Paris juge «injustifiée» la rupture par Bamako des accords de défense

Cette capture d'écran d'une vidéo obtenue de l'armée française le 22 avril 2022, qui affirme avoir filmé via un drone, montre des mercenaires russes en train d'enterrer des corps près d'une base à Gossi, dans le nord du Mali (Photo, AFP).
Cette capture d'écran d'une vidéo obtenue de l'armée française le 22 avril 2022, qui affirme avoir filmé via un drone, montre des mercenaires russes en train d'enterrer des corps près d'une base à Gossi, dans le nord du Mali (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 04 mai 2022

Paris juge «injustifiée» la rupture par Bamako des accords de défense

  • De leur côté, les Nations unies doivent par ailleurs statuer en juin sur le renouvellement de leur mission au Mali
  • Des violations fermement démenties par les militaires français

PARIS: La France a jugé mardi "injustifiée" la décision des colonels au pouvoir au Mali de dénoncer les accords de défense entre Bamako et Paris, en plein retrait des troupes françaises du pays, qu'elle compte mener "en bon ordre" dans les prochains mois.

"Informée, le 2 mai, de la décision unilatérale des autorités de transition maliennes de dénoncer" ces accords, la France "considère cette décision injustifiée et conteste formellement toute violation du cadre juridique bilatéral qui serait imputable à la force Barkhane", a réagi la porte-parole du ministère des Affaires étrangères dans un communiqué.

Paris a dans la foulée écarté toute répercussion sur le calendrier du délicat retrait en cours de la force militaire Barkhane déployée au Mali, annoncé en février et censé s'échelonner sur six mois. 

Le Quai d'Orsay assure que la France "poursuivra le retrait en bon ordre de sa présence militaire au Mali, annoncé en février, "conformément aux engagements pris à l'égard de ses partenaires et dans un souci de coordination et de dialogue respectueux avec les forces armées maliennes". 

Preuve d'une nouvelle dégradation des rapports entre Paris et Bamako, les autorités maliennes dominées par les militaires ont annoncé lundi soir rompre les accords de statut des forces (Status of Force Agreements, ou Sofa) fixant le cadre juridique de la présence des forces française Barkhane et européenne Takuba, ainsi que le traité de coopération en matière de défense, conclu en 2014 entre le Mali et la France.

Le porte-parole du gouvernement, le colonel Abdoulaye Maïga, a justifié cette décision en invoquant notamment de "multiples violations" de l'espace aérien par les appareils français malgré l'instauration d'une vaste zone d'interdiction aérienne au-dessus du territoire.

Réunion à l'ONU 

Le Conseil de sécurité de l'ONU a parallèlement tenu mardi une réunion informelle à huis clos sur le Mali, à la demande de la Russie, qui a accusé la France de propager des accusations mensongères contre Moscou et Bamako, selon des diplomates. 

Dans une lettre adressée fin avril à l'ONU, obtenue par l'AFP, Bamako avait dénoncé des "violations répétées et délibérées de l'espace aérien national par des aéronefs étrangers, notamment par les forces françaises, à des fins d'espionnage, d'intimidation et de subversion".

Des violations fermement démenties par les militaires français.

"Nous considérons que l'analyse juridique des autorités maliennes selon laquelle le Sofa est dénoncé avec effet immédiat en raison de violations n'est pas fondée. Nous considérons qu'à ce stade le Sofa court toujours", jusqu'à ce que le dernier soldat français quitte le territoire malien, a commenté mardi l'état-major français.

Si les rapports entre Bamako et Paris ne cessent de se dégrader ces derniers mois, en particulier depuis l'arrivée au Mali de paramilitaires du groupe russe Wagner, un récent épisode semble avoir jeté de l'huile sur le feu.

De manière assez inédite, l'état-major français a décidé de diffuser des vidéos tournées par un drone à proximité de la base de Gossi (centre), quittée en avril par la France, montrant selon lui des paramilitaires de la société russe Wagner en train d'enterrer des corps en vue de faire accuser la France de crimes de guerre. 

