Une dizaine de frappes russes sur l'est de l'Ukraine, «nouvelle phase» de la guerre

Les forces russes concentrent leurs efforts sur la prise de contrôle total de la région du Donbass. (Archive/Reuters)
Les forces russes concentrent leurs efforts sur la prise de contrôle total de la région du Donbass. (Archive/Reuters)
Un homme regarde le cratère d'une explosion à la suite d'une attaque russe tôt le matin, à Kramatorsk, en Ukraine, le lundi 18 avril 2022. (AP Photo/Petros Giannakouris)
Un homme regarde le cratère d'une explosion à la suite d'une attaque russe tôt le matin, à Kramatorsk, en Ukraine, le lundi 18 avril 2022. (AP Photo/Petros Giannakouris)
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Publié le Mardi 19 avril 2022

Une dizaine de frappes russes sur l'est de l'Ukraine, «nouvelle phase» de la guerre

  • Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a affirmé qu'une «nouvelle phase de l'opération» militaire russe avait commencé
  • Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a demandé aux deux parties d'arrêter les combats pour une «pause humanitaire» de quatre jours à l'occasion de la Pâque orthodoxe

KRAMATORSK/ NATIONS UNIES: La Russie a déclaré mardi avoir mené une dizaine de frappes sur l'est de l'Ukraine qu'elle entend "libérer", le chef de la diplomatie russe évoquant le début d'une "nouvelle phase" de la guerre qui dure depuis bientôt deux mois.  

Au lendemain de l'annonce par Kiev d'une nouvelle offensive d'ampleur de Moscou dans l'est de l'Ukraine, les forces armées ukrainiennes ont confirmé que les Russes avait "intensifié leur offensive" tout le long de la ligne de front dans l'est du pays. 

Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a affirmé qu'une "nouvelle phase de l'opération" militaire russe avait commencé. "Je suis convaincu que cela sera un moment très important pour cette opération spéciale", a-t-il déclaré à la presse indienne. 

Le ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou a dit suivre le "plan de libération" des "républiques" séparatistes prorusses de Donetsk et Lougansk (est de l'Ukraine), établi par le président russe Vladimir Poutine qui a reconnu leur indépendance. 

Les forces aériennes russes ont tiré des "missiles de haute précision" et neutralisé 13 places fortes de l'armée ukrainienne, a affirmé son ministère, appelant les Ukrainiens à la reddition. 

Les autorités locales ukrainiennes ont appelé les habitants à fuir cet "enfer", malgré l'absence de couloirs humanitaires. 

Ces dernières semaines, après avoir échoué à prendre le contrôle de la région de Kiev, la campagne militaire russe s'est réorientée sur le bassin du Donbass, partiellement contrôlé par les forces prorusses depuis 2014. 

La "bataille pour le Donbass" a commencé, a affirmé lundi le président ukrainien Volodymyr Zelensky. "Une très grande partie de l'ensemble de l'armée russe est désormais consacrée à cette offensive." 

Selon un haut responsable américain du département de la Défense, la Russie a augmenté sa présence militaire dans l'est et le sud de l'Ukraine, portant à 76 le total de bataillons dans le pays. 

 

Guterres dénonce l'offensive russe à l'est et demande 4 jours de «pause humanitaire» pour la Pâque orthodoxe

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a dénoncé mardi l'offensive russe dans l'est de l'Ukraine et demandé aux deux parties d'arrêter les combats pour une "pause humanitaire" de quatre jours à l'occasion de la Pâque orthodoxe. 

"Je demande aujourd'hui une pause humanitaire de quatre jours pour la semaine sainte", de jeudi à dimanche, "pour permettre l'ouverture d'une série de couloirs humanitaires" en Ukraine, a déclaré le chef de l'ONU. 

Cette suspension des combats servirait à l'évacuation des civils "des zones de confrontations actuelles et attendues", avec l'aide de la Croix-Rouge, et à l'acheminement de l'aide humanitaires "dans les zones les plus touchées comme Marioupol, Kherson, Donetsk et Lougansk", avance-t-il. 

"Plus d'un tiers" des 12 millions de personnes qui ont besoin d'aide humanitaire en Ukraine se trouvent dans ces quatre villes, selon lui. 

"Nous prévoyons que ce chiffre va atteindre 15,7 millions -- soit 40% des Ukrainiens qui sont encore dans le pays", a-t-il ajouté. 

