Au procès de la catastrophe de Brétigny, un rapport qui accable la SNCF

L'ancien PDG de la SNCF, Guillaume Pepy, devant la salle d'audience du procès lié à l'accident de train à la gare de Brétigny-sur-Orge en 2013 (Photo, AFP).
L'ancien PDG de la SNCF, Guillaume Pepy, devant la salle d'audience du procès lié à l'accident de train à la gare de Brétigny-sur-Orge en 2013 (Photo, AFP).
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Publié le Vendredi 13 mai 2022

Au procès de la catastrophe de Brétigny, un rapport qui accable la SNCF

  • Selon cette expertise, réalisée par le cabinet Aptéis le déraillement est avant tout le résultat d'un dysfonctionnement organisationnel
  • L'avocat du syndicat Sud-Rail met en cause la conséquence des contraintes budgétaires qui auraient causé le vieillissement du réseau ferré

EVRY: Défauts d'organisation ou de maintenance et baisses d'effectifs: le tribunal d'Evry a débattu jeudi d'un rapport qui accable la SNCF et incrimine la "banalisation du risque" qui aurait conduit à la catastrophe ferroviaire de Brétigny-sur-Orge en 2013.

Selon cette expertise, réalisée par le cabinet Aptéis à la demande du comité d'hygiène et de sécurité (CHSCT) de l'établissement sud-ouest francilien de la SNCF, le déraillement "est avant tout le résultat d'un dysfonctionnement organisationnel". 

Le cabinet, cité devant le tribunal par l'avocat du syndicat Sud-Rail, partie civile, rappelle que le "retard de maintenance" général du réseau ferré vieillissant est la conséquence des contraintes budgétaires. 

L'expertise de 300 pages est vivement critiquée par la défense de la SNCF: "le rapport Aptéis n'apporte aucun élément technique et scientifique nouveau de nature à expliquer l'accident. Ce n'est d'ailleurs ni l'objet, ni son champ de compétence", avait répondu Me Emmanuel Marsigny, dans des observations transmises pendant l'instruction.

La SNCF (héritière pénalement de SNCF Infra, chargée de la maintenance), le gestionnaire de voies SNCF Réseau (ex-Réseau Ferré de France) et un ancien cadre cheminot sont jugés depuis la semaine dernière pour "homicides involontaires" et "blessures involontaires".

Les deux sociétés encourent jusqu'à 225.000 euros d'amende. 

Le 12 juillet 2013, le retournement d'une éclisse en acier - une sorte de grosse agrafe joignant deux rails - a fait dérailler un train en gare de Brétigny-sur-Orge (Essonne).

Entendu jeudi par le tribunal, un des rédacteur du rapport Aptéis, Nicolas Spire, sociologue du travail, a longuement décrit son travail, fruit de l'audition d'une centaine d'agents.

"Comment l'accident a pu survenir ? L'esprit de notre travail n'est pas de chercher les responsables, nous ne sommes pas sur le terrain judiciaire", dit-il à la barre.

M. Spire s'est notamment appuyé sur le rapport Rivier paru en 2005 et en 2012 sur l'état du réseau en France, réalisé par l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne, dont les travaux font autorité en matière ferroviaire.

Tout était maîtrisé

Selon le sociologue, la restriction des moyens cumulée à un "manque de vision à long terme" et à la "poursuite des recherches économiques" va "engendrer une dégradation durable" de ce réseau.

Souhaitant élever la productivité, la SNCF a "augmenté le travail de nuit", ainsi "le volume d'activité ne décroit pas mais les effectifs baissent", affirme M. Spire.

"Les voies sont insuffisamment renouvelées, donc plus dures à maintenir", enchaîne-t-il en incriminant une "banalisation du risque" et du "travail dans l'urgence", une inquiétante "réduction de l'effectif compétent" et un "dysfonctionnement organisationnel", notamment dans l'entretien des voies.

Pour l'expert, la baisse du nombre d'agents de surveillance des voies en Ile-de-France et dans la zone de Brétigny "semble y avoir été plus importante qu'ailleurs" en France.

Cette baisse a eu des conséquences "sur les conditions d'organisation de la maintenance", la "pénibilité" et "la sécurité" des agents lors des opérations de maintenance, souligne l'expert. "On préfère sous-traiter qu'engager des agents, dans un contexte d'un besoin de maintenance qui augmente".

