Ukraine: Les Occidentaux de plus en plus déterminés contre Moscou

Biden a demandé au Congrès américain 33 milliards de dollars pour soutenir Kiev (Photo, Reuters).
Biden a demandé au Congrès américain 33 milliards de dollars pour soutenir Kiev (Photo, Reuters).
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Publié le Vendredi 29 avril 2022

Ukraine: Les Occidentaux de plus en plus déterminés contre Moscou

  • Joe Biden a demandé une rallonge de 33 milliards de dollars au Congrès pour fournir davantage d'équipements militaires à l'Ukraine
  • Les Occidentaux sont de plus en plus désinhibés dans leur soutien à l'Ukraine

PARIS: De plus en plus désinhibés dans leur soutien à l'Ukraine, les Occidentaux affichent clairement depuis cette semaine leur souhait de voir Moscou mordre la poussière, semblant assumer le risque d'escalade et de dérapage vers la guerre.

"Nous voulons voir la Russie affaiblie à un degré tel qu'elle ne puisse pas faire le même genre de choses que l'invasion de l'Ukraine", a déclaré lundi le chef du Pentagone Lloyd Austin. On ne peut pas être plus clair. 

Washington a ensuite réuni mardi une quarantaine de pays, dont toute l'Otan, à Ramstein en Allemagne pour organiser un soutien de grande ampleur à l'Ukraine.

Mercredi, c'est la cheffe de la diplomatie britannique Liz Truss qui a appelé à "redoubler" le "soutien", en donnant "armes lourdes, chars, avions", et souhaité repousser "la Russie hors de toute l'Ukraine", donc y compris de la Crimée annexée depuis 2014.

Jeudi, Joe Biden a demandé une rallonge de 33 milliards de dollars au Congrès pour principalement fournir davantage d'équipements militaires à l'Ukraine. Les Etats-Unis "n'attaquent pas" la Russie mais "aident les Ukrainiens à se défendre" et ont déjà livré dix armes antichars pour chaque blindé russe, a à cette occasion assuré le président américain.

Il faut "remonter à la crise des Euromissiles à la fin des années 1970" pour retrouver un tel niveau de tensions dans les déclarations, explique à l'AFP Emilia Robin, une historienne spécialiste de la Guerre froide à l'université Panthéon-Sorbonne de Paris. "On appelait cela la +guerre fraîche+ car elle arrivait après une période de détente. Cela s'est ensuite apaisé avec l'arrivée de (Mikhaïl) Gorbatchev (à la tête de l'URSS) et la reprise de négociations".

 

Unité dans la fermeté

"L'unité dans la fermeté prévaut désormais", analyse pour l'AFP Jean-Sylvestre Mongrenier, de l'institut franco-belge Thomas More. 

"Les Etats-Unis prennent ainsi la direction d'une nouvelle coalition, où comme à chaque fois ils fournissent 70% des moyens", estime sur Twitter l'analyste et ancien officier Michel Goya. Non pas en militaires sur le terrain comme en Afghanistan ou en Irak, mais en moyens militaires. "Avec la guerre ouverte comme seule limite", souligne M. Goya.

Les Occidentaux ont basculé dans "un second temps de la guerre", analyse Florent Parmentier, enseignant à Sciences-Po à Paris. "Il y a une forme de changement, on parle de plus en plus d'encourager l'Ukraine sur le chemin de la victoire" maintenant que ce pays a prouvé sa capacité à résister jusque-là, dit-il à l'AFP.

"Les Occidentaux s'inscrivent dans la perspective d'une guerre qui va durer", estime, également auprès de l'AFP, Marie Dumoulin, une ancienne diplomate et directrice du programme Europe élargie à l'European Council for Foreign Relations (ECFR), qui voit quant à elle une "continuité" dans leur action.

Pour M. Mongrenier, le changement vient aussi d'une évolution dans l'appréhension des motivations russes. L'Europe "semble avoir compris que l'avenir du continent (...) se jouera dans le bassin du Don" pour contrer le projet géopolitique russe de "négocier un nouveau Yalta" lui restituant "les Etats post-soviétiques".

Face à ce changement de rythme, la Russie répond sur le terrain militaire, frappant des voies de communication, des entrepôts, pour limiter l'efficacité du soutien occidental, mais aussi sur le terrain sémantique.

