Clichy: dénonçant des violences policières, deux femmes voilées portent plainte

Me Nabil Boudi, avocat des deux plaignantes. Photo fournie.
Me Nabil Boudi, avocat des deux plaignantes. Photo fournie.
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Publié le Mardi 26 avril 2022

Clichy: dénonçant des violences policières, deux femmes voilées portent plainte

  • Les deux plaignantes affirment avoir été frappées le jeudi 14 avril sur le pont de Clichy, dans les Hauts-de-Seine
  • «Le fonctionnaire de police va continuer à s’acharner sur elle pendant plusieurs secondes, allant jusqu’au plaquage ventral», raconte leur avocat

PARIS: Une plainte pour «violences volontaires» et «injure publique par personnes dépositaires de l’autorité publique» a été déposée le 21 avril par deux jeunes femmes voilées âgées de 24 et de 23 ans. Ces dernières affirment avoir été frappées le jeudi 14 avril sur le pont de Clichy, dans les Hauts-de-Seine. L’une d’entre elles soutient avoir reçu plusieurs gifles au visage.

Les vidéos de la scène sur les réseaux sociaux
Prises par des automobilistes qui ont assisté à la scène, des vidéos de l’altercation ont été largement partagées sur les réseaux sociaux. Samedi 23 avril, les deux plaignantes témoignent dans une vidéo publiée sur le site Action contre l’islamophobie (ACI); elles racontent leur version des faits. «Il m’assène une claque. […] On a senti de la haine dans ses yeux», explique l’une de ces deux jeunes femmes qui préfèrent garder l’anonymat par peur de représailles.

Sollicité par Arab News en français, Me Nabil Boudi, avocat des deux plaignantes, raconte: «Elles étaient engagées à mi-chemin sur le passage piéton quand une voiture de police arrive à toute vitesse, activant les gyrophares, pour forcer le passage. L’une de mes clientes a pointé du doigt le bonhomme vert [signalement du passage piéton] en sous-entendant: “J’ai la priorité, donc je peux traverser.” Pile à ce moment-là, un des policiers sort du véhicule et procède au contrôle d’identité que je qualifie d’“illégal” en la forme. Les deux jeunes femmes n’étant pas en infraction, ce contrôle d’identité est fondé sur le seul élément distinctif des deux jeunes femmes: le port du voile», nous révèle-t-il, précisant que le contrôle d’identité est assez symptomatique des violences policières.

«Cette action va dégénérer en violence; les deux jeunes filles n’en comprennent pas les motifs», raconte-t-il. «Mes clientes, qui ont continué à traverser le passage piéton, ont été attrapées par les bras. L’une d’entre elles essaie de se libérer, le policier lui assène une énorme gifle sur le visage», poursuit-il. «Le fonctionnaire de police va continuer à s’acharner sur elle pendant plusieurs secondes, allant jusqu’au plaquage ventral. Elle se retrouve au sol avec le genou du policier sur son omoplate droite. C’est une technique qu’on utilise en général pour les personnes dangereuses», déplore-t-il. «Ma cliente était en état de choc. Elle dispose de certificats médicaux qui établissent des blessures, notamment sur le visage.»

L’automobiliste, le témoin clé
«Dans cette affaire, nous avons un témoin clé, un témoin visuel et oculaire. Il s’agit d’une automobiliste qui, la première, laisse traverser les deux jeunes filles. Elle assiste à toute la scène. Face à cette violence, elle décide de descendre de voiture, appelle les passants à l’aide et demande aux policiers d’arrêter, car elle était en train de filmer. La présence de la caméra a eu un effet immédiat. Ils [les fonctionnaires de police] arrêtent. Pour tasser l’affaire, ils changent de comportement et déclarent avoir été insultés», nous révèle Me Boudi.

Selon lui, le témoin clé a signifié aux policiers avoir filmé toute la scène. Or, précise-t-il, «ce n’était pas le cas. L’automobiliste a commencé à filmer après la gifle. Le fonctionnaire de police est tombé dans le piège et déclare, devant les témoins sur place: “Oui je l’ai tapée, j’avais le droit.” Avec ces mots, il passe aux aveux et reconnaît avoir porté des gifles», souligne Me Boudi.

Peur de porter plainte
«Les deux jeunes femmes ont hésité à porter plainte par peur des représailles. Dans une ville comme Clichy, où la police est omniprésente, il est difficile aux victimes de porter plainte. Mais grâce aux associations et au soutien de leurs proches, elles ont pu franchir le pas. Elles se sont orientées vers moi. Ces jeunes filles sont impressionnantes par leur résilience. Elles aimeraient que justice soit rendue et souhaitent, surtout, que leur démarche puisse aider à ce que ce type d’agressions cessent d’exister dans notre société», nous fait savoir l’avocat des deux plaignantes.

