La Covid, choc sans précédent pour les travailleurs des pays les moins avancés

Le directeur général de l'Organisation internationale du Travail (OIT), Guy Ryder, prononce un discours à l'ouverture de la Conférence internationale du Travail de l'OIT le 10 juin 2019 à Genève. (Photo d'illustration, AFP)
Le directeur général de l'Organisation internationale du Travail (OIT), Guy Ryder, prononce un discours à l'ouverture de la Conférence internationale du Travail de l'OIT le 10 juin 2019 à Genève. (Photo d'illustration, AFP)
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Publié le Vendredi 29 avril 2022

La Covid, choc sans précédent pour les travailleurs des pays les moins avancés

  • « En comparaison avec les pays développés, les impacts socio-économiques de la pandémie ont été bien plus dramatiques que ses conséquences sanitaires dans les pays les moins avancés (PMA)», affirme l'OIT.
  • Au nombre de 46, ces États majoritairement africains et asiatiques se caractérisent par de faibles niveaux de revenus et une grande vulnérabilité économique et environnementale

PARIS : Pertes de revenus, sous-alimentation: la pandémie de Covid-19 a eu des conséquences "dramatiques" pour les travailleurs, souvent informels, des pays les moins avancés, indique un rapport de l'Organisation internationale du Travail (OIT) publié vendredi.

"En comparaison avec les pays développés, les impacts socio-économiques de la pandémie ont été bien plus dramatiques que ses conséquences sanitaires dans les pays les moins avancés (PMA)", affirme l'OIT.

Au nombre de 46, ces États majoritairement africains et asiatiques se caractérisent par de faibles niveaux de revenus et une grande vulnérabilité économique et environnementale.

Au sein des PMA, le taux d'emploi a chuté de 2,6 points de pourcentage entre 2019 et 2020, pour s'établir à 61,4% d'actifs à temps plein au sein de la population en âge de travailler.

Dans les pays développés, le taux d'emploi, déjà à un niveau plus faible, a diminué bien moins fortement (-1,9 point à 55,4%).

"Des centaines de millions de personnes ont soit perdu leur emploi soit vu leurs revenus baisser", alerte Guy Ryder, le directeur général de l'OIT, dans la préface du rapport.

"Or, même quelques semaines sans revenus ont des conséquences économiques graves pour des personnes qui travaillent dans le secteur informel, ont peu d'argent en réserve et aucun accès à un congé maladie indemnisé ou au télétravail", poursuit-il.

Chute de revenus

Dans ce contexte, l'ampleur du choc sur le marché du travail des PMA s'explique notamment par les confinements.

Ces mesures de lutte contre la pandémie ont en effet "frappé de plein fouet les secteurs où se concentrent les emplois informels: commerce, alimentation, transports, services à la personne et travail à domicile", observe l'OIT.

Au sein des pays les moins avancés, 96% des emplois du secteur agricole, forestier et piscicole sont ainsi informels. Le chiffre atteint 88,1% dans la vente de gros et de détail, et 87,4% dans le transport et l'entreposage.

Mais plus que des pertes d'emploi, les actifs des pays les moins avancés ont surtout pâti de la chute de leurs revenus.

Dans certains pays comme l'Ouganda ou le Yémen, 80 à 90% des personnes interrogées disent avoir connu "des pertes de revenus significatives" en lien avec la crise.

Dans l'industrie haïtienne de l'habillement, 91% des 3 300 travailleurs interrogés en décembre 2020 affirmaient eux avoir été contraints de réduire leur nombre de repas ou la quantité de nourriture consommée à chaque repas, "à cause de l'inflation des prix de l'alimentation ou de la chute des revenus du ménage".

 

Cinq chiffres du travail dans les pays les moins avancés

46

C'est le nombre de pays les moins avancés (PMA) recensés en 2021 par l'Organisation des nations unies, dont l'OIT est une agence spécialisée. La plupart des PMA se situent en Afrique et en Asie, mais la liste compte également six petits Etats insulaires comme les îles Salomon ou l'archipel des Kiribati. Trois critères entrent en ligne de compte pour classer un Etat dans cette catégorie: les revenus, le capital humain et la vulnérabilité économique et environnementale.