Risque de "3e guerre mondiale" pour le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, menace de riposte "rapide et foudroyante" en cas d'ingérence de la part de Vladimir Poutine ou encore commentaires du Kremlin selon lequel les livraisons d'armes "menacent la sécurité" européenne.

La Russie "considère tout simplement qu'à partir du moment où il y a des livraisons d'armes de plus en plus importantes, la différence entre les belligérants et la non intervention deviendra de plus en plus fine", juge M. Parmentier.

Franchise russe

"Si demain la Russie considère que l'Otan est cobelligérante ou qu'un des pays en fait beaucoup en matière de livraisons d'armes, il ne serait pas surprenant de voir des frappes militaires de plus en plus près des frontières de manière à faire passer ce message, il faut reconnaître aux dirigeants russes une certaine forme de franchise", selon lui.

D'ailleurs, les tirs russes sur le pont de l'estuaire du Dniestr, par lequel transitait de l'aide en provenance de Roumanie, s'inscrivent dans ce cadre. Pour le ministre français des Affaires Jean-Yves Le Drian, les déclarations russes relèvent de "l'intimidation à laquelle il ne faut pas céder". La France n'est "pas en guerre contre la Russie", répète-t-il.

Pour M. Mongrenier, il ne faut pas "inverser les responsabilités" d'un éventuel embrasement, car c'est la Russie de Vladimir Poutine "engagée dans une +marche à rebours+, pour appliquer sur le terrain ses fantasmagories géopolitiques, qui a relancé la guerre contre l'Ukraine, sur une plus vaste échelle encore, et qui menace de fait tous les équilibres en Europe".

Mais pour l'ancien diplomate italien Marco Carnelos, du cabinet MCGeopolicy, "certains dirigeants occidentaux, notamment américains et britanniques, avancent comme des somnambules vers la guerre. Je trouve que nous sommes dans la même situation qu'à l'été 1914, avec une escalade progressive, qui s'est achevée par le Première guerre mondiale. Nous avons les mêmes dynamiques, avec beaucoup de mauvaises interprétations, perceptions erronées de part et d'autres".


Pont effondré à Baltimore: les corps de deux des six ouvriers retrouvés

Le pont Francis Scott Key, effondré, se trouve au sommet du porte-conteneurs Dali à Baltimore, dans le Maryland, le 27 mars 2024. (AFP)
Le pont Francis Scott Key, effondré, se trouve au sommet du porte-conteneurs Dali à Baltimore, dans le Maryland, le 27 mars 2024. (AFP)
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  • Les corps repêchés ont été identifiés comme ceux de deux hommes âgés de 35 et 26 ans, originaires du Mexique et du Guatemala
  • En raison de la quantité de béton et de débris, «les plongeurs ne sont plus en mesure de se frayer un chemin en sécurité» vers «ce que nous pensons être les véhicules piégés», dit la police

BALTIMORE: Les corps sans vie de deux des six ouvriers recherchés ont été repêchés mercredi des eaux glacées du port de Baltimore, sur la côte Est américaine, ont annoncé les autorités, au lendemain de l'effondrement spectaculaire d'un pont percuté par un porte-conteneurs.

"Des plongeurs ont localisé un pick-up rouge à environ 7.6 mètres de profondeur", a annoncé lors d'un point presse, la police du Maryland, l'Etat où se situe Baltimore. "Deux victimes du drame étaient prisonnières du véhicule".

Les corps repêchés ont été identifiés comme ceux de deux hommes âgés de 35 et 26 ans, originaires du Mexique et du Guatemala, qui faisaient partie de l'équipe d'ouvriers présente sur la chaussée du pont Francis Scott Key au moment de l'accident.

Les corps de quatre de leurs collègues, tous présumés morts, n'ont eux pas encore été retrouvés, ont ajouté les autorités.

Mais, en raison notamment de la quantité de béton et de débris, "les plongeurs ne sont plus en mesure de se frayer un chemin en sécurité" vers "ce que nous pensons être les véhicules piégés", a déclaré Roland Butler, de la police du Maryland.

Les secours vont donc chercher à retirer la structure de l'eau pour faciliter l'accès aux plongeurs, a-t-il précisé.