Paris a d'ailleurs tenu mardi à réaffirmer sa "vigilance à l'égard de toute tentative de manipulation de l'information" et a rappelé sa "détermination à assurer la sécurité de ses soldats et des soldats européens engagés à ses côtés au cours de cette phase de désengagement".

"Nous nous attendons à de nouvelles accusations injustifiées envers les soldats français, concernant des méfaits voire des exactions", avertit l'état-major. 

Après avoir progressivement quitté les bases avancées de Tessalit, Tombouctou et Gossi, les militaires français doivent encore quitter les bases de Ménaka et Gao (nord-est). "Le retrait sera effectif avant la fin de l'été", souligne l'état-major, qui estime faire face à "un problème diplomatique plus que militaire".

Malgré tout, "la vraie problématique est de savoir quelle sera l'attitude des forces maliennes" dans les prochaines semaines, s'inquiète un haut gradé, en craignant de possibles entraves alors que Barkhane est engagée dans une très lourde et complexe opération logistique pour quitter le Mali, après plus de neuf ans de présence.

De leur côté, les Nations unies doivent par ailleurs statuer en juin sur le renouvellement de leur mission au Mali (Minusma), forte de quelque 14.000 Casques bleus et policiers.


Début des discussions entre Washington et Niamey sur le retrait des troupes américaines du Niger

Les manifestants réagissent alors qu'un homme brandit une pancarte exigeant que les soldats de l'armée américaine quittent le Niger sans négociation lors d'une manifestation à Niamey, le 13 avril 2024. (AFP)
Les manifestants réagissent alors qu'un homme brandit une pancarte exigeant que les soldats de l'armée américaine quittent le Niger sans négociation lors d'une manifestation à Niamey, le 13 avril 2024. (AFP)
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  • Le gouvernement du Niger, issu d'un coup d'Etat en juillet dernier, avait dénoncé en mars l'accord de coopération militaire en vigueur avec les Etats-Unis
  • Washington a accepté de retirer du pays ses plus de 1 000 soldats et annoncé envoyer une délégation à Niamey pour s'accorder sur les détails de ce retrait

WASHINGTON: Washington a entamé les discussions avec Niamey sur le retrait du Niger des troupes américaines qui y étaient déployées dans le cadre de la lutte antidjihadiste au Sahel, a déclaré lundi le Pentagone.

Le gouvernement du Niger, issu d'un coup d'Etat en juillet dernier, avait dénoncé en mars l'accord de coopération militaire en vigueur avec les Etats-Unis, estimant que la présence américaine était désormais "illégale".

Washington a finalement accepté la semaine dernière de retirer du pays ses plus de 1 000 soldats et annoncé envoyer une délégation à Niamey pour s'accorder sur les détails de ce retrait.

"Nous pouvons confirmer le début des discussions entre les Etats-Unis et le Niger sur le retrait ordonné des forces américaines du pays", a déclaré le porte-parole du Pentagone Pat Ryder.

Une "petite délégation du Pentagone et du commandement militaire américain pour l'Afrique" participe aux discussions, a-t-il précisé.

Les Etats-Unis vont "continuer à explorer les options possibles afin d'assurer que nous soyons toujours en mesure de faire face aux potentielles menaces terroristes", a-t-il encore dit.

A Niamey, le ministre nigérien des Affaires étrangères, Bakari Yaou Sangaré, a indiqué dans un communiqué avoir eu lundi "des discussions" avec l’ambassadrice des États-Unis à Niamey, Kathleen Fitzgibbon, portant "sur la question du départ des troupes militaires américaines du Niger".

L’entretien s’est déroulé en présence de Maria Barron, directrice de l'Agence américaine pour le développement international (USAID) à Niamey, qui a assuré que l'agence allait "poursuivre sa coopération bilatérale" avec le Niger, annonçant "un nouvel accord devant remplacer celui en cours qui expire en septembre 2024", selon le communiqué.

Au Niger, les Etats-Unis disposent notamment d'une base de drone importante près d'Agadez, construite pour environ 100 millions de dollars.