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Interrogé par Arab News en français sur les chances de succès des dossiers qui traitent de violences policières, Me Boudi, habitué à plaider ce genre d’affaires, affirme: «C’est un parcours du combattant. On assiste, ces derniers temps, à une espèce de ras-le-bol où tout le monde est excédé par les faits d’agressions ou de violences policières. En outre, j’ai le sentiment que les choses sont en train de changer, d’évoluer. Depuis l’avènement des réseaux sociaux et de la vidéosurveillance, les faits de violences sont plus faciles à prouver. C’est d’ailleurs grâce à cela que les affaires éclatent.»
 
Précisons que les trois policiers concernés par cette affaire ont, eux aussi, déposé plainte pour «outrage», «rébellion en réunion» et «violence sur personnes dépositaires de l’autorité publique». Une enquête préliminaire a été ouverte à Nanterre.

 

 


Gérald Darmanin a rendu visite à Nicolas Sarkozy mercredi soir à la prison de la Santé

Le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, a rendu visite mercredi soir à Nicolas Sarkozy à la prison parisienne de la Santé, a indiqué jeudi à l'AFP une source proche du dossier. (AFP)
Le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, a rendu visite mercredi soir à Nicolas Sarkozy à la prison parisienne de la Santé, a indiqué jeudi à l'AFP une source proche du dossier. (AFP)
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  • L'entrevue, qui s'est déroulée en présence du directeur de l'établissement, a eu lieu entre 19H00 et 19H45
  • L'ancien président de la République bénéficie de la protection de deux officiers de sécurité, une mesure exceptionnelle prise "eu égard à son statut et aux menaces qui pèsent sur lui"

PARIS: Le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, a rendu visite mercredi soir à Nicolas Sarkozy à la prison parisienne de la Santé, a indiqué jeudi à l'AFP une source proche du dossier.

L'entrevue, qui s'est déroulée en présence du directeur de l'établissement, a eu lieu entre 19H00 et 19H45, a poursuivi cette même source, avant un échange entre le garde des Sceaux et les agents pénitentiaires sur la sécurité de l'ex-chef de l'Etat.

Condamné le 25 septembre à cinq ans d'emprisonnement dans le dossier libyen pour association de malfaiteurs, Nicolas Sarkozy a été incarcéré le 21 octobre à la Santé. Cette détention d'un ancien président est une première dans l'histoire de la République.

Il a depuis déposé une demande de remise en liberté, que la justice doit examiner dans les prochaines semaines.

L'ancien président de la République bénéficie de la protection de deux officiers de sécurité, une mesure exceptionnelle prise "eu égard à son statut et aux menaces qui pèsent sur lui", avait expliqué le ministre de l'Intérieur, Laurent Nuñez.

Gérald Darmanin avait dit avant l'incarcération de l'ex-président son intention d'aller le visiter, afin de "s'assurer que les conditions de sécurité sont bonnes pour ce détenu au statut hors du commun", avait expliqué son entourage.


Nouveau coup de filet dans l'enquête sur le cambriolage du Louvre

Les "perquisitions qui ont eu lieu au cours de la soirée et de la nuit ne nous ont pas permis de retrouver le butin de ce cambriolage", a souligné la procureure. (AFP)
Les "perquisitions qui ont eu lieu au cours de la soirée et de la nuit ne nous ont pas permis de retrouver le butin de ce cambriolage", a souligné la procureure. (AFP)
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  • Ces nouvelles interpellations s'ajoutent à celles de deux hommes, arrêtés samedi et qui sont soupçonnés d'avoir fait partie du commando de quatre hommes sur place
  • Ils ont été inculpés et placés en détention provisoire mercredi soir. Les cinq nouveaux interpellés sont en garde à vue

PARIS: La procureure de Paris Laure Beccuau a annoncé jeudi cinq nouvelles interpellations liées au casse du musée du Louvre, dont un principal suspect, mais les joyaux de la couronne de France, estimés à 88 millions d'euros, restent introuvables.

Ces nouvelles interpellations s'ajoutent à celles de deux hommes, arrêtés samedi et qui sont soupçonnés d'avoir fait partie du commando de quatre hommes sur place. Ils ont été inculpés et placés en détention provisoire mercredi soir. Les cinq nouveaux interpellés sont en garde à vue.

Parmi eux se trouve un des cambrioleurs présumés, qui "était effectivement un des objectifs des enquêteurs, on l'avait dans le viseur", a précisé la procureure de Paris sur la radio RTL.