Les autorités avaient averti mardi soir qu'elles ne pensaient pas pouvoir "retrouver ces individus encore en vie", alors que deux membres de leur équipe avaient été secourus peu après le drame.

Les victimes, originaires d'Amérique latine selon la presse américaine, réparaient des nids de poule sur le pont lorsqu'il s'est écroulé dans le fleuve Patapsco.

«Pas conçu pour résister»

L'agence américaine de sécurité des transports (NTSB) a fourni mercredi une chronologie détaillée de la tragédie, basée sur l'analyse préliminaire de l'enregistreur de données du porte-conteneurs.

Long de 300 mètres pour 48 mètres de largeur, le Dali, battant pavillon singapourien, a quitté le quai du port de Baltimore mardi à 0H39 (04H39 GMT) à destination de l'Asie, a indiqué Marcel Muise, enquêteur du NTSB, lors d'une conférence de presse.

À 1H24 locales, des alarmes ont commencé à retentir à bord du navire, signalant des problèmes de propulsion. Le pilote a rapidement informé les autorités portuaires par radio que le navire se dirigeait vers le pont, et a demandé l'intervention de remorqueurs.

L'appel à l'aide a été également reçu par deux équipes de l'autorité locale des transports qui se trouvaient sur le pont en raison des travaux. Ces dernières ont alors fermé toutes les voies de circulation, sauvant ainsi probablement des vies.

Puis, à 1H29, l'enregistreur du navire a enregistré des "sons correspondant à la collision".

Le pont, emprunté chaque jour par des dizaines de milliers de véhicules, s'est alors effondré tel un château de cartes, des pans entiers de la structure se retrouvant sur le bateau.

Des images impressionnantes de vidéosurveillance montrent le porte-conteneurs dévier de son cap, heurter une pile du pont inauguré en 1977 puis s'écrouler.

Pour le ministre américain des Transports Pete Buttigieg, "ce type de pont (...) n'a tout simplement pas été conçu pour résister à un choc direct contre pilier de soutien essentiel".

L'équipage avait tenté en vain de ralentir la course du navire en jetant l'ancre.

L'enquête préliminaire montre qu'il s'agit d'un accident, selon les autorités.

«Coût de la reconstruction»

Le président Joe Biden s'est engagé à ce que "l'Etat fédéral paie la totalité du coût de la reconstruction" du pont, qui porte le nom de l'auteur des paroles de l'hymne national américain, en admettant que cela prendrait du temps.

"Nous serons aux côtés des habitants de Baltimore aussi longtemps qu'il le faudra", a-t-il encore assuré mercredi soir sur le réseau social X.

Car l'enjeu est aussi économique: ce pont à quatre voies, long de 2,6 km, est situé sur un axe nord-sud crucial pour l'économie de la côte Est des Etats-Unis.

Pour l'heure, le transport maritime y est "suspendu jusqu'à nouvel ordre", selon les autorités. Le port de Baltimore est le neuvième du pays en termes d'activité et génère plus de 15.000 emplois.

Le Dali est "stable" et ne représente pas de danger pour l'environnement et le public, en dépit de la présence à bord de 5,6 milliards de litres de diesel et de quelques conteneurs de matières dangereuses, a assuré mercredi Peter Gautier, responsable des gardes-côtes.

Deux conteneurs, sur un total de 4,700, sont tombés à l'eau.

Le navire est exploité par la société maritime Synergy Group et affrété par le géant danois du transport maritime Maersk.

Les autorités portuaires de Singapour ont déclaré mercredi qu'il avait passé avec succès deux inspections en 2023 et qu'une jauge de contrôle de la pression du carburant défectueuse avait été réparée en juin.

Les autorités chiliennes avaient signalé en 2023 un défaut dans les machines du navire, une anomalie rapidement réparée selon elles.