Après le coup d'Etat qui a renversé le président élu Mohamed Bazoum fin juillet, le nouveau régime militaire a rapidement exigé le départ des soldats de l'ancienne puissance coloniale française et s'est rapproché de la Russie, comme le Mali et le Burkina Faso voisins, également dirigés par des régimes militaires et confrontés à la violence de groupes jihadistes.


L'Ukraine s'attend à une détérioration sur le front vers la mi-mai

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo, AFP).
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo, AFP).
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  • L'armée ukrainienne traverse une période délicate, confronté à une pénurie de nouvelles recrues et de munitions en raison de retards importants de livraisons d'aide occidentale, notamment américaine
  • La Russie, qui est à l'initiative depuis l'automne 2023, a revendiqué lundi la conquête d'un village de l'Est ukrainien situé non loin de Vougledar

KIEV: La situation sur le front ukrainien va empirer autour de la mi-mai et début juin, qui sera une "période difficile", a prévenu lundi le chef du renseignement militaire ukrainien Kyrylo Boudanov, sur fond de craintes d'une nouvelle offensive russe.

La Russie, qui est à l'initiative depuis l'automne 2023, a revendiqué lundi la conquête d'un village de l'Est ukrainien situé non loin de Vougledar, localité à la jonction des fronts Est et Sud, dont elle cherche à s'emparer depuis deux ans.

"N'allons pas trop dans les détails, mais il y aura une période difficile, à la mi-mai et début juin", a prévenu M. Boudanov, interrogé sur l'état du front, dans une interview au service ukrainien de la BBC.

L'armée russe "mène une opération complexe", a-t-il dit.

"Nous pensons qu'une situation plutôt difficile nous attend dans un futur proche. Mais il faut comprendre que ce ne sera pas catastrophique", a estimé Kyrylo Boudanov.

"Armageddon ne se produira pas, contrairement à ce que beaucoup disent en ce moment. Mais il y aura des problèmes à partir de la mi-mai", a-t-il ajouté.

L'armée ukrainienne traverse une période délicate, confronté à une pénurie de nouvelles recrues et de munitions en raison de retards importants de livraisons d'aide occidentale, notamment américaine.

En face, les troupes russes, bien plus nombreuses et mieux armées, ne cessent de pousser à l'Est et revendiquent régulièrement la prise de petits villages dans le Donbass.

En février, Moscou s'est emparé d'Avdiïvka, une ville forteresse, et vise désormais la cité  stratégique de Tchassiv Iar.

Cette cité, perchée sur une hauteur, s'étend à moins de 30 kilomètres au sud-est de Kramatorsk, la principale ville de la région sous contrôle ukrainien, qui est un important nœud ferroviaire et logistique pour l'armée ukrainienne.

Offensive estivale? 

Lundi, le ministère russe de la Défense a affirmé avoir "libéré" Novomykhaïlivka, à une trentaine de kilomètres de Donetsk.

Ce village est proche de Vougledar, une cité minière à la jonction des fronts Sud et Est. Début 2023, l'Ukraine était parvenue à y repousser un assaut de l'armée russe, infligeant des pertes humaines importantes.

Kiev craint désormais une offensive estivale russe encore plus puissante.

Fin mars, le commandant des forces terrestres ukrainiennes Oleksandre Pavliouk avait jugé "possible" un tel scénario, impliquant un groupe de 100.000 soldats russes.

Le commandant en chef des forces ukrainiennes, Oleksandre Syrsky, a déjà admis mi-avril que la situation sur le front Est s'était "considérablement détériorée" récemment.

Il a affirmé voir une "intensification significative" de l'offensive russe depuis mars, aboutissant à des "succès tactiques".

La grande contre-offensive ukrainienne de l'été 2023 s'était heurtée à de puissantes lignes de défense russes qui ont épuisé les ressources de l'armée ukrainienne, sans permettre de libérer les régions occupées par la Russie.

