Fin d'une ère pour Netflix, désormais face au défi de la stagnation

Un panneau est affiché devant le siège social de Netflix le 20 avril 2022 à Los Gatos, en Californie (Photo, AFP).
Un panneau est affiché devant le siège social de Netflix le 20 avril 2022 à Los Gatos, en Californie (Photo, AFP).
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Publié le Jeudi 21 avril 2022

Fin d'une ère pour Netflix, désormais face au défi de la stagnation

  • Il aura suffi que Netflix recule de 200.000 abonnés en net, soit moins de 0,1% du total, pour que l'action soit amputée du tiers de sa valeur
  • Pour attirer ces téléspectateurs du côté payant, Netflix prépare aussi des offres moins chères avec de la publicité, d'ici un ou deux ans

NEW YORK: En perte d'abonnés pour la première fois depuis plus de dix ans, Netflix est menacé de stagnation après une décennie de croissance effrénée, un nouveau défi que la plateforme aborde néanmoins en position de force.

Il aura suffi que Netflix recule de 200.000 abonnés en net seulement, soit moins de 0,1% du total, pour que Wall Street s'affole, avec une action amputée de plus d'un tiers de sa valeur en une seule séance mercredi.

Cette perte d'abonnés et la promesse d'"investissements pour relancer le chiffre d'affaires enterrent la belle histoire de Netflix", ont écrit les analystes de Wells Fargo, qui n'ont pas hésité à diviser par deux leur objectif pour le cours de l'action. "Netflix a perdu son éclat", ont-ils assené.

Signe que ce premier trimestre 2022 n'est pas un accident, Netflix anticipe une baisse nettement plus marquée, de deux millions d'abonnés en net, au deuxième trimestre. 

"Je ne suis pas sûr que ce soit un tournant, mais cela montre l'entrée dans une nouvelle phase de croissance ralentie", a commenté Scott Zari, de S&P, "la question étant de savoir combien de temps elle va durer."

"La direction a été assez claire sur le fait que nous ne pouvions espérer qu'une croissance très faible en 2022 et 2023", ont relevé, dans une note, les analystes de Bank of America.

Le changement s'est senti dans le ton de la présentation des résultats, mardi soir.

Il a été moins question du succès de "Bridgerton" ou "Ozark", deux séries phares du service vidéo en ligne, que de ces 100 millions de foyers qui regardent Netflix sans payer grâce à des identifiants partagés.

"Quand nous étions en croissance rapide, ce n'était pas une priorité", a reconnu le co-fondateur, Reed Hastings, lors de la présentation. "Et maintenant, on travaille d'arrache-pied là-dessus."

"Nous ne voulons pas stopper ce partage", a néanmoins prévenu Gregory Peters, responsable opérationnel, mais "mieux convertir" ce visionnage indu en revenus.

"La croissance future dépendra de leur capacité à monétiser ces ménages", a estimé Scott Zari.

La publicité arrive

Pour attirer ces téléspectateurs du côté payant, Netflix prépare aussi des offres moins chères avec de la publicité, d'ici un ou deux ans.

Après avoir longtemps défendu un modèle sans pub, l'entreprise de Los Gatos en Californie va finalement imiter ses grands concurrents, de Disney à HBO Max, Apple restant seule exception.

"Est-ce qu'ils sont derrière la concurrence" en la matière, "oui", reconnaît Jawad Hussain, de S&P, même s'il "sera peut-être un peu plus facile" que pour leurs concurrents de déployer la publicité en ligne, "car ils ont toujours été un groupe en pointe technologiquement".

Pour Jeff Wlodarczak, analyste du cabinet Pivotal, "il semble que le marché du streaming soit désormais totalement investi au niveau mondial" après la pandémie de Covid-19 qui a accéléré sa pénétration. "Il s'agit maintenant de convertir les pirates, de prendre des parts de marché (à d'autres) ou de monter les prix."

Ce dernier axe n'est déjà plus exploitable à court terme par Netflix, qui avait déjà remonté une nouvelle fois ses prix en janvier, au point de devenir, aux Etats-Unis, le service le plus cher parmi tous les grands acteurs.

Côté budget, "vous allez clairement voir un impact en termes de dépenses de contenu", prévient Paul Hardart, professeur à l'université de New York (NYU). 

Netflix s'était jusqu'ici fixé une enveloppe de 19 milliards pour ses contenus en 2022, en hausse par rapport aux 17 milliards de l'an dernier.