Mer de Chine méridionale: nouvel échange acerbe entre Manille et Pékin

Cette photo prise le 5 mars 2024 montre un navire des garde-côtes chinois dans la mer de Chine méridionale contestée. (AFP)
Cette photo prise le 5 mars 2024 montre un navire des garde-côtes chinois dans la mer de Chine méridionale contestée. (AFP)
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  • Samedi, trois soldats philippins ont été blessés lors d'un accrochage avec les garde-côtes chinois, qui ont bloqué leur navire
  • Pékin revendique la quasi-totalité de la mer de Chine méridionale, y compris des eaux et des îles proches des côtes de plusieurs pays voisins

MANILLE: La Chine et les Philippines ont échangé jeudi de nouvelles accusations après de nouveaux accrochages en mer de Chine méridionale, où les deux pays ont des revendications concurrentes.

Samedi, trois soldats philippins ont été blessés lors d'un accrochage avec les garde-côtes chinois, qui ont bloqué leur navire et l'ont endommagé à l'aide de puissants canons à eau au large d'un des récifs disputés, l'atoll Second Thomas.

"Nous ne cherchons pas à entrer en conflit avec quelque nation que ce soit, en particulier avec les nations qui prétendent être nos amies, mais nous ne nous laisserons pas réduire au silence, à la soumission ou à l'asservissement", a déclaré jeudi dans un communiqué le président philippin Ferdinand Marcos.


Le nombre de migrants ayant traversé la Manche à un niveau record depuis janvier

Le navire des forces frontalières britanniques « Defender », transportant des migrants récupérés en mer alors qu'ils tentaient de traverser la Manche depuis la France, revient à la marina de Douvres, dans le sud-est de l'Angleterre, le 17 janvier 2024 (Photo, AFP).
Le navire des forces frontalières britanniques « Defender », transportant des migrants récupérés en mer alors qu'ils tentaient de traverser la Manche depuis la France, revient à la marina de Douvres, dans le sud-est de l'Angleterre, le 17 janvier 2024 (Photo, AFP).
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  • Selon des chiffres publiés mercredi par le ministère britannique de l'Intérieur, 4 644 personnes, toutes nationalités confondues, ont effectué cette périlleuse traversée au premier trimestre
  • En 2023, près de 30 000 migrants ont au total traversé illégalement la Manche

LONDRES: Plus de 4.600 migrants ont rejoint l'Angleterre par la Manche illégalement à bord de canots depuis le 1er janvier, un record pour les trois premiers mois de l'année malgré les promesses du gouvernement conservateur de mettre fin à ces dangereuses traversées.

Selon des chiffres publiés mercredi par le ministère britannique de l'Intérieur, 4.644 personnes, toutes nationalités confondues, ont effectué cette périlleuse traversée au premier trimestre, soit une augmentation de 23% par rapport à la même période l'année dernière (3.700).

Le dernier record avait été établi en 2022 avec 4.548 traversées entre début janvier et fin mars.

Rien que mardi, 338 personnes ont gagné les côtes anglaises dans ces embarcations, le plus souvent des canots pneumatiques chargés de dizaines de passagers.

Depuis le début de l'année, au moins sept migrants, dont une fillette de sept ans et un adolescent de 14 ans, sont morts en mer et sur un canal en tentant de rejoindre l'Angleterre.

"Il y a une prise de risque de plus en plus grande" et "l'année qui vient n'augure rien de bon", avait averti début mars l'association française d'aide aux migrants Utopia 56, selon laquelle le rythme de décès depuis le début de l'année atteint un niveau inédit depuis trois ans.

Depuis son arrivée à Downing Street il y a un an et demi, le Premier ministre Rishi Sunak a fait de la lutte contre l'immigration irrégulière l'une de ses priorités, martelant vouloir "stopper les bateaux".

Projet de loi contreversé

En 2023, près de 30.000 migrants ont au total traversé illégalement la Manche, un chiffre en forte baisse par rapport au record atteint en 2022 (45.000), que le gouvernement met en avant dans son bilan.

Toute progression des arrivées sur le sol britannique risque de fragiliser les conservateurs à quelques mois des élections législatives, pour lesquelles l'opposition travailliste est donnée largement en tête dans les sondages.

Le projet de loi controversé du gouvernement pour expulser les migrants au Rwanda se heurte par ailleurs à la résistance de la chambre haute du Parlement, celle des Lords, qui souhaite adoucir ce texte.

Lundi, le ministère de l'Intérieur a lancé une campagne sur les réseaux sociaux pour dissuader les ressortissants vietnamiens, de plus en plus nombreux, à tenter de traverser la Manche.