"Cette année, la semaine sainte orthodoxe est observée à l'ombre d'une guerre qui représente la négation totale du message de la Pâque", "une saison pour le renouveau, la résurrection et l'espoir", a regretté Antonio Guterres, appelant encore au dialogue entre Russes et Ukrainiens. 

"Cette Pâque coïncide avec une offensive russe dans l'est de l'Ukraine. L'intense concentration des forces et de la puissance de feu rend cette bataille inévitablement plus violente, sanglante et destructrice", a encore dit le secrétaire général. 

« L'enfer » 

L'AFP a vu des bus transportant des militaires ukrainiens se diriger vers Kramatorsk, la capitale du Donbass, tandis que les autorités locales appelaient la population civile à évacuer. 

"C'est l'enfer", s'est ému lundi soir sur Facebook le gouverneur ukrainien de la région de Lougansk, Serguiï Gaïdaï. Les combats "sont incessants" dans plusieurs villes. 

"Partez!", a-t-il ordonné mardi à ses concitoyens. "Des milliers d'habitants de Kreminna n'ont pas eu le temps de partir et maintenant, ils sont otages des Russes." 

Kreminna, qui comptait environ 18 000 habitants avant la guerre et est située à une cinquantaine de kilomètres au nord-est de Kramatorsk, est tombée aux mains des Russes, selon lui.  

Des combats ont lieu également à Roubijné (15 km à l'est de Kreminna) et à Popasna (75 km au sud), selon M. Gaïdaï, qui a évoqué un bilan de 200 morts. 

L'armée russe "concentre ses efforts" pour s'emparer de Marioupol (sud-est), Popasna, Roubijné, Severodonetsk --tout près de Lyssytchansk, dont le maire Oleksandr Zaïka a qualifié sur Telegram la situation de "très, très tendue". 

"Je vous en supplie: partez tant qu'il existe cette possibilité", a-t-il lancé. 

Dans la région voisine de Donetsk, celle de Lougansk, les Russes bombardent "en direction de Mariïnka, Otcheretyne et Avdiïvka", a signalé mardi son gouverneur, Pavlo Kyrylenko, sur Telegram. 

Lundi, huit civils sont morts dans ces régions - dont une famille voulant fuir Kreminna - et une personne au moins mardi, selon les autorités locales. 

Faute d'accord avec les Russes, aucun couloir d'évacuation de civils n'a pu être organisé mardi dans le pays, et ce pour la troisième journée consécutive, avait indiqué mardi matin la vice-Première ministre ukrainienne Iryna Verechtchouk. 

La Russie a cependant annoncé peu après avoir ouvert un couloir censé permettre aux forces ukrainiennes ayant décidé de se rendre de sortir de Marioupol, port stratégique sur la mer d'Azov, assiégé depuis début mars par les troupes russes. 

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Une image diffusée par le conseil municipal de Marioupol montrent des nuages de fumée s'élevant au-dessus de l'aciérie Azovstal et l'entrée détruite du chantier naval d'Azov, le 18 avril 2022. (Photo, AFP)

Nouvel ultimatum 

Dans cette ville où les autorités craignent la mort de 20 000 à 22 000 civils, les combats se concentrent autour du complexe métallurgique d'Azovstal. 

Des combattants ukrainiens y sont retranchés, mais aussi "au moins 1 000 civils, la plupart des femmes, des enfants et des personnes âgées, dans les abris souterrains" de l'usine, a affirmé mardi le conseil municipal de Marioupol sur Telegram. 

"Il y a des combats en cours, des combats de rue (...) mais aussi des combats de chars", a affirmé M. Kyrylenko sur la chaîne américaine CNN, assurant que les forces ukrainiennes résistaient toujours. 

La Russie, qui a appelé mardi les défenseurs de Marioupol à cesser "leur résistance insensée" après un premier ultimatum dimanche, est déterminée à s'emparer de ce port. 

Sa prise lui permettrait de consolider ses gains territoriaux le long des côtes de la mer d'Azov, en reliant le Donbass à la Crimée, et de libérer des troupes pour d'autres opérations. 