629

En millions, le nombre de personnes en âge de travailler dans les pays les moins avancés en 2019. Parmi cette population active âgée de 15 à 64 ans, 403 millions occupaient un emploi à temps plein, tandis que 208 millions n'exerçaient aucune activité économique. En 2019 toujours, la population totale des PMA atteignait près d'1,1 milliard de personnes.

88,9%

Dans les PMA, près de neuf travailleurs sur dix exerçaient dans le secteur informel en 2019. Le phénomène est nettement plus répandu en Afrique (89,2%) et en Asie (88,5%) que dans les PMA insulaires (75,1%). Le décompte de l'OIT est large, puisqu'il inclut les actifs qui travaillent dans des entreprises formelles ou à domicile mais dont l'activité n'est soumise ni à la législation nationale du travail ni à la taxation des revenus.

57%

C'est le pourcentage de travailleurs en situation d'extrême pauvreté qui exercent dans les PMA. Ces actifs gagnent moins d'1,9 dollar par jour. A l'échelle mondiale, le monde compte 218 millions d'actifs dans cette situation de précarité extrême. Par extrapolation, cela signifie donc que sur ce total, près de 125 millions de travailleurs pauvres vivent dans les pays les moins avancés.

Moins de 5

Parmi l'ensemble des actifs des PMA, 78% d'entre eux exercent dans des entreprises de moins de cinq personnes, et seulement 9% dans des structures de 50 personnes et plus. A l'inverse, dans les pays développés, moins d'un quart (23%) de l'emploi total est pourvu par les entreprises de moins de cinq personnes, et 45% des emplois s'exercent dans des grandes structures de plus de 50 employés.

"Les économies des PMA sont marquées par une forte dualité: d'un côté quelques grandes entreprises formelles, et de l'autre une large majorité de petites et micro-entreprises, très souvent dans le secteur agricole", a résumé le directeur général de l'OIT Guy Ryder vendredi lors d'une conférence de presse. "Il manque un chaînon au milieu", a-t-il ajouté, appelant au développement d'entreprises de tailles plus diversifiées.

Encore pire pour les femmes

Les femmes, déjà largement moins présentes que les hommes sur le marché du travail, ont été particulièrement touchées par les conséquences économiques du Covid-19.

Entre 2019 et 2020, le taux d'emploi des travailleuses a ainsi reculé de 2,8 points dans les PMA, contre seulement 2,4 points chez les hommes.

A la fin de l'année 2020, à peine plus d'une femme sur deux (50,9%) exerçait un emploi à temps plein, contre 72,3% des hommes.

Leur faible participation au marché du travail peut s'expliquer par les "responsabilités familiales" qui leur sont assignées.

Mais les "normes sociales", qui gouvernent le mariage des femmes, leur accès à l'éducation ou au marché du travail, jouent également un rôle.

Le télétravail... sans internet ?

Dans son rapport, l'OIT pointe enfin que si les rues des villes européennes se sont soudainement vidées au début de la pandémie, cela est moins vrai dans les PMA.

Malgré les restrictions liées au Covid-19, "les autoentrepreneurs, les travailleurs payés à la journée ou peu qualifiés sont restés mobiles", note l'organisation genevoise. 

Étant donné que seul un habitant des PMA sur cinq avait un accès réel à Internet en 2017, le télétravail n'était "tout simplement pas une option" pour la majorité d'entre eux.

Selon des données GPS exploitées par l'OIT, en avril 2020, les déplacements individuels dans les pays à faibles revenus ont baissé de 30% par rapport à janvier 2020, soit moitié moins que dans les États à revenus moyens ou élevés, où la mobilité a reculé de 50 à 60%.


