Nicaragua: quatre ans après le soulèvement anti-Ortega, des familles demandent «justice»

Sur cette photo d'archive prise le 20 avril 2018, des étudiants brûlent des pneus devant l'Université d'ingénierie lors d'affrontements avec la police anti-émeute, dans le cadre d'une manifestation contre les réformes du gouvernement à l'Institut de sécurité sociale (INSS) de Managua. (Inti Ocon/AFP)
Sur cette photo d'archive prise le 20 avril 2018, des étudiants brûlent des pneus devant l'Université d'ingénierie lors d'affrontements avec la police anti-émeute, dans le cadre d'une manifestation contre les réformes du gouvernement à l'Institut de sécurité sociale (INSS) de Managua. (Inti Ocon/AFP)
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Publié le Dimanche 17 avril 2022

Nicaragua: quatre ans après le soulèvement anti-Ortega, des familles demandent «justice»

  • Initialement lancées contre un projet de réforme de la sécurité sociale, les manifestations se sont vite transformées en une vive contestation contre le pouvoir du chef de l'État, accusé de corruption et de népotisme
  • La contestation réclamant la démission de Daniel Ortega a été réprimée dans le sang, faisant 355 morts et plus de 100.000 exilés

MANAGUA, Nicaragua :«J'ai du mal à respirer», a glissé dans son dernier souffle Alvaro Conrado, 15 ans, touché par balle en 2018 à Managua tandis qu'il apportait de l'eau à des étudiants mobilisés contre le gouvernement de Daniel Ortega. Sa vie s'est arrêtée, celle de sa famille aussi.

L'adolescent a été vraisemblablement tué par un franc-tireur. Les premières manifestations contre le pouvoir avaient éclaté deux jours plus tôt, le 18 avril. Initialement lancées contre un projet de réforme de la sécurité sociale, elles se sont vite transformées en une vive contestation contre le pouvoir du chef de l'État, accusé de corruption et de népotisme.

Manifestations, barricades, affrontements avec la police, le pays a été paralysé pendant cinq mois et la contestation réclamant la démission de Daniel Ortega a été réprimée dans le sang, faisant 355 morts et plus de 100.000 exilés, selon la Commission interaméricaine des droits humains.

«La justice et la vérité. C'est ce que nous voulons, qu'on nous dise ce qu'il s'est passé. Quatre ans après, personne n'a été arrêté», déplore auprès de l'AFP Alvaro Conrado, le père de l'adolescent, dans sa maison de Managua.

En quatre ans, le pays s'est enfoncé dans la crise politique. Le gouvernement, pour qui les manifestations «terroristes» de 2018 relèvent d'une tentative de coup d'État, a interdit plusieurs partis d'opposition et ONG. Il a fait fermer des universités privées et des journaux indépendants, avant de faire promulguer un arsenal législatif destiné à contrer l'opposition.

L'État, lui, est contrôlé à tous les niveaux par le parti au pouvoir, le Front sandiniste de libération nationale (FSLN).

En novembre, Daniel Ortega, un ex-guérillero de 76 ans, au pouvoir depuis 2007, a été sans surprise réélu pour un quatrième mandat consécutif, alors que ses rivaux les plus sérieux et de nombreux opposants étaient emprisonnés, accusés de complot contre son gouvernement avec le soutien de Washington.

A quelques jours du quatrième anniversaire du soulèvement, la vice-présidente et épouse de Daniel Ortega, Rosario Murillo, a dénoncé une «explosion infernale, malveillante, maligne». «Il n'y aura ni pardon, ni oubli», a-t-elle lancée, en affirmant que l'histoire se souviendrait de la «victoire sur le mal».

- «Nouvelle vague de persécution» -

«Le 20 avril, à midi, quand j'ai reçu un appel me disant que mon fils Alvaro était blessé, je ne pouvais pas le croire. Je n'oublierai jamais ce moment», raconte Alvaro Conrado.