Or, "soit on maintient le réseau pour tenir la qualité, soit il se dégrade, et le vieillissement devient ainsi dégradations, assurément", affirme Nicolas Spire.

Le rapport relève également que l'usure de l'éclisse avait été repérée depuis plusieurs années et son renouvellement demandé dès 2007, et rappelé en 2011. Mais son remplacement n'avait été programmé que pour 2016.

Selon M. Spire, d'autres facteurs ont provoqué l'accident, comme la maintenance difficile et technique des appareils de voie, la vitesse de circulation des trains et les risques sous estimés de la vitesse.

"Aucun renoncement n'a touché la substance des voies et n'a affecté la zone de Brétigny, en ce qui concerne les voies principales", lui répond à la barre Alain Autruffe, représentant légal de la SNCF. Il y avait une "attention plus soutenue" de la maintenance sur ce secteur et "tout était maîtrisé et conforme aux référentiels", assure-t-il.

Les juges d'instruction, qui ont renvoyé la SNCF devant le tribunal, reprochent à la SNCF "des défaillances "dans l'organisation, le contrôle et la réalisation des opérations de maintenance".


France: l'adoption d'un budget compromise après le rejet des députés

Les résultats du vote sur le projet de loi de finances pour 2026 à l'Assemblée nationale, à Paris, tôt dans la matinée du 22 novembre 2025. (AFP)
Les résultats du vote sur le projet de loi de finances pour 2026 à l'Assemblée nationale, à Paris, tôt dans la matinée du 22 novembre 2025. (AFP)
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  • L’Assemblée nationale a rejeté massivement en première lecture le budget 2026, renvoyant le texte au Sénat et illustrant l’extrême fragmentation politique depuis la dissolution de 2024
  • Le gouvernement minoritaire, sous pression pour réduire un déficit public record, peine à trouver une majorité, malgré l’espoir d’un compromis sur fond de tensions entre blocs politiques

PARIS: Les députés français ont rejeté à la quasi-unanimité en première lecture le budget de l'État pour 2026, dans la nuit de vendredi à samedi, un vote inédit depuis des décennies qui augure mal d'une adoption avant la fin de l'année.

Après des semaines de débats parfois houleux sur la fiscalité du patrimoine, ou celle des grandes entreprises, 404 députés ont rejeté la partie "recettes" du texte (un seul a voté pour), emportant ainsi l'ensemble du projet de loi, sans même étudier la partie "dépenses".

En vertu des procédures parlementaires françaises, ce vote renvoie le texte initial du gouvernement à la chambre haute du Parlement, qui s'en saisira la semaine prochaine.

Dans un paysage politique très facturé depuis la dissolution de l'Assemblée nationale décidée par le président Emmanuel Macron en 2024, la difficulté à adopter un budget de l'Etat constitue le sujet majeur à l'origine de la chute des derniers Premier ministres.

Le gouvernement minoritaire de Sébastien Lecornu, un proche d'Emmanuel Macron, se trouve pourtant sous forte pression pour réduire le déficit public, le plus élevé de la zone euro, dont l'ampleur inquiète les marchés financiers.

L'Assemblée avait déjà rejeté en 2024 le budget de l'État, de manière inédite depuis l'adoption de la Ve République en 1958. Mais c'est une première qu'il le soit avec une telle ampleur.

Les groupes de gauche et l'extrême droite ont voté contre, ceux du camp gouvernemental se sont divisés entre votes contre et abstentions. Seul un député centriste a voté en faveur du texte.

- Compromis? -

Si l'exécutif espère toujours une adoption avant la fin de l'année, cela apparaît comme une gageure, en terme de délais comme en terme de majorité pour le voter.

Minoritaire, le quatrième gouvernement en moins d'un an et demi, le sixième depuis la réélection de M. Macron en mai 2022, avait promis de laisser le dernier mot au Parlement pour éviter une censure.

Mais la recherche d'un compromis reste très difficile entre un camp présidentiel fracturé, une gauche traversée de tensions et une extrême droite favorable à une union des droites.

Si elle a vu dans le "plus long débat budgétaire" de la Ve République, un "travail utile", la ministre des Comptes publics Amélie de Montchalin a aussi déploré un "certain nombre de mesures inconstitutionnelles, irréalistes ou inapplicables".

Dans le viseur du camp gouvernemental, plusieurs hausses d'impôts, dont un "impôt universel" sur les multinationales, une hausse de taxe sur les rachats d'action, ou une contribution sur les dividendes.