L’intelligence artificielle, levier d’émancipation pour les femmes selon la directrice de la DCO

Interrogée par Arabnews en français en marge des Rencontres économiques de l’Institut du monde arabe à Paris, El Haddaoui affiche un optimisme mesuré : « On ne peut pas dire que l’intelligence artificielle est une bonne ou une mauvaise chose en soi, explique-t-elle, mais je suis très optimiste quant aux opportunités qui existent pour les femmes. » (Photo fournie)
Interrogée par Arabnews en français en marge des Rencontres économiques de l’Institut du monde arabe à Paris, El Haddaoui affiche un optimisme mesuré : « On ne peut pas dire que l’intelligence artificielle est une bonne ou une mauvaise chose en soi, explique-t-elle, mais je suis très optimiste quant aux opportunités qui existent pour les femmes. » (Photo fournie)
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  • Pour la directrice générale de la Digital Cooperation Organization (DCO), Hajar El Haddaoui, l’intelligence artificielle (IA) représente une opportunité considérable pour les femmes sur le marché du travail, à condition toutefois de réduire les fractures
  • Interrogée par Arabnews en français en marge des Rencontres économiques de l’Institut du monde arabe à Paris, El Haddaoui affiche un optimisme mesuré

PARIS: Pour la directrice générale de la Digital Cooperation Organization (DCO), Hajar El Haddaoui, l’intelligence artificielle (IA) représente une opportunité considérable pour les femmes sur le marché du travail, à condition toutefois de réduire les fractures numériques, de renforcer la coopération internationale et d’intégrer cette technologie au cœur des stratégies nationales de développement.

Interrogée par Arabnews en français en marge des Rencontres économiques de l’Institut du monde arabe à Paris, El Haddaoui affiche un optimisme mesuré : « On ne peut pas dire que l’intelligence artificielle est une bonne ou une mauvaise chose en soi, explique-t-elle, mais je suis très optimiste quant aux opportunités qui existent pour les femmes. »

« On voit de plus en plus de femmes s’intéresser à l’IA et aux algorithmes dans différents domaines ; il faut s’en saisir comme d’une opportunité », souligne El Haddaoui, dont l’organisation, fondée à Riyad en 2020, regroupe 16 États membres et compte plus de 40 partenaires issus des secteurs technologique et financier.

Œuvrant essentiellement autour de deux axes stratégiques — la résilience technologique et la prospérité numérique —, la DCO s’est vu accorder un siège d’observateur à l’Assemblée générale des Nations unies en 2022.

L’accès à l’intelligence artificielle n’est cependant pas uniforme à l’échelle mondiale, plaide El Haddaoui, dont l’organisation œuvre pour l’inclusivité numérique et technologique.
« Non, il n’y a pas d’égalité entre les pays, affirme-t-elle sans détour. Certains ont énormément investi dans l’IA et disposent des ressources nécessaires, tandis que d’autres en sont encore loin. »

Elle insiste sur l’importance de la coopération régionale pour réduire ces écarts : « Il faut échanger les bonnes pratiques et, surtout, soutenir les pays en retard par de grands investissements », souligne-t-elle, rappelant que « certains pays n’ont même pas la 5G, ce qui rend toute avancée en IA très difficile ».

Pour elle, la réduction de cette fracture nécessite des partenariats solides entre États, des échanges d’expériences et un appui financier ciblé, afin « de permettre à davantage de pays d’intégrer l’intelligence artificielle dans leurs priorités nationales ».

Cependant, les disparités ne sont pas seulement internationales, souligne El Haddaoui : elles sont également internes, car « dans certains pays, les zones rurales n’ont même pas accès à Internet, alors que d’autres régions abritent des hubs d’innovation très avancés », observe-t-elle.

Cette fracture numérique interne constitue, selon elle, un défi majeur. La solution passe par une stratégie globale d’éducation et d’inclusion : « Il faut prendre en compte l’éducation dès le plus jeune âge, développer des applications accessibles dans les langues locales et former les talents nationaux pour diffuser les connaissances liées à l’IA au sein même du pays. »

Ce n’est qu’une fois ces bases posées que la réduction de la fracture pourra s’étendre aux niveaux régional et mondial.