Depuis, cet informaticien de 53 ans a perdu son poste de fonctionnaire. Son épouse, qui vit en Espagne, redoute de rentrer au Nicaragua après avoir manifesté pour dénoncer l'assassinat de son fils avec l'Association des mères d'avril (AMA).

Dans le nord du pays, dans la ville d'Esteli, Francisca Machado, 48 ans, pleure également son fils, Franco Valdivia, un étudiant en droit de 23 ans tué pendant les manifestations.

La mère de famille vit chaque mois d'avril avec «beaucoup de douleur et d'impuissance». «Je veux et j'exige justice, quoi qu'il en coûte», dit-elle.

Dans le sud du Nicaragua, sur l'île d'Ometepe, Justo Rodriguez, un agriculteur de 69 ans, a été arrêté en 2020, accusé d'avoir participé à la commémoration du deuxième anniversaire des manifestations, ce qu'il conteste.

Il a passé huit mois en prison où il est tombé malade. Depuis sa libération, il reste prostré dans son lit avec des difficultés pour s'exprimer. «Après m'avoir emmené là-bas» en prison, «ils m'ont ramené en mauvais état», parvient-il expliquer.

Selon Vilma Nuñez, la présidente du Centre nicaraguayen des droits humains (Cenidh), une des rares organisations indépendantes qui opèrent encore dans le pays, 177 opposants sont toujours détenus, dont certains ont déjà été condamnés jusqu'à 13 ans de prison.

Mais la répression ne cesse pas, dit-elle à l'AFP, relatant «une nouvelle vague de persécution avec des perquisitions, menaces et arrestations». Au moins six musiciens et producteurs ayant une position critique ont ainsi été arrêtés récemment.

Sans compter «une autre forme de répression» qui consiste «à retirer les passeports des gens pour qu'ils ne puissent pas voyager, et s'ils sont à l'extérieur du pays, les empêcher de renouveler leur passeport, ce qui les rend illégaux».

J'en ai eu assez de tant de cruauté», raconte l'ex-ambassadeur nicaraguayen qui a fait défection

Le 23 mars, il faisait défection de manière spectaculaire en dénonçant devant l'Organisation des Etats américains (OEA) la «dictature» de Daniel Ortega au Nicaragua où plus de «177 prisonniers politiques» sont emprisonnés.

Limogé, l'ex-ambassadeur nicaraguayen Arturo McFields évoque auprès de l'AFP par téléphone depuis les Etats-Unis, la situation dans son pays quatre ans après la sanglante répression des manifestations anti-gouvernementales.

Quelle est la situation au Nicaragua ?

«La délinquance et le trafic de drogue augmentent, mais la police persécute et harcèle les responsables religieux, les journalistes, les chanteurs et les quelques rares défenseurs des droits humains qui restent encore dans le pays. C'est irrationnel. Mais toutes les morts ont leur résurrection et je pense que le Nicaragua va connaître son +dimanche de gloire+».

Que peut encore faire le gouvernement de Daniel Ortega ?

«Oser emprisonner des responsables religieux. Cela pourrait être une nouvelle étape de la répression. L'an dernier, le président a déclaré que dans n'importe quel autre pays, des religieux (qui critiquent le gouvernement) seraient en prison (...) Il les a qualifiés de terroristes».

Vous dites cela en raison de l'expulsion du nonce apostolique en mars ?

«Les menaces se sont poursuivies cette année et nous savons qu'ensuite elles se concrétisent. Je veux croire qu'il va y avoir de l'espérance. Les gens sont fatigués de tant de répression, même les fonctionnaires, les policiers, les militaires».

Cela peut-il prendre la forme de manifestations collectives ?

«Cette lassitude à un moment donné va se concrétiser d'une manière ou d'une autre dans une manifestation, dans quelque chose de différent. Comment je sais cela ? J'en suis la preuve vivante. J'étais à l'intérieur et j'en ai eu assez. Assez de tant de cruauté, de mauvais traitements. La répression est un boomerang. Quand la répression et la cruauté augmentent, cela vous révèle comme dictateur. Et la rhétorique habituelle de l'impérialisme (des Etats-Unis) et de la CIA et toutes ces choses tombent à plat».