Pour Joel Mier, professeur de marketing à l'université de Richmond, si les changements annoncés sont "significatifs", ils restent "périphériques". La "stratégie de long terme reste d'investir dans de la création locale et de bâtir une présence dans les jeux vidéo".

Avec ses 221 millions d'abonnés, "Netflix reste, de loin, le leader du marché du streaming", rappelle Scott Zari. "Ils sont très loin devant", abonde Paul Hardart, "en particulier au niveau mondial, ce qui leur donne un gros avantage".

Loin d'être un cas à part, la plateforme offre, en outre, un avant-goût à ses concurrents, qui "seront aussi confrontés à ces problèmes à un moment donné", selon Jawad Hussain. "Ce n'est pas une bonne nouvelle pour Netflix", appuie Paul Hardart, "mais c'en est sans doute une plus mauvaise pour les autres plateformes qui essayent de s'affirmer."


IA: Google investit 5 milliards de livres au Royaume-Uni avant la visite de Trump

Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
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  • Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat
  • Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres

LONDRES: Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays.

Cette somme financera "les dépenses d'investissement, de recherche et développement" de l'entreprise dans le pays, ce qui englobe Google DeepMind (le laboratoire d'IA du géant californien), a indiqué le groupe dans un communiqué.

Google ouvre mardi un centre de données à Waltham Cross, au nord de Londres, dans lequel il avait déjà annoncé l'an dernier injecter un milliard de dollars (850 millions d'euros). La somme annoncée mardi viendra aussi compléter ce financement, a précisé un porte-parole de l'entreprise à l'AFP.

Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat.

Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres.

Selon un responsable américain, qui s'exprimait auprès de journalistes, dont l'AFP, en amont de la visite, les annonces se porteront à "plus de dix milliards, peut-être des dizaines de milliards" de dollars.

Le gouvernement britannique avait déjà dévoilé dimanche plus d'un milliard de livres d'investissements de banques américaines dans le pays, là aussi en amont de la visite d'Etat du président Trump.

Et l'exécutif britannique a annoncé lundi que Londres et Washington allaient signer un accord pour accélérer les délais d'autorisation et de validation des projets nucléaires entre les deux pays.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Londres redouble d'efforts pour se dégager des hydrocarbures et a fait du nucléaire l'une de ses priorités.

Le partenariat avec Washington, baptisé "Atlantic Partnership for Advanced Nuclear Energy", doit lui aussi être formellement signé lors de la visite d'État de Donald Trump.

 


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".


La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, alerte le Secours populaire

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
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  • "La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire
  • "La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg

PARIS: La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, touchant tous les aspects de la vie des plus fragiles, alerte jeudi le Secours Populaire, qui publie un baromètre témoignant de cette situation jugée préoccupante.

"La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire.

L'association publie un baromètre qui indique qu'un tiers des Français (31%) rencontrent des difficultés financières pour se procurer une alimentation saine permettant de faire trois repas par jour. De même 39% ont du mal à payer leurs dépenses d'électricité et 49% à partir en vacances au moins une fois par an, selon ce sondage réalisé par l'Institut Ipsos, auprès d'un échantillon de 1.000 personnes, représentatif de la population nationale âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

"La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg.

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier.

Malgré un "léger mieux" constaté sur certains indicateurs lié au "ralentissement de l'inflation", ce baromètre révèle "une situation sociale toujours très préoccupante", selon le Secours populaire.

En début de semaine, la déléguée interministérielle à la prévention et la lutte contre la pauvreté, Anne Rubinstein, a évoqué des "difficultés" rencontrées par l'Etat pour résorber un taux de pauvreté qui a atteint un niveau record en 2023 en France métropolitaine.

Face à cette situation, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) a appelé mardi à une "mobilisation collective" pour "débloquer la lutte contre la précarité".

Au niveau européen, 28% de la population déclare se trouver en situation précaire, également selon ce baromètre du Secours Populaire, qui s'appuie aussi sur des échantillons de 1.000 personnes représentatifs de neuf autres pays (Allemagne, Grèce, Italie, Pologne, Royaume-Uni, Moldavie, Portugal, Roumanie, Serbie).

La part des personnes se considérant comme précaires demeure à un niveau "très alarmant" en Grèce (46%) et en Moldavie (45%), pointe le baromètre.

En 2024, le Secours populaire a soutenu 3,7 millions de personnes en France. L'association fournit notamment de l'aide alimentaire et organise des activités pour différents publics pour rompre l'isolement.