier électoral

A l'en croire, les États-Unis, déjà offusqués par ses critiques répétées à l'encontre de la politique américaine en Irak ou en Afghanistan, ont été ulcérés par sa visite à Moscou le jour même du déclenchement de la guerre en Ukraine.

Quel que soit le nom du successeur d'Imran Khan, une lourde tâche l'attend. Les défis sont nombreux, à commencer par le redressement d'une économie caractérisée par une inflation élevée, une roupie en dépréciation constante et une dette préoccupante.

La sécurité se dégrade également. Galvanisés par l'arrivée au pouvoir des talibans en août en Afghanistan, les talibans pakistanais du Tehreek-e-Taliban Pakistan (TTP) ont multiplié les attaques ces derniers mois.

L'opposition s'était par le passé dite favorable à des élections anticipées, mais seulement après qu'elle ait obtenu le départ de M. Khan.

Ces élections doivent être convoquées d'ici octobre 2023. Mais une fois au pouvoir, l'opposition sera en mesure de fixer son propre calendrier électoral, et aussi d'influer sur une série d'affaires ouvertes à son encontre sous le gouvernement Khan.

La Commission électorale estime qu'il lui faudra au moins sept mois pour être prête à organiser une élection, selon les médias pakistanais.

Le Pakistan, une république islamique de 220 millions d'habitants dotée de l'arme nucléaire, est habitué aux crises politiques. Le pays a passé plus de trois décennies sous un régime militaire et aucun Premier ministre n'est jamais allé au bout de son mandat depuis l'indépendance en 1947.

L'armée, clé du pouvoir politique, qui avait été accusée de soutenir M. Khan en 2018, n'est pas publiquement intervenue ces derniers jours.


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
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  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.