Quels sont les projets du gouvernement ?

«La soif de pouvoir est très grande, même si aucun successeur n'a été désigné. Pour des raisons biologiques, (Daniel Ortega, 76 ans, et son épouse Rosario Murillo, 70 ans) ne peuvent pas durer éternellement. Cela pourrait être Rosario Murillo, mais on ne sait pas. Ce que l'on sait, c'est qu'ils veulent rester au pouvoir pour toujours. La seule façon d'éviter cela, c'est que l'opposition soit unie».

Vous évoquez un mécontentement au sein de gouvernement, c'est-à-dire ?

«Le gouvernement ne permet pas que les gens donnent leur avis de façon aussi catégorique. Je vous parle de l'atmosphère qui règne dans cet environnement et des interactions que l'on a quand on est haut fonctionnaire. On voit passer des commentaires, on entend des réactions. On ressent des choses et on se dit : +je ne suis pas le seul+.  

Le gouvernement parvient à apaiser ces mécontentements grâce aux trois P : prison, prébendes et persuasion. La persuasion n'est pas beaucoup utilisée. Les avantages par prébendes il n'y en a pas parce qu'il n'y a plus de coopération (économique) avec le Venezuela. Donc ce qui est utilisé, c'est la prison.  Des fonctionnaires se voient retirer leur passeport, et cela a été renforcé après ce qu'il s'est passé avec moi».

Qui a le pouvoir, Daniel Ortega ou son épouse ?

«Au quotidien, Rosario Murillo est celle qui est en première ligne. Mais quand il s'agit de décisions de la plus haute importance, le président a le dernier mot».

Quel est votre statut actuel aux Etats-Unis ?

«J'ai demandé l'asile. Dans mon pays j'ai été désigné comme un traître à la patrie (...) si je rentre, m'attend une cellule dans la prison d'El Chipote (où sont emprisonnés les opposants)».

Qu'attendez-vous du gouvernement de Joe Biden ?

«Nous demandons l'extension d'un statut de protection temporaire pour les Nicaraguayens qui fuient leur pays. Qu'on leur permette de gagner leur vie honnêtement, parce que la «migra» (autorité migratoire américaine) peut les renvoyer dans un régime de terreur».

 


Des rapports internes concluent à un climat antisémite et anti-musulman à Harvard

Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël". (AFP)
Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël". (AFP)
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  • Harvard, comme d'autres universités américaines de renom, Columbia en particulier, est accusée par le président républicain d'avoir laissé prospérer l'antisémitisme sur son campus pendant les mouvements étudiants contre la guerre à Gaza menée par Israël
  • Un premier groupe de travail sur l'antisémitisme et les positions anti-Israël, composé principalement de membres du corps enseignant mais aussi d'étudiants

NEW YORK: Deux rapports distincts sur Harvard publiés mardi par l'université ont établi qu'un climat antisémite et anti-musulman s'était installé sur le campus de la prestigieuse université américaine, dans le viseur de Donald Trump, et la pressent d'agir pour y remédier.

Ces deux rapports de plusieurs centaines de pages, construits notamment à partir de questionnaires et de centaines de témoignages d'étudiants et d'encadrants menés depuis janvier 2024, sont rendus au moment où l'université implantée près de Boston (nord-est) s'est attiré les foudres de Donald Trump, qui l'a dernièrement dépeinte en "institution antisémite d'extrême gauche", "foutoir progressiste" et "menace pour la démocratie".

Harvard, comme d'autres universités américaines de renom, Columbia en particulier, est accusée par le président républicain d'avoir laissé prospérer l'antisémitisme sur son campus pendant les mouvements étudiants contre la guerre à Gaza menée par Israël après l'attaque du Hamas le 7 octobre 2023.