"Des traces ADN" lient ce principal suspect "au vol qui a été commis", a ajouté Laure Beccuau, suggérant qu'il faisait partie du commando des quatre hommes qui ont commis le vol du 19 octobre en moins de huit minutes, une affaire qui a fait le tour de la planète.

"Quant aux autres personnes qui sont placées en garde à vue, ce sont des personnes qui peuvent éventuellement nous renseigner sur le déroulement de ces faits", a expliqué la procureure de Paris, sans vouloir en dire plus sur leur profil, "il est trop tôt".

Ces cinq nouvelles interpellations ont eu lieu à Paris et dans son agglomération, notamment en Seine-Saint-Denis (dans le nord de la région parisienne), a-t-elle indiqué.

"Déterminée" 

Les "perquisitions qui ont eu lieu au cours de la soirée et de la nuit ne nous ont pas permis de retrouver le butin de ce cambriolage", a souligné la procureure.

"Je dirais que comme toute enquête, cette enquête, c'est comme un fil d'Ariane", a comparé Laure Beccuau, insistant: "mon rôle n'est pas d'être inquiète (sur le sort des bijoux) mais d'être déterminée".

Et de lancer un message: "ce que je souhaite très clairement dire à ceux qui détiendraient les bijoux aujourd'hui, c'est que évidemment la justice saura tenir compte de l'absence de préjudice de ce cambriolage". "La coopération dans l'enquête, on en tient compte pour la peine évidemment", a-t-elle formulé plus explicitement.

Ces nouvelles interpellations "n'ont pas été du tout liées aux déclarations" des deux mis en examen, mais "à d'autres éléments dont nous disposons au dossier", les traces ADN, la vidéosurveillance ou encore l'examen de la téléphonie.

Les deux inculpés - un arrêté à l'aéroport de Roissy alors qu'il tentait de rejoindre l'Algérie, l'autre à Aubervilliers (région parisienne au nord) -  "n'ont pas souhaité s'exprimer" devant le magistrat instructeur mercredi soir, a-t-elle confié.

Auparavant, les deux trentenaires "se sont livrés à des déclarations, que côté enquêteurs et côté magistrats du parquet, nous estimons minimalistes par rapport à ce qui nous paraît être démontré par le dossier", a mis en avant Laure Beccuau.

"Marchés parallèles" 

"Si on analyse leur casier, on ne peut pas effectivement considérer qu'ils font partie du haut du spectre de la criminalité organisée", a-t-elle décrypté à leur sujet.

La procureure insiste sur l'idée de sortir "d'une image d'une criminalité organisée, type mafieux, avec le patron et tout un tas d'équipes qui gravitent autour de lui parce que ce sont des connaissances".

La criminalité organisée peut aussi se nourrir selon elle de "personnes recrutées sur les réseaux sociaux, n'ayant aucun casier judiciaire" et susceptibles de commettre des méfaits graves pour "des sommes qui nous sidèrent", sous-entendu modiques.

La procureure de Paris s'est en outre attardée sur le rôle de l'Office central de lutte contre le trafic des biens culturels (OCBC), qui explore "un certain nombre de marchés parallèles" car ce n'est sans doute pas sur le marché légal des oeuvres d'art que surgiront les bijoux.

Parmi les hypothèses des enquêteurs, il y a celle "que ces bijoux pourraient être une marchandise de blanchiment, voire de négociation dans le milieu", a enfin pointé la procureure.

 

 


Budget: Lecornu fragilisé par une alliance gauche-RN sur la fiscalité des multinationales

Les députés votent en levant la main lors du débat et de l'examen du budget de l'État 2026 à l'Assemblée nationale française, la chambre basse du parlement français, à Paris, le 29 octobre 2025. (AFP)
Les députés votent en levant la main lors du débat et de l'examen du budget de l'État 2026 à l'Assemblée nationale française, la chambre basse du parlement français, à Paris, le 29 octobre 2025. (AFP)
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  • Alliance gauche–RN : Les députés ont adopté plusieurs taxes sur les grandes entreprises, défiant le gouvernement
  • Crise budgétaire : Le budget 2026 est fragilisé, avec un risque de passage en force par ordonnances

PARIS: Les députés ont voté mercredi de nouvelles taxes visant les grandes entreprises, dans une alliance de circonstance entre la gauche et l'extrême droite, rendant plus difficile l'adoption du budget par le camp gouvernemental qui dénonce une "folie fiscale".

Sébastien Lecornu se retrouve face à une équation politique de plus en plus impossible, alors même que les mesures les plus sensibles – notamment sur la taxation des hauts patrimoines, condition posée par les socialistes à leur non-censure – n'ont pas encore été examinées.