L'Ukraine fait désormais face aux hésitations de ses alliés occidentaux, même si une aide militaire américaine de 61 milliards, longtemps bloquée, a finalement été votée par la Chambre des représentants des Etats-Unis samedi. Le texte doit encore être adopté par le Sénat puis promulgué par le président Joe Biden.

Kiev espère désormais que l'aide des Etats-Unis pourra atteindre le front très rapidement. Le Kremlin a, lui, jugé que qu'elle ne changerait "rien"


Espagne : l'homme clé d'un scandale de corruption garde le silence devant le Sénat

Koldo Garcia, ancien conseiller du ministre espagnol des Transports, assiste à une commission d'enquête sur une affaire de corruption liée à l'achat de masques pendant la pandémie, au Sénat de Madrid, le 22 avril 2024. (Photo, AFP)
Koldo Garcia, ancien conseiller du ministre espagnol des Transports, assiste à une commission d'enquête sur une affaire de corruption liée à l'achat de masques pendant la pandémie, au Sénat de Madrid, le 22 avril 2024. (Photo, AFP)
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  • Placé en garde à vue le 21 février, Koldo García est soupçonné de s'être enrichi en prélevant de lucratives commissions sur des contrats de vente de masques entre mars et juin 2020
  • Selon la justice, l'affaire aurait généré 9,5 millions d'euros de profits, pour des contrats d'un montant total de 53 millions d'euros

MADRID: L'homme de confiance d'un ex-ministre espagnol, très proche du Premier ministre socialiste Pedro Sánchez, a invoqué lundi son droit au silence devant une commission d'enquête mise en place par le Sénat qui l'entendait dans une affaire de corruption embarrassante pour l'exécutif.

Mis en cause pour son rôle dans un scandale lié à des achats de masques pour des administrations publiques durant la pandémie de Covid-19, Koldo Garcia était invité à s'exprimer pour la première fois publiquement sur cette affaire par cette commission du Sénat, dominé par le Parti populaire (PP, droite), principale formation d'opposition.

Bombardé de questions, cet homme à la stature imposante a invoqué son "droit à ne pas témoigner" en raison de la procédure ouverte par la justice sur ce scandale. "Par bon sens, je pense que je dois attendre" de "témoigner devant" le juge avant d'évoquer l'affaire, a-t-il expliqué.

M. Garcia a toutefois assuré avoir la conscience "très" tranquille. Visiblement agacé, il a dénoncé le traitement réservé à l'affaire par les journaux. "Médiatiquement, on m'a déjà crucifié vivant", a-t-il jugé.

Placé en garde à vue le 21 février, Koldo García est soupçonné de s'être enrichi en prélevant de lucratives commissions sur des contrats de vente de masques entre mars et juin 2020.

Selon la justice, l'affaire aurait généré 9,5 millions d'euros de profits, pour des contrats d'un montant total de 53 millions d'euros.

L'affaire est très sensible politiquement, car Koldo García était l'homme de confiance de José Luis Ábalos, ministre des Transports de 2018 à 2021 et membre important du premier cercle de Pedro Sánchez - l'un des rares à lui être resté fidèle après son éviction en 2016 de la tête du parti socialiste à la suite de résultats électoraux désastreux.

Mi-mars, le chef de file du PP, Alberto Núñez Feijóo, avait accusé le Premier ministre d'avoir été "au courant" et d'avoir "couvert" l'affaire. "Nous sommes face à une très grave affaire potentielle de corruption qui touche votre gouvernement, votre parti et probablement vous-même", avait-il ajouté.

Le Parti socialiste, qui a promis d'enquêter sur cette affaire avec "une transparence absolue", a exclu M. Ábalos de ses rangs, tandis que le gouvernement a limogé un haut fonctionnaire du ministère des Transports qui avait géré l'achat des masques.

Comme le Sénat, la Chambre des députés, où les socialistes et leurs alliés sont majoritaires, a voté la création d'une commission d'enquête sur les affaires de corruption autour de contrats d'achat de matériel sanitaire, mais élargie à plusieurs autres affaires dont l'une implique le compagnon d'Isabel Díaz Ayuso, le présidente de la région de Madrid et une figure du PP.