Un pétrolier russe saisi en Grèce

Un pétrolier russe a été saisi en Grèce en vertu des sanctions européennes liées à la guerre en Ukraine, a-t-on appris mardi auprès des gardes-côtes grecs.
Le Pegas, qui devait se rendre au port turc de Marmara, se trouve actuellement ancré à Karystos, dans le sud de l'île grecque d'Eubée, selon le site internet de circulation maritime internationale Marine Traffic.
"Le pétrolier a été saisi le 15 avril en vertu des sanctions européennes, avec 19 Russes à bord", a déclaré une porte-parole des gardes-côtes grecs.
Elle a précisé que la saisie du bâtiment ne portait pas sur sa cargaison, qui devrait être transvasée sur un autre pétrolier, sans donner plus de détails sur la date de l'opération.
Selon des médias grecs, le tanker russe a rencontré des problèmes de moteur et était escorté par un remorqueur vers la péninsule du Péloponnèse, dans l'ouest de la Grèce, quand il a été contraint de mouiller à Karystos en raison des mauvaises conditions météorologiques.

Combats sur tous les fronts 

Dans l'est toujours, des divisions de missiles antiaériens Tor ont été transférées dans la région de Kharkiv et des systèmes antiaériens S-400 et S-300 ont été déployés dans la région russe de Belgorod près de la frontière avec l'Ukraine, selon l'état-major ukrainien. 

A Kharkiv même, deuxième ville d'Ukraine, de nouveaux bombardements ont fait mardi trois morts et 16 blessés. 

La Russie a aussi fait état de dizaines d'autres frappes de missiles dans le sud de l'Ukraine, autre ligne de front. 

Moscou, qui occupe déjà la ville de Kherson, "concentre ses forces" pour avancer vers la région de Mykolaïv, plus à l'ouest, où les bombardements se sont intensifiés, a indiqué mardi Natalia Goumeniouk, porte-parole du commandement sud des forces armées ukrainiennes. "La situation est tendue." 

"Tout le monde s'attendait à une offensive comme le 24 février avec une grande force terrible", a cependant souligné mardi le conseiller de la présidence ukrainienne, Oleksiy Arestovytch à la télévision ukrainienne. "Or, elle se déroule prudemment. Ce sont des unités russes qui tentent d'avancer. Dans le sud, ils tentent de nous encercler, cela a commencé avant-hier." 

La ville occidentale de Lviv, proche de la frontière polonaise et longtemps épargnée, a aussi subi de "puissantes" frappes lundi qui ont fait sept morts, d'après les autorités locales. 

Non loin de Lviv, un important dépôt d'"armements étrangers", provenant des Etats-Unis et de l'Union européenne, a été détruit, selon Moscou. 

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Derniers développements de la guerre en Ukraine lancée par la Russie, avec photos. (Graphique, AFP)

Prisonniers libérés, diplomates expulsés 

Soixante-seize Ukrainiens ont été libérés dans un nouvel échange de prisonniers avec la Russie, a annoncé Kiev mardi, sans révéler le nombre de Russes libérés. Moscou n'a pas confirmé cet échange.  

La Russie a en revanche indiqué avoir expulsé 36 diplomates belges et néerlandais, en représailles à une mesure similaire prise par Bruxelles et La Haye.  

Alors que les Etats-Unis ont annoncé lundi l'arrivée aux frontières ukrainiennes des premières cargaisons de leur nouvelle tranche d'aide militaire (d'un montant de 741 millions d'euros), le ministre russe Choïgou a accusé les Etats-Unis et les Occidentaux de "tout faire pour faire durer au maximum" la guerre, poussant Kiev à "se battre jusqu'au dernier des Ukrainiens".  

Le président américain Joe Biden devait participer mardi à une réunion virtuelle consacrée à l'Ukraine avec ses "alliés et partenaires", dont la liste n'a pas été dévoilée, selon un responsable de la Maison Blanche. 

« Ondes sismiques » économiques  

La guerre en Ukraine, qui a poussé près de cinq millions d'Ukrainiens à fuir leur pays, a déclenché des "ondes sismiques" pour l'économie mondiale, a prévenu Pierre-Olivier Gourinchas, chef économiste du Fonds monétaire international (FMI). 

La croissance de l'UE devrait notamment ralentir à 2,8% cette année, celle des Etats-Unis à 3,7% (-0,3 point). L'économie russe, soumise à des sanctions occidentales inédites, devrait elle se contracter de 8,5%, et le PIB ukrainien chuter de 35%. 