Un premier groupe de travail sur l'antisémitisme et les positions anti-Israël, composé principalement de membres du corps enseignant mais aussi d'étudiants, a établi que les deux phénomènes "ont été alimentés, pratiqués et tolérés, non seulement à Harvard, mais aussi plus largement dans le monde universitaire".

Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël".

Un autre groupe de travail distinct, lui consacré aux positions anti-musulmans, anti-arabes et anti-Palestiniens, a conclu à "un sentiment profondément ancré de peur parmi les étudiants, les enseignants et le personnel". Les personnes interrogées décrivent "un sentiment de précarité, d'abandon, de menace et d'isolement, ainsi qu'un climat d'intolérance omniprésent", écrivent ses auteurs.

"Harvard ne peut pas - et ne va pas - tolérer l'intolérance. Nous continuerons à protéger tous les membres de notre communauté et à les préserver du harcèlement", s'engage dans une lettre accompagnant les deux rapports le président de Harvard, Alan Garber, à l'initiative des deux rapports, en promettant de "superviser la mise en oeuvre des recommandations" préconisées.

Harvard, l'université la plus ancienne des Etats-Unis et une des mieux classées au monde, s'est distinguée en étant la première à attaquer en justice l'administration Trump contre un gel de plus de deux milliards de dollars de subventions fédérales, décidé après que la célèbre institution a refusé de se plier à une série d'exigences du président.

Donald Trump, qui reproche aux universités d'être des foyers de contestation progressiste, veut avoir un droit de regard sur les procédures d'admission des étudiants, les embauches d'enseignants ou encore les programmes.

L'accusation d'antisémitisme est fréquemment employée par son administration pour justifier ses mesures contre les établissements d'enseignement supérieur, ainsi que contre certains étudiants étrangers liés aux manifestations contre la guerre à Gaza.


Canada: le libéral Mark Carney donné vainqueur après une campagne centrée sur Trump

Le Premier ministre canadien et chef du Parti libéral, Mark Carney, salue ses partisans lors d'une fête de victoire à Ottawa (Ontario), le 29 avril 2025. (AFP)
Le Premier ministre canadien et chef du Parti libéral, Mark Carney, salue ses partisans lors d'une fête de victoire à Ottawa (Ontario), le 29 avril 2025. (AFP)
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  • Le Parti libéral de Mark Carney a remporté lundi les législatives canadiennes, selon les projections des médias locaux, après une campagne centrée sur les menaces du président américain Donald Trump contre le pays
  • Toutefois, selon des résultats encore préliminaires, les libéraux pourraient rester minoritaires au Parlement et seraient donc contraints de gouverner avec l'appui d'un autre parti

OTTAWA: Le Parti libéral de Mark Carney a remporté lundi les législatives canadiennes, selon les projections des médias locaux, après une campagne centrée sur les menaces du président américain Donald Trump contre le pays.

Toutefois, selon des résultats encore préliminaires, les libéraux pourraient rester minoritaires au Parlement et seraient donc contraints de gouverner avec l'appui d'un autre parti.

Il y a quelques mois encore, la voie semblait toute tracée pour permettre aux conservateurs canadiens emmenés par Pierre Poilievre de revenir aux affaires, après dix ans de pouvoir de Justin Trudeau.

Mais le retour de Donald Trump à la Maison Blanche et son offensive inédite contre le Canada, à coups de droits de douane et de menaces d'annexion, ont changé la donne.

A Ottawa, où les libéraux sont réunis pour la soirée électorale dans une aréna de hockey, l'annonce des résultats a provoqué une salve d'applaudissements et des cris enthousiastes.

"Je suis si heureuse", lâche sur place Dorothy Goubault, originaire de la région des Mille Iles en Ontario. "Je suis contente car nous avons quelqu'un qui peut parler à M. Trump à son niveau. M. Trump est un homme d'affaires. M. Carney est un homme d'affaires, et je pense qu'ils peuvent tous les deux se comprendre".