Interrogée sur le risque de voir le financement de l’IA se faire au détriment d’autres secteurs essentiels, El Haddaoui se veut rassurante : « Si l’intelligence artificielle est intégrée dans la stratégie numérique nationale et appliquée à tous les secteurs — santé, finance, économie ou éducation —, elle ne concurrence pas les autres investissements, elle les renforce », explique-t-elle.

Elle met toutefois en garde contre une approche sectorielle trop étroite : « Dans les pays où l’investissement est concentré uniquement sur l’IA sans vision transversale, le risque existe. Il ne faut pas répéter les erreurs commises lors de la transformation digitale dans certaines régions. L’IA doit être pensée comme une stratégie cross-industry, présente dans tous les secteurs et non en silo. »

Pour cette raison, ajoute-t-elle, la DCO travaille avec de nombreux États membres, dont le Maroc : « Nous sommes présents sur le terrain dans plusieurs pays membres afin d’accompagner le développement numérique local », précise-t-elle.


La ministre de la transition numérique marocaine: l’IA une opportunité pour l’émancipation des femmes

L’intelligence artificielle (IA) peut devenir un outil puissant pour renforcer la place des femmes dans la société et sur le marché du travail. C’est le message porté par la ministre marocaine de la Transition numérique, Amal El Fallah Seghrouchni. (Photo fournie)
L’intelligence artificielle (IA) peut devenir un outil puissant pour renforcer la place des femmes dans la société et sur le marché du travail. C’est le message porté par la ministre marocaine de la Transition numérique, Amal El Fallah Seghrouchni. (Photo fournie)
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  • Le Maroc multiplie les initiatives pour démocratiser l’accès à ces technologies
  • En juillet dernier, les Assises nationales de l’intelligence artificielle ont réuni 2 500 acteurs publics et privés

PARIS: L’intelligence artificielle (IA) peut devenir un outil puissant pour renforcer la place des femmes dans la société et sur le marché du travail.
C’est le message porté par la ministre marocaine de la Transition numérique, Amal El Fallah Seghrouchni, qui voit dans cette technologie une opportunité majeure pour réduire les fractures sociales et économiques, à condition de s’y préparer dès maintenant.

Nommée ministre en 2024, Seghrouchni est une pionnière de l’intelligence artificielle. Elle est même décrite par certains comme « l’Elon Musk du Maroc », mais elle se distingue de ce dernier par son engagement éthique et son attachement à l’inclusion et à la justice sociale liées à l’avènement des nouvelles technologies.
Dans le cadre de ses fonctions et responsabilités, elle poursuit sa quête d’une utilisation raisonnée de l’intelligence artificielle, au profit de tous.

Présente à Paris à l’occasion de la 16ᵉ édition des Rencontres économiques, organisées par l’Institut du monde arabe, la ministre a insisté, en réponse à Arab News en français, sur la nécessité d’intégrer les femmes dans cette révolution technologique.
« Aujourd’hui, l’intelligence artificielle est utilisée dans tous les secteurs de la vie professionnelle : la santé, l’agriculture, l’art, la culture, le droit ou encore la fintech », indique-t-elle. « Et si les femmes maîtrisent l’intelligence artificielle, elles peuvent accéder à un marché de l’emploi beaucoup plus vaste. »

Selon la ministre, l’IA permet aux femmes d’améliorer leur productivité et d’accéder à des ressources jusqu’ici moins accessibles, comme la traduction automatique, les calculs complexes ou la recherche d’informations ciblées : « autant d’usages concrets qui peuvent faciliter leur insertion professionnelle ».
Elle met également en avant le potentiel des outils d’IA pour les femmes entrepreneures, dirigeant des petites ou moyennes entreprises, qui peuvent ainsi s’appuyer sur le commerce électronique pour dépasser les limites des marchés locaux.
« Il existe aujourd’hui des plateformes qui permettent aux femmes d’accéder à un marché global grâce à l’intelligence artificielle », explique-t-elle.