Le président ukrainien espère néanmoins obtenir pour son pays "dans les semaines à venir" le statut de candidat à l'adhésion à l'UE. 

Après les ambassades italienne et française qui se sont réinstallées à Kiev ces derniers jours, l'Espagne devrait bientôt les rejoindre et son Premier ministre, Pedro Sánchez, se rendra "bientôt" en Ukraine, ont indiqué des sources gouvernementales espagnoles. 


Gaza: une commission de l'ONU accuse Israël de «génocide»

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  • La commission, qui ne s'exprime pas au nom de l'ONU, est arrivée "à la conclusion qu'un génocide se produi(sai)t à Gaza et continu(ait) de se produire" dans ce territoire palestinien,
  • "La responsabilité incombe à l'État d'Israël", a-t-elle ajouté en présentant un nouveau rapport

GENEVE: Une commission d'enquête internationale indépendante de l'ONU a accusé mardi Israël de commettre un "génocide" à Gaza depuis octobre 2023 avec l'intention de "détruire" les Palestiniens, mettant en cause le Premier ministre et d'autres responsables israéliens.

La commission, qui ne s'exprime pas au nom de l'ONU, est arrivée "à la conclusion qu'un génocide se produi(sai)t à Gaza et continu(ait) de se produire" dans ce territoire palestinien, a déclaré à l'AFP sa présidente, Navi Pillay.

"La responsabilité incombe à l'État d'Israël", a-t-elle ajouté en présentant un nouveau rapport.

Israël a "rejeté catégoriquement" ce "rapport biaisé et mensonger et appelle à la dissolution immédiate" de la commission, a réagi son ministère des Affaires étrangères.

Sa publication intervient près de deux ans après le début de la guerre, déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas le 7 octobre 2023 en Israël. Depuis, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a juré de détruire le mouvement islamiste qui a pris le pouvoir en 2007 à Gaza.

La commission d'enquête a conclu que les autorités et les forces de sécurité israéliennes avaient commis "quatre des cinq actes génocidaires" définis par la Convention de 1948 pour la prévention et la répression du crime du génocide.

A savoir: "meurtre de membres du groupe; atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale de membres du groupe; soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle; et mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe".

Cette commission a conclu que le président israélien, Isaac Herzog, le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, et l'ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, avaient "incité à commettre un génocide et que les autorités israéliennes (n'avaient) pas pris de mesures" pour les en empêcher.

"Intention de détruire" 

"Il est clair qu'il existe une intention de détruire les Palestiniens à Gaza par des actes répondant aux critères énoncés dans la Convention sur le génocide", a relevé dans un communiqué Mme Pillay, qui fut présidente du Tribunal pénal international pour le Rwanda et juge à la Cour pénale internationale (CPI).

Les plus hauts dirigeants israéliens "ont orchestré une campagne génocidaire", a ajouté la Sud-Africaine de 83 ans, ancienne Haute-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme.

La commission n'est pas une instance juridique mais ses rapports peuvent accroître la pression diplomatique et servent à recueillir des preuves que les tribunaux peuvent utiliser.

La commission a conclu un accord de coopération avec la Cour pénale internationale (CPI) avec laquelle "nous avons partagé des milliers d'informations", a expliqué Mme Pillay à l'AFP.

"La communauté internationale ne peut rester silencieuse face à la campagne génocidaire lancée par Israël contre le peuple palestinien à Gaza. Lorsque des signes et des preuves manifestes de génocide apparaissent, l'absence d'action pour y mettre fin équivaut à une complicité", a souligné Mme Pillay.

La campagne de représailles militaires dans le territoire palestinien a fait près de 65.000 morts, selon des données du ministère de la Santé de la bande de Gaza, placé sous l'autorité du Hamas, données jugées fiables par l'ONU.

Depuis le début de la guerre, Israël a été accusé à plusieurs reprises de commettre un génocide à Gaza, par diverses ONG, des experts indépendants de l'ONU, et jusque devant la justice internationale, à l'initiative de l'Afrique du Sud.

Les autorités israéliennes ont toujours vigoureusement rejeté ces accusations.

L'ONU n'a pas qualifié la situation de génocide, mais le chef des opérations humanitaires a exhorté à la mi-mai les dirigeants mondiaux à "agir pour empêcher un génocide".