Pour le ministre Steven Guilbeault, "les nombreuses attaques du président Trump sur l'économie canadienne, mais aussi sur notre souveraineté et notre identité même, ont vraiment mobilisé les Canadiens", a-t-il déclaré sur la chaine publique CBC.

Et les électeurs "ont vu que le Premier ministre Carney avait de l'expérience sur la scène mondiale".

Mark Carney n'avait pas encore pris la parole à minuit locales (04H00 GMT), tandis que se poursuivait le dépouillement.

Dans les longues files devant les bureaux de vote toute la journée, les électeurs ont souligné l'importance de ce scrutin, parlant d'élections historiques et déterminantes pour l'avenir de ce pays de 41 millions d'habitants.

- "Chaos" -

À 60 ans, Mark Carney, novice en politique mais économiste reconnu, a su convaincre une population inquiète pour l'avenir économique et souverain du pays qu'il était la bonne personne pour piloter le pays en ces temps troublés.

Cet ancien gouverneur de la banque du Canada et de Grande-Bretagne n'a cessé de rappeler pendant la campagne que la menace américaine est réelle pour le Canada.

"Ils veulent nos ressources, notre eau. Les Américains veulent notre pays", a-t-il prévenu.

"Le chaos est entré dans nos vies. C'est une tragédie, mais c'est aussi une réalité. La question clé de cette élection est de savoir qui est le mieux placé pour s'opposer au président Trump?", a-t-il expliqué pendant la campagne.

Pour faire face, il a promis de maintenir des droits de douane sur les produits américains tant que les mesures de Washington seront en place.

Mais aussi de développer le commerce au sein de son pays en levant les barrières douanières entre provinces et de chercher de nouveaux débouchés, notamment en Europe.

En face, le chef conservateur, qui avait promis des baisses d'impôts et des coupes dans les dépenses publiques, n'a pas réussi à convaincre les électeurs de ce pays du G7, 9e puissance mondiale, de tourner le dos aux libéraux.

Pierre Poilievre aura aussi souffert jusqu'au bout de la proximité, de par son style et certaines de ses idées, avec le président américain, ce qui lui a aliéné une partie de l'électorat, selon les analystes.

Au QG des conservateurs à Ottawa, Jason Piche se dit toutefois "surpris" des résultats, "je pensais que ce serait plus serré que ça".

Un peu plus loin, Jean-Guy Bourguignon, homme d'affaires de 59 ans, se dit carrément "très triste". "Est-ce que c'est vraiment ça le pays dans lequel nous voulons vivre?", demande-t-il alors qu'il énumère les politiques des libéraux, qu'il juge liberticides.

Près de 29 millions d'électeurs étaient appelés aux urnes dans ce vaste pays du G7 qui s'étend sur six fuseaux horaires. Et plus de 7,3 millions de personnes avaient voté par anticipation, un record.


Ukraine: Poutine annonce une trêve du 8 au 10 mai, «tentative de «manipulation»» répond Zelensky

Le président russe Vladimir Poutine prononce un discours lors d'une réunion du Conseil des législateurs à Saint-Pétersbourg, le 28 avril 2025. (AFP)
Le président russe Vladimir Poutine prononce un discours lors d'une réunion du Conseil des législateurs à Saint-Pétersbourg, le 28 avril 2025. (AFP)
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  • Le président russe Vladimir Poutine a annoncé lundi une trêve sur le front en Ukraine durant trois jours du 8 au 10 mai
  • Son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky denonçant une "tentative de manipulation"

MOSCOU: Le président russe Vladimir Poutine a annoncé lundi une trêve sur le front en Ukraine durant trois jours du 8 au 10 mai, à l'occasion de la commémoration de la victoire sur l'Allemagne nazie, son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky denonçant une "tentative de manipulation".

Le président américain Donald Trump exhorte Kiev et Moscou à conclure un cessez-le-feu et un accord de paix, trois ans après le début de l'offensive russe ayant déjà fait des dizaines de milliers de morts civils et militaires.