La formation à l’IA représente un investissement, concède la ministre, mais celui-ci reste accessible et rentable. De nombreux programmes, soutenus par des organisations internationales ou des initiatives nationales, visent à réduire cette barrière financière.
« Nous avons lancé un programme qui s’appelle Elevate pour le commerce électronique : il aide gratuitement des femmes à accéder à ces plateformes », précise-t-elle. Et même si certaines formations sont payantes, les coûts restent modérés « au regard du retour sur investissement potentiel ».

La ministre reconnaît cependant l’existence de plusieurs niveaux de fracture : alphabétisation, numérique, et désormais intelligence artificielle.
Mais elle estime que « la question n’est pas de savoir s’il va y avoir une fracture, mais si nous allons pouvoir maîtriser ces technologies pour ne pas rester sur le bord du chemin », car il ne s’agit pas de subir ces transformations, mais « de les utiliser comme leviers de réduction des inégalités ».

Le Maroc multiplie les initiatives pour démocratiser l’accès à ces technologies. En juillet dernier, les Assises nationales de l’intelligence artificielle ont réuni 2 500 acteurs publics et privés.
Le pays a lancé des plateformes de formation, un programme de soutien aux start-up, ainsi qu’un vaste réseau d’instituts de recherche et de développement baptisé Jazari.

« Rien n’arrive tout seul », rappelle la ministre. « Le coût est là, mais aussi la volonté d’apporter les moyens humains, financiers et techniques nécessaires. C’est un grand chantier que nous voulons mener à bien, avec la détermination des femmes à monter dans ce que j’appelle le train de l’IA. »

La métaphore est claire : l’intelligence artificielle avance rapidement, et il faut savoir monter à bord au bon moment. En misant sur la formation, l’accès aux outils et l’accompagnement des femmes, la ministre entend faire de l’IA non pas une nouvelle ligne de fracture, mais une voie d’émancipation et d’ouverture.


Les Rencontres Économiques de l’IMA: la place des femmes dans l’économie à l’ère de l’IA

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  • Quatre tables rondes, réunissant le temps d’une journée des personnalités féminines éminentes du monde arabe et de la France, ont échangé sur la manière de mettre en lumière le rôle des femmes dans la transformation numérique
  • Parmi la trentaine de participantes figuraient notamment la ministre marocaine de la Transition numérique Amal El Fallah Seghrouchni, l’ancienne ministre française de la Culture Rima Abdul Malak, aujourd’hui à la tête d’un média francophone libanais

PARIS: Organisée par l’Institut du Monde Arabe à Paris autour du thème « Femmes, business et innovation », la 16ᵉ édition des Rencontres économiques du monde arabe a décortiqué tous les aspects de l’économie au féminin.

Quatre tables rondes, réunissant le temps d’une journée des personnalités féminines éminentes du monde arabe et de la France, ont échangé sur la manière de mettre en lumière le rôle des femmes dans la transformation numérique, l’entrepreneuriat et la création, ainsi que sur les moyens de favoriser des synergies franco-arabes.

Parmi la trentaine de participantes figuraient notamment la ministre marocaine de la Transition numérique Amal El Fallah Seghrouchni, l’ancienne ministre française de la Culture Rima Abdul Malak, aujourd’hui à la tête d’un média francophone libanais, des femmes d’affaires telles que Hajar El Haddaoui, directrice générale de Digital Cooperation Organization (Maroc–Arabie saoudite), ou encore Olfa Zorgati, membre du conseil d’administration d’Ubisoft, ainsi que des ambassadrices comme Delphine O, et Shayna Al Zuhairi, directrice générale du Iraq Business Women Council.

IA et leadership

Parmi les temps forts figuraient un fireside chat sur l’intelligence artificielle et le leadership, plusieurs tables rondes réunissant cheffes d’entreprise et responsables d’institutions, ainsi qu’une keynote consacrée à la transformation des médias.