A La Haye, la Cour internationale de justice (CIJ) avait sommé Israël dès janvier 2024 de prévenir tout acte de génocide. Quatre mois après, le procureur de la CPI avait demandé que des mandats d'arrêt soient délivrés à l'encontre de MM. Netanyahu et Gallant, soupçonnés de crimes contre l'humanité et crimes de guerre.

La CPI est depuis dans le collimateur de Washington qui a pris des mesures contre des magistrats ayant autorisé la Cour à émettre ces mandats d'arrêt, notamment l'interdiction d'entrée sur le sol américain et le gel des avoirs détenus aux États-Unis.


Rubio promet un soutien "indéfectible" à Israël, avant une visite à Doha

Le secrétaire d'État américain Marco Rubio et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu visitent le Mur occidental, le lieu de prière le plus sacré du judaïsme, dans la vieille ville de Jérusalem. (AP)
Le secrétaire d'État américain Marco Rubio et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu visitent le Mur occidental, le lieu de prière le plus sacré du judaïsme, dans la vieille ville de Jérusalem. (AP)
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  • En visite à Jérusalem, le secrétaire d’État Marco Rubio a réaffirmé le soutien « indéfectible » des États-Unis à Israël dans sa guerre contre le Hamas à Gaza
  • Alors que les offensives israéliennes se poursuivent, causant de lourdes pertes civiles à Gaza, les critiques internationales s’intensifient

Jérusalem: Le secrétaire d'Etat Marco Rubio a promis lundi à Jérusalem le "soutien indéfectible" des Etats-Unis à Israël pour éliminer le mouvement islamiste palestinien Hamas à Gaza, à la veille d'un déplacement à Doha.

Durant la visite de M. Rubio, l'armée israélienne a poursuivi son offensive dans la bande de Gaza assiégée et affamée, la Défense civile locale faisant état d'au moins 49 morts, dont des enfants.

Lancée en riposte à une attaque sans précédent du Hamas en Israël le 7 octobre 2023, cette offensive a fait des dizaines de milliers de morts et détruit une grande partie du territoire palestinien, où le mouvement islamiste a pris le pouvoir en 2007.

Le déplacement de M. Rubio a coïncidé avec un sommet arabo-islamique à Doha, quelques jours après une attaque israélienne inédite le 9 septembre au Qatar contre des chefs du Hamas.

"Les habitants de Gaza méritent un avenir meilleur, mais cet avenir meilleur ne pourra commencer que lorsque le Hamas sera éliminé", a déclaré M. Rubio après une rencontre à Jérusalem avec le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu.

"Vous pouvez compter sur notre soutien indéfectible et notre engagement à voir cela se concrétiser", a-t-il ajouté.

M. Rubio se rend mardi au Qatar, en route pour Londres, afin de "réaffirmer le soutien total des Etats-Unis à la sécurité et la souveraineté du Qatar après l'attaque israélienne", selon le département d'Etat.

La frappe aérienne au Qatar, un médiateur entre Israël et le Hamas, a contrarié le président Donald Trump.

"Le Qatar a été un très grand allié. Israël et tous les autres, nous devons faire attention. Quand nous attaquons des gens, nous devons être prudents", a-t-il dit dimanche.

Malgré cette critique, M. Netanyahu a estimé que M. Trump était "le plus grand ami" qu'Israël ait jamais eu à la Maison Blanche.

- "Animaux barbares" -

Au sommet de Doha, l'émir du Qatar, cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani, s'en est prix à Israël, l'accusant de "vouloir faire échouer les négociations" en vue d'un cessez-le-feu à Gaza et d'une libération des otages enlevés durant l'attaque du 7-Octobre.

Un communiqué final du sommet a appelé "tous les Etats à revoir les relations diplomatiques et économiques avec Israël", alors que les six monarchies du Golfe ont appelé les Etats-Unis à "user de leur influence" pour contenir Israël.

A Jérusalem, M. Rubio s'est montré pessimiste quant à la possibilité d'une solution "diplomatique" à Gaza, qualifiant le Hamas d'"animaux barbares".

"Même si nous souhaitons vivement qu'il existe un moyen pacifique et diplomatique pour mettre fin (à la guerre) -et nous continuerons à explorer cette voie-, nous devons également nous préparer à la possibilité que cela ne se produise pas", a-t-il dit.