Jeudi, les députés feront une pause dans les débats budgétaires, avec une journée réservée à l'examen de textes proposés par le Rassemblement national.

Mais ils reprendront vendredi, avec l'examen prioritaire dès 09H00 de l'article 3 du projet de loi de Finances instaurant une taxe sur les holdings, suivi des amendements de la gauche pour créer une taxe Zucman.

Dans ce contexte déjà tendu, le gouvernement avait haussé le ton dès mercredi matin. "La justice fiscale a laissé place à la surenchère fiscale", a mis en garde mercredi le ministre de l'Economie Roland Lescure. Le Premier ministre s'est lui inquiété devant les sénateurs d'une déconnexion entre le débat fiscal et "la question économique générale et globale".

Dans leur ligne de mire, le vote mardi par une alliance de la gauche et du RN d'un "impôt universel" sur les multinationales, pour lutter contre l'évasion et l'optimisation fiscale.

Une mesure censée rapporter 26 milliards d'euros, selon ses défenseurs, mais jugée inopérante, contraire à la législation et néfaste pour l'économie française, par le gouvernement.

- "Pas honteux" -

Marine Le Pen, pointée du doigt par la droite pour son soutien, a défendu la mesure. "Il s'agit juste de faire respecter la loi", selon elle.

"Pour l'instant, ce qui a été voté" à l'Assemblée dans le cadre de l'examen du budget de l'Etat n'est "pas honteux, contrairement aux hurlements du gouvernement", a enfoncé la cheffe des députés RN.

Mais les mises en garde du camp gouvernemental n'ont pas freiné les députés dans leur lancée, au contraire.

Dans l'après-midi, ils ont continué d'adopter des mesures visant les grands groupes.

Là encore, ce sont les votes réunis de la gauche et du RN qui ont permis l'adoption d'une mesure portée par LFI visant à élargir le champ d'application de l'impôt minimum de 15% sur les bénéfices des multinationales.

C'est "une autoroute vers le contentieux", qui fragiliserait les efforts coordonnés avec l'OCDE pour lutter contre l'évasion fiscale, a fustigé dans l'hémicycle le ministre de la Fonction publique, David Amiel.

"On assume à 100%" ce vote, a martelé le député RN Jean-Philippe Tanguy.

Dans la foulée, le gouvernement a essuyé deux nouveaux revers: le RN a réussi à faire adopter de justesse un amendement pour alourdir la taxation sur les rachats d'actions, afin de lutter contre la spéculation. Les députés de gauche se sont pour la plupart abstenus. Puis c'est la France Insoumise qui a réussi à faire adopter, lors d'un vote très serré, un amendement instaurant une taxe exceptionnelle sur les superdividendes.

Ces derniers votes ne devraient pas faciliter la tâche de Sébastien Lecornu.

Mercredi matin, le président de LR Bruno Retailleau avait dénoncé une "folie fiscale", et "le coût de la stabilité politique exorbitant". Le chef des députés MoDem Marc Fesneau estime aussi que le texte "devient totalement invotable".

- Amendement de compromis ? -

A l'issue du Conseil des ministres, la porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, avait relativisé les votes de la veille, rappelant qu'on n'est "qu'au tout début du processus parlementaire".

M. Retailleau pense d'ailleurs que la première partie du budget sur les recettes "sera refusée par l'Assemblée" et donc que ce sera le Sénat "qui devra reprendre la copie".

Sous couvert d'anonymat, plusieurs cadres de la coalition gouvernementale disent s'attendre à ce qu'il n'y ait "pas de budget" et que le gouvernement doive se contenter d'une "loi spéciale", qui lui permet de reconduire en 2026 les impôts et dépenses de 2025.

Autre option: l'adoption d'un budget par ordonnances, comme l'autorise la Constitution si les délais d'examen du texte sont dépassés, et comme s'en inquiète le RN.

Les groupes politiques ont accepté de retirer une partie de leurs amendements afin d'accélérer les débats.

La fiscalité va continuer d'alimenter les tensions dès la reprise vendredi matin.

Du fait de l'opposition résolue du bloc central, de la droite et du RN, la taxe Zucman n'a guère de chance d'être votée, que ce soit dans sa forme initiale (un impôt minimum de 2% sur les patrimoines de plus de 100 millions d'euros) ou modifiée (3% à partir de 10 millions d'euros, mais en excluant les entreprises innovantes et familiales).

Un amendement de compromis pourrait donc être encore présenté par le gouvernement au moment des débats. "Il y a encore du travail", a reconnu Mme Bregeon.