Dans le fireside chat dédié à l’IA et au leadership, Amal El Fallah Seghrouchni et Anne Bouverot (envoyée spéciale pour l’IA en France) ont croisé leurs visions, soulignant l’importance d’une gouvernance responsable et partagée de l’IA entre l’Europe et le monde arabe, conciliant innovation et protection des droits.

Elles ont également mis en avant la place centrale des femmes et de l’éducation dans la formation, pour réduire la fracture numérique et encourager l’industrialisation de solutions locales.

La programmation, détaillée par l’IMA, a alterné débats sur l’intelligence artificielle et le leadership, sessions sur les industries culturelles et créatives (ICC), et interventions consacrées au financement et à la coopération institutionnelle.

Les intervenantes issues du monde de la tech et du secteur privé (start-up, entreprises, écosystèmes) ont discuté des opportunités de co-développement entre acteurs français et arabes, ainsi que du besoin d’écosystèmes favorables (financement, cadres réglementaires, formation) pour transformer le talent féminin en entreprises viables.

La transformation des médias à l’ère des transitions

Une autre table ronde, réunissant un panel mixte de diplomates et de femmes actives dans les secteurs des financements publics, du droit et de l’IA, a insisté sur la nécessité d’aligner les réponses aux défis climatiques, énergétiques et numériques à travers des partenariats bilatéraux et multilatéraux.

Rima Abdul Malak a prononcé une courte keynote sur la transformation des médias à l’ère des transitions, montrant comment innover avec l’IA tout en préservant la déontologie et la diversité culturelle.
Elle a également souligné le rôle des femmes dirigeantes dans la recomposition du paysage médiatique.

Les tables rondes de l’après-midi ont porté sur les industries culturelles et créatives, les synergies franco-arabes pour la création artistique, les modèles de financement (fondations, philanthropie, fonds publics) et la médiation culturelle à l’ère de l’IA.

Sur le fond, deux lignes directrices ont traversé les discussions. D’abord, l’idée que l’émancipation économique des femmes constitue un levier stratégique de développement. Les intervenantes, issues des secteurs public et privé, ont insisté sur la nécessité de traduire les discours en dispositifs concrets : accès au financement, incubateurs dédiés, formations techniques et réseaux de mentorat.

Ensuite, la nécessité d’une coopération pratique à travers des partenariats, des centres d’excellence et des mécanismes de financement conjoints, plutôt que de simples déclarations d’intention.

Tout au long de la journée, les intervenantes françaises et arabes ont appelé à bâtir des cadres éthiques communs et des programmes de formation destinés à réduire la fracture numérique.
L’enjeu n’est plus seulement technique, a-t-il été rappelé, mais également politique. Il concerne la régulation, la souveraineté technologique et la capacité des pays du Sud à développer des solutions adaptées à leurs usages.

La table ronde dédiée aux industries culturelles et créatives a insisté sur l’importance des modèles hybrides — mécénat, fonds d’impact, structures de coopération publique-privée — permettant de soutenir la création sans l’enfermer dans des logiques purement marchandes.

Les intervenantes issues du monde de l’art et des fondations ont partagé leurs retours d’expérience et proposé des pistes concrètes pour professionnaliser les filières tout en préservant la diversité culturelle.

Plusieurs participantes ont également souligné l’importance d’instruments financiers adaptés : garanties publiques, fonds de capital-risque dédiés aux entrepreneures et dispositifs de venture philanthropy pour accompagner les premières étapes des projets culturels et technologiques.

Ces rencontres confirment la maturation d’un agenda franco-arabe centré sur l’économie du savoir et la création, et réaffirment que la question du genre ne peut demeurer un simple enjeu symbolique, mais doit se traduire par une véritable architecture d’accompagnement (financement, formation, incubateurs, réglementation).

Pour que les promesses tiennent, les participantes ont appelé à une feuille de route opérationnelle, assortie de calendriers, de budgets et d’indicateurs, afin de transformer l’énergie du plaidoyer en actions mesurables.