M. Rubio a aussi affiché la solidarité des Etats-Unis avec Israël avant un sommet coprésidé par la France et l'Arabie saoudite le 22 septembre à l'ONU, destiné à promouvoir la reconnaissance d'un Etat de Palestine, au côté d'Israël.

Une initiative largement symbolique dans la mesure où Israël s'oppose fermement à la création d'un tel Etat auquel aspirent les Palestiniens.

Les Etats-Unis sont également hostiles à cette démarche, qui selon M. Rubio, a "enhardi" le Hamas.

En soirée, le secrétaire d'Etat a rencontré à Jérusalem des familles d'otages, selon un responsable du département d'Etat. Sur les 251 personnes enlevées durant l'attaque du 7-Octobre, 47 sont encore retenues à Gaza, dont 25 décédées selon l'armée israélienne.

- "Un corps sans âme" -

Dans le territoire palestinien, la Défense civile a indiqué que plus de la moitié des 49 Palestiniens tués l'avaient été à Gaza-ville, où l'armée a intensifié ses attaques avec l'objectif de s'en emparer.

Compte-tenu des restrictions imposées aux médias à Gaza et des difficultés d'accès sur le terrain, l'AFP n'est pas en mesure de vérifier de manière indépendante les informations des différentes parties.

L'armée israélienne, qui présente Gaza-ville comme l'un des derniers bastions du Hamas dans le territoire palestinien, y a détruit plusieurs tours d'habitation en accusant le Hamas de s'y cacher.

Les Palestiniens continuent de fuir, en grand nombre, la ville et ses environs, qui comptaient un million d'habitants selon l'ONU.

"Je me sens comme un corps sans âme", dit Susan Annan, une Palestinienne qui habitait dans l'une de tours détruites. "Nous avons quitté notre maison avec seulement nos vêtements. Nous n'avons rien pu emporter."

L'attaque du 7-Octobre a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.

Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts à Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire. L'ONU y a déclaré la famine, ce que Israël dément.


La flottille pour Gaza quitte la Tunisie, direction le territoire palestinien

Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
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  • Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place
  • Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser"

BIZERTE: Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire.

"Nous essayons d'envoyer un message à la population de Gaza, (de lui dire) que le monde ne l'a pas oubliée", a dit à l'AFP la militante écologiste suédoise Greta Thunberg avant d'embarquer dans le port de Bizerte, dans le nord de la Tunisie.

"Lorsque nos gouvernements ne prennent pas leurs responsabilités, nous n'avons pas d'autre choix que de prendre les choses en main", a-t-elle ajouté.

Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place.

Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser", "nous partons par solidarité, dignité et pour la justice".

Les embarcations arrivées d'Espagne s'étaient transférées à Bizerte après un séjour mouvementé à Sidi Bou Saïd, près de Tunis.

La "Global Sumud Flotilla", accueillie par des rassemblements de soutien, a indiqué que deux de ses bateaux avaient été visés par des attaques de drones deux nuits de suite la semaine passée, publiant des vidéos à l'appui. Après la deuxième annonce, les autorités tunisiennes ont dénoncé "une agression préméditée" et dit mener une enquête.

L'eurodéputée franco-palestinienne Rima Hassan qui, comme Greta Thunberg, avait été détenue à bord du "Madleen" lors d'une précédente traversée vers Gaza, a dit à l'AFP redouter "bien entendu" de nouvelles attaques, ajoutant: "on se prépare aux différents scénarios".

Selon elle, les personnalités les plus en vue - dont l'actrice française Adèle Haenel - ont été réparties entre les deux plus gros bateaux de coordination "de manière à équilibrer et (ne) pas concentrer toutes les personnalités visibles dans un seul et même bateau".

Le départ de Tunisie a été repoussé à plusieurs reprises en raison de motifs de sécurité, de retard dans les préparatifs pour certains bateaux et de la météo.

La Global Sumud Flotilla ("sumud" signifie "résilience" en arabe), qui comprend aussi des embarcations parties ces derniers jours de Corse (France), Sicile (Italie) et Grèce, avait initialement prévu d'atteindre le territoire palestinien à la mi-septembre, après deux tentatives bloquées par Israël en juin et juillet.