"A partir de minuit entre le 7 et le 8 mai, et jusqu'à minuit entre le 10 et le 11 mai, la partie russe annonce un cessez-le-feu", a indiqué le Kremlin dans un communiqué. "Pendant cette période, toutes les opérations de combat seront arrêtées".

D'après la présidence russe, Vladimir Poutine a pris cette décision unilatérale "pour des raisons humanitaires" et à l'occasion des célébrations du 80e anniversaire de la victoire sur l'Allemagne nazie.

Pour M. Zelensky, au contraire, "il y a désormais une nouvelle tentative de manipulation". "Pour une raison, a-t-il dit dans son adresse quotidienne, tout le monde doit attendre le 8 mai et ne cesser le feu qu'ensuite pour garantir le silence" lors de la parade du 9 mai sur la place Rouge à Moscou.

La Russie commémore le 9 mai cet événement dont Vladimir Poutine a fait un marqueur essentiel de la puissance retrouvée du pays. Les dirigeants d'une vingtaine de pays sont attendus pour un défilé militaire en grande pompe sur la place Rouge à Moscou.

Le Kremlin a dit considérer que l'Ukraine "devrait suivre cet exemple", tout en prévenant que les forces russes "fourniront une réponse adéquate et efficace" en cas de violation de la trêve.

Vladimir Poutine avait déjà déclaré un bref cessez-le-feu de 30 heures les 19 et 20 avril à l'occasion de Pâques. Les deux camps s'étaient ensuite accusés de l'avoir violé, même si une baisse de l'intensité des combats avait été ressentie dans plusieurs secteurs du front.

"Accroître la pression sur la Russie"

La Maison Blanche a soutenu lundi que Donald Trump souhaitait un cessez-le-feu "permanent" en Ukraine et pas seulement une trêve temporaire.

Les Etats-Unis, jusque-là le premier soutien de l'Ukraine, veulent tourner la page aussi vite que possible quitte, craint Kiev, à accepter des dispositions très favorables à Moscou.

Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a dit dimanche à son homologue russe, Sergueï Lavrov, qu'il était temps de mettre fin à une "guerre insensée" en Ukraine, selon un communiqué lundi.

De son côté, le président français Emmanuel Macron a affirmé que "dans les huit à dix jours prochains, nous allons accroître la pression sur la Russie", dans un entretien publié par le magazine Paris Match.

Il a estimé avoir "convaincu les Américains de la possibilité d’une escalade des menaces, et potentiellement de sanctions" contre Moscou.

Conditions maximalistes de Poutine 

La Russie maintient des conditions maximalistes concernant l'Ukraine, dont elle veut la reddition et le renoncement à rejoindre l'Otan, tout en s'assurant de pouvoir garder les territoires ukrainiens annexés.

La reconnaissance internationale de l'annexion russe de la Crimée et de quatre autres régions ukrainiennes est une condition "impérative" à la paix, a encore martelé lundi le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov.

La Russie a annexé la péninsule ukrainienne de Crimée en mars 2014, ce que la communauté internationale, Etats-Unis compris, n'a jamais reconnu.

En septembre 2022, quelques mois après le déclenchement de son assaut à grande échelle, elle a aussi revendiqué l'annexion de quatre régions ukrainiennes qu'elle occupe partiellement, celles de Donetsk, Lougansk, Kherson et Zaporijjia.

La Russie, qui a l'avantage sur le front, a revendiqué lundi la prise de Kamyanka, un village de la région de Kharkiv, dans le nord-est de l'Ukraine.

La Corée du Nord a pour la première fois reconnu lundi avoir envoyé des troupes en Russie et qu'elles avaient aidé Moscou à reprendre aux Ukrainiens les zones de la région de Koursk dont ils s'étaient emparés.

Trois personnes ont par ailleurs été tuées lundi dans une attaque russe contre un village de la région de Donetsk (est), selon les services du procureur régional.