Avec elles, le déficit passerait à "4,1%" du PIB (contre un objectif à 4,7% dans le texte initial), sans elles il serait de "5,3%", a estimé Amélie de Montchalin.

Sur X, elle a dénoncé l'"attitude cynique" des "extrêmes", se disant cependant "convaincue" de la possibilité d'un compromis.

"Le compte n'y est pas", a lancé le chef de files des élus socialistes, Boris Vallaud, estimant les "recettes" insuffisantes pour "effacer" des économies irritantes sur les politiques publiques.

Le PS continuera toutefois à "chercher le compromis", a-t-il assuré.

Les socialistes, qui avaient accepté de ne pas censurer le Premier ministre en échange notamment de la suspension de la réforme des retraites, espéraient que les débats permettent d'arracher une taxe sur le patrimoine des ultra-riches. Mais les propositions en ce sens ont été rejetées.

Si le Parlement ne se prononce pas dans les délais, le gouvernement peut exécuter le budget par ordonnance. Une loi spéciale peut aussi être votée permettant à l'Etat de continuer à percevoir les impôts existants l'an prochain, tandis que ses dépenses seraient gelées, en attendant le vote d'un réel budget.


Narcobanditisme: la porte-parole du gouvernement sera à la marche blanche samedi à Marseille

La porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, a annoncé vendredi qu'elle irait à la marche blanche prévue samedi à Marseille en hommage à Mehdi Kessaci, le frère du militant Amine Kessaci engagé contre le narcobanditisme, soulignant que sa présence devait illustrer le "soutien de l'Etat". (AFP)
La porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, a annoncé vendredi qu'elle irait à la marche blanche prévue samedi à Marseille en hommage à Mehdi Kessaci, le frère du militant Amine Kessaci engagé contre le narcobanditisme, soulignant que sa présence devait illustrer le "soutien de l'Etat". (AFP)
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  • "Au-delà des actes forts et des engagements du ministre de l'Intérieur et du garde des Sceaux, l'État et singulièrement le gouvernement devaient marquer, symboliquement et humblement, leur soutien et leur solidarité lors de ce rassemblement
  • "Les réflexes partisans n'ont pas leur place dans une telle marche et dans un tel combat", a estimé Mme Bregeon, espérant que les participants seraient "le plus nombreux possible" samedi

PARIS: La porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, a annoncé vendredi qu'elle irait à la marche blanche prévue samedi à Marseille en hommage à Mehdi Kessaci, le frère du militant Amine Kessaci engagé contre le narcobanditisme, soulignant que sa présence devait illustrer le "soutien de l'Etat".

Le jeune homme de 20 ans a été assassiné le 13 novembre par deux hommes à moto, et la justice étudie la piste d'"un crime d'intimidation" lié au militantisme de son frère.

"Le gouvernement sera présent et je me rendrai samedi à Marseille en compagnie de mon collègue Vincent Jeanbrun, qui est ministre de la Ville et du Logement", a déclaré Maud Bregeon sur TF1 vendredi, ajoutant que ce drame avait "profondément choqué tous nos concitoyens".

La porte-parole a assuré que son déplacement serait fait "humblement, avec la modestie et la pudeur que cet événement nécessite, sans communication sur place".

Il s'agit, selon elle, de "marquer l'engagement total du gouvernement et le soutien de l'État, du président de la République et du Premier ministre, à cette famille et aux proches de Mehdi Kessaci".

"Au-delà des actes forts et des engagements du ministre de l'Intérieur et du garde des Sceaux, l'État et singulièrement le gouvernement devaient marquer, symboliquement et humblement, leur soutien et leur solidarité lors de ce rassemblement où habitants, élus locaux et nationaux feront bloc contre le narcotrafic", a précisé l'entourage de Maud Bregeon à l'AFP.

La porte-parole retrouvera à Marseille de nombreuses autres personnalités politiques, dont beaucoup issues de gauche, comme Olivier Faure (PS) ou Marine Tondelier (les Ecologistes).

"Les réflexes partisans n'ont pas leur place dans une telle marche et dans un tel combat", a estimé Mme Bregeon, espérant que les participants seraient "le plus nombreux possible" samedi.

Si les courants politiques s'accordent sur le constat, ils s'opposent sur les voies à suivre pour contrer le narcotrafic.

Le député LFI du Nord Ugo Bernalicis a ainsi affirmé sur franceinfo que "ce qu'on demande au gouvernement, c'est pas tant la participation à cette marche, c'est de faire en sorte que les moyens soient à la hauteur des enjeux". Et "le compte n'y est pas", a-t-il dit.

Il a notamment appelé à s'attaquer au "cœur du problème" en légalisant le cannabis, dont la vente est "le moteur financier" des trafiquants, selon lui.

Le député insoumis des Bouches-du-Rhône Manuel Bompard, qui sera présent samedi, a exhorté à un "changement de doctrine complet", demandant par exemple plus de moyens pour la police judiciaire.

"Plutôt que d'envoyer des policiers chasser le petit consommateur, je pense au contraire qu'il faut concentrer les moyens dans le démantèlement des réseaux de la criminalité organisée", a-t-il dit.

Quant à la suggestion du maire de Nice Christian Estrosi d'engager l'armée contre le narcotrafic, Maud Bregeon a rappelé que ce n'était "pas les prérogatives de l'armée" et "qu'on a pour ça la police nationale, la gendarmerie nationale, la justice de la République française".


Une centaine de personnes en soutien à un directeur d'école menacé de mort

Un rassemblement de soutien d'environ 150 personnes se tenait vendredi matin devant une école maternelle située à Rennes, dans l'ouest de la France, dont le directeur a été menacé de mort par une famille refusant que leur fillette soit encadrée par un homme. (AFP)
Un rassemblement de soutien d'environ 150 personnes se tenait vendredi matin devant une école maternelle située à Rennes, dans l'ouest de la France, dont le directeur a été menacé de mort par une famille refusant que leur fillette soit encadrée par un homme. (AFP)
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  • Cet enseignant a porté plainte le 14 octobre "pour des faits de menace de mort datant du 10 octobre", a affirmé jeudi le procureur de la République de Rennes, Frédéric Teillet. Le rectorat a également porté plainte
  • "On reproche simplement au collègue d'être un homme et d'encadrer des jeunes enfants", a déploré Mickaël Bézard, du syndicat Force Ouvrière (FO) des écoles, présent devant l'établissement

RENNES: Un rassemblement de soutien d'environ 150 personnes se tenait vendredi matin devant une école maternelle située à Rennes, dans l'ouest de la France, dont le directeur a été menacé de mort par une famille refusant que leur fillette soit encadrée par un homme.

Cet enseignant a porté plainte le 14 octobre "pour des faits de menace de mort datant du 10 octobre", a affirmé jeudi le procureur de la République de Rennes, Frédéric Teillet. Le rectorat a également porté plainte.

Selon des sources syndicales, la famille n'aurait pas toléré que l'instituteur accompagne la fillette aux toilettes.

"On reproche simplement au collègue d'être un homme et d'encadrer des jeunes enfants", a déploré Mickaël Bézard, du syndicat Force Ouvrière (FO) des écoles, présent devant l'établissement.

"Il n'y a pas d'aspect religieux derrière tout ça" a insisté Fabrice Lerestif, un autre représentant de ce syndicat à l'échelle départementale, reprenant les termes du ministre français de l'Éducation, Édouard Geffray, en marge d’un déplacement la veille près de Lyon (centre-est).

Environ 150 personnes, dont des enseignants d'écoles voisines et une trentaine de parents d'élèves, étaient présents devant l'école, fermée pour la journée. "Soutien à notre collègue", "Parents unis! Respect et soutien total à nos enseignants", clamaient deux pancartes accrochées aux grilles.

Parmi les parents d'élèves, Pierre Yacger est venu avec ses enfants soutenir l'équipe éducative "en qui on a pleinement confiance". Concernant le directeur, "on n'a jamais eu de retour négatif", a-t-il affirmé.

Choqué, l'enseignant est depuis en arrêt de travail. Il est "meurtri par la situation" qui a "eu un impact fort sur l'ensemble de l'école", alors qu'il s'agit d'un établissement "où tout se passe bien", a précisé Mickaël Bézard.

Le corps enseignant demande que la fillette, toujours scolarisée dans cette école, soit changée d'établissement, "pour retrouver aussi un climat serein", a-t-il poursuivi.

"Cette enfant, peut-être, va être scolarisée ailleurs", a estimé Gaëlle Rougier, adjointe à l'éducation à la municipalité de Rennes. "Il va bien falloir poursuivre une médiation avec la famille", a-t-